LE MONDE | 05.08
VIENNE, CORRESPONDANTE
L'incident qui s'est produit dans la nuit du
samedi 2 au dimanche 3 août dans les laboratoires de l'Agence internationale
de l'énergie atomique (AIEA), à 35 km de Vienne, a ravivé
les inquiétudes sur la sécurité du site. En novembre
2007, le directeur de l'agence, Mohamed El-Baradei, sonnait l'alerte dans
un rapport au Conseil des gouverneurs: la sécurité des laboratoires
chargés de l'analyse d'échantillons nucléaires était
jugée insuffisante, le matériel d'analyse obsolète.
Par chance (Ndw: elle ne sera pas toujours
là, un jour il faudra bien ne plus compter que sur elle!...), dimanche,
à 2 h 30 du matin, personne ne se trouvait dans les laboratoires
de l'agence lorsque, sous l'effet d'un surcroît de pression, une
fiole contenant un échantillon de plutonium a libéré
des particules, contaminant la salle de stockage et deux pièces
attenantes. L'alarme automatique s'est déclenchée, le système
de filtration de l'air a opéré. Une heure plus tard, une
équipe d'intervention de l'AIEA assurait l'étanchéité
des trois pièces. Aucune radioactivité n'a pu être
décelée à l'extérieur, selon Ayan Evrensel,
porte-parole de l'agence. Ce que le ministère autrichien de l'environnement
confirme.
MESURES DE SÉCURITÉ INSUFFISANTES
Mais que se serait-il passé si le système
de ventilation avait flanché? Ce risque avait justement été
évoqué dans le rapport alarmant présenté en
novembre 2007. Le directeur de l'AIEA y dénonçait le vieillissement
de l'infrastructure des laboratoires construits en 1962, la vétusté
du matériel d'analyse - dont une microsonde ionique à bout
de souffle après vingt-huit années de service - et l'insuffisance
des mesures sécuritaires. Pour conclure que les laboratoires de
la plus haute autorité internationale en matière de surveillance
de la dissémination nucléaire ne répondaient pas aux
normes de sécurité onusiennes!
Cent quatre-vingts chimistes et physiciens
internationaux travaillent sur le site de Seibersdorf, situé à
côté du Centre de recherche autrichien, à 35 km de
la capitale. Ils poursuivent une double mission : l'évaluation de
la dissémination des matériels radioactifs dans les domaines
civils de la santé, de l'agriculture ou de l'industrie, et la surveillance
de la non-prolifération du nucléaire à des fins militaires.
C'est dans ce cadre que l'AIEA est chargée d'inspecter les sites
nucléaires et d'analyser échantillons et matériaux
prélevés. Les "prises" iraniennes ou nord-coréennes
sont ainsi - parmi d'autres - stockées et analysées à
Seibersdorf.
Le manque d'espace dans les laboratoires multiplierait
les risques de manipulation pour les chercheurs. La modernisation de l'infrastructure
et de l'équipement exigerait une rallonge budgétaire de 27,2
millions €, est-il précisé dans le rapport de novembre
2007. |
Depuis cette date, le financement d'une nouvelle microsonde ionique
semble avoir été assuré par des contributions additionnelles.
Tout en relativisant l'urgence et l'ampleur des mesures à prendre,
les Etats membres du Conseil des gouverneurs ont amorcé des discussions
sur la rénovation des laboratoires.
La sécurité extérieure
des bâtiments situés sur le terrain du centre de recherche
autrichien fait également l'objet de controverse. Un simple grillage
de barbelés enceint les laboratoires où se trouve stocké
le matériel radioactif. De quoi raviver les inquiétudes de
la population autrichienne, traditionnellement hostile au nucléaire
depuis qu'elle s'est prononcée contre le recours à cette
source d'énergie en 1978.
Laurence Monnot
Fuite radioactive en Autriche: pas de radiations
dans l'environnement (AIEA)
29/08/2008-[12:44] - AFP
VIENNE, 29 août 2008 (AFP) - Des tests indépendants ont
confirmé qu'aucune matière radioactive n'avait filtré
dans l'environnement suite à l'incident dans un laboratoire de l'AIEA
près de Vienne début août, a indiqué vendredi
l'Agence internationale de l'énergie atomique.
"Des experts en protection contre les radiations
du centre de recherche autrichien (ARC) ont confirmé qu'il n'y avait
pas eu de rejet radioactif dans l'environnement comme le système
de surveillance automatique du laboratoire l'indiquait", a souligné
l'AIEA dans un communiqué. L'organisation a également indiqué
qu'aucune contamination n'a eu lieu dans le laboratoire. Dans la nuit du
3 août cinq échantillons contenant une solution au plutonium
s'étaient renversés suite à l'éclatement de
l'un d'entre eux dans une salle de stockage sécurisée du
laboratoire de Seibersdorf, à 35 kilomètres au sud-est de
Vienne. L'incident n'avait fait aucune victime, personne ne se trouvant
sur les lieux, et l'AIEA avait écarté tout acte de malveillance.
Au total les cinq fioles contenaient moins d'un gramme de plutonium et
la fuite, détectée par l'alarme automatique du système
de ventilation, a été confinée dans l'armoire sécurisée
où elles étaient entreposées. L'incident a été
jugé de niveau 1 sur l'échelle INES (qui va jusqu'à
7) des incidents nucléaire. Une enquête est toujours en cours
en interne sur l'incident, a indiqué l'AIEA qui a précisé
que la décontamination de la salle de stockage avait été
terminée le 22 août. L'an passé, l'AIEA elle-même
avait concédé que les installations n'étaient pas
aux normes. C'est dans le secteur où a eu la fuite que sont analysés
les échantillons prélevés par les inspecteurs de l'AIEA
lors de leurs missions de vérification. Des travaux de recherche
sur l'application du savoir nucléaire dans d'autres domaines (environnement,
santé, botanique) sont également menés au laboratoire
de Seibersdorf. |