Rien ne va plus, sur le chantier finlandais du réacteur nucléaire de troisième génération (EPR), entre le groupe français Areva et son client, la compagnie d'électricité TVO. Depuis des mois, la situation n'avait cessé de se dégrader (Le Monde du 12 décembre). L'affaire prend désormais un tour très sérieux: l'entreprise dirigée par Anne Lauvergeon a annoncé, vendredi 19 décembre, que le consortium Areva-Siemens, responsable du projet, avait lancé, le 5 décembre, "une procédure d'arbitrage au titre des retards causés par TVO". La branche suédoise de la Chambre de commerce internationale de Paris devra établir les responsabilités des contractants dans ces retards. 
     Areva a indiqué qu'il présentera, fin février 2009, un résultat opérationnel 2008 "en baisse par rapport à l'exercice 2007" (751 millions €). En effet, il a dû suspendre son activité de négoce d'uranium en raison de la chute des prix et surtout constituer, au second semestre, une nouvelle provision liée à la dérive des coûts du chantier finlandais d'Olkiluoto - comme il l'a fait presque chaque semestre depuis le début des travaux en 2005. Mais contrairement à son partenaire, Siemens, Areva n'a jamais communiqué le montant de ces provisions, se contentant de les qualifier de "significatives". Certains analystes évoquent une somme d'environ 1,5 milliard €.
     L'enjeu de cet arbitrage est considérable, puisqu'il porte sur le partage des surcoûts : alors que le prix de vente était de 3 milliards €, la facture finale pourrait approcher les 5 milliards. TVO avait fait savoir, le 17 octobre, que c'est le fournisseur d'une centrale clés en main "qui est responsable du calendrier et des éventuelles augmentations de coûts". Et qu'il refusait d'engager une négociation sur le partage des pertes. 

"FIGER UN CALENDRIER" 
     Les dirigeants d'Areva incriminent les lenteurs de l'électricien finlandais. Alors que le contrat précise que la validation des documents d'ingénierie doit être réalisée en deux mois, expliquent-ils, TVO tarde à les adresser à Stuk, l'autorité de sûreté nucléaire finlandaise, qui met en moyenne plus d'un an à donner son feu vert. Une situation critique quand il faut certifier 100.000 documents! Et un délai exorbitant quand on sait qu'il ne faut que trois mois à Flamanville (Manche), où EDF construit le premier EPR français, et que le chantier de Taishan (Chine) avance bien, remarque une porte-parole d'Areva.