CONTROVERSES NUCLEAIRES !

2008
avril
Incertitudes et dérives de la médecine environnementale: l'exemple des rayonnements ionisants
 André Aurengo
Chef du service de médecine nucléaire, Hôpital de la Pitié-Salpétrière, Paris
ADIT, http://pagesperso-orange.fr/scmsa/Aurengo_JR08.pdf

     Extrait: 
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     Question: Quelles études envisager alors pour répondre aux préoccupations entourant la gestion des déchets radioactifs à vie longue?
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     Réponse: Les observations passées sur la cancérogenèse liée à l'incorporation de radionucléides à vie longue et plus particulièrement aux émetteurs a montrent que la réponse dosimétrique ne permet pas d'affirmer clairement ce que seront les effets sur la santé du retour à l'homme des radionucléides à vie longue. Peu d'études sont faites par la voie de l'ingestion. De plus, nous n'avons aucune information pour les produits de fission, 99Tc, 135Cs et 129I.
     Il semble donc que de nouveaux programmes de recherche soient absolument nécessaires pour répondre aux questions légitimes des populations concernées par une situation exceptionnelle. Ces programmes devraient se baser sur des études toxicologiques, aujourd'hui abandonnées, et prendre modèle sur l'industrie pharmaceutique lorsque cette dernière demande l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament (les AMM).
     Cette démarche est contraignante et bien encadrée par la réglementation européenne (CE, 2001) selon des normes qualitatives strictes de bonnes pratiques de laboratoire. Elle demande en premier de la part des demandeurs une étude de pharmacocinétique et de toxicologie pour chaque forme galénique et pour chaque voie d'administration. Ces études animales permettent d'évaluer et de signaler les risques de toxicité qui peuvent apparaître lors des études cliniques qui seront démarrées en fonction des résultats de ces études précliniques. L'analyse de ces études animales fait partie intégrante de l'évaluation du bénéfice-risque d'une dose quotidienne et d'une durée pour un traitement d'une nouvelle molécule. Cette évaluation proposée par le demandeur d'AMM est ensuite validée ou non par les autorités de tutelle qui délivre l'AMM.
     La législation précise encore qu'aucune étude in vitro même si elle peut aider à comprendre les mécanismes d'action ne peut remplacer l'étude dans un organisme entier de la toxicité du produit avec une bonne fiabilité.
     Transposée au problème de gestion des déchets, l'application d'une démarche similaire devrait conduire à étudier la toxicité des radionucléides par la voie ingestion pour des doses correspondantes à celles qui sont sensées atteindre l'homme. Il faudrait donc lancer des études de toxicologie par ingestion chronique de faibles quantités des radionucléides à vie longue tels les 135Cs, 129I et actinides.
     De premiers résultats observés en Finlande chez l'homme exposé quotidiennement à une contamination de son eau de boisson par de l'uranium naturel montre que les modèles prescriptifs de la CIPR, utilisés actuellement pour les études d'impact des déchets sont battus en brèche (Kurttio et al., 2005) et que même à des concentrations relativement élevées en uranium, aucune toxicité rénale n'est observée (Kurttio et al., 2006). Chez le rat exposé à une ingestion chronique d'uranium, il est fait état d'une accumulation et d'une distribution de l'uranium différente de celle des modèles actuels (Paquet et al., 2006). L'approche dosimétrique aujourd'hui proposée nous paraît donc dès lors devoir être complétée pour répondre aux questions du public.
(…)
     Les recherches menées tant en France qu'en Europe pour améliorer les connaissances scientifiques sur la gestion des déchets et la recherche de solutions techniques nouvelles ont largement fait progresser nos connaissances sur ce sujet. Elles permettent d'asseoir la gestion des déchets radioactifs sur des bases scientifiques solides (CNE, 2006). En France, la loi de 1991 a aussi permis d'apporter au public une information réservée jusque-là aux experts.
     Il n'en demeure pas moins que l'acceptabilité des populations n'a pas, quinze ans après l'adoption de cette loi, beaucoup progressé. Tout comme il y a quinze ans, on ne cherche pas, semble-t-il, à vouloir répondre de manière directe à la question posée par les populations: quel est le risque pour ma santé et celle de nos descendants si mon eau de boisson ou mes aliments sont contaminés? Les études de radiobiologie si utiles qu'elles soient ne permettent pas aujourd'hui de répondre clairement à cette question.
     Il paraît alors qu'à l'époque où tout le monde s'accorde pour engager un dialogue avec les «parties prenantes» qu'il faille élargir le champ de recherches proposées et lancer de nouvelles recherches de toxicologie pour répondre efficacement aux craintes des populations sur leur santé. La démarche efficace mise en place par l'industrie pharmaceutique pourrait et devrait servir de modèle. 
(…)
Commentaire de la rédaction de la Gazette Nucléaire:
     Désolant, Aurengo vise à remplacer Pellerin!...