CONTROVERSES NUCLEAIRES !
ACTUALITE INTERNATIONALE
2008

mai
L'erreur du nucléaire: les VRP de l'atome
Source ADIT, http://www.naturavox.fr

     Au lieu de construire des réacteurs, l'Italie et la Grande-Bretagne feraient bien de prendre acte de l'échec du nucléaire en France.
Berlusconi, Sarkozy, Kadhafi, Bush, Poutine, Hu Jintao:
les VRP de l'atome

     C'est sous prétexte de réduire la facture énergétique du pays, tout en luttant contre le réchauffement climatique, que le gouvernement Berlusconi a annoncé son projet de construire des réacteurs nucléaires en Italie, suivant en cela Gordon Brown qui veut remplacer les réacteurs britanniques dont la plupart arrivent en fin de vie.
     Or, il suffit de regarder la situation de la France pour constater que le nucléaire est une réponse absurde, et parfaitement inefficace aux graves problèmes du climat et de l'énergie: malgré 58 réacteurs qui produisent 80% de son électricité, la France est frappée comme ses voisins par l'explosion du prix de l'énergie. Les pêcheurs, les automobilistes et bien d'autres catégories sont là pour en témoigner.
     Les documents (*) discrètement publiés le 11 avril 2007 par le Ministère de l'Economie sont tout aussi limpides: "La facture payée en 2006 pour un approvisionnement énergétique d'origine étrangère est le double de celle de 2003. Sans elle, le commerce extérieur de la France aurait été excédentaire de 15 milliards €. Avec elle, il est déficitaire de 30 milliards €". Le bilan 2007 n'a pas été publié: le flop de l'option nucléaire y est encore plus évident.
     Les pronucléaires en sont réduits à suggérer que "sans le nucléaire, ce serait pire". Ce qui est à la fois dérisoire – est-ce donc ça le "miracle nucléaire"? – et faux: c'est avec le nucléaire que c'est pire puisque nous avons à acquitter la facture pétrole-gaz ET la facture nucléaire. Car, certaines déclarations le laissent abusivement croire, le nucléaire n'est pas "gratuit", bien au contraire:
    * l'investissement de départ est pharaonique: la France est d'ailleurs très loin d'avoir fini de payer les réacteurs actuellement en service. Si l'argent public investi dans l'atome depuis 50 ans figurait sur les factures EDF, les citoyens verraient bien que l'électricité nucléaire est extrêmement chère. C'est si vrai que, aux USA, c'est seulement parce que l'Etat fédéral offre des substantielles aides publiques aux compagnies privées que certaines envisagent la construction de quelques nouveaux réacteurs.
    * la facture nucléaire "aval" (démantèlement des installations, déchets radioactifs) s'annonce elle aussi incommensurable: EDF se veut rassurante en prétendant avoir mis de côté quelques dizaines de milliards €, mais la Grande-Bretagne a fixé à 103 milliards le coût du démantèlement de ses propres installations, pourtant bien moins nombreuses que les nôtres. Il est évident que, tôt ou tard, il va manquer plusieurs centaines de milliards € et encore plus si de nouveaux réacteurs sont construits. Nos enfants apprécieront.
     Pour enfoncer le clou, rappelons que le nucléaire ne couvre que 2,5% de la consommation mondiale d'énergie: une part si faible qu'elle a une influence quasi nulle sur le climat et sur le prix de l'énergie. Et, contrairement à ce que l'on peut lire ici ou là, cette part va encore décliner: les nouveaux réacteurs, qui vont hélas être construits ici ou là, seront toutefois bien moins nombreux que ceux qui vont fermer dans les années à venir: la moitié des réacteurs en service sur Terre approchent de leur fin de vie.
     Il convient aussi de regarder ce qui se passe en Chine, présentée comme le nouvel "eldorado" de l'atome. Si les Chinois construisent les 40 nouveaux réacteurs annoncés, le nucléaire couvrira royalement... 4% de l'électricité, c'est-à-dire 0,7% de la consommation chinoise d'énergie. Les données sont quasiment les mêmes pour l'Inde.
     Aux USA, l'atome représente 20% de l'électricité, soit 4% de la consommation totale d'énergie. Et la majorité des 103 réacteurs américains vont fermer dans les 20 ans. L'atome restera dans tous cas une énergie marginale, même dans les pays les plus nucléarisés.

     Revenons aux projets de Brown et Berlusconi. En Grande-Bretagne, vers 2020, la quasi-totalité des réacteurs actuels auront été fermés et l'atome couvrira moins de 4% de l'électricité, c'est-à-dire moins de 1% de la consommation totale d'énergie. Les éventuels nouveaux réacteurs, annoncés avec fracas ces jours-ci, n'auront vraisemblablement pas commencé à fonctionner et, dans tous les cas, ne remplaceront pas la production des réacteurs fermés entre temps.
     De même, en Italie, il faudra une bonne dizaine d'année avant qu'un ou deux réacteurs ne commencent à fonctionner, couvrant là aussi moins de 1% de la consommation italienne d'énergie. Comme en France aujourd'hui, le nucléaire sera bien incapable "d'assurer l'indépendance énergétique" de ces pays.
     Et ce d'autant moins que l'uranium, le combustible des réacteurs, est importé à 100%. Son prix a déjà été multiplié par dix en quelques années et ce n'est qu'un début : les différents pays nucléarisés, Chine en tête, ont commencé à se battre pour accéder aux dernières réserves facilement extractibles.
     Il faut donc être sacrément aveugle pour croire encore que le nucléaire peut représenter une alternative énergétique. Il en est de même concernant la lutte contre le réchauffement climatique: nous l'avons vu, la part du nucléaire dans l'énergie mondiale est - et va rester - si faible que sa contribution climatique est quasi-nulle.
     Qui plus est, même si c'est moins que le charbon ou le gaz, la filière nucléaire dégage de façon non-négligeable des gaz à effet de serre car il faut considérer toute la filière, des mines d'uranium (lesquelles occasionnent aussi de graves contaminations de l'environnement, par exemple au Niger) jusqu'au démantèlement des installations. Sans oublier que les centrales rejettent régulièrement des gaz comme le fréon dont la contribution à l'effet de serre est des milliers de fois plus importante que celle du CO2. (**)
     Et encore, il ne faut pas oublier les tares bien connues du nucléaire, que nous ne développons pas ici: risques de catastrophes (on a encore frôlé le pire pendant l'été 2006 à Forsmark en Suède et l'été 2007 lors du séisme de Kashiwasaki au Japon) , déchets radioactifs (malgré les belles déclarations depuis 50 ans, aucune solution acceptable n'existe), rejets dans l'environnement (une étude scientifique vient de montrer en Allemagne un excès de cancers jusqu'à 50 km autour des centrales), prolifération (la France nucléaire fait d'ailleurs un sale bizness avec des dictateurs comme Kadhafi), etc.
     Mais il est une autre vérité à connaître, bien plus réjouissante: sur Terre, les énergies renouvelables produisent beaucoup plus que le nucléaire. D'ailleurs, la seule hydroélectricité produit plus que l'atome: 3.000 TWh/an contre 2.700. De quoi faire chanceler les idées fausses malheureusement si répandues en France, le seul pays au monde où l'on croit que le nucléaire est indispensable et les énergies renouvelables négligeables.
     Les perspectives de croissance de l'énergie éolienne sont exponentielles partout sur la planète, avec des productions d'ores et déjà si massives que sont balayées les objections rétrogrades sur l'intermittence de cette production. Le solaire lui aussi est en plein envol, en particulier dans les Etats comme la Californie qui ont compris que l'avenir était dans les renouvelables.
     En combinant les économies d'énergie et les énergies renouvelables, il sera rapidement possible d'assurer protection de l'environnement et indépendance énergétique : il y aura toujours du soleil, du vent, du bois, etc. Lorsque se produiront, peut-être plus vite qu'on ne le pense, de graves ruptures d'approvisionnement en pétrole, gaz ou uranium, les grands perdants seront ceux qui auront gaspillé leur argent dans des voies de garage comme le nucléaire.
(*) "Facture énergétique de la France en 2006" et "Bilan énergétique de l'année 2006 de la France"
(**) C'est d'ailleurs pour cela que les pronucléaires parlent toujours du seul CO2, afin de passer sous silence les rejets d'autres gaz à effet de serre de l'industrie nucléaire.