Réexaminer
la possibilité de stocker les déchets dans les sols sous-marins
ou lancer une filière de réacteurs de IVe génération
qui les réutiliseront: un colloque de scientifiques à la
rentrée va relancer sans tabous (?...)la
question du traitement des déchets nucléaires.
Entre 1977 et 1988, un groupe de travail international, dit groupe Seabed, avec des scientifiques d'une dizaine de pays, dont la France, l'Allemagne, les Etats-Unis, le Japon a étudié en détails les conséquences d'une immersion de déchets nucléaires dans les fonds marins. La principale option envisagée étaient de placer les déchets dans un engin en forme de torpille, lancé depuis la surface et capable de s'enfoncer jusqu'à 30 mètres dans la boue argileuse des grands fonds marins. Une option proche était de creuser un puits, à partir d'une plateforme de surface, pour enfouir les déchets à 200 mètres dans le sous-sol marin. La campagne d'essais la plus active eut lieu en juin-juillet, avec le navire "Marion Dufresne", à bord duquel étaient montés 70 scientifiques. Ils travaillèrent sur deux zones dans l'Atlantique Nord, le Grand Meteore Est et la partie sud de la plaine abyssale de Nares. Treize carottes furent prélévées tandis que 17 torpilles remplies d'instruments de mesures furent lancées et pénétrèrent dans le sous-sol marin. Ce vaste programme Seabed, étudié de façon rigoureusement scientifique, a été abandonné en 1988. Les recherches s'orientant alors vers les enfouissements dans les formations géologiques continentales, comme on l'étudie actuellement en France, sur le site de Bure. A l'époque, l'image d'une mer vue comme un territoire sacré et inviolable avait largement contribué à rejeter cette technique. Pourtant, les experts qui ont participé aux études ont reconnu la fiabilité de la technique, sans parler de son coût modéré. Sa logique repose sur la barrière que représentent plusieurs dizaines de mètres de sédiments, plusieurs milliers de mètres d'eau, le tout à plusieurs milliers de kilomètres de toutes zones habitées. Les choix géologiques continentaux offrent certes toutes les garanties technologiques, mais la difficulté d'acceptation par les populations proches est un obstacle réel. On le voit autour du site de Bure actuellement testé dans l'est de la France. L'option sous-marine pourrait alors refaire surface au moins dans les débat d'experts... Nous reparlerons donc de cette option, parmi d'autres, lors du colloque organisé le 10 septembre par l'Université Paris-Diderot et son Groupe de recherche en Radiotoxicologie (GRRT) , avec le soutien de l'ANDRA, et dont le thème général est «Nucléaire et communication». (cf note) (suite)
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suite:
Car la difficulté à aborder sereinement les options du stockage des déchets relève bien d'un problème de communication (!..). La perception des dangers liés au nucléaire surestime les risques. Du plutonium de Cadarache au rejet d'uranium autour du site du Tricastin, en passant par le tritium de Golfech ou l'iode 131 utilisé en médecine nucléaire à Toulouse, l'année 2009-2010 a prouvé combien la communication sur ces risques est difficile, sensible et marquée par le sensationnalisme de la presse. Les déchets de haute activité et à vie longue (jusqu'à 100.000 ans par exemple) représentent 90% de la radioactivité de tous les déchets. Mais ils constituent seulement 2% des volumes. En ce qui concerne la France, tous les déchets de ce type produits entre le début de l'industrie nucléaire jusqu'en 2004 tiennent dans un espace de 1.850 m3. C'est-à-dire un cube de 12 mètres sur 12, qui pourrait donc tenir au dernier étage de la tour Eiffel! Les quantités sont minimes, et pourtant c'est cette question des déchets qui fait peur dans le nucléaire. Le colloque «Nucléaire et Communication» examinera en toute rigueur scientifique les questions de sûreté et de sécurité, et les choix possibles à faire à propos des déchets. Parmi les autres solution de traitements de déchets, figure bien sûr celle qui consiste à les réutiliser. C'est la filière des réacteurs dits de IVeme génération, que la France avait commencé à développer avec Superphenix avant de l'arrêter pour des considérations purement politiques, sous la pression des écologistes. Ces réacteurs à neutrons rapides sont capables de retraiter les actinides, qui constituent la quasi-totalité des résidus à vie longue, en produisant à nouveau une énergie considérable et rejetant des déchets en quantité 20 fois moindre. On sait que le Japon, la Russie, l'Inde travaillent activement sur cette filière où la France aurait pu être pionnière. Note: (la "tonalité" du document s'explique par la) liste des conférenciers et intervenants: Bernard Kirchner, ex-directeur technique de Transnucléaire Bertrand Barré, conseiller AREVA et professeur à l'INSTN Jacques Foos, professeur honoraire de sciences nucléaires au CNAM Gérald Ouzounian, directeur délégué aux affaires internationales, ANDRA Jacques Pradel, ancien inspecteur général au CEA Jean de Kervasdoué, professeur d'économie de la santé au CNAM Maurice Tubiana, président honoraire de l'académie de médecine Pierre Galle, membre correspondant de l'académie des Sciences Nicole
Colas-Linhart
Maître de conférence et praticien hospitalier en Médecine nucléaire à l'Hôpital Beaujon responsable du Laboratoire de Biophysique à la Faculté Xavier Bichat "Radiologie et Radiopathologie" (UFR de médecine Paris 7-Diderot). Présidente du GRRT (Groupe de recherche en Radiopathologie et Radiotoxicologie). |