02.07.10
Dans l'industrie nucléaire, l'héritage
du passé est souvent encombrant. Areva doit faire face à
un stock de 25.000 m3 de déchets radioactifs anciens,
issus de la première usine de retraitement du site de la Hague (Manche)
et entreposés dans des installations vétustes. Une situation
qui provoque la colère de l'Autorité de sûreté
nucléaire (ASN). Celle-ci "s'inquiète de retards pris
dans les projets de reprise et d'évacuation". Et "va prescrire
un calendrier contraignant de reprise et de traitement".
Les déchets incriminés proviennent
de l'usine UP2-400,
mise en service en 1966 et arrêtée fin 2003, deux unités
plus modernes ayant été construites entre-temps. Areva (qui
était alors la Cogema) y a retraité près de 10.000
tonnes de combustibles usés, brûlés d'abord dans les
centrales de la filière graphite-gaz, puis dans les réacteurs
à eau sous pression, ainsi que dans le surgénérateur
expérimental Phénix.
Ces résidus, moyennement radioactifs
mais à vie longue (des milliers ou des millions d'années
pour certains), sont des sous-produits générés par
les opérations de retraitement, qui consistent à récupérer
les matières recyclables (uranium et plutonium) et à isoler
les substances hautement radioactives (produits de fission et actinides
mineurs). Ils comprennent les gaines métalliques des assemblages
de combustible (coques, embouts), ainsi que des boues formées par
les solutions acides utilisées lors de ces opérations.
Désormais, les déchets de retraitement
sont compactés en galettes, pour le métal, ou coulés
dans des matrices de bitume, pour les boues, puis placés dans des
fûts en acier inoxydable, eux-mêmes entreposés dans
des installations spécifiques. Mais, par le passé, ils n'étaient
pas entourés des mêmes précautions. Ils étaient
conservés dans de simples silos de béton, où ils ont
été laissés en l'état.
"A l'époque, l'industrie nucléaire
n'avait pas la même rigueur d'exploitation ni les mêmes exigences
de sûreté qu'aujourd'hui", observe Jean-Luc Lachaume,
directeur général adjoint de l'ASN. "Ces stockages sont
contrôlés, à la fois par l'exploitant et par l'Institut
de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), et
nous sommes sûrs qu'il n'y a pas eu de fuite radioactive, précise-t-il.
Mais, au fil du temps, ils ne peuvent que se dégrader. Il n'est
pas possible que cette situation perdure pendant encore vingt ou trente
ans. Areva doit reprendre rapidement les déchets et les conditionner
selon les normes actuelles." L'industriel est, à tout le moins,
coupable de négligence. "Au début des années 1990,
Areva parlait de démarrer les travaux en 1997. Aujourd'hui, rien
de significatif n'a été fait", s'impatiente Thomas Houdré,
chef de la division de Caen de l'ASN.
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SOLUTIONS PROVISOIRES
Interrogée sur ce dossier lors d'un
déplacement à laHague, la patronne d'Areva, Anne Lauvergeon,
a balayé les critiques du gendarme du nucléaire: "Un subdivisionnaire
régional a fait le bilan annuel de ce qui va et de ce qui ne va
pas. C'est tout à fait classique. Ce n'est pas une découverte.
Nous sommes en train de résoudre cela. Tout est parfaitement d'équerre
avec l'ASN."
Directeur de la communication du site de laHague,
Christophe Neugnot indique cependant que "la reprise et le conditionnement
des déchets anciens font partie du plan de démantèlement
de l'usine UP2-400, pour lequel une enquête publique doit démarrer
à l'automne 2010".
La commission d'enquête étant
en cours de nomination, ajoute-t-il, Areva n'est pas autorisée à
communiquer sur ce sujet. Les dossiers de l'industriel indiquent que l'ensemble
du démantèlement, chiffré à 4 milliards €,
doit s'étaler sur vingt-cinq ans. Mais, pour les déchets
radioactifs en souffrance, l'ASN compte "obliger Areva à trouver
des solutions dans des délais courts".
Reste qu'il ne s'agira que de solutions provisoires.
En France, les déchets nucléaires à vie longue, comme
ceux à haute activité, sont toujours en attente d'un stockage
définitif. Ce devrait être près de Bure (Meuse - voir
"A propos de Bure" dans INFONUCLEAIRE),
dans une couche d'argile profonde de 500 mètres. Cette solution
finale, contestée par les écologistes et une partie des riverains,
n'est prévue, au mieux, qu'en 2025.
Pierre Le Hir
Les vieux déchets de La Hague seront
traités et stockés
http://www.enviro2b.com/
Les déchets radioactifs produits par
la toute première unité de traitement de La Hague devraient
être traités d'ici une quinzaine d'années et stockés
dans des conteneurs.
Thomas Houdré, responsable de l'Autorité
de sûreté nucléaire de Normandie, dénonçait
il y a quelques temps les "quelques milliers de tonnes (qui) n'étaient
pas actuellement conditionnées et (qui) étaient stockées
en vrac dans trois ou quatre sites". Il a donc été entendu
puisque ces milliers de tonnes de déchets radioactifs seront traités
et stockés dans des conteneurs d'ici dix à quinze ans, l'opération
étant financée par Areva.
Ces déchets issus de la première
unité de traitement de La Hague, aussi appelée unité
UP2-400, ont donc été produits de 1965 jusqu'aux années
80-90. Il s'agit principalement de "déchets de procédés,
d'emballages et de combustibles , de gains, de déchets métalliques
et de déchets graphites" explique Thomas Houdré.
Il précise également que "l'ASN
va prescrire un calendrier contraignant avant la fin de l'année
pour le traitement de ces déchets". |