Des retards,
des coûts qui flambent, des erreurs de construction…le nouveau réacteur
d'Olkiluoto, en Finlande, devait être le fleuron de l'industrie nucléaire
européenne. Il en concentre au contraire les défauts et met
en cause l'avenir de la filière, écrit Serge Enderlin
dans Internazionale.
Publié le 13 avril Des retards, des coûts qui flambent,
des erreurs de construction..., le nouveau réacteur d'Olkiluoto,
en Finlande, devait être le fleuron de l'industrie nucléaire
européenne. Il en concentre au contraire les défauts et met
en cause l'avenir de la filière.
Deux cents réacteurs en 20 ans
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Un bilan qui fait froid dans le dos Depuis que la réduction impérative des émissions de gaz à effet de serre s'est imposée comme une évidence, l'énergie nucléaire dispose, pour la première fois depuis très longtemps, d'un atout dans la bataille idéologique quant à son avenir : elle n'émet en effet presque pas de CO2. "Le nucléaire ne contribue pas à réduire les émissions de CO2", affirme Lauri Myllyvirta, un jeune homme qui s'est taillé une petite réputation en s'enchaînant avec cinq collègues de Greenpeace pendant cinq jours au sommet d'une grande grue rouge sur le chantier d'Olkiluoto. "Considérez tout d'abord la durée des chantiers et l'intensité énergétique nécessaire à leur aboutissement. Prenez en compte la catastrophe écologique que représentent les mines d'uranium. Prenez en compte les centaines de milliers de kilomètres parcourus par des poids lourds pour faire circuler les barres de combustible nucléaire de leur lieu de fabrication jusqu'aux centrales, et des centrales jusqu'aux centres de retraitement. Puis de ces derniers jusqu'aux sites de stockage temporaire des déchets. Ajoutez aux convois de camions les escortes de véhicules militaires ou de police, parce qu'on ne trimballe pas de l'uranium comme du charbon..." Petteri Tiippana, le vice-directeur de la Stuk, l'autorité de surveillance du nucléaire finnois dresse un bilan qui fait froid dans le dos: "le problème d'Areva, qui est aussi in fine celui de tous les Finlandais, c'est que la compétence s'est complètement perdue en route depuis la construction de la dernière centrale nucléaire en Europe, il y a plus de vingt ans. J'ajoute que l'EPR est un réacteur d'un type nouveau: autant dire que la Finlande a offert son territoire pour servir de ballon d'essai. J'ai l'impression qu'Areva découvre son travail en le faisant. Ils ont été beaucoup trop optimistes, ont fait des promesses qu'ils ne pouvaient pas tenir, sont allés trop vite parce qu'ils voulaient une vitrine planétaire clinquante." Le nucléaire, une source qui engage bien loin dans le temps...
Cet article est tiré de l'essai "L'après pétrole a commencé" (éditions du Seuil, 2009), de Serge Enderlin. Les petites mains de la décontamination nucléaire Les centrales atomiques françaises font appel à des travailleurs précaires, vivant la plupart du temps dans des roulottes, employés pour les tâches les plus risquées et exposées aux radiations : "On les appelle les 'jumpers' : les plongeurs. Ou bien les nomades du nucléaires", écrit ainsi Alias, le supplément hebdomadaire du quotidien italien Il Manifesto. Employés par des sous-traitants d'EDF, de GDF-Suez ou d'Areva, qui gèrent les centrales, il "encaissent 80% des doses collectives annuelles des radiations ionisantes produites par le parc nucléaire français". Le magazine explique que la doctrine du risque zéro en matière de protection des radiations a été progressivement abandonnée pour celle, beaucoup plus floue, d'ALARA (As Low As Reasonably Acceptable, Aussi bas que raisonnablement acceptable). Plusieurs de ces "nomades nucléaires" ont porté plainte contre leurs employeurs pour les conséquences de leur exposition aux radiations, mais celles-ci n'ont pas abouti. La prescription pour les accidents du travail dans le domaine nucléaire intervient en effet au bout de dix ans, "le temps d'incuber la maladie et d'occulter les causes qui l'ont provoquée", souligne Alias. http://www.globalproject.info/it/ |