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Le 7 septembre 2010 à 11h28
De nouveaux travaux confirment
que la résistance aux radiations de la bactérie Deinococcus
radiodurans est due à un mécanisme de protection de ses
protéines et non pas de son ADN. Grosse surprise: ce mécanisme
peut être transposé aux cellules humaines pour améliorer
leur propre résistance.
Deinococcus radiodurans n'a même pas
dû se rendre compte de l'explosion de la centrale nucléaire
de Tchernobyl. En effet, cette bactérie à l'allure banale
résiste à des radiations équivalant à mille
fois la dose qui tuerait un homme. Et ce n'est pas son seul atout: ce micro-organisme
supporte des conditions extrêmes telles que le froid, la sécheresse,
le vide ou l'acidité. Ses propriétés ont fait d'elle
une énigme depuis 1956, l'année de sa découverte dans
des boîtes de conserve de bœuf irradiées de rayons gamma.
Mais peu à peu, elle livre ses secrets.
Aujourd'hui, des chercheurs de l'Uniformed
Services University of the Health Sciences à Bethesda aux Etats-Unis
commencent à expliquer cette étrange protection dont bénéficie
la bactérie et espère même en tirer profit pour la
médecine. Leurs travaux confirment de précédentes
études: la protection n'agit pas directement sur l'ADN, la molécule
centrale qui contient les informations génétiques, mais plutôt
sur les protéines (en particulier celles impliquées dans
la réparation de l'ADN).
Pour parvenir à ces conclusions publiées
dans le journal Plos One, les chercheurs ont effectué une série
d'expériences. Tout a commencé par l'ultrafiltration des
bactéries. Ce procédé permet d'éliminer les
grands éléments de la cellule, en particulier les protéines
dont la taille est supérieure à 1 kilodalton (c'est-à-dire
les peptides qui contiennent plus d'une dizaine d'acides aminés).
La solution obtenue, appelée ultrafiltrat, a été testée
comme protecteur contre les radiations. En comparaison avec un ultrafiltrat
d'une bactérie sensible, celui de Deinococcus protège les
protéines contre l'oxydation par les radicaux libres, une conséquence
des rayons ionisants.
Une protection qui se partage
L'utrafiltrat contient des quantités
de manganèse, de phosphate, de nucléosides, de bases et de
peptides très supérieures à l'ultrafiltrat d'une bactérie
sensible. Ces éléments sont-ils donc responsables de la résistance?
L'application d'un mélange mimant la composition de l'ultrafiltrat
sur des protéines purifiées a permis de montrer que les quatre
partenaires (nucléoside, phosphate, peptides et manganèse)
préservent de manière synergique l'activité enzymatique
des protéines, malgré l'application de 50.000 Gray (un Gray
ou Gy équivaut à l'absorption d'un joule par kilogramme de
matière).
En jouant les apprentis sorciers, les chercheurs
ont montré que l'action du mélange protecteur est également
transposable à d'autres espèces. En effet, l'ajout de l'ultrafiltrat
dans le milieu de culture de la bactérie Escherichia coli ou des
cellules humaines (une lignée de lymphocytes T) diminue le taux
de mortalité cellulaire, après l'exposition à des
radiations: les cellules humaines deviennent (un peu) résistantes
aux radiations!
Ces résultats pourraient, d'après
les scientifiques impliqués dans ces travaux, permettre de protéger
des bactéries importantes pour le recyclage des déchets radioactifs,
uniquement par ajout des composants protecteurs dans le milieu et non pas
par génie génétique. De plus, l'ultrafiltrat pourrait
également être utilisé dans le cadre de la fabrication
d'un vaccin très efficace pour détruire l'ADN du virus par
irradiation sans dégrader les protéines dont le rôle
est d'activer le système immunitaire. En revanche, la fabrication
d'hommes ou d'animaux OGM résistants aux bombes atomiques n'est
pas encore envisagée...
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suite:
http://www.plosone.org/
Small-Molecule Antioxidant Proteome-Shields in Deinococcus radiodurans
INTRODUCTION (pdf intégral,
1,9 Mo)
Unrepaired DNA double-strand breaks (DSBs)
are generally the cause of ionizing radiation-induced cell-killing, as
shown, for example, by the greatly increased radiosensitivity of specific
repair-deficient mutants. However, the great variation in radiosensitivity
among bacterial species correlates not with initial damage to DNA but rather
with the susceptibility of their proteins to radiation-induced oxidation.
For example, 90% of Shewanella oneidensis cells, which are hypersensitive
to gamma-ray-induced protein oxidation, are killed by doses of gamma-rays
(70 Gy) which cause less than one DSB per haploid genome. In contrast,
proteins in extremely radiation resistant bacteria are highly protected
from oxidation and the cells can survive hundreds of DSBs caused by ionizing
radiation.
Remarkably, for bacteria spanning the limits
of ionizing radiation resistance, for human cells, for archaea, yeast,
animals and viruses, the lesion-yields for DSBs, the most severe form of
DNA damage in irradiated cells, are very similar and fall within a narrow
range (0.002–0.006 DSB/Gy/Mbp per haploid genome). In contrast, the amount
of protein damage in irradiated cells is strongly influenced by their antioxidant
status, where yields of radiation-induced protein oxidation can be 100
times greater in sensitive bacteria than in resistant bacteria. We have
hypothesized that naturally sensitive bacteria are killed by ionizing radiation
mainly owing to the susceptibility of their repair proteins to oxidative
inactivation, which could render even minor DNA damage lethal. In contrast,
manganese complexes in extremely resistant bacteria may prevent oxidative
protein damage, which could protect the activity of enzymes, and thereby
greatly increase the efficiency of DNA repair. This exploratory study is
the first to examine the nature of radioprotective Mn complexes in D. radiodurans.
In the 1940s, Walter M. Dale demonstrated
that enzymes in aqueous solution could be inactivated by small doses of
X-rays (10 Gy), mediated by the indirect effects of reactive molecular
species derived from the ionization of water. The possibility that resistance
of cells to ionizing radiation could be increased, specifically by protecting
proteins, was supported by studies which showed that the radiosensitivity
of an enzyme is not a fixed entity but a variable, where inactivation could
be prevented by adding an enzyme's substrate or other small organic compounds.
In the 1960s, a low-molecular-weight (<15 kDa), protein-free extract
capable of protecting sensitive bacteria against the lethal effects of
ionizing radiation was prepared from Deinococcus radiodurans, a vegetative
bacterium which represents life's utmost limit for ionizing radiation resistance,
capable of surviving 12,000 Gy. Yet, the active components of the extract
and the cellular molecules they protected were not identified. The concordance
of this history of results with recent work demonstrating that proteins,
but not DNA, in Deinococcus bacteria are extraordinarily resistant to ionizing
radiation and desiccation damage led to this study.
Our strategy for elucidating the chemical
protective mechanisms utilized by D. radiodurans was to identify inorganic
and organic constituents in protein-free cell extracts of D. radiodurans
which were over-represented compared to protein-free cell extracts of ionizing
radiation-sensitive bacteria. Of the small molecules which were enriched
in D. radiodurans protein-free cell extracts, peptides were by far the
most abundant. At physiologically relevant concentrations, reconstituted
mixtures of peptides, Mn2+ and orthophosphate bestowed extraordinary
levels of radiation resistance on purified enzymes but did not significantly
protect DNA. Collectively, our findings resolve how, after exposure to
huge doses of gamma-rays, or to months of desiccation in a desert, D. radiodurans
cells retain sufficient protein activity to repair their DNA. |