Dans le monde complexe de l'énergie,
de nombreux sujets sont sujets à controverse, dont celui de la "fusion
froide". Dans ce contexte ambigü, un accord de collaboration entre
ENEA et Pirelli Labs a été signé pour une reprise
des activités de recherche sur ce thème. D'autre part, la
conférence internationale (Icenes 2005) a inclus la fusion froide
parmi les systèmes énergétiques émergents.
Ce phénomène est connu depuis les années trente quand, pour la première fois, un développement d'énergie lié au passage de l'hydrogène à travers des matériaux comme le palladium a été observé. Le thème devient controverse en 1989 quand deux chercheurs, Martin Fleischmann de l'université anglaise de Southampton et Stanley Pons de l'université americaine d'Utah, annoncent des résultats surprenants qu'ils nomment "fusion froide". Les deux chimistes affirment avoir produit une réaction de fusion à température ambiante: une barre de palladium plongée dans une solution d'hydroxyde de lithium et d'eau lourde, aurait produit un excès d'énergie sous forme de chaleur, d'origine nucléaire et non chimique. A partir de cet instant, un groupe de scientifiques majoritairement sceptiques, qui réclament des résultats plus précis (mesurables et reproductibles), se distinguent des groupes de chercheurs convaincus d'avoir déjà obtenu des résultats significatifs. Ces quinze dernières années, malgré les efforts et l'enthousiasme des équipes américaines, japonaises et européennes la recherche sur la fusion froide continue d'avoir la vie dure, comme le reconnaît le directeur de l'unité technico-scientifique Fusion de l'ENEA, Maurizio Samuelli : "les résultats obtenus jusqu'à maintenant témoignent d'une mauvaise reproductibilité. En particulier, on n'arrive pas à déterminer les instants de début et de fin de l'expérience, qui ne peuvent être contrôlés par les chercheurs. Par ailleurs, il est évident que ce procédé implique des phénomènes physiques intéressants". Des phénomènes physiques ou simplement chimiques, comme le soutiennent certains détracteurs. Il s'agit d'un phénomène qui comporte certainement une production d'énergie, mais qui ne semble pas encore s'expliquer. En 1999, Michel McKubre, directeur du centre de recherche sur l'énergie de Menlo Park (USA) pour sa part, conteste les résultats de Fleischman et Pons, en annoncant: "ils devraient reconnaître qu'il pourrait ne pas s'agir de fusion froide". L'ambiguïté de la situation engendre des difficultés pour les personnes impliquées, en effet les programmes expérimentaux ne sont plus financés et aucune revue scientifique n'accepte de publier les résultats, considérant le sujet comme scientifiquement sans importance. |
Entre temps, des prospectives de collaboration se
précisent (en partenariat avec le Ministère des Activités
Productives italien et le Commissariat à l'Energie Atomique francais)
mais les contacts avec industries et investisseurs échouent. Mais
alors pourquoi insister? La réponse se trouve dans le
fait que la fusion froide pourrait être liée à la possibilité
de produire de l'énergie nucléaire propre à
l'aide d'un système relativement simple et économique par
rapport notamment à la fusion nucléaire. C'est la raison
pour laquelle, malgré tout, la fusion froide reste un sujet d'étude
et de discussion. Le Naval research laboratory de la Marine americaine,
par exemple, n'a jamais abandonné les études sur ce sujet
et l'insère parmi les activités de recherche sur lesquelles
il vaut la peine d'investir. Le Centre des Etudes de l'Energie Nucléaire
belge et le groupe d'experts qui ont organisé fin août à
Bruxelles la conférence internationale "Icenes 2005" sont du même
avis.
En Italie, le groupe de l'ENEA Frascati en collaboration de l'équipe de l'Institut National de Physique Nucléaire, est parmi ceux en Europe qui ont le plus activement éetudié ce thème en exposant des résultats intéressants. Un membre de l'équipe, Emilio Del Giudice soutient que "le phénomène est indiscutablement de caractère nucléaire, mais d'une physique nucléaire non conventionnelle, différente de la physique nucléaire connue jusqu'à maintenant". Partant de ces résultats, Pirelli Labs souhaite investir dans le cadre d'un accord et a l'intention de développer un projet sur la fusion froide appelé "blue sky" (à haut risque et à long terme) mais assez important pour y investir des hommes et des moyens. Les deux axes de travail: l'un porte sur la valorisation de quelques solutions innovantes (nouvelles méthodes concernant la préparation de cathodes de palladium) mis récemment au point par Vittorio Violante de l'ENEA; l'autre permet d'étudier l'excitation du système par un laser, qui permet de faciliter le processus de fusion froide. L'expérience de l'ENEA unie à celle de Pirelli Labs pourrait mener à des résultats significatifs. L'objectif serait de démontrer qu'au moins dans la moitié des cas, il est possible d'obtenir une production d'énergie en excès de 20 à 30%: un tel résultat convaincrait non seulement les plus sceptiques mais pourrait aussi ouvrir la voie à des innovations technologiques prometteuses. Ce qui, aujourd'hui, reste utopique pour de nombreuses personnes. Même les plus enthousiastes, du reste, reconnaissent que la voie qui la sépare d'une source utilisable d'énergie est encore longue. Mais pour combien de temps? Ceci dépendra de la capacité des pionniers de convaincre le reste du monde que cela vaut la peine de tenter l'expérience... |