Chaque année, environ 150 milliards
de m3 de gaz naturel partent en fumée, selon les chiffres
donnés par la Banque mondiale, qui indique que ce volume équivaut
à un quart du volume de gaz utilisé aux États-Unis
en un an, 30% de la consommation annuelle de gaz de l'Union européenne,
ou encore 75% des exportations de gaz de Russie. Le brûlage du gaz
naturel, également appelé torchage, est un procédé
utilisé pour se débarrasser du gaz naturel associé
à la production pétrolière et constitue à cet
égard "un gaspillage flagrant d'une ressource d'énergie
de grande valeur," selon Bent Svenson, chargé du dossier
à la Banque mondiale. "Le cas de l'Afrique illustre de façon
particulièrement frappante ce gaspillage de ressources. Si l'on
prenait le gaz qui est torché en Afrique, ce qui ne représente
que 40 milliards de m3 par an, et qu'on l'utilisait pour créer
de l'électricité produite par des centrales modernes et efficaces,
on pourrait doubler la production électrique
de l'Afrique subsaharienne, à l'exclusion de l'Afrique
du Sud," explique-t-il. 15 pays -le Nigeria, la Russie, l'Iran, l'Irak,
l'Angola, le Qatar, l'Algérie, le Venezuela, la Guinée Équatoriale,
l'Indonésie, le Brésil et le Mexique- sont actuellement les
plus concernés par cette pratique.
Outre ce gaspillage, le torchage pose de graves problèmes environnementaux en contribuant à augmenter significativement les émissions de gaz de serre. Selon Bent Svenson, l'arrêt du torchage ferait baisser de 13% le montant total des émissions de CO2 que les pays se sont engagés à réduire au titre du Protocole de Kyoto pour la période 2008-2012… Par ailleurs, les substances toxiques répandues par les fumées des torchères "empêchent les populations de vivre dans un environnement sain," rappelle la Banque mondiale. Au Niger, pays où a été le plus pratiqué le torchage, des communautés locales ont porté plainte en juin 2005, soutenues par les Amis de la Terre et l'ONG Environmental Rights Action, contre le Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC) et le gouvernement nigérian, ainsi qu'à l’encontre du consortium constitué par Shell, Exxon, Chevron, TotalFinaElf et Agip, afin de faire cesser le torchage. En novembre 2005, la Haute Cour Fédérale du Nigéria a ordonné aux compagnies pétrolières d'arrêter le torchage dans le delta du Niger, invoquant la violation des droits de l'homme. |
Aujourd'hui, la Banque mondiale cherche à
réduire cette pratique par le biais de partenariats publics/privés
avec les gouvernements et les compagnies pétrolières. Un
des principaux obstacles réside dans le manque d'infrastructures
et de marchés pour la vente de ces gaz associés. "Une
grande partie du pétrole est produite dans des zones éloignées,
et souvent même off-shore, donc loin des marchés où
le gaz associé pourrait être consommé," explique
Bent Svenson. Ici, le rôle de la Banque mondiale n'est pas d'investir
dans des infrastructures comme des oléducs permettant le transport
du gaz, mais de conseiller les compagnies dans ces investissements. "Réduire
le torchage demande un effort global et concerté de la part des
gouvernements et de l'industrie, ainsi que de la part des institutions
financières et des communautés locales," explique
Rashad Kaldany, président du comité de pilotage des partenariats
publics / privés. Le succès de cette initiative repose largement
sur la volonté politique des pays concernés. Aujourd'hui,
seulement un quart d’entre eux sont impliqués dans ce programme
de la Banque mondiale, qui a pu néanmoins développer plusieurs
actions, comme l'adoption d’une norme mondiale pour la réduction
du torchage, la mise en œuvre de projets pour l'utilisation des gaz associés
dans sept pays et la mise en œuvre de projets carbone, qui ont permis d'éviter
le rejet de 12 milliards de m3 de gaz par an, soit une réduction
des émissions de CO2 de 115 millions de tonnes pour 2012.
LES PARTENAIRES DE LA BANQUE MONDIALE
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