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Le mode de vie des Français se lit dans leurs poubelles...

    PARIS (AFP) - Nos modes de vie gonflent nos poubelles: le surgelé soigneusement emballé a détrôné le plat mitonné, le téléphone portable dernier cri chasse le modèle précédent tous les 16 mois et... les poubelles débordent, constate un bilan de 40 ans de consommation dressé jeudi par la société Eco-emballage.
    Entre 1960 et 2003, les déchets municipaux ont doublé pour atteindre quelque 400 kg par an et par habitant. Les poubelles continuent de grossir au rythme de 1% par an et les capacités de traitement ne suivent pas.
    Face à cette inflation, le gouvernement lance lundi une campagne nationale de mobilisation sur la réduction des quantités de déchets ménagers.
    "Si les déchets augmentent, c'est parce qu'ils correspondent à un type de société", observe Bernard Hérodin, directeur général d'Eco-Emballage, société privée chargée depuis 1992 de la collecte et de l'élimination des emballages.
    Depuis 1960, la population française a certes augmenté (de 15 millions d'habitants) mais surtout la famille a profondément changé: le nombre de foyers monoparentaux a été multiplié par quatre. Le nombre des célibataires a explosé. Un foyer sur trois est une personne seule, et un sur deux à Paris.
    On ne cuisine pas de la même façon pour cinq personnes ou une seule. La taille moyenne d'un ménage est passée de 3,2 membres à 2,4 membres entre 1960 et 1995. Le conditionnement des produits s'est adapté: sachets individuels, minidoses, demi-portions, bouteilles de 50 cl ont envahi les rayons, multipliant les emballages en cartons, plastiques et aluminium.
    L'achat de plats surgelés, eux-aussi emballés, a été multiplié par cinq entre 1979 et 1989.
    En 40 ans, la consommation de loisir (téléphone portable, CD, DVD...) s'est envolée. Chaque Français jette 14 kg d'équipements électriques et électroniques par an, contre 3 kg en 1965.
    "Chacun d'entre nous possède 15 fois plus de biens que ses grands-parents", relève Nadia Boeglin, chef du département Consommation durable à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
    L'acheteur est parfois "captif": il devra changer d'ordinateur pour utiliser un logiciel récent, même si son appareil n'a que 2 ans.
    L'écologie a néanmoins marqué quelques points: les industriels ont réduit le poids des emballages, qui coûtent cher en transport et en énergie. La bouteille d'eau en plastique a par exemple "maigri" de 22% en 10 ans.
    Le tri s'est généralisé. Mais 80% des ordures ménagères vont en décharge ou sont incinérées sans autre forme de traitement.
    La filière la mieux structurée, l'emballage, a réduit les tonnages mais pas les quantités: en dix ans, le nombre d'emballages a augmenté de 25% à près de 100 milliards d'unités par an.
    Les associations écologistes jugent indispensable d'impliquer davantage les industriels dans la "fin de vie" de leurs produits. Aujourd'hui, un produit électronique est obsolète en moins de deux ans, et nombre d'appareils ménagers sont conçus pour tomber en panne au bout de quelques années. Si l'industriel doit payer pour éliminer ses produits, il se posera davantage la question de leur durabilité et de leur réparation.
    Dans l'emballage, l'industrie contribue pour moitié au coût d'élimination, l'autre moitié étant assumée par les collectivités.
    "L'acteur fondamental, c'est le citoyen consommateur", estime pour sa part Bernard Hérodin. Et de citer la réussite "inimaginable il y a quelques années" de l'opération de réduction des sacs en plastique dans la grande distribution, avec une baisse de 15% du nombre de sacs dès la première année