Certains et même beaucoup (et même la plupart?) se réjouissent. Moi, je ne suis pas sûr! Quelque chose "quelque-part" me gêne que je pourrais résumer ainsi: "avant" il y avait un problème (simple) de voisinage; maintenant un tribunal va le régler. P.Desproges, qui n'est pourtant généralement pas "ma tasse de thé" disait: "Dénonçez vos voisins, dénoncez vos amis, y'a pas de raison!" Pris évidemment au second degré, nous y arrivons petit à petit: ne nous parlons plus que par lettre recommandée avec accusé de réception?!
Si dans le cas de fumer, pour une estime aussi élémentaire d'autrui, un décret assorti de tout son cortège de "flics" et de sanctions est nécessaire, il y a là comme une perversion de l'utilisation du législatif et surtout un échec de la société; mais ne nous trompons pas de cible: si le tabac, ainsi que l'alcool, les jeux,... n'étaient pas une puissance économique fondamentale pour l'Etat, le problème serait réglé depuis longtemps.
J'ai utilisé le mot société: ce mot souvent galvaudé permet trop souvent de nous voiler la face; ici le mot "civilisation" serait plus juste: oublierait-on, à l'instar des automobilistes qui sont avant tout des piétons (!), que les fumeurs sont avant tout des... non fumeurs ? Mais quand on entend déclarer par Michel Charasse (lors du fameux lancement de la cigarette Chevignon): "il ne s'agit pas d'inciter à fumer ceux qui ne fument pas, mais de convaincre ceux qui persistent à fumer de choisir la SEITA plutôt qu'une marque étrangère" (il est vrai qu'il est ce qu'on pourrait appeler "un grand fumeur devant l'éternel"), on peut considérer cela comme du lavage de cerveau; mais la plupart des publicités n'en sont-elles pas toujours plus ou moins?! M'entendant "crier" une nouvelle fois, d'aucuns me répondront que cela fait marcher l'économie... Est-il possible de rappeler par exemple que depuis 1990, les banques sont obligées de signaler des versements d'argent d'origine "trouble" et que personne n'est allé crier que l'on allait mettre en péril la bonne santé des banques?!
Petite réflexion subsidiaire: étant flagrant que les fumeurs sont très fidèles à leur(s) marque(s) de tabac, il me semblerait parfaitement stupide de la part des publicitaires d'investir des sommes colossales sans avoir l'espoir de convaincre une personne de plus de fumer; sur le plan de la logique économique ce serait un non-sens total...
Tout ceci est bien un conditionnement et le combat n'est pas à armes égales entre le marketing publicitaire du tabac qui dispose d'un budget de 1 milliard de francs par an (rien qu'en France...) et le jeune, qui par souci d'intégration sociale commence à fumer, à devenir esclave de cette drogue (ainsi enrichisseur de ce marketing...) et qui ne trouvera au bout de la route que maladie ou mort prématurée; gardons hélas à l'esprit que la France est le pays qui a la plus forte proportion de jeunes qui fument.
Pour terminer et rapprocher tout cela, selon mon habitude, des problèmes globaux de la planète, je rappelle qu'en se substituant aux cultures vivrières, la culture du tabac dans les pays du Sud contribue à leur malnutrition; comme il est possible qu'on puisse ne pas se sentir encore concerné, il est "bon" de savoir qu'elle contribue aussi à la destruction des forêts tropicales; si encore une fois on peut (?!) ne pas se sentir concerné, n'oublions pas que nos enfants, eux, seront obligés d'être confrontés aux conséquences d'un tel choix.