LE SOURIRE PERDU DE LA CRÉMIÈRE
J'avais préparé cette chronique avant de connaître le résultat du second tour des... présidentielles, mais pour raison d'enchaînement avec les municipales, elle n'avait pas pu trouver sa place à temps... Suite à l'évolution politique actuelle, la voici, légèrement remaniée.

Nous avons donc encore été obligés (?) de "marcher soit à droite soit à gauche", comme à l'armée vous ne trouvez pas?: droite-gauche-droite-g... c'est à dire "marcher droit" finalement, c'est à dire continuer à vouloir relancer la consommation, c'est à dire le gaspillage, la pollution, etc... Et que l'on ne croie pas que cela créera tellement d'emplois: il n'y a qu'à voir, ces 10 dernières années, la multiplication des produits de notre civilisation "des loisirs" comparée à celle des chômeurs. On aurait presque envie de dire «encore heureux que les pauvres sont pauvres!»: vous rendez-vous compte s'ils consommaient (et donc gaspillaient) autant que nous?! L'UNESCO avance le nombre de UN milliard de personnes seulement qui pourraient vivre avec notre modèle de civilisation... Ne voyons-nous donc pas qu'il est littéralement criminel de relancer cette f... consommation? D'ailleurs, ce n'est pas en manque de garde-manger que nous allons devenir, mais plutôt en manque de... poubelles! Et à force de marcher à reculons sur le tas de nos ordures, nous allons bien finir par nous casser la g... Mais n'avons-nous pas déjà commencé sans nous en apercevoir?

Nous avons remplaçé «liberté, égalité, fraternité» par «productivité, rentabilité, compétitivité». C'est vrai que si les premiers sonnent mieux, ils sonnent souvent creux, suivez mon regard: SDF, CES et autres RMIstes... Quant au trou de la "Sécu", quand on le compare au gouffre financier de l'armée, personne ou presque pour affirmer qu'il est plus important d'assurer la santé de tous, que de se ruiner dans... les essais nucléaires (réalisons nous vraiment que c'est pour tuer "grâce" au nucléaire?!), sans parler de Superphénix (tiens, le but est peut-être de nous le faire oublier, celui-là!?). Quant à affirmer que «nous avons la Paix parce que nous avons la dissuasion nucléaire» (J.Chirac, ce 14 juillet), combien de pays peuvent prouver qu'ils "ont la Paix", sauf à dire qu'ils ne l'ont chez eux que parce qu'ils la font ailleurs?! (de façon militaire mais aussi économique).

La "Sécurité"... Comme on en a parlé de ce problème pendant les élections! Mais comme je ne peux détailler, je vous résume les réponses entendues partout à la question «la sécurité, pour vous qu'est-ce que c'est?»: et bien, il y est généralement moins question de celle des Etats que de celle des individus, qui est faite ainsi de santé, d'instruction et d'emplois. C'est pourquoi, avouer souvent qu'on est rien sans un travail est grave de dire ça, mais cela se vérifiera hélas tant que la politique de protection sociale sera basée sur celui-là, car si le travail diminue, la "sécurité... sociale" ne pourra faire autrement que diminuer, CQFD!

Enfin, bien que nous ne soyons que la partie émergée (dans tous les sens du mot, pour ceux qui sont... noyés!) de l'iceberg humain, je ne m'étendrai pas cette fois sur le tiers monde, mais pour résumer notre rapport avec "eux", la France dépense 40 milliards dans le cadre de la coopération, qui devraient normalement servir au développement des populations: n'est-ce pas plutôt généralement prendre l'argent aux pauvres des pays riches pour le donner aux riches des pays pauvres, car comment s'étonner autrement, de la pérennité de certains dictateurs du monde entier? Quant au chômage au niveau mondial, c'est 1 milliard (oui vous avez bien lu!) d'emplois qu'il faudrait crééer dans les prochaines années, c'est à dire davantage qu'il en existe aujourd'hui dans l'ensemble des pays développés! Ne continuons donc pas à faire l'autruche en croyant que nous allons pouvoir garder nos emplois avec toutes nos formes de gaspillage, sans compter que de plus en plus d'affamés et de réfugiés le sont pour des raisons écologiques, de plus en plus de catastrophes étant liées à l'inconséquence de l'action humaine, telles érosions, inondations ou sécheresses, accidents chimiques et bien sûr nucléaires. Donc économiser l'énergie, en particulier, ce n'est pas seulement faire plaisir aux petits poissons des rivières réchauffées et polluées par nos centrales, c'est réellement un scénario de paix au niveau international, car l'environnement est devenu incroyablement conflictuel: il n'y a qu'à se rappeler qu'à Rio, les Américains n'ont pas voulu de convention sur le climat pour ne pas changer leur niveau de vie...

A nous tous maintenant de rappeler à notre nouveau Président que nos formes de social et d'humanitaire (qui lui, est actuellement trop souvent une sorte de "service après-vente de l'armée") ne sont que des palliatifs, aujourd'hui absolument nécessaires, mais totalement insuffisants si on ne s'attaque pas aux causes qui, chaque jour davantage, engendrent une société d'injustice. Rappelons-nous donc surtout que rien ne changera si nous ne transformons pas personnellement et quotidiennement notre consommation, donc notre solidarité, donc notre sécurité.

On ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre, même dans nos pays où (l'on dit qu') il y a les deux... Alors, à défaut du sourire de la crémière (probablement au chômage), pourquoi ne pas essayer de préserver celui des générations futures et selon une formulation du professeur Th. Monod, allons-nous enfin nous décider à sortir de l'âge des... casernes? Car pour que les pères aient vraiment fait la dernière guerre, il faudrait enfin que les fils ne soient pas toujours prêts à faire la suivante!

Yves Renaud