ETRE OU NE PAS ETRE... VAURIEN?
Pour ceux qui, comme moi, ne sont pas familiers avec la littérature "guerrière", le titre de cette chronique se réfère au Maréchal Montgomery qui avouait: «il faut être un vaurien pour réussir dans l'armée»...

«Attention, qu'on ne dise pas que je voue haine et mépris aux soldats, mais l'armée est trop souvent devenue un outil entre les mains de dirigeants dont bon nombre sont les jouets des marchands d'armes»: même si je le pense, ce n'est pas moi qui le dit, mais Bernard Clavel... Les guerres continuent de vider les coeurs de leur sang - que nous avons tous le même, quelque soit notre religion, notre couleur, notre race, nos idées ou notre... ethnie - et dans le même temps, de plus en plus souvent, emplissent d'or "certains" coffres; et là je ne montre pas seulement du doigt ceux des marchands de canons, mais plus gravement de ces dirigeants, qu'ils soient de l'Ouest ou de l'Est, du Nord ou du Sud.

Devons nous continuer à dire que «puisque tout le monde fait la même chose alors ne nous gênons pas» ou affirmer (avec trop de vigueur pour que nous en soyons intimement persuadés...): «si nous ne le faisons pas, ce seront les autres qui en vendront»? Même si l'analyse des causes historiques, politiques ou "ethniques"des conflits actuels (Bosnie, Algérie, Rwanda... pour ne parler que des plus proches ou... des plus médiatisés!) est incontournable, tant que nous ne répondrons pas à la question «qui, dans l'ombre, excite les belligérants et leur fournit les moyens de s'entretuer; qui profite de la situation, marchands d'armes mais aussi cartels financiers...?), nous ne montrerons que notre cynisme et notre volonté que cela dure. Il n'y a qu'à voir la foire, pardon le salon de l'armement Eurosatory du Bourget près de Paris, dans un marché où «on voit poindre de nouvelles perspectives suite au changement de mission des armées occidentales». Certains journalites ne disent-ils même pas que des entreprises vont être "obligées" de se reconvertir, en particulier dans le recyclage des déchets? Oserai-je rajouter «mais ne faisaient-ils pas déjà que cela?!»... Certains se plaignent d'un exode de cerveaux: mais quand le philosophe disait qu'il valait mieux une tête bien pleine qu'une tête bien faite», pensait-il pleine d'argent (qui plus est, sale)? Savez-vous que le coût du porte-avions Charles de Gaulle, ses avions et équipements représente 1% du PIB annuel de la France?! Et quel coût, en vies humaines et en argent, devons-nous retenir des (ir)résolutions successives et tergiversations de l'ONU que le général sus-nommé avait d'ailleurs qualifié de «Machin»? Atermoiements qui discréditent pour des décennies toute idée de droit international même si ce droit que l'on voudrait voir s'exercer sur la planète, ne nous garantirait pas à coup sûr «la paix perpétuelle» (Emmanuel Kant), mais au moins exprimerait une réelle volonté.

Mais voilà, il s'agit encore et toujours d'un problème de responsabilité personnelle, qu'il s'agisse des guerres que nous laissons faire par les armes que nous laissons vendre ou des pollutions que nous entretenons par les déchets que nous produisons (encore une fois la liste n'est pas limitative). Et cette perte du sens de la responsabilité est difficile à expliquer: on se rassure grâce à la télévision, on se crée une bonne conscience parce qu'on a donné cent francs au Téléthon, on devient résistant parce qu'on montre l'héroïsme de ceux qui ont débarqué, on fait sa bonne action parce qu'on a vu des images du Rwanda et puis on passe à autre chose... Je crois que les gens sont "paumés" par ce monde devenu artificiellement trop grand (ah! les soi-disant prodiges du direct, du temps réel, de cette réalité dite virtuelle dont on nous rebat les oreilles et, dernière trouvaille, ces "autoroutes de l'information"!), qui nous fait vivre les uns à côté des autres au lieu de vivre ensemble et par ces médias qui nous occultent les éléments d'analyse essentiels pour mieux comprendre tous les conflits récents ou actuels. Les questions de sécurité, défense, course aux armements, conflits internationaux ne peuvent pourtant plus s'aborder et surtout se résoudre sans parler d'écologie, de développement et de justice entre le Nord et le Sud.

Nous devons pourtant vraiment nous remettre en question et réaliser que la "vraie" information, la rencontre et le dialogue font plus pour la paix que les canons qui laissent les vaincus et les "vainqueurs" aussi victimes les uns que les autres des marchands d'armes: puisque de toute façon les guerres et les conflits se terminent toujours autour d'une table de négociation, la sagesse de nos "intellectuels" (et la nôtre!) ne devrait-elle pas énergiquement soutenir le droit à l'expression, à la parole, à la confrontations des idées puisque c'est ainsi que finira cette folie des armes?

En cette période des vacances qui, j'espère, ne sera pas une période de... vacance de notre solidarité, je vous propose de méditer une phrase de l'abbé Pierre extraite de son "Testament":

«La vie, c'est apprendre à aimer»

Et encore une fois, bonnes vacances à ceux qui partent et surtout bon courage à ceux qui restent!

Yves Renaud