La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°103/104

DOSSIER GOLFECH - problèmes du tritium


     Nous allons commencer un «roman» Golfech car la matière est importante. La demande d'information sur le site a été constante et la bataille de procédure a été menée aussi loin que possible. Mais les réacteurs sont construits et ils vont peser sur la vie des populations. Une commission d'information pose des questions et surveille. Le GSIEN est intervenu au moment de l'enquête pour les rejets liquide et gazeux. Nous allons donc commencer par ce dossier et ensuite nous publierons successivement les interventions de la commission. Pour commencer nous prendrons:
     - la conception des procédures ultimes;
     - la note de l'U.F.C.
     Il n'y a aucune prétention, sauf à inciter tout un chacun à garder un œil sur les réacteurs pour obliger nos autorités de sûreté et EDF à faire le maximum. Ce n'est pas inutile car la sûreté des réacteurs, qui est le garant de la sécurité des populations, est affaire de mentalité.
     Toutes les questions soulevées à Golfech n'ont pas eu de réponses mais les faits difficiles à contourner sont venus donner raison.
     - Les filtres à sable mal montés sur 6 réacteurs, mal étudiés, ne servant finalement que d'alibi médiatique;
     - Les générateurs de vapeur;
     - Les pressuriseurs;
     - et pour finir les grilles mal montées sur tous les réacteurs.
     On a du pot mais les Russes aussi avaient eu du pot jusqu'en 1986...
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COMMENTAIRE SUR LE DOSSIER FOURNI PAR E.D.F. POUR L'ENQUÊTE PUBLIQUE
RELATIVE AUX DEMANDES D'AUTORISATION DE REJETS D'EFFLUENTS
RADIOACTIFS LIQUIDES ET GAZEUX DE LA CENTRALE NUCLÉAIRE DE GOLFECH
En préambule 
     Le GS1EN, depuis sa création en 1975, travaille pour qu'un véritable débat démocratique ait lieu en ce qui concerne l'industrie nucléaire. Les enquêtes publiques lors des diverses procédures d'autorisation pour les centrales nucléaires devraient être en principe l'occasion d'un tel débat. Cela nécessite évidemment que les dossiers fournis par l'exploitant à la population et à ses élus comportent l'ensemble des éléments nécessaires pour qu'ils puissent apprécier la situation dans toute sa réalité.
     L'enquête publique relative à la demande d'autorisation de rejets radioactifs actuellement en cours dans la région de Golfech concerne l'appréciation de l'impact sur l'environnement et la population des rejets possibles de la centrale nucléaire de Golfech.
     Parmi ces rejets, il faut considérer ceux qui proviennent du fonctionnement «normal» (ce qui comprend un certain nombre d'incidents ou d'accidents mineurs) et ceux qui proviennent de situations accidentelles graves possibles et dont la gestion est d'ailleurs envisagée par les autorités administratives.
     Le dossier fourni à la population et à ses élus à l'occasion de cette enquête publique est techniquement inconsistant. Il ne permet pas d'appréhender la situation que les rejets de la centrale nucléaire de Golfech peuvent créer dans la région.
     En ce qui concerne les rejets «normaux», le dossier comporte un grand nombre de lacunes. Quant aux rejets accidentels graves, ils ne sont même pas évoqués: aucune indication même rudimentaire sur les niveaux de contamination qui en résulteraient et leurs conséquences pour la population. Les autorités administratives n'ont pas versé au dossier l'ensemble des mesures envisagées pour gérer ces crises accidentelles afin d'en maintenir les conséquences dans une enveloppe qu'elles jugent «acceptable».
     Il est évident, dans ces conditions, que l'enquête publique actuellement en cours ne peut être qu'un simulacre de démocratie. L'exploitant et les autorités chargées de la santé publique et de la sécurité civile n'ont pas fourni les informations nécessaires pour que chacun parmi la population et ses élus puisse formuler un jugement rationnel et fondé objectivement.
     C'est pourquoi nous demandons que cette enquête soit suspendue jusqu'à ce que l'exploitant et les autorités administratives aient fourni à la population et à ses élus l'ensemble des éléments concernant les rejets «normaux», les rejets accidentels et la gestion des accidents majeurs graves. L'enquête publique devrait ensuite être étendue à l'ensemble des populations susceptibles de subir les conséquences des rejets qu'ils soient «normaux» ou accidentels.

Les rejets «normaux»
Etat de référence
     Le suivi des rejets radioactifs dans l'environnement a pour but essentiel de déterminer l'impact éventuel de ces rejets sur les humains. Il n'est donc pas sérieux de ne prendre en compte que le suivi de quelques végétaux terrestres ou aquatiques ou celui de l'eau et du lait. L'impact du fonctionnement de la centrale de Golfech ne pourra être établi que si un état de référence concernant la mortalité et la morbidité humaines a été effectuée au préalable. Une étude de morbidité est nécessaire: incidence des divers cancers, mortalité néonatale, taux d'avortement spontané, incidence des maladies infectieuses, caractéristiques des enfants à la naissance (poids, trisomie, malformations, etc.). Des populations de référence en divers points de la région concernée doivent être suivies avec soin.

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     Les animaux, qu'on ne prend pas en compte dans les études d'impact, peuvent servir d'indicateurs particulièrement sensibles car il est possible chaque année d'avoir dans des troupeaux de référence un grand nombre de mises bas simultanées, ce qui conduit à une précision statistique bien meilleure que celle qu'on peut avoir avec des naissances isolées et dispersées d'enfants. Un état de référence pour certains animaux (vaches, porcs, moutons, chèvres, chevaux...) serait donc particulièrement utile (taux de fécondité, mortalité à la naissance, taux et nature des malformations, poids, croissance, etc.).
     L'impact réel de la centrale sur l'environnement ne peut être déterminé que si ces études humaines, animales et végétales, sont effectuées au préalable.

Les bioindicateurs
     Les rejets ayant lieu de façon discontinue, il est important de disposer dans l'environnement terrestre et aquatique de bioindicateurs étalonnés qui intègrent les rejets sur un temps suffisamment long et qui les concentrent suffisamment pour que leur analyse soit facile. Certaines mousses remplissent facilement ce rôle et doivent être par conséquent étudiées avec soin. L'emplacement des points de prélèvement doit être fixé en tenant compte des conditions météorologiques locales. Un état de référence précis pour ces bioindicateurs est bien sûr nécessaire.

La surveillance de l'environnement
     Les chapitres du dossier relatifs à la surveillance de l'environnement sont beaucoup trop succincts.
     En ce qui concerne les rejets liquides, l'échantillonnage «automatique» du SCPRI mentionné dans le dossier est-il continu ou discontinu? Les termes utilisés semblent signifier qu'il s'agit de prélèvements discontinus.
     En ce qui concerne la surveillance des rejets gazeux, il est prévu une mesure en continu du rayonnement g en 4 points autour du site. Il est évident que 4 points seulements ne peuvent fournir un état détaillé de la situation dans la région. Le nombre de points de mesure devrait être accru non seulement au voisinage du site mais égaIement loin du site.
     D'autre part, la mesure du rayonnement g ambiant ne permet pas de connaître avec précision la contamination réelle de l'atmosphère par les poussières et les aérosols. Ce sont des prélèvements discontinus (journaliers) qui sont prévus par le SCPRI. Signalons que d'après les Bulletins du SCPRI, la contamination atmosphérique est connue 5 jours seulement après les prélèvements. Une gestion correcte des situations anormales est impossible dans ces conditions. Le contrôle de la contamination atmosphérique devrait être effectué en continu par des balises[1] permettant de mesurer avec précision l'activité des poussières atmosphériques ainsi que l'Iode 131. Ces mesures devraient être officiellement reconnues comme relevant de la responsabilité de ceux qui localement ont la charge des gestions accidentelles.
     Des remarques analogues peuvent être faites concernant le contrôle de l'eau de la Garonne et celle des nappes qui servent pour l'alimentation en eau de la population. Il est mentionné dans le dossier des «prélèvements d'eau du milieu récepteur à chaque rejet». Les mesures de contrôle ne dépendent finalement que de l'exploitant. Seules des mesures en continu par des organismes indépendants de la centrale (producteurs d'eau, responsables locaux ou régionaux) permettraient un suivi significatif du fonctionnement de l'installation. 

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     Il serait important de mentionner explicitement la sensibilité exigée pour les mesures. L'expérience montre que le SCPRI fixe cette sensibilité par rapport aux limites maximales autorisées et non pas suivant les concentrations attendues à la suite d'un fonctionnement normal de la centrale. Cette pratique ne permet pas de détecter rapidement des anomalies de fonctionnement et d'anticiper les situations anormales pouvant conduire à des situations accidentelles.
     D'une façon générale, on comprend mal pourquoi les autorisations de rejet sont fixées à des niveaux 10 fois (et plus) supérieurs aux rejets normaux attendus:
     0,08 Bq/l (hors tritium) attendus pour 0,8 Bq/l autorisés
     5,5 Bq/l pour le tritium attendus pour 80 Bq/l autorisés
     Une attention particulière doit être portée aux rejets de Césium 134 et 137 dont la présence dans l'eau est le signe d'une perte de confinement de la première barrière (fissuration des gaines du combustible) et au cobalt 58, produit d'activation du nickel des aciers, dont la présence dans  les rejets est le signe d'une corrosion de certaines parties de l'équipement.
     Pour ces radioéléments, il aurait été intéressant de connaître explicitement et avec précision l'ampleur des rejets que l'exploitant considère comme relevant d'un fonctionnement normal ainsi que l'impact attendu sur des bioindicateurs sensibles.

Le cas particulier du Tritium
     Trop peu d'attention est accordée au tritium, un des rejets les plus importants des centrales nucléaires (hors accident). Généralement, le tritium n'est considéré que sous la forme d'eau tritiée. Or il peut se fixer dans les cellules organiques (il est dit alors «tritium organiquement lié»). Dans ce cas, sa période biologique est très longue.
     Afin de mieux connaître le cheminement du tritium dans la chaîne alimentaire et de disposer d'un état initial dans ce domaine avant la mise en service de la centrale de Golfech, il est nécessaire de faire effectuer des mesures systématiques du tritium organiquement lié dans les végétaux des zones environnantes. La méthode mise au point par le Service d'Ecotoxicologie (Centre d'Etudes Nucléaires de la Vallée du Rhône) du Département de Protection Sanitaire de l'IPSN permet d'effectuer cette mesure et de reconstituer l'historique du tritium dans une région donnée à partir d'échantillonnages et de mesures sur des végétaux ligneux pérennes. Par ailleurs, à partir de la mise en service de l'installation, cette mesure devrait être effectuée systématiquement sur les végétaux dans le cadre des programmes de surveillance écologique de l'environnement. Un tel suivi devrait pouvoir mettre en évidence tout rejet anormalement élevé, signe d'un mauvais fonctionnement de la centrale.

Les filtres à Iode
     Il nous paraît important d'imposer à l'exploitant que tous les points éventuels de rejets gazeux possibles soient équipés en permanence de filtres piégeant l'Iode sous ses formes particulaire ou gazeuses afin de protéger la population et en particulier les groupes à risque constitués par les femmes enceintes et les jeunes enfants, contre les rejets éventuels d'iode radioactif, soit au cours de fausses manœuvres, soit au cours d'incidents d'exploitation. Il est important aussi de préciser la périodicité du remplacement de ces filtres ainsi que la procédure de ce remplacement car l'efficacité des filtres décroît rapidement au cours du temps.

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1. Nous savons que le Conseil Général du Tarn et Garonne a développé un point de vue identique mais le document soumis à l'enquête publique ne prévoit pas le système de surveillance sous cet angle. 
Problèmes liés au débit de la Garonne
     Une bonne dilution des rejets radioactifs exige un débit minimum du fleuve. Il est dit que ce débit d'étiage sera précisé dans l'autorisation alors qu'aucune indication n'est donnée dans le dossier soumis à l'enquête. Pourquoi cette rétention d'information?
     De plus, l'avis donné par le SCPRI[2] indique qu'il pourrait y avoir des rejets pour des débits de la Garonne inférieurs à ceux spécifiés dans l'autorisation officielle après accord du SCPRI. Aucune mention n'est faite des critères qui seront utilisés par le SCPRI pour donner ces autorisations exceptionnelles. Il n'est même pas possible de savoir si de tels critères existent réellement, ce qui enlève ainsi toute signification à la condition de débit minimum que l'autorisation comportera.
     Le problème de l'échauffement anormal des eaux de la Garonne en cas de période d'étiage n'est pas abordé. Afin de maintenir la température du fleuve à un niveau toujours acceptable, il nous paraît important que soit exigée la mise en place d'une unité de refroidissement auxiliaire des purges des tours de refroidissement renvoyées dans le fleuve.
     Le dossier ne traite pas des problèmes des crues de la Garonne et le débit maximum n'est pas indiqué.
     En cas de crue, la dispersion sur les berges des radioéléments fixés dans les boues du fleuve et remis en suspension doit être précisée. Il est simplement indiqué dans le dossier: «Ces dépôts fins porteurs d'activité peuvent en période de crues par exemple être remobilisés et ajouter une activité à celle existante dans les rejets normaux». Il est envisagé dans certains cas que la radioactivité supplémentaire due à ce phénomène soit de 1 à 2 Bq/l alors que la limite maximale autorisée n'est que de 0,8 Bq/l en moyenne quotidienne.
     Des explications supplémentaires sur ce point auraient été appréciées.
     Le dossier signale que certaines zones isolées du fleuve possèdent une granulométrie fine des boues, ce qui favorise ce phénomène. La localisation de ces zones n'est pas mentionnée. Une surveillance spécialisée de la contamination de ces zones ne semble pas envisagée, ce qui est tout à fait anormal.

Les rejets chimiques
     Les taux de dilution des rejets chimiques non radioactifs ne sont pas spécifiés. Ceci part du postulat que ces produits ne sont pas toxiques quelle que soit leur concentration. Un examen plus attentif aurait été souhaitable.
     Acide borique: dans le dossier relatif à la centrale de Nogent-sur-Seine, il est indiqué que l'acide borique est toxique pour des concentrations de l'ordre de 4 à 15 mg/l. Lorsque l'eau du fleuve est utilisée pour l'irrigation, l'apport en acide borique aux cultures est loin d'être négligeable. Il peut atteindre 1,8 kg par hectare pour 2 tranches nucléaires en fonctionnement, ce qui est supérieur aux valeurs habituellement recommandées pour les engrais.

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     A partir du moment où l'accident grave est envisagé comme possible à la fois par les spécialistes du CEA et de l'EDF et par les autorités sanitaires, la population et ses élus sont en droit de connaître avec précision les façons dont l'accident serait géré, afin de porter un jugement fondé sur les niveaux d'acceptabilité que cette gestion sous-entend.

Pièces jointes en annexe
     Etude de l'impact d'un accident nucléaire majeur à la centrale de Nogent-sur-Seine sur l'alimentation en eau potable dans l'agglomération parisienne (Agence Financière de Bassin Seine-Normandie, janvier 1985).
     Analyse par l'IPSN du rapport de l'AFBSN non daté. L'accident majeur à Nogent-sur-Seine et l'alimentation en eau de la région parisienne (GSIEN, 21 avril 1987). Texte de l'EDF concernant les rejets chimiques à Nogent-sur-Seine.
     Evaluation des conséquences radiologiques d'un accident nucléaire: le projet ECRAN. Bilan de l'expérience CRUAS. Rapport EDF (HE/3388.06/B, juillet 1988).
     Si les rejets ont lieu en période d'étiage, la concentration peut être très importante et c'est généralement pendant les périodes de sècheresse exigeant des irrigations fréquentes que les étiages ont lieu.
     Il serait peut-être utile de prévenir les agriculteurs utilisant l'eau du fleuve pour l'irrigation, des périodes pendant lesquelles sont envisagés les rejets, soit pour irriguer en dehors de ces périodes, soit pour ajuster leurs engrais en tenant compte de cet apport supplémentaire.
     L'hydrazine, l'EDTA etc...: en ce qui concerne les rejets d'hydrazine, ils pourraient être considérablement réduits par addition d'eau oxygénée. Ceci correspondrait bien à la recommandation du SCPRI de «maintenir les quantités rejetées aussi basses que possible».
     La toxicité des rejets d 'hydrazine, d'EDTA (acide éthylène diamine tétracétique) aurait mérité plus d'attention en particulier en ce qui concerne les niveaux de concentration au niveau de l'émissaire avant la dilution totale.
     Les sels d'EDTA sont utilisés comme agents chélateurs pour les métaux lourds (particulièrement toxiques). Il pourrait donc y avoir au point de rejet une remise en suspension de ces métaux.
     D'une façon générale, l'action sur les poissons et les algues, des produits chimiques rejetés au voisinage du point de rejet n'est pas obligatoirement négligeable.
     Il pourrait donc être nécessaire, pour des raisons de prudence, d'imposer une dilution préalable avant les rejets.
     Signalons que la surveillance en continue de la pollution chimique n'est pas mentionnée.

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2. Il nous semblerait plus normal que les textes portent la mention du Ministère de la Santè et non celui d'un simple service de ce ministère, comme si ce service fonctionnait d'une façon autonome par rapport à son ministère de tutelle.
Les situations accidentelles hors dimensionnement
     La démarche probabiliste qui fait considérer l'accident grave (fusion du cœur avec perte de confinement) comme trop peu probable pour être envisagé, est en contradiction flagrante avec les conceptions actuelles des spécialistes français de la sûreté nucléaire.
     Nous pouvons lire dans un rapport officiel les jugements suivants concernant l'approche probabiliste des accidents graves: «Plus les événements sont improbables, plus grande est l'incertitude sur le calcul de leur probabilité, de sorte que ce calcul lui-même n'a plus grande signification ... En France, nous n'accordons guère de crédit aux calculs probabilistes pour classer les accidents graves, car nous estimons que l'estimation de ces valeurs très faibles ne repose pas sur une assise scientifique suffisante. Nous préférons nous en tenir à la notion d'événement «concevable» ou «plausible» au sens du jugement de l 'ingénieur»[3].
     Ce texte a été présenté à une conférence internationale sur la sûreté des réacteurs nucléaires par F. Cogné, Directeur de l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire du CEA (IPSN), J. Bussac, chef du Département d'Analyse de Sûreté de l'IPSN et J. Pelcé son adjoint. Compte tenu des responsabilités hiérarchiques importantes de ces trois personnes, on est en droit de considérer leur conception comme étant celle des autorités administratives responsables au plus haut niveau de la sûreté nucléaire.
     Ainsi nous devons admettre que toute conception probabiliste des accidents graves est étrangère à la pensée officielle.
     Cela signifie en clair que lorsque l'on considère un événement grave «concevable au sens du jugement de l'ingénieur» qui n'a pas été pris en compte pour le dimensionnement de l'installation, on doit en considérer les conséquences sans tenir compte de sa probabilité d'occurrence.
     Ajoutons la déclaration de P. Tanguy, Inspecteur Général pour la Sûreté et la Sécurité Nucléaire, Direction Générale (EDF) : «Nous faisons tout ce que nous pouvons pour prévenir l'accident grave, nous espérons ne pas en avoir, mais nous ne pouvons pas garantir qu'il ne se produira pas. On ne peut exclure que dans les dix ou vingt ans à venir un accident nucléaire civil se produise dans l'une de nos installations»[4].
     Ces accidents graves (majeurs) doivent donc être pris en compte et les rejets qui en résultent doivent être soigneusement étudiés et cela en dehors de toute considération statistique ou probabiliste. Ces études doivent considérer les conditions météorologiques les plus pénalisantes dès lors qu'elles sont possibles et non pas des conditions moyennes. Elles devraient faire partie des dossiers fournis à la population et à ses élus quand les pouvoirs publics sollicitent leur avis lors des enquêtes locales.
     Une telle étude a été faite en 1985 par l'Agence Financière de Bassin Seine-Normandie pour la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine. Celle-ci avait pris pour hypothèse de travail le rejet maximum envisagé comme possible par la CEE. Cette étude avait été contestée par l'IPSN dans un document confidentiel qui n'admettait qu'un rejet bien moindre dans le pire des cas possibles.
     Cependant le document reconnaissait: «Néanmoins, pour un accident de type S3, même avec des hypothèses plus réalistes sur les transferts de radioactivité, l'activité volumique de l'eau de la rivière au droit des stations de pompage pourrait conduire à s'interroger sur la suspension momentanée de certains pompages».
     En effet, le document précisait que la concentration en Iode 131 dans la Seine pourrait atteindre 400 fois la concentration maximale reconnue comme admissible par les organismes officiels et cela «sur un temps sensiblement plus long que celui annoncé dans l'étude de l'AFBSN» (c'est-à-dire nettement supérieur à 24 heures).
suite:
     Dans son texte introductif, l'IPSN envisage, afin de réduire la radioactivité reçue, «la mise en œuvre des mesures comme l'interdiction temporaire de la consommation des eaux de la Seine pour les enfants».
     On voit bien là que l'IPSN considère comme possibles des situations accidentelles avec des pertes de confinement suffisamment graves pour concerner une population importante et exiger des mesures de restriction de la consommation de l'eau.
     Signalons que ni l'étude de l'AFBSN ni la contre-expertise de l'IPSN ne prenaient en compte la contamination de la nappe phréatique par pénétration du corium en fusion après traversée du radier du bâtiment du réacteur. L'IPSN ne considérait pas comme nécessaire d'étudier cette possibilité, il s'agirait là d'un événement lent qui devrait permettre la mise en place de contre-mesures que personne n'a encore rendues possibles.
     Ce dossier sur les rejets accidentels à Nogent-sur-Seine a été rendu public par le Ministère de l'Environnement le lendemain de la clôture de l'enquête publique relative à la demande d'autorisation de rejets d'effluents radioactifs.
     Nous ignorons si des études analogues concernant la pollution radioactive de la Garonne et des nappes phréatiques ont été faites, Elles doivent être rendues publiques le plus rapidement possible.
     L'existence des plans ORSEC-RAD montre que les autorités responsables de la Sécurité Civile prennent en compte ces possibilités d'accidents majeurs avec des rejets suffisamment importants pour mettre en danger la population. En ce qui concerne la région de Golfech, C. Virenque, Médecin-Chef des Sapeurs Pompiers de la Haute Garonne, indiquait l'an dernier [5]: «Au total, il apparaît bien que face à un accident nucléaire sur le site de Golfech, une stratégie spécifique de secours et de soins a été prévue».
     Il nous paraît de la plus grande importance que les autorités administratives dans la perspective de transparence exigée par le Premier Ministre, indiquent d'une façon explicite lors des enquêtes publiques les moyens dont disposent les autorités administratives et les critères qu'elles devront utiliser pour intervenir en cas de crise grave:
     - moyens de mesures de radioactivité à leur disposition, nombre de mesures en continu, leur localisation, la nature des mesures effectuées et leur sensibilité par rapport aux seuils d'alerte, etc.
     - moyens mis en œuvre pour traiter cette information en temps réel et efficacité de ces moyens déterminés à partir des essais de simulation (en fonction des conditions météorologiques, etc.).
     - critères d'intervention que les autorités régionales devront utiliser pour décider des moyens à mettre en œuvre: dose engagée maximale admissible (sur quels critères cette grandeur sera évaluée?), débit de dose dû au rayonnement externe, concentration maximale admissible en radioéléments pour l'air, l'eau, la nourriture.
     - Consignes préventives données à la population du voisinage et vérification de l'exécution de ces consignes: étanchéité des maisons, problème de la ventilation des habitants lié au chauffage (ceci dans l'éventualité d'un confinement), possession de moyens d'écoute indépendants du réseau EDF (piles en état de fonctionnement sur des récepteurs radio), problème des animaux domestiques, etc.
     - Disponibilité des stocks d'iode, modalités de la distribution, posologie et contre indications. 
     - Evacuation éventuelle très rapide des enfants en bas âge et des femmes enceintes particulièrement sensibles à l'iode radioactif (groupes à haut risque).
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3. J. Bussac, F. Cogné, J. Peleé, «Approche française en matière d'accidents graves et de problématique du terme source». International Topical Meeting on Thermal Reactor Safety, San Diego, 2-6 février 1986.
4. P. Tanguy, «La maîtrise des risques nucléaires». Actes du Colloque Nucléaire-Santé-Sécurité, p. 430, Montauban, 21-22-23 janvier 1988.
5. C. Virenque, «Organisation des secours et des soins d'urgencc en cas d'accident radiologique ou nucléaire». Actes du Colloque Nucléaire-Santé-Sécurité, p. 481, Montauban, 21-22-23 janvier 1988.

PROTECTION DES POPULATIONS EN CAS D'ACCIDENT GRAVE SURVENANT A LA CENTRALE ÉLECTRONUCLÉAIRE DE GOLFECH
La conception des procédures ultimes
Le dépressuriseur à sable
1- La conception des procédures ultimes
     Les procédures dites «ultimes» sont des mesures qui doivent permettre, en cas d'accident très grave (en particulier menace de rejet direct à l'extérieur de l'enceinte de confinement suite à la perte de l'étanchéité de cette enceinte) de limiter les conséquences de l'accident.
     Ainsi la possibilité de contrôler et de filtrer les rejets au moyen d'un système de filtration spécial destiné à faire baisser la pression à l'intérieur de l'enceinte tout en retenant 90% des aérosols présents dans l'atmosphère de l'enceinte de confinement[1]: le dépressuriseur à sable.
     Ce système soulève plusieurs questions:
     - quelle pourrait être la quantité de produits ainsi relâchés dans l'environnement, et comment ceux-ci se propageraient-ils dans l'environnement?
     - quel serait le temps nécessaire pour ramener la pression à l'intérieur de l'enceinte de confinement à une valeur ne présentant pas de danger pour l'étanchéité de l'enceinte (le débit du dépressuriseur est faible: sa perte de charge* est de 0,1 bar).
     - comment se comporterait le filtre en cas de forte humidité à l'intérieur de l'enceinte (cas de l'accident majeur)? Ne serait-il pas colmaté par cette humidité? En tout état de cause, «EDF est en train d'examiner la possibilité d'installer des pré-filtres en amont des filtres à sable. Ils auraient pour fonction principale de diminuer la teneur en eau des matières allant dans les filtres à sable en cas d'accident»[2].
     - qu'est-il prévu au niveau de l'entretien et de la vérification de ces filtres (mesures destinées à éviter un colmatage consécutif à l'éventuel développement de moisissures)?
     - est-il prévu un écran biologique permettant à l'opérateur d'accéder aux vannes de commande de ces filtres, en particulier pour les refermer (l'ensemble du circuit est à ce moment-là excessivement contaminé et donc très irradiant)?
     - quelle est l'efficacité réelle de ce système? Peu de pays en sont équipés: les Etats-Unis par exemple n'ont pas estimé opportun de s'en doter. Nuclear Engineering International titrait en février 19893: «Encore aucun consensus sur les filtres de dépressurisation» et il ajoutait «Alors que se poursuit le débat concernant l'opportunité et l'efficacité des systèmes de filtres à dépressurisation, dont l'objectif est d'atténuer les conséquences d'un accident grave, l'installation de tels systèmes est aujourd 'hui largement inspirée par la pression politique».
     Quant à Monsieur P. Tanguy, Inspecteur Général de Sûreté à EDF, il confiait à Nucleonics Week (6 avril 1989)4 que l'installation de ce type d'aménagement était en partie motivée par le désir de gagner l'opinion publique à l'énergie nucléaire.
     L'efficacité des dépressuriseurs à sable serait donc très largement controversée.
     Le Ministère de l'Industrie a pour sa part demandé à EDF, par un courrier en date du 26 juillet 1989, de bien vouloir s'assurer de la fiabilité de ce procédé.
     Dans ces conditions d'incertitude, et au vu des conséquences en Union Soviétique de la catastrophe de TchernobyI [5, 6], il apparaît légitime de s'interroger sur l'opportunité de limiter les mesures de confinement et d'évacuation en cas d'accident grave aux populations situées dans un rayon de 10 et 5 km autour de la centrale.
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1. P. Tanguy. «La Maîtrise des Risques Nucléaires». Actes du Colloque "Nucleaire-Santé-Securité», Montauban 21-23 janvier 1988  Conseil Général de Tarn-et-Garonne. 1989.
2. Nuclear Enngineering International, août 1989. «EDF thinks about filters».
3. Nuclear Enngineering International, février 1989, «Still no consensus on containment filters venting».
4. Nucleonics Week, 6 avril 1989. «Tanguy says gain in acceptance could outweigh backfits costs».
5. Conseil Superieur de la Sûrete et de l'Information Nucléaires, Séance du 30 janvier 1990 Communication du Professeur P. Pellerin (SCPRI).
6. Le Généraliste, 20 février 1990 pp. 16-23.
II. Questions écrites remises à ce sujet à Messieurs les représentants du Ministère de l'Industrie et de l'Aménagement du Territoire et du Secrétariat d'Etat auprès du Premier Ministre Chargé de l'Environnement et de la Prévention des Risques Technologiques et Naturels Majeurs lors de la réunion de la CLI du 23 février 1990
     a) Le dépressuriseur à sable est-il opérationnel à Golfech?
     b) La CLI demande le dossier technique relatif au fonctionnement, à la maintenance, à la fiabilité, à l'efficacité de ce dispositif et à sa qualification sur le site de Golfech.
     c) Quelles procédures sont prévues pour, conformément aux recommandations de Monsieur le Professeur Pellerin (SCPRI) du 30/01/90 au Conseil Supérieur de la Sûreté et de l'Information Nucléaires, éviter en cas d'accident grave la contamination massive et durable de l'environnement proche et lointain par le Césium 137?

III. Réponse sur ce point du Ministère de l'Industrie et de l'Aménagement du Territoire et du Secrétariat d'Etat auprès du Premier Ministre Chargé de l'Environnement et de la Prévention des Risques Technologiques et Naturels Majeurs

FICHE NR 12
Conception du filtre à sable

Réf. : Fiche n°6 de la lettre SIN 14/90 du 14 janvier 1990
     Le filtre à sable est en place à Golfech, et serait utilisé en cas de nécessité. Une décision éventuelle d'utilisation ne pourra être prise que par le poste de commandement direction du site après concertation avec les différents échelons locaux et nationaux de l'autorité chargé de la gestion de la crise, et serait soumise à l'accord du SCSIN.
     La centrale de Golfech et les équipes de crise disposent des règles d'utilisation correspondantes.
     En juillet 1989, le SCIN a demandé à l'exploitant de montrer que les doses reçues par la personne qui manipulerait les vannes était acceptable que s'il n'y avait pas de risque d'explosion d'hydrogène.
     Par lettre du 18 janvier 1990, EDF a répondu à ces demandes:

- Accessibilité:
     Dans les analyses effectuées antérieurement, au début des mises en place des dispositifs de décompression/filtration, un défaut de protection avait en effet été identifié sur le P'4 vis-à-vis de la manœuvre des vannes par les opérateurs. Ceci a fait l'objet d'une modification de la protection qui est réalisée sur Golfech.
- Risque hydrogène:
     Concernant le risque d'explosion hydrogène dans le filtre, rappelons que ce problème n'est susceptible de se poser que pendant une très courte période (de l'ordre de quelques minutes) lors de la mise en service du filtre lorsque celui-ci est à une température susceptible de provoquer une condensation importante dans l'éventualité d'un mélange contenant une quantité significative d'hydrogène et riche en vapeur d'eau.
     Ce risque apparaît donc peu vraisemblable. Cependant afin de ne pas laisser d'incertitude concernant ce risque éventuel, EDF a engagé l'étude et la mise en œuvre d'un dispositif de préchauffage utilisant les circuits de conditionnement existants.
     Dans ces conditions le dispositif est opérationnel sur les tranches et en particulier à Golfech conformément aux objectifs qui lui avaient été assignés.
     Par ailleurs, et indépendamment du caractère d'ores et déjà opérationnel de cette installation, des études sont poursuivies afin d'améliorer si possible les performances assignées à celle-ci.

suite:
     Concernant la question relative à la contamination massive et durable de l'environnement par le Césium 137, rappelons que c'est justement l'objectif du dispositif de filtration que de limiter le relâchement de produits radioactifs sous forme d'aérosols, et donc en particulier le Césium 137, en cas d'accident grave. Le dispositif prévu, auquel a été assigné un objectif minimum d'efficacité assurant que les rejets ne conduisent pas à des conséquences non maîtrisables, aurait en fait une efficacité supérieure, limitant par là même le rejet en Césium.

IV. Commentaire de la CLI
     Le courrier adressé à la CLI comporte deux indications:
     a) Concernant la protection biologique de l'opérateur qui devrait en cas d'accident grave, accéder à la vanne de commande du filtre à sable.
     Il est dit: «Ceci a fait l'objet d'une modification de la protection qui est réalisée sur Golfech».
     Cette information est contraire aux termes du Rapport de l'Inspecteur Général d'EDF, P. Tanguy (7):
     «En matière de radioprotection, le débit de dose aux endroits les plus exposés du site est acceptable si les filtres sont munis de protections biologiques. Les dossiers pour commande des équipements (bacs à eau montés sur une charpente) seront prêts au printemps 90 et le début des travaux d'installation pourra commencer environ un an au plus tard. Le parc sera muni de ces protections biologiques fin 92».
     La vanne permettant de commander le dépressuriseur à sable n'est donc pas accessible à Golfech dans des conditions d'irradiation acceptables pour le personnel de la centrale. Dans le cadre des prévisions EDF, il ne le sera pas avant au moins un an.
     b) Il y a un risque d'explosion d'hydrogène dans le filtre:
     Que ce risque n'existe «que pendant une très courte période (de l'ordre de quelques minutes)» n'a rien de rassurant.
     En effet, il concerne le moment de la mise en service du filtre (P. Tanguy[7]) et «il est difficile de démontrer que dans sa conception actuelle, le filtre résisterait à une déflagration»[7].
     Ceci est préoccupant, car dans une telle éventualité la sûreté serait mise en cause de deux manières:
     * Mise hors service du dépressuriseur et donc impossibilité d'éviter un accident majeur en cas de surpression dépassant la résistance de l'enceinte.
     * Risque de transition de la déflagration vers la détonation d'hydrogène et de ruine de l'enceinte de confinement[8,9].
     Dans ces conditions (vanne inaccessible à l'opérateur, risque d'explosion d'hydrogène à l'intérieur du filtre), la CLI s'étonne de lire que «le dispositif est opérationnel sur les tranches et en particulier à Golfech».
     c) La CLI prend note que le Césium 137 serait, en cas d'accident grave survenant à la centrale de Golfech, en partie retenu par le dépressuriseur à sable.
     Il est néanmoins évident que ceci ne serait effectif que dans le cas d'un dépressuriseur à sable opérationnel.
     En dehors de ces points, aucune information concernant le dossier technique relatif au fonctionnement, à la maintenance, à la fiabilité, à l'efficacité de ce dispositif et à sa qualification sur le site de Golfech n'a été communiqué à la CLI comme elle le demandait.
     Par ailleurs, Monsieur Auverlot, qui représentait lors de la réunion de la CLI du 23 février 1990, le Service de Sûreté des Installations Nucléaires (Ministère de l'Industrie et de l'Aménagement du Territoire), s'est alors engagé à communiquer à la CLI l'échange de courrier qui a eu lieu entre ses services et EDF.
     Ceci n'a pas été fait.

p.8
7. P. Tanguy, Inspecteur Général de Sûreté, EDF - Sûreté Nucléaire 1989 - Rapport de l'Inspecteur Général, chap. 4, «Procédures ultimes et plans d'urgence».
8. Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques, Rapport sur les conséquences de l'accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl et sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, J.M. Rausch, R. Pouillé, 17/12/87, § 2,3,4.
9. CLI, Protection des populations en cas d'accident grave survenant à la centrale électronucléaire de Golfech, -2-, «Le risque d'explosion d'hydrogène, la tenue de la cuve du réacteur et la tenue de l'enceinte de confinement".

UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS "QUE CHOISIR?"
DU TARN-ET-GARONNE
PROBLÈME DU TRITIUM
Note concernant le compte rendu de la réunion départementale de l'environnement du vendredi 15 septembre 1989.

     Le compte rendu de la réunion départementale de l'environnement appelle un certain nombre de questions et d'observations qui portent sur l'information, la protection des populations et les modalités de fonctionnement de la centrale électro-nucléaire de Golfech.

1. L'information des populations
1.1. Contamination et surveillance de l'environnement
     A. «Le point zéro concernant Golfech pourra être connu avant la divergence de la centrale dès lors que les pouvoirs publics publient mensuellement sur minitel (3614 code MAGNUC) les résultats des mesures de radioactivité autour des sites nucléaires» (p. 4).
     Les résultats relatifs au point zéro ne sont pas actuellement disponibles sur minitel. Quand le seront-ils?
     Les résultats des mesures effectuées régulièrement dans l'environnement de la centrale après sa mise en service seront-ils communiqués en temps réel (en continu pour le rayonnement g, quotidiennement pour les aérosols atmosphériques, mensuellement pour les autres prélèvements, après chaque rejet pour l'eau de la Garonne en aval du site)?
     B. «[...] Question ayant trait à l'alimentation en eau potable à partir de la Garonne en aval de Golfech et à l'existence effective de solutions de rechange pour l'approvisionnement des populations [...]. Le premier aspect [de ce problème] est d'ordre technique: c'est celui du dimensionnement de l'accident. Une étude à ce sujet, conduite par l'IPSN, est disponible depuis le mois dernier [...]» (p. 6).
     Où cette étude peut-elle être consultée?

     C. «Après avoir précisé que 10% du tritium rejeté était susceptible d'être intégré, Madame le docteur Raymond indique [...]» (p. 7)
     (a) Qu'il s'agisse des rejets liquides ou gazeux, c'est sous forme d'eau tritiée (tritium remplaçant dans la molécule d'eau un des deux atomes d'hydrogène) que le tritium rejeté par les centrales est au départ incorporé par les organismes vivants. Une partie de ce tritium est réparti rapidement dans l'eau intra- et extra-cellulaire (3 ou 4 heures après l'ingestion chez l'homme «standard» de 70 kg) et de manière homogène dans l'ensemble des fluides de l'organisme; il s'élimine progressivement (la moitié a disparu au bout de 4 à 18 jours)[l,2].
     Une autre partie est incorporée aux organismes vivants d'une manière beaucoup plus durable et plus préoccupante sur le plan sanitaire; il s'agit du tritium «organiquement lié».
     Il est inexact d'affirmer que cette fraction représente 10% de l'activité intégrée en tritium.
     En effet, des travaux ont montré que:
     - En cas d'absorption d'eau tritiée, la part de tritium qui sera intégrée à la matière organique peut varier de manière considérable selon le règne (végétal ou animal), selon l'espèce, selon la partie et le tissu (du végétal, de l'animal) considérés.
     Ainsi, la racine de carotte intègrera à sa matière organique environ 10% du tritium qui a été ingéré, contre plus de 60% pour le grain de petit pois[3]. Chez le rat, la fraction de tritium retenue par le foie après une administration unique d'eau tritiée représente environ 1/100.000e du tritium administré contre 1/100e (1%) pour la moelle épinière[1].
     - Lorsqu'il est intégré à certaines molécules organiques telle la thymidine, son temps de séjour dans l'organisme est beaucoup plus long que lorsqu'il reste sous forme d'eau tritiée (sa période biologique est alors de 400 à 600 jours)[4].
p.9

     Pami la quantité de tritium intégré à la matière organique des végétaux, 80% est intégré dans les molécules de structure (lignine, cellulose...), c'est-à-dire à demeure (on parle de tritium «non labile»). Sa période biologique est alors la même que sa période physique (12,3 ans)[5].
     Il y a de ce fait dans les organismes vivants une accumulation de tritium organiquement lié.
     Ainsi, à New York, l'alimentation contient 4 fois plus de tritium lié que de tritium non lié (c'est-à-dire présent sous forme d'eau tritiée)[6]. On trouve deux fois plus de tritium lié en moyenne (avec des pointes à 3,80 voire 4,4 fois plus) que de tritium non lié dans les graminées et les vignes de la vallée du Rhône (région de Pierrelatte et Marcoule)[5].
     - De plus, l'activité intégrée dans les tissus est plus importante après ingestion de nourriture elle-même tritiée qu'après ingestion d'eau tritiée: 6 fois plus chez le porc après ingestion de lait en poudre tritié, 14 fois plus après ingestion de pommes de terre tritiées[7].
     (b) L'homme absorbe lui aussi du tritium de deux manières: par absorption d'eau tritiée et par consommation de nourriture déjà contaminée en eau tritiée mais aussi et surtout en tritium organiquement lié dont, nous venons de le voir, l'importance va croissante.
     Mais il ne suffirait pas de connaître la part du tritium absorbé qui est effectivement intégrée par l'organisme pour être en mesure d'en apprécier la toxicité.
     Celle-ci dépend en effet de multiples facteurs: nature des molécules auxquelles est intégré le tritium, taux d'incorporation, taux de renouvellement de ces molécules dans l'organisme et du tritium dans ces molécules, espèce végétale ou animale considérée, sexe, modalités de la contamination, efficacité biologique du rayonnement émis par le tritium, etc...
     Ces données sont dans l'ensemble inexistantes[1]. On sait cependant que:
     - La toxicité du tritium est considérablement augmentée (jusqu'à 5.000 fois chez les embryons de rongeurs) lorsque celui-ci est intégré à certaines molécules biochimiques: à l'acide folique[8], à la leucine (qui interviendra dans l'élaboration des protéines - on parle de «précurseur»), à l'euridine (précurseur de l'acide ribonucléique ou ARN) ou à la thymidine (précurseur de l'acide désoxyribo-nucléique ou ADN)[9,10,11].
     Le tritium peut également être fixé sur d'autres molécules telles celles des hormones sexuelles[12] ou des corticostéroides[13].
     - Les effets du tritium peuvent se manifester de manière spécifique sur la descendance:
     * diminution du nombre d'oocytes (précurseurs des ovules) chez la souris femelle après ingestion par la mère d'eau tritiée pendant la période de gestation (passage de la barrière placentaire)[14,15].
     * apparition de tumeurs à partir de la 8e génération chez des populations de souris dont les ascendants mâles ont ingéré de l'eau tritiée avant la conception[16].
     - Pour de faibles doses de tritium intégrées, les cellules germinales femelles sont quatre fois plus sensibles chez le singe, animal plus proche de l'homme, que chez le rongeur[15].
suite:
     - A de faibles niveaux d'exposition, le tritium est, à niveau d'exposition égal, plus destructeur des oocytes de la souris que les rayons g émis par le cobalt 60 (celui-là même est utilisé en radiothérapie)[17].
     (c) Enfin, la toxicité du tritium étant fonction de la quantité absorbée, il convient de faire remarquer que la quantité de tritium rejetée dans l'environnement (atmosphère, milieux aquatiques) est considérable.
     En ce qui concerne les centrales électro-nucléaires, elle est en France de l'ordre de 1.500 curies (555 X 1011 becquerels) pour une centrale de type PWR (l'essentiel du parc nucléaire français) de 1.000 MWe (les centrales françaises font en général 900 ou 1.300 MWe). Pour ce même type de centrale, on estime qu'il produit 20.000 à 80.000 curies (74.1013 à 3.1015 becquerels) par an, essentiellement dans le cœur du réacteur, et que 80% environ de ce tritium sera lui relâché dans l'environnement de manière incontrôlée après que le combustible usagé ait été retiré du cœur (1/3 du combustible est ainsi remplacé chaque année) - soit au cours d'un stockage prolongé, soit lors des opérations de retraitement sur le site de retraitement des combustibles irradiés.
     Dans le cas où le combustible n'est pas simplement de l'uranium 235 enrichi mais un mélange d'uranium enrichi et de plutonium (mélange «Melox»), la quantité de tritium produit et donc relâché dans l'environnement est plus importante.
     La contamination de l'environnement mondial par les seuls rejets contrôlés des réacteurs nucléaires est estimée à près de 1 mégacurie (37.1015 becquerels) par an[18].
     «Il s'agit du radioélément le plus facilement métabolisable qui soit, et qui est de plus rejeté en quantité considérablement plus importante - gaz rares exceptés - par la plupart des installations»[19].
     Quant aux réacteurs à fusion sur lesquels travaillent actuellement les laboratoires de recherche, ils rejetteraient dans l'environnement 10.000 fois plus de tritium que les actuels réacteurs à fission[20].
     Les autres sources de contamination de l'environnement par le tritium sont les suivantes:
     - liées aux programmes militaires: les esais atmosphériques, qui ont été une source de contamination considérable, les flottes militaires, les bases de stockage d'armes nucléaires...
     - les usages médicaux (radiodiagnostics) et industriels (chromatographie gazeuse, peintures et interrupteurs lumineux, recherches de gisements de pétrole ou de gaz, études hydrologiques...)
     - les usages domestiques (exemple: montres et réveils lumineux, où le tritium a remplacé le radium utilisé précédemment; une montre contient entre 50 et 200 millicuries de tritium, dont environ 0,1% disparaît chaque année, ce qui représenterait une perte globale de 10 kilocuries pour 100 millions d'utilisateurs[21].
p.10

     La quantité de tritium retrouvée dans l'environnement et dans la chaîne alimentaire est directement liée à la quantité rejetée.
     Ainsi, avant l'avènement de la technologie nucléaire, les eaux de surface contenaient environ 6 à 24 picocuries (0,2 à 0,8 becquerels) de tritium par litre. Pendant la période des essais nucléaires, elles en contenaient plusieurs milliers (de l'ordre de 100 à 200 becquerels) par litre[22]. On trouve aujourd'hui dans les eaux de la Meuse, en aval de la centrale de Chooz, des concentrations de 750 à 1.000 picocuries soit 28 à 37 becquerels de tritium par litre (soit 100 fois plus qu'avant l'époque de la technologie nucléaire), avec des pointes à plusieurs milliers de picocuries (100 à 200 becquerels).
     On estime que localement un litre de lait contiendra, après la mise en service de la centrale électro-nucléaire de Golfech (2 tranches), plus de 600 becquerels de tritium par litre (proportion d'eau tritiée et de tritium organiquement lié non précisée)23.

1.2. Problèmes sanitaires
     A. «Aucun pays au monde n'a mené une enquête épidémiologique» (Mme le docteur Raymond, p. 7).
     Cette affirmation, pour être imprécise, n'en est pas moins erronée, comme en témoigne par exemple la communication faite par le docteur J. Lafuma, Chef du Département de Protection Sanitaire, IPSN-CEA lors du Colloque «Nucléaire: Santé-Sécurité» qui s'est tenu à Montauban en janvier 1988:
     «L'étude des populations anglaises autour des sites nucléaires - Cette étude a été confiée par le gouvernement britannique à l'équipe d'Oxford, dont le responsable, Mr Doll, est le père de l'épidémiologie en cancérologie [...]».
     B. «Les recherches déjà conduites dans ce domaine n'ont apporté aucune preuve de l'effet nocif des faibles doses d'irradiation» (p. 7) (Idem, p. 7)
     (a) sur le plan méthodologique: de par sa nature même, une étude épidémiologique n'apporte pas de preuves; elle peut simplement faire apparaître l'existence de corrélations entre plusieurs phénomènes, sans qu'il soit possible d'établir entre eux des relations de cause à effet. Seules les études expérimentales sont susceptibles d'apporter cette preuve (J. Lafuma, déjà cité).
     (b) sur le fond: si les conclusions des enquêtes épidémiologiques ne convergent pas toutes, nombre d'entre elles ont cependant fait apparaître des corrélations positives entre une exposition à de faibles doses de rayonnement et diverses pathologies cancéreuses. On peut citer parmi elles:
     - L'étude des populations anglaises autour des sites nucléaires (J. Lafuma, déjà cité):
     «Sans qu'il soit possible de parler de relations de causalité, on observe quelque chose d'indiscutablement significatif pour la leucémie lymphoïde du jeune autour des installations nucléaires britanniques» (p. 194)
     - Exposition au tritium dans l'industrie nucléaire britannique et multiplication par 13 du taux de cancers de la prostate (V. Beral et al., British Medical Journal, n° 291, 1985).
     - Population sous le vent de l'usine nucléaire de Rocky Flats (Colorado, USA) et accroissement du taux de mortalité par cancers en fonction de la distance à l'usine (c. Johnson, «Evaluation of cancer incidence for anglos in the period 1969-1971 in areas of census tracts with measured concentrations of plutonium soil contamination downwind from the Rocky Flats Plant in the Denver standard metropolitan statistical area», International Radiation Protection Association, Je Congrès International, Jérusalem, Israël, 9-14 mars 1980.

suite:
     - Cancers d'enfants et niveaux de radioactivité naturelle en Grande-Bretagne (G.W. Kneale, A. Stewart, «Childhood cancers in the United Kingdom and their relation to background radiation», Radiation and Health, Ed. R.R. Jones and R. Southwood, J. Wiley, 1987).
     - Travailleurs de l'usine nucléaire américaine de Hanford (USA) et taux de cancers (T.F. Mancuso, A.M. Stewart, G.W. Kneale, «Hanford 1: Radiation exposures of Hanford workers dying from cancer and other causes», Health Physics, 1977, 33, p. 369).
     - Travailleurs des chantiers de réparation des sous-marins nucléaires de Portsmouth (Massachussets, USA) et mortalité par cancer (T. Najarian, T. Colton, «Mortalit y from leukaemia and cancer in shipyard nuclear workers», The Lancet, 13 mai 1978, pp. 1018-1020.
     - Résultats récents du suivi des survivants Japonais des bombardements d'Hiroshima et Nagasaki (E.P. Radford, «Recent evidence of radiation induced cancer in the Japanese atomic bomb survivors», Radiation and Health déjà cité; en traduction dans Santé et Rayonnement, GSIEN-CRIIRAD, janvier 1988).
     C. «On ne peut établir un point zéro sanitaire» (p. 7) Cette affirmation est pour le moins étrange et aurait demandé à être justifiée.
     D. La formation des médecins
     «Mme le docteur Raymond indique qu'elle s'effectue en deux étapes d'une journée chacune [...]. D'une part une formation théorique en matière de radioprotection, d'autre part [...]» (p. 8)
     (a) Qui anime ces journées?
     (b) Peut-on penser sérieusement former un médecin en une journée sur un sujet aussi vaste et complexe?

II. La protection des populations
II - l. La gestion de l'accident
     A. «La décision de procéder à l'évacuation de la population ne correspond pas à un accident de niveau 3. Cette évacuation peut être décidée à partir d'une dose globale intégrée de 5 rems (...)». (p. 3)
     (a) A partir de quelle dose globale intégrée et pour quelles populations (localisation, dimension) peut-on parler d'accident de niveau 3?
     (b) Dans sa publication n° 26 de 1977, la Commission Internationale de Protection Radiologique spécifie (article 127) que «lorsqu'on calcule l'équivalent de dose qui résulte pour les personnes du public d'une incorporation de radionucléides, il faut tenir compte de ce que les dimensions des organes et les caractéristiques métaboliques sont différentes chez les enfants».
     A partir de quelle dose globale intégrée par les enfants serait-il décidé de leur évacuation?
     Rappelons qu'une dose globale intégrée de 5 rems correspond à la dose maximale annuelle tolérée pour les travailleurs, et que c'est la dose maximale qui a été admise en 1985 par la Commission Internationale de Protection Radiologique pour le public pour toute une vie d'adulte (0,1 rem par an pendant 50 ans).
     (c) Rappelons également qu'en cas d'accident radiologique, les populations sont susceptibles non seulement de subir une irradiation externe, mais également d'inhaler ou d'ingérer des radioéléments qui seront à l'origine d'une irradiation interne pendant, et surtout au cours des mois et des années qui suivront l'accident. Cette contamination viendra s'ajouter à l'irradiation externe. Mais elle n'est pas prise en compte dans l'estimation des doses d'irradiation reçues par les populations exposées, donc dans la décision d'évacuation.

p.11

     (d) «Précisons enfin qu'une telle décision d'évacuation pourra être prise à partir d'une dose globale intégrée de 5 rems, mais que l'on pourra attendre, pour prendre cette décision, que la dose globale intégrée ait atteint jusqu'à 50 rems» (?!) (Réponse de Mr le Préfet de Tarn-et-Garonne à Questions Posées par les Membres d'Associations de Protection de l'Environnement, septembre 1989).
     B. «Sur la base des résultats d'analyses susceptibles d'être connus dans les 24 heures, toutes directives utiles pourraient être données prévoyant le cas échéant l'interdiction de la consommation de certains produits» (p. 4).
     Le transfert de l'iode dans le lait est très rapide (moins de 24 heures). Il faut donc envisager une information des populations dans des délais inférieurs à 24 heures.

II.2. La gestion des rejets en fonctionnement normal
     A. «Les normes [de Cattenom] prévoient [ ... ] un seuil de 0,37 becquerel par litre à ne pas dépasser ainsi qu'une limite annuelle en concentration instantanée de 1,48.1012» (p. 7)
     (a) Il convient de préciser 0,37 becquerel par litre pour tous les radioéléments autres que le tritium et pour une seule trancche (Journal Officiel du 17 août 1989, p. 10322).
     (b) A quoi correspond 1,48 x 1012 becquerels maximum?
     En tout état de cause, il est prévu pour chacune des tranches 3 et 4 de Cattenom une limite annuelle de 40.1012 becquerels par an en tritium et 0,55.1012 becquerels par an hors tritium (Idem).
     B. «Les normes allemandes prévoient des dérogations au cas par cas. Ces dernières ont été d'ailleurs en partie reprises dans les arrêtés concernant la centrale de Cattenom qui prescrivent l'information immédiate des autorités compétentes en cas de dépassement» (p. 7).
     Cette formulation est inexacte. Les normes prévues pour les tranches 3 et 4 sont toujours, pour les radioéléments autres que le tritium, le potassium 40 et le radium, 5 fois plus élevées que les normes allemandes.
     Mais l'exploitant est explicitement invité à n'en pas dépasser les 1/5e et à signaler au SCPRI (Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants) tout dépassement de ce 1/5e en indiquant les mesures qu'il compte prendre pour éviter son renouvellement (J.O. déjà cité).
     De plus, cette dernière disposition n'apporte rien à la réglementation existante selon laquelle les exploitants de centrales nucléaires sont tenus de communiquer au SCPRI tous renseignements concernant les rejets qu'ils effectuent dans l'atmosphère ou dans le milieu aquatique (Journal Officiel du 12 septembre 1976, arrêtés d'aplication des décrets n°74-945 et 74-1181 des 15 novembre 1974 et 31 décembre 1974 respectivement).
     C. «Le 2e aspect du problème résulte de la présence d'une importante agglomération à l'aval de la centrale, en l'occurrence Agen. Cette situation implique effectivement la nécessité de rechercher toutes les possibilités de diversification de l'alimentation en eau potable notamment par l'interconnexion des réseaux de distribution» (p. 6)
     Il est incompréhensible que cette nécessité n'ait pas été perçue avant l'époque de la mise en service de la centrale.

suite:
III. Modalités de fonctionnement de la centrale
111.1. Le débit d'étiage de la Garonne
     A. «Mr. Hirtzman indique que [...] la période d'étiage coïncide généralement avec des besoins réduits de consommation électrique» (p. 6)
     Concernant la situation présente, Mr le Préfet ne partage pas ce point de vue lorsqu'il évoque «la perspective d'un étiage (basses eaux) automnal éventuellement très sévère» et insiste sur «la réalité du problème et sur le fait qu'il convient d'accroître les ressources en eau» (idem).
     B. Il est signalé que «EDF pourra compenser à partir des barrages prévus (Lunax, 1992) ou existant sur la Garonne ou le Tarn jusqu'à cette date les débits évaporés de la centrale [...] lorsque le débit d'étiage sera inférieur à 90 m3/seconde» (p. 5)
     (a) Quel a été le débit d'étiage pour septembre et octobre 1989?
     (b) Jusqu'à quel débit d'étiage les barrages existants peuvent-ils compenser les débits évaporés sur la centrale?
     III.2. Les crues
     «Mr. Bourjade est amené à préciser qu'une limitation des rejets est également prévue au-delà d'un certain seuil» (p. 5). Ce seuil (fixé par le SCPRI) n'est pas connu du public. Quel est-il?

     IV. Questions posées au cours de la réunion dont il n'est pas fait état dans le compte rendu
IV.1. Disponibilité locale en iode stable en cas d'accident radiologique 
(question posée par le Comité Tchernobyl-Golfech)
     Réponse: Il n'est pas question que de l'iode soit stocké sur place: des quantités suffisantes sont disponibles auprès du SCPRI (Le Vésinet, Yvelines) et seront en cas de besoin acheminées.
     (a) Ceci est contraire aux propos tenus à Montauban par Mr le Professeur Huguenard, Chef du Service de Réanimation-Chirurgie de l'Hôpital Henri-Mondor de Créteil (94), Vice-Président de la Société Internationale et Président de la Société Française de Médecine de Catastrophe, Responsable du SAMU du Val de Marne, le 23 janvier 1988 dans le cadre du Colloque «Nucléaire: Santé-Sécurité»:
     «En ce qui concerne les stocks d'iode, alors que tout ce qui concerne le département est l'affaire du Préfet, il se trouve que dans ce cas particulier, la responsabilité en incombe aux pharmacies d'hôpitaux: ce sont elles qui doivent avoir constitué les stocks d'iode. Ceux-ci doivent faire partie des Postes de Secours Mobiles (les PSM stocks de médicaments) qui sont en cours de reconstitution sous l'autorité du Haut Fonctionnaire de la Défense au Ministère de la Santé» (Actes du Colloque «Nucléaire: Santé-Sécurité», p. 494).
     (b) Où en est aujourd'hui la constitution de ces stocks d'iode?
     (c) Il est en effet nécessaire de disposer sur place de tels stocks car «la prévention de l'irradiation thyroïdienne par l'administration d'iodure est efficace à condition d'être précoce» (M. Schlumberger, N. Parmentier, J. Chavaudra, C. Parmentier, M. Tubiana, «Conduite à tenir en cas de contamination par les radio-isotopes de l'iode», La Revue du Praticien, 8/10/1987, pp. 2449-2455). 

 p.12

IV.2. En cas d'accident radiologique nécessitant un confinement ou une évacuation, comment les populations rurales isolées seront-elles informées, à leur domicile ou sur leur lieu de travail?
     (Question posée par l'Union Fédérale des Consommateurs de Tarn-et-Garonne)
     Réponse: Cinq ensembles mobiles d'alerte seront spécialement équipés pour ce faire.
     Remarque de l'UFC: Il est utopique, en milieu rural, de penser pouvoir atteindre toutes les personnes isolées.
     IV.3. En cas d'accident radiologique nécessitant le confinement des troupeaux, l'UFC (a) fait observer que de nombreux agriculteurs ne sont pas équipés pour assurer un réel confinement; (b) demande quelles consignes seront données aux agriculteurs et selon quelles modalités dans l'éventualité où le lait serait contaminé et impropre à la consommation
     Réponse: Le lait sera jeté. Ceci donnera sûrement lieu à une indemnisation
     Remarque: Cette question n'a fait l'objet que d'une réponse partielle et imprécise.
1) L. JEANMAIRE, J. PIECHOWSKI, Mélabolisme et toxicilé du Tritium - Moyens de surveillance des expositions, CEA-IPSN, 1987.
2) Commission Internationale de Protection Radiologique, Publicalion n°30, 1979. 
3) Transfert à la ration alimentaire du tritium émis par les installations nucléaires, CEA-Cadarache/CEN de Mol, Belgique/Université agronomique de Wageningen, Pays-Bas, 1979. 
4) A.L. CARSTEN, ««Tritox» - A multiple-parameter evaluation of tritium toxicity», EULEP Symposium, CEE, Luxembourg, 1984. 
5) Etude expérimenlale de la mesure du Tritium organique dans les chaînes alimentaires - Applications aux réseaux de surveillance de l'environnement, CEA-IPSN, 1985. 
6) D.C. BOGEN, G.A. WELFORD, C.G. WHITE, «Tritium distribution in man and environment (IAEA-SM 232/75»), AEIA, OCDE, AEN, "Behaviour of Tritium in the environment". San Francisco, 16-20 octobre 1979, Vienne, AIEA, pp. 567-574. 
7) R. KIRCHMANN, P. CHARLES, R. Van BRUWAENE, J. REMY, G. KOCH, J. Van DENHOECK, «Distribution of tritium in different organs of calves and pigs after ingestion of various tritiated feeds», Current Top. Radiation Research, 12, pp. 291-312, 1977. 
8) B.E. LAMBERT, R.J. CLIFTON, «Radiation doses resuliting from the administration of tritiated folic acid and tritiated water to the rat», British Journal of Radiology, 1967,40, pp. 56-61. 
9) B.E. LAMBERT, R.J. CLIFTON, «Radiation doses resulting from the ingestion of tritiated thymidine by the rat», Health Physics, 1968, 15, pp. 3-9. 
10) T. RYTOMAA, J. SALTEVO, H. TOIVONEN, «Radiotoxicity of tritium labelled molecules», Symposium de l'Agence Internationale pour l'Énergie Atomique (AEIA), Vienne, 1979. 
11) T. YAMADA, O. YUWAKA, «Changes in sensitivity of mouse embryos during the pronuclear and the 2-cell stage», EULEP Symposium CEE, Luxembourg, 1984. 
12) J. VENNART, «Radiotoxicology of tritium and carbone 14 compounds», Health Physics, 1969, 16, pp. 429-440. 
13) M. STANDEVEN, D. CLARKE, «Estimation of radiation doses to tissues after administration of tritiated corticosteroids to the rat», British Journal of Radiology, 1967, 40, pp. 48-55.
suite:
14) Z. PIETRZAK-FLIS et al., «Tritium incorporation in rats chronically exposed to tritiated food or tritiated water for three generations», Journal of Radiation Research, 1982, 22, pp. 434-442. 
15) R.L. DOBSON, «The toxicity of tritium», IAEA Symposium on Biological implications of radionucleides released from nuclear reactors, Vienne, 1979. 
16) Travaux du Professeur D.J. MEWISSEN, Unité de Radiologie, Université de Chicago. 
17) R.L. DOBSON, T.C. KWAN, «The RBE of tritium radiation measured in mouse oocytes: increase at low exposure levels», Radiation Research, 1976, 66, pp. 615-625. 
18) F. LUYKX, G. FRASER, Radioactive effluents from nuclear power Stations and nuclear fuel reprocessing plants in the European Community: Discharge date, 1976-1980, Commission des Communautés Européennes, Luxembourg (1983). 
W.J. MASSCHELEIN, J. GUENOT, «Impact of nuclear power plants of the PWR-type on river water quality», Actes du Congrès de l'IAWPR, Le Cap, Pergamon Press (1982). 
NCRP (Conseil National de Protection Radiologique des Etats-Unis), Tritium in the environment, Washington, 1979. 
NEA (Nuclear Agency of OESO), Radiological significance and management of Tritium, carbon-14, krypton-85 and iodine-129 arising from the nuclear fuel cycle, Paris, 1980. 
H. STROM, Friedlich in die katastrofe, Francfort, 1981. 
19) H. CAMUS, C. SIMEON, D. CARRERE, Méthodologie d'étude de la sensibilité de l'environnement face aux rejets des industries nucléaires, CEN-Cadarache/La Blachelle-Pierrelatte, CEA. 
20) A.A. MOGHISSI, in H.J. BURKI et a1., «Tritiated uracil, tritiated thymidine, and bromodeoxyuridine-induced mutations in eucaryotic cells», Symposium de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AEIA), Vienne, 1979. 
21) G. Van GINKEL, Tritium in de biosfeer: een lileraturstudie, Ultrech, 1976. 
22) UNSCEAR (Comité Scientifique des Nations Unies sur les Effets des Rayonnements Atomiques), Exposures resulting from nuclear explosions, A/AC.82/R 399, New York, 1981. 
23) Rapports établis à la demande d'EDF par la Section de Radioécologie du Centre Electro-Nucléaire de Cadarache (CEA) dans le cadre de l'élaboration du dossier destiné à introduire la demande de déclaration d'utilité publique de la Centrale Electro-Nucléaire de Golfech (1978, p. 148).

CEA = Commissariat à l'Energie Atomique 
CEE = Commission des Communautés Européennes.
 


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