La G@zette Nucléaire sur le Net!
N°127/128
NOUVELLES DE GENSUIKIN
Tokyo, 16.4.93


     Récemment le gouvernement Japonais a passé outre aux nombreuses critiques (émises dans le monde entier), en autorisant le transport d'une quantité énorme de Plutonium, par le bateau Akatsuki-Maru. A présent, le gouvernement est sur le point de lancer la construction de la plus grande usine de retraitement du monde.
     Malgré le fait que la mise en route de "Monjyun, un prototype de surgénérateur ait été retardée, et que le programme national d'utilisation de Plutonium doive être réexaminé, le gouvernement japonais a accordé, le 24 décembre 1992 le permis de construire à l'usine de retraitement prévue près du village de Rokkasho, dans le préfecture d'Aomori. La construction doit débuter ce printemps. Les quantités de combustible irradié, retraitées annuellement, seront de 800 tonnes. Etant donné que le nouveau plan de construction de l'usine ne comporte plus de programme de filtrage du Krypton 85, et qu'en conséquence, ce gaz dangereux sera libéré dans l'air, une nouvelle vague d'indignation secoue les populations. En plus, le 15 janvier 1993, un grand tremblement de terre s'est produit - magnitude 7,9 sur l'échelle de Richter - dont l'épicentre était en mer, à l'Est de Aomori. Ses effets ont également fortement été ressentis à l'Est de la préfecture de Aomori, où se trouve le village de Rokkasho. Etant donné que la future usine de retraitement est située au-dessus d'une faille (mise à jour 2008!), la crainte et l'anxiété croissent parmi les Japonais.
     Nous souhaitons vous informer des actions actuelles entreprises au Japon, autour du Plutonium.
     Le 13 mars 1993, deux manifestations se sont déroulées dans la ville d'Aomori. Le matin, une manifestation, convoquée inopinément pour protester contre le début de la construction de l'usine de retraitement a rassemblé 300 personnes. Il y a eu beaucoup de messages de l'étranger. L'après-midi, les paysans d'Aomori ont organisé une manifestation qui a rassemblé environ 2.000 personnes. y compris des syndicalistes ainsi que les manifestants du matin.
     Le 14 mars une manifestation de protestation contre la construction de l'usine a eu lieu au village de Rokkasho.
     Les 10 et 11 avril, alors que le début de la construction était imminent, Gensuikin, Jichiro, (syndicat des fonctionnaires de toutes les préfectures et municipalités du Japon), le Conseil des Syndicats d'Aomori, et d'autres ont organisé plusieurs manifestations pour protester contre la construction de l'usine de retraitement. Le matin du 10 avril, Jichiro a organisé une manifestation de 1.500 participants. L'après-midi, le Bureau Exécutif du mouvement anti-nucléaire d'Aomori (comprenant le bureau d'Aomori du Parti Socialiste Démocatique du Japon et le Centre Kenpyo d'Aomori) a organisé une manifestation rassemblant 4.100 participants environ.
     Ce soir-là, à Aomori, une réunion spéciale des délégués et militants opposés au cycle du plutonium, a rassemblé 130 participants venus de tout le Japon. Plusieurs propositions ont été faites. L'une est que Gensuikin achète un terrain à Ohma, Préfecture d'Aomori, sur le site même de la construction du réacteur de l'ATR (Advanced Thermal Reactor). Cette proposition a bien entendu l'objet d'empêcher la construction de l'ATR, qui recherche une utilisation "pratique" allégée d'un réacteur surgénérateur.
     Une manifestation nationale, demandant l'arrêt de la construction de Monjyu aura lieu les 2 et 3 octobre 1993.

Appel du Comité Exécutif de Gensuikin
pour la 48e Conférence Mondiale de Gensuikin
     Il existe actuellement une quantité immense de victimes du nucléaire, "Hibakushasn" dans le monde. Leur nombre est évalué à plus de 25 millions. Il suffit de penser aux dommages causés par les essais nucléaires et l'accident de Tchernobyl. Il est impossible de décrire entièrement la gravité des problèmes liés à ces incidents.

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Nous voyons que ces "Hibakushas" souffrent des conséquences de toutes les phases du cycle nucléaire, en commençant par les mines d'uranium jusqu'à la gestion des déchets. Le nombre de Hibakusha ne cessera de croître si nous n'interrompons pas le cycle du nucléaire.
     Nous affirmons depuis longtemps que "les êtres humains ne peuvent coexister avec la technologie nucléaire" et avons cherché à faire connaître l'agonie et les souffrances des "Hibakushas" du monde. Ce sont les "Hibakusha" qui mettent en accusation toutes les phases du cycle du nucléaire, à cause des dangers qu'elles impliquent, et qui veulent une société et un avenir libérés du nucléaire. En cherchant à introduire une "Loi d'Assistance aux Hibakushas", basée sur le principe d'une indemnité nationale, les Hibakushas de Hiroshima et de Nagasaki veulent également éviter la répétition d'un désastre nucléaire.
     Depuis la fin du système de Guerre Froide, beaucoup de problèmes qui étaient restés cachés pendant la Guerre Froide ont fait surface. Il s'agit en particulier des problèmes des victimes de radiations de l'ancienne Union Soviétique, ainsi que des problèmes de réparations de la Seconde Guerre Mondiale entre le Japon et ses voisins. Mais nous sommes assaillis par d'autres problèmes, comme les conflits ethniques, la famine et la misère, ainsi que des problèmes écologiques non résolus.
     Bien que nous saluions les grands progrès enregistrés dans les négociations pour la réduction des Armes Nucléaires Stratégiques, entre les Etats-Unis et la Fédération des Républiques Russes, ces deux pays possèdent encore, à eux deux, 3.000 armes stratégiques. En ce qui concerne les armes atomiques du Royaume Uni, de France ou de la République Populaire de Chine, il n'y a aucune réduction de leur nombre. En plus de cela, Israël est devenu une puissance nucléaire, sans que nous ne nous en soyons aperçus.
     En mars 1995, le Traité de Non Prolifération vient à expiration. Bien que nous demandions sa révision et sa prolongation, nous voulons aussi un programme concret pour l'élimination des armes atomiques. Ce plan devrait comprendre le Traité d'Interdiction Total des Essais Nucléaires. L'arrêt de la production de matériel nucléaire à usage militaire comme le Plutonium et le respect des zones dénucléarisées. Maintenant que la Guerre Froide est finie, nous avons la possibilité d'avancer rapidement sur la voie de l'abolition des armes atomiques.
     De même, il est très important pour nous de promouvoir un désarmement général dans la région Asie-Pacifique. Nous n'avons, à ce jour aucun lieu où nous puissions discuter de ces problèmes dans la région. Dans le cadre de la "sécurité commune", nous devrions discuter des questions suivantes : dénucléarisation de la péninsule coréenne, réunification et paix dans les deux Corées.
     Nous sommes extrêmement inquiets de voir que le Japon devient une société utilisant de grandes quantités de Plutonium Nous devons demander l'arrêt de quelques centrales nucléaires vieillies et ayant des défauts structurels, ainsi que la suppression de toute nouvelle construction. En plus, nous devons accélérer notre campagne en faveur d'une "société dénucléarisée, sans Plutonium" afm d'échapper aux dangers liés à la production, l'utilisation et le transport de Plutonium. Nous devons nous engager à entreprendre des efforts pour les économies d'énergie, visant à l'instauration d'une société dénucléarisée.
     La fin de la Guerre Froide a fondamentalement modifié notre perspective du monde. Plus précisément, le changement continue et doit continuer.
     Nous devrions saisir cette chance de créer un monde pacifique, symbiotique et dénucléarisé.
     Nous vous invitons à venir assister à la 48e Conférence Mondiale de Gensuikin, qui se tiendra à Hiroshima, Nagasaki et Okinawa du 4 au 12 août 1993.
Le Président de Gensuikin:
Ichiro MORITAKI
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Nouvelle Zemble:
une poubelle nucléaire explosive
dans l'océan arctique
     En posant les problèmes des déchets nucléaires, civils et militaires en France dans le dernier numéro de notre revue, nous avons balayé devant notre porte. Cela nous donne le droit de nous interroger sur le drame écologique nucléaire russe. En partant en mission à Moruroa, nous avons privilégié les séquelles des essais nucléaires français. Cela nous donne le droit d'examiner ici le devenir d'une autre île victime des essais La Nouvelle Zemble, située au-delà du 60ème parallèle, entre la mer de Barents et la mer de Kara.
     Car la folie nucléaire est une maladie planétaire, et le désarmement une tâche internationale. Car l'accumulation des déchets venant justement de ces ex-armes, ou des ex-sous-marins nucléaires, peut être dangereuse, sans précautions, pour nous et nos enfants, au-delà des frontières.
     Nous avons quelques mois, laissé par le cessez-le feu nucléaire décidé par les moratoria, pour agir avec force et empêcher les cimetières atomiques d'être des foyers futurs de morts. Une fois de plus, la solution se trouve dans la prévention, une fois de plus, nous sommes, en tant que médecins, en première ligne.
     C'est aujourd'hui la tâche prioritaire de l'IPPNW, et nous à l'AMFPGN, nous saurons enprendre notre part.
A. BEHAR
I. Le polygone de tir en Nouvelle Zemble
     Cette île, située au-delà du cercle polaire, a été vidée de ses habitants pour être, selon la "circulaire no 700", le centre secret des essais atomiques dès 1955. Deux périodes s'ouvrent alors:
     - Les essais atmosphériques de 1955 à 1962: Ils vont se succéder sans répit, par exemple, 23 essais en 1961, 36 en 1962! et ceci avec des fortes énergies, jusqu'à plusieurs mégatonnes par essais. La technique est celle du bombardement aérien, mais l'engin est testé d'un parachute pour laisser le temps à l'avion de se mettre à l'abri. Quelques essais dans l'eau sont tentés en 1961, mais vite abandonnés.
     - Les essais souterrains de 1964 à 1990: La technique est très différente de celle utilisée en Polynésie. Ici, l'engin est placé dans un tunnel creusé dans une mine désaffectée, seulement à 500 m de profondeur, avec un confinement très relatif puisqu'il existe des émanations de gaz radioactif à la surface, pendant l'explosion!
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     Au total, avec 132 tests, la Nouvelle Zemble, avec 273 mégatonnes, représente 94% de tous les essais soviétiques en tonnage.
     Il est intéressant de comparer avec les 467 essais de Semi Palatinsk, qui totalisent 16 mégatonnes, et donc 4,5% du total, et les 115 explosions "pacifiques" (qui ont contaminé l'Oural et les rivières sibériennes jusqu'à ce jour), 1,5 Mt donc 1,5% du total.
     Dans ces conditions, on comprend l'importance de la pollution radioactive, même si celle-ci est très atténuée depuis l'arrêt des essais atmosphériques en 1964. Il reste encore de grandes quantités de strontium 90 et de césium 137, en Sibérie et en Carélie. Le cycle bien connu lichen-rennes-hommes fait qu'aujourd'hui encore la dose moyenne d'incorporation du césium est dix fois plus élevée que la norme dans ces régions du nord, au-delà du 60ème parallèle.
     Aujourd'hui, la Nouvelle Zemble est une île désolée, avec des ruines de maisons soufflées par les explosions, mais de plus elle est devenue progressivement un cimetière nucléaire, en accueillant des déchets radio-actifs supplémentaires.

II. La Nouvelle Zemble, dépôt officieux de détritus nucléaires
     La question tourne autour d'un seul problème: où la compagnie navale de Mourmansk et la flotte militaire russe ont-elles déposé, en Nouvelle Zemble, 11.000 containers de déchets radioactifs, 15 réacteurs retirés (?) des sous-marins nucléaires et du brise-glace "Lénine", et 5 autres réacteurs officiellement immerges"?
     Il semblerait que ceux-ci seraient déposés ou immergés le long des côtes de la Nouvelle Zemble, de l'autre côté du polygone de tir (voir carte jointe). Mais il n'est pas possible de les localiser avec précision car l'armée refuse l'accès de l'île du côté de la mer de Kara, à une mission indépendante pour enquêter sur ces restes. De plus le responsable du site et la direction de la 6ème flotte russe refusent d'endosser la responsabilité des actes d'un autre service de la même marine: "le secteur de l'entretien et de la maintenance".
     Ce que l'on sait: il y a dans chaque sous-marin 2 réacteurs nucléaires...

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Zones repérées où ont été coulés des déchets de haute activité
(document Greenpeace)


Ou bien, comme le fait actuellement la France à La Hague, on retire les 2 réacteurs pour stockage, et on décontamine l'épave, ou bien, comme semble le faire la Russie, on laisse tout en place et on immerge l'épave!
     Manifestement, il y a près des côtes de la Nouvelle Zemble, du côté de la mer de Kara, donc à l'opposé des sites d'essais nucléaires, des sous-marins immergés, dont un est à seulement 40 mètres de fond. Mais cette zone est interdite à toute investigation internationale et la mission norvégienne d'inspection n'a été autorisée à visiter que la côte sud vers la mer de Barents.
     Ce que l'on sait aussi de source russe, c'est le niveau d'activité global des produits immergés dans la mer de Kara: 2 à 3 milliards de GBq (environ 0,1 milliard de Ci), par contre, l'état exact de confinement et le type de contrôle effectué sont inconnus. Plus urgent et plus important encore, il y a aujourd'hui au sein de la flotte russe de l'arctique, 20 sous-marins en passe d'être désarmés, soit 40 réacteurs à stocker en urgence. 5 d'entre eux attendent à Mourmansk une décision imminente sur leur désarmement et le stockage de leurs structures.
     Si on ajoute les 270 réacteurs civils des centrales atomiques de la région, et si on constate que la majorité d'entre eux sont opérationnels depuis 7 à 14 ans (durée de vie optimum 10 ans, durée pratique, 5 à 6 ans), on comprend le drame des déchets de haute activité de cette région, car la Russie n'a pas de crédits disponibles pour traiter convenablement ce problème.
     Rappelons en exergue que la conférence de Londres sur les déchets nucléaires a interdit tout dépôt de déchets de ce type dans l'océan, à la demande du Danemark et que la Russie est signataire de cette convention.
     Il y a des sources contradictoires sur l'importance et la nature des immersions des déchets nucléaires:
     1. Les autorités locales d'Arkhansgelk parlent d'immersion
de déchets de haute activité (comme les réacteurs) et de faible
activité (catégorie A), avec une activité globale de l'ordre de 0,5
milliard de GBq (soit environ 20 MCi)
     2. Kazakov, responsable des déchets radioactifs pour la zone nord, et Chernyskov, directeur du centre nucléaire russe "Arzamas-16", disent qu'il ne s'agit que (excusez du peu) de l'immersion de containers contenant des produits de type A, et que le volume de 500.000 m3 annuels de déchets déversés dans la mer de Barents ne représentent que... 500 à 900 Curies par mois.
     J'ai personnellement discuté avec un capitaine de vaisseau qui assure l'immersion en pleine mer de containers venant de Mourmansk, en un point situé entre ce port et celui d'Arkhangelsk.
     Il immerge régulièrement des fûts toxiques et des fûts radioactifs, et son lieu d'immersion est de plus en plus près de Mourmansk, faute de fuel et de crédits pour le dédommager de sa course. Il faut signaler qu'au cours même de la conférence, un lâché de fûts radioactifs a été fait dans la mer de Barents, très officiellement et en toute tranquilité d'âme.
     Tous les observateurs et tous les spécialistes s'accordent pour dénoncer ce type de "stockage" des déchets car le confinement est insuffisant compte tenu des contraintes océaniques, les pressions et les courants sous-marins. Mais pour l'instant, la Russie continue sa pollution du grand océan polaire par plusieurs moyens:
     1) Les essais atmosphériques ont été la première source de pollution. Le maximum de la contamination date de 1962 où la station d'Anderma ("goskoumgydromet") a mesuré des retombées jusqu'à 1.000 fois plus élevées que le niveau admissible. Aujourd'hui, y compris en Nouvelle Zemble, la commission de contrôle de l'environnement de l'ex-URSS a constaté une radioactivité résiduelle égale de 2 à 3 fois le bruit de fond. De plus, il reste sur toute la zone arctique du nord de la Russie le stigmate de cette époque imprimé dans le cycle bien connu "Lichen-rennes-hommes". Au-delà du 60ème parallèle, ce cycle, en particulier pour le césium 137, est responsable d'une contamination étendue de l'ordre de 3 à 4 fois au-dessus du bruit de fond russe.
     2) La 2ème phase des essais souterrains représente une autre source de pollution, spécialement en Nouvelle Zemble, car un accident dans l'explosion d'une bombe dans un souterrain a entraîné une forte contamination, y compris des eaux glacées.
     3) La 3ème source est d'origine civile: c'est l'idée de brillants nucléocrates, pendant la période Khroutchev-Brejniev d'utiliser les bombes nucléaires comme explosifs pour des travaux publics, comme le percement de routes, de canaux, etc.
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     Il y a eu 27 explosions de ce type de 1969 à 1988, depuis le lac Ladoga jusqu'à l'Oural avec en particulier pour le district d'Arkhazangelsk en 1971, une explosion dans le village d'Ilynsko-podomskoye, en 1984 près du village de Ruchji, au sud-est de Kotlas (pour colmater une fuite de gaz), résultat: la contamination est encore telle qu'elle est incompatible avec la vie à Kumzhinsky dans la zone autonome de Nenetz.
     4) La 4ème source de pollution radioactive vient des rivières de la Sibérie polluée par l'industrie nucléaire. Car il y a de fortes émissions de déchets autour des complexes de Chlyabinsk, Yekaterinburg, Kurgan et Tyumen... Par exemple, les rivières Techa et Mishelyak charrient des déchets venant d'un projet appelé "Majak" et qui a abouti à l'accumulation in situ d'un milliard de curie. Autre exemple: on a retrouvé une forte contamination de la rivière Yenisei provenant de la centrale "Krasnoyarsk-26", distante de 900km!
     5) La 5ème source est celle que nous avons décrite avec l'amoncellement des déchets nucléaires mal confinés en Nouvelle Zemble, et dans les mers de Kara et Barents. Ceci explique la raison de la tenue d'une conférence intemationale à Arkhangelsk en octobre 1992, pour jeter un cri d'alarme au monde: si des solutions ne sont pas trouvées en urgence, la catastrophe écologique et humaine de la zone nord russe dépassera, et de loin, en ampleur celle de Chernobyl.

III. Les conséquences médicales
     Contrairement au nord du Groenland, du Canada et de l'Alaska, le nord de la Russie est fortement peuplé car il existe une importante industrie dans cette zone. Le boom économique des années 70 a entraîné un important transfert de population, venant du sud, et mal préparée aux rigueurs du climat polaire. Il existe, par exemple, 40 % d'ukrainiens dans cette population du nord. Dans ce contexte, la directrice de l'institut des questions médicales du nord et de la Sibérie, le Dr Maslemikova, a présenté le bilan sanitaire des deux régions les plus exposées, celle d'Arkhangeslk et celle de Nenetz.
     La morbidité par cancer a augmenté de 20 fois entre 1978 et 1991, mais celle-ci n'augmente que de 5 fois dans la population arborigène. Si on examine le bilan sanitaire particulièrement bien fait pour la ville d'Arkhangelsk, pour la même période, l'augmentation des cancers est de 1,6 fois, les affections hématologiques malignes 2,3 fois et du système endocrinien 3 fois, ceci pour tous les habitants confondus, immigrés récents du sud compris.
     C'est pourquoi le rapport insiste sur le biais important lié aux conditions particulières secondaires au climat extrême et à la mobilité de la population, que l'on appelle le stress du Grand Nord, et qui déterrnine un "profil sanitaire du nord" spécifique. Quoi qu'il en soit, une telle contamination ne peut pas être sans effet sur les êtres humains. Une étude épidémiologique sérieuse, faite selon les norrnes internationales, est encore plus urgente que pour la Polynésie, car le niveau moyen de la radioactivité lié à la contamination de radionucléides à vie longue, comme le strontium 90 et le césium 137 est préoccupant, même si la Russie s'apprête à remonter le seuil de la dose maximale collective admissible pour la population, de 0,1 à 0,25 Sievert pour échapper à tout reproche de la CIPR!

IV. Que faire?
     En tout cas, stopper net le projet criminel de Chemyskov et Kazanov, responsables de haut niveau du complexe militaro-industriel, qui veulent reprendre les essais nucléaires en Nouvelle Zemble pour faire sauter avec chaque bombe un réacteur nucléaire, ce qu'ils appellent les essais nucléaires "pacifiques"(!) constituant ainsi autant de points chauds non contrôlables dans le sol, avec des milliards de curies plus ou moins confmés.
     Il faut aussi examiner en détail les propositions faites par l'IAEA de Vienne; l'une vise à constituer dans l'île de Yuzhny située dans l'archipel de la Nouvelle Zemble un centre contrôle de stockage et de retraitement (conformément aux voeux de
l'administration de Mourmansk, et de l'institut de technologie de Moscou), l'autre, de faire ce même centre, sans traverser la mer, dans la péninsule de Kola, dans la région de Dalnye Zelinsky, comme le demande l'institut de la technologie énergétique de Saint Petersbourg.
     En tout état de cause, rien ne se fera:
     - Sans crédits importants, et il faut bien que les nations riches payent pour la sécurité de la planète.
     - Sans contrôle international sérieux et répété.
     - Sans levée immédiate et sans conditions du secret militaire sur les déchets nucléaires civils et militaires.
     Ceci explique les conclusions que nous avons adoptées au congrès d'Arkhangelsk.

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