La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°225/226

Les déchets nucléaires américains pourraient servir de cible aux terroristes
www.newscientist.com/article.ns?Id=dn7241


     Note du Réseau "Sortir du nucléaire": veuillez nous excuser pour la traduction non professionnelle de cet article. Néanmoins, le propos est très compréhensible... et édifiant.

     07 avril 2005 - agence de presse NewScientist.com - Rob Edwards
     Un grand nuage de retombées radioactives mortelles pourrait être produit par une attaque terroriste sur les déchets nucléaires stockés à proximité des 103 réacteurs aux EU, selon un rapport expert pour les EU l'Académie Nationale de Sciences (NAS).
     Les piscines de refroidissement dans lesquels est stocké le combustible radioactif pourraient être sévèrement endommagé par le crash d'un avion , des armes très puissantes ou des explosifs, dit le rapport . Avec l'eau qui s'en échappe, le gainage du combustible, fait d'un alliage de zirconium, surchaufferait et s'enflammerait.
     Le rapport se termine par: "ceci pourrait faire s'échapper de grandes quantités de produits radioactif dans l'environnement".
     Il a été compilé par un comité de 15 scientifiques principaux d'universités, des instituts de recherches et des consultations en réponse à une demande du Congrès des USA.
     "Nos découvertes étaient unanimes," dit le président du comité, Louis Lanzerotti, de l'Institut de New Jersey de Technologie. "Le comité a identifié plusieurs scénarios d'attaque terroristes qui pourraient avoir des conséquences potentiellement sévères."
     On a demandé au NAS d'examiner la question après qu'un rapport par des critiques nucléaires en 2003 a suggéré qu'une attaque sur une piscine de stockage puisse répandre plus de radioactivité que l'accident de réacteur de Tchernobyl en Ukraine en 1986. Les critiques ont dit qu'une telle émission causerait des milliers de morts du cancer..
     Bien que leurs revendications inquiètes aient été rejetées par la Commission Régulatrice Nucléaire (NRC)des USA et l'industrie nucléaire à l'époque ils ont maintenant été renforcés selon le rapport de NAS. "Le comité juge que certaines de leurs évaluations de fuites (de produits radioactifs) ne doivent pas être écartées".

     Sous eau sur terre
     Les membres du comité NAS, cependant, ne peut pas dire précisément combien des piscines de refroidissement de 12 mètres de profondeur sont en danger. Celles des 34 réacteurs à eau bouillante aux EU pourraient être plus vulnérables parce qu'ils sont placés au-dessus du niveau du sol sous des couvertures minces d'acier. 

suite:
     Les piscines des 69 réacteurs à eau pressurisée sont au niveau du sol.
     Les dangers à chaque usine individuelle doivent maintenant être analysés, le rapport de NAS dit et il pourrait être "prudent" de déplacer quelque déchets dans un dépôt à sec.
     Il recommande aussi des actions urgente, y compris la réduction des risques en installant des arroseurs résistants d'eau de rafraîchissement de secours.
     Le NAS a publié une version déclassée de son rapport le 6 avril après un argument avec le NRC sur ce qui pourrait être rendu public sans aider des terroristes. Le NRC est critiqué dans le rapport pour miner la confiance publique en refusant l'information sur la vulnérabilité des piscines de stockage du combustible usé.

     Scénarios "peu raisonnables"
     Dans une lettre au Congrès le 14 mars, le NRC a dit que certains des scénarios dans le rapport de NAS étaient "peu raisonnables" et certaines de ses recommandations "ont manqué d'une base technique saine". Néanmoins, dans une déclaration le 6 avril, il a décrit le rapport comme "important" et a dit qu'il donnait à ses recommandations "une sérieuse considération".
     Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001, le NRC a désigné qu'il avait publié pas moins que neuf jeux d'instructions obligatoires ou des conseils aux opérateurs de réacteur nucléaire pour améliorer la sécurité de centrales nucléaires, y compris à propos du stockage du combustible usé.
     Mais le NRC a été accusé d'être "obstructionniste" par Frank von Hippel, de l'Université Princeton au New Jersey et un des auteurs du rapport 2003 qui a d'abord donné l'alarme. "La commission doit être rétablie comme une agence régulatrice non effrayée par l'industrie nucléaire" a écrit le New Scientist.
     "Indépendamment des chances d'une attaque sur les piscines de combustible usé, l'étude de NAS montre que nous n'avons pas pris toutes les précautions raisonnables pour atténuer ses conséquences," ajoute David Lochbaum, un ingénieur nucléaire de sécurité de l'Union des Scientifiques Concernés à Washington DC. "Ces mesures doivent être prises."

p.24

Les Vétérans
I/ Enquête sur les conséquences sur la santé des essais nucléaires français (suite)
Résultats sur 1412 questionnaires
Dr J.L. Valatx
Président de l'AVEN
     La France qui a effectué 210 essais nucléaires dont 50 atmosphériques tant au Sahara algérien qu'en Polynésie française, ne reconnaît pas les conséquences sanitaires des essais parce qu'ils étaient particulièrement "propres" comparés aux essais américains et britanniques. C'est ce qu'affirme encore le récent rapport (février 2002) de l'Office parlementaire de l'évaluation des risques scientifiques et technologiques, malgré les témoignages fournis par les Vétérans français. 
     Devant l'absence d'enquêtes médicales effectuées après les essais nucléaires et publiées sur la santé des personnels, dès sa création en juin 2001, notre association fait le projet de réaliser une enquête de santé auprès de ses adhérents afin d'estimer l'impact des essais nucléaires sur le déclenchement de pathologies et l'incidence sur la descendance. 
     Depuis longtemps (1988), les Vétérans des essais nucléaires américains ont obtenu du Sénat une loi reconnaissant officiellement le lien avec le service d'une liste de 25 maladies pouvant être radio-induites. Récemment, une estimation du Département de la Santé du Congrès (mars 2002) fait état de au moins 11.000 morts sur le territoire US dus aux effets de l'irradiation ou de la contamination par les essais nucléaires qui se sont déroulés dans le désert du Névada.
     En Grande Bretagne, une étude de Mme Sue Rabbit ROFF sur la santé des Vétérans britanniques vient de mettre en évidence les conséquences des essais nucléaires sur la santé. 30% des vétérans sont décédés autour de l'âge de 50 ans de cancers qui sont reconnus comme radio-induits. Près de la moitié des descendants des vétérans souffrent des mêmes maladies que leurs pères et un taux élevé de malformations est observé.
     En Australie, l'action persévérante des Vétérans a obtenu la publication de la liste nominative des 16.500 personnels australiens ayant participé aux essais britanniques. De plus, l'indemnisation d'un certain nombre de Vétérans a été obtenue pour des maladies radio-induites.
     Notre questionnaire comporte 40 questions et permet de faire le point sur la situation militaire ou civile du Vétéran, sur le ou les sites sur lesquels il a été présent, sur son emploi sur les sites, sur les informations reçues, les protections dont il bénéficiait lors des essais. Des questions sur les maladies, les opérations passées ou présentes du Vétéran, essaient d'estimer son état de santé. Étant donné la possibilité de transmission à la descendance de maladies génétiques ou de prédispositions à certaines maladies, induites par les radiations, des questions concernaient les enfants, petits-enfants et arrière petits-enfants.
     A ce jour, nous avons reçu 1.500 questionnaires dont 1.412 ont été saisis sur informatique.
     1. Caractéristiques des personnes répondant au questionnaire.
 Ceux qui ont répondu au questionnaire sont des appelés du contingent, des engagés, des militaires de carrière, des ingénieurs, techniciens et administratifs du C.E.A. et des techniciens d'entreprises sous-traitantes. 
     Une majorité de militaires était des appelés du contingent qui n'étaient pas volontaires pour les essais et n'avaient pas reçu d'informations sur la protection ou les risques pour la santé.
     2. Pathologies
     En ce qui concerne la pathologie, seulement 10% des vétérans estiment qu'ils sont en bonne santé et ne signalent aucune maladie. 
     2.1 Pathologies cancéreuses 
     Parmi les vétérans malades, 476 vétérans (33.71%) signalent de 1 à 3 cancers différents; ce pourcentage est supérieur à l'incidence annuelle du cancer en France (17%) pour les hommes de moins de 65 ans. Les cancers les plus fréquents sont les cancers de l'appareil digestif, du sang, de la bouche, du poumon, de la peau et génito-urinaires. 
     En considérant l'âge des vétérans au diagnostic du cancer, 76.4% ont moins de 60 ans.
     Parmi les cancers du sang, les lymphomes (38 cas/1412) et les myélomes (12 cas/1412) représentent plus de 25 fois le taux de la population française. La fréquence de ces maladies souvent radio-induites est anormalement élevée pour des personnes de moins de 60 ans.
     Parmi ces cancers, 195, soit 40.9%, ont entraîné le décès du vétéran. En considérant l'âge des vétérans décédés, 29.2% ont moins de 50 ans et 64.1% ont moins de 60 ans.
suite:
     2.2. Pathologies non cancéreuses
     Pour les pathologi'es non cancéreuses, 82.3% des vétérans indiquent une ou plusieurs maladies. 
     Les pathologies cardio-vasculaires sont les plus fréquentes (15.3%), puis viennent les affections digestives (13.9%) et les affections des os et de muscles (9.3%). Les maladies de peau, souvent atypiques, représentent 8% des pathologies; les maladies neurologiques et psychiatriques, 7.6%. Les vétérans signalent également la perte précoce de leurs dents (5.3%) et de leurs cheveux (4.4%). 
     Concernant l'âge de survenue de ces pathologies, 41% des pathologies surviennent avant 30 ans, 48.4% avant 40 ans, 66.3% avant 50 ans. 
     3. Descendance
     209 (18.89%) vétérans mentionnent que leur femme ou compagne a eu une ou plusieurs fausses couches.
     Concernant la descendance, 306 vétérans (21.6%) n'ont pas d'enfants. 25% d'entre eux signalent une stérilité par anomalie du sperme. Pour les autres, 2391 enfants (2.16 par famille) sont nés en moyenne 4.5 ans après les essais (minimum quelques mois, maximum 21 ans). 
     Parmi les 2391 enfants nés après les essais (2.16 enfants/famille), 335 enfants (14%) présentent des anomalies congénitales plus ou moins importantes (surdité ou cataracte, squelettiques, ectopie testiculaire, malformations cardiaques ou rénales, trisomie 21,...) et 382 enfants (15.9%) des maladies (allergies, stérilité, troubles hormonaux, retard mental, épilepsie, …). 
     28.9 pour mille des enfants sont décédés à la naissance ou au cours de la première année de vie.
     En résumé, ces résultats portant sur 1412 vétérans mettent en évidence:
     1. 90% présentent une ou plusieurs maladies; 
     2. 33.7% ont présenté un ou plusieurs cancers différents. Les cancers peu fréquents dans la population françaises sont très augmentés chez les vétérans. 77% des cancers sont survenus avant l'âge de 60 ans et 65.3% sont décédés avant l'âge de 60 ans.
     3. Les pathologies non cancéreuses cardio-vasculaires, digestives, et ostéo-musculaires sont les plus fréquentes;
     4. Les enfants présentent des anomalies congénitales (14%) et diverses maladies (15.9%).

Conclusions
     Les résultats de notre étude, à partir des questionnaires remplis par 1.412 vétérans adhérents de l'AVEN, indiquent que leur santé a été atteinte d'une manière importante par des maladies cancéreuses et non cancéreuses. La santé de leurs enfants a été également gravement perturbée.
     Malgré les critiques qui peuvent être formulées, nos résultats, comparés à ceux des Britanniques, indiquent des pourcentages similaires. Ainsi, les essais français ont été aussi “propres” que les essais anglo-américains. 
     En l'absence de dosimétrie fiable (externe par badge et interne par gamma spectrométrie), une étude au cas par cas ne peut être réalisée, ni une étude cas-témoin, ni une enquête épidémiologique rétrospective car la population des vétérans n'est pas connue. Récemment, la dosimétrie biologique, basée sur les anomalies chromosomiques des lymphocytes, permettrait de calculée la dose reçue même 30 à 40 ans après l'irradiation ou la contamination.
     Ces résultats représentent un argument important pour demander que le ministère de la Défense publie rapidement la liste nominative de tous les personnels civils et militaires qui ont été présents sur les sites d'expérimentation atomiques (Sahara et Polynésie) afin de réaliser une véritable étude épidémiologique rétrospective pour établir d'une manière certaine les effets sur la santé des essais nucléaires et d'en tirer les conséquences : responsabilité de l'État, vote d'une loi établissant la présomption d'origine des maladies et création d'un fonds d'indemnisation. 
     A défaut d'établir la liste nominative, le ministère de la défense devrait instituer un suivi médical des personnels et de leurs familles et rechercher la dosimétrie biologiques de tous les Vétérans.

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II/ Communiqué et C.R. d'audience
 
COMMUNIQUE DE PRESSE suite aux appels du Ministère de la Défense.
La «Patrie des droits de l'homme» refuse la justice pour les victimes de ses essais nucléaires
     Lyon - Papeete, le 22 août 2005.
     Alors qu'en juin dernier, les tribunaux des pensions militaires de Quimper, Tours et de Brest avaient rendu un jugement favorable en faveur d'Anne Tardieu (veuve de vétéran), d'André Mézière et de Michel Cariou, vétérans des essais nucléaires et membres de l'Aven, le ministère de la Défense vient de faire appel de ces trois jugements. Les juges de Quimper, Tours et de Brest avaient reconnu la responsabilité du ministère de la Défense en admettant que les pathologies graves — hypertension intracrânienne, dont est décédé Élie Tardieu, polymyosite et dysmitose thyroïdienne, dont sont atteints les deux autres vétérans —, pouvaient être imputables à leur exposition au danger radioactif au cours de leur service sur les sites d'essais nucléaires du Sahara et de Polynésie française.
     Le ministère de la Défense motive notamment son appel sur les dispositions du code des pensions militaires qui prévoient que la maladie doit se déclarer au plus tard dans les 90 jours suivants la fin du service. Face à cette mauvaise foi du ministère, le Dr Jean-Louis Valatx, président de l'Aven s'étonne: «Les maladies imputables à la radioactivité peuvent se révéler jusqu'à plusieurs décennies après l'exposition au danger radioactif. Cela, nul ne l'ignore, sauf, semble-t-il, le ministère de la Défense dont les Services de Santé et de Protection Radiologique étaient pourtant omniprésents sur les sites d'essais nucléaires du Sahara et de Polynésie française
     L'Aven, l'association Moruroa e tatou* et l'Observatoire des armes nucléaires/CDRPC dénoncent cette politique de l'autruche du ministère de la Défense qui persiste à maintenir que les milliards de radioéléments éjectés lors de ses essais nucléaires n'ont pu avoir aucun effet sur la santé des personnels employés sur les sites comme des populations voisines.
     «La France devrait se mettre à l'école des États-Unis qui, depuis 1988, assument par une loi d'indemnisation les conséquences désastreuses de leurs essais nucléaires dans le Pacifique et dans l'État du Nevada », déclare Bruno Barrillot, directeur de l'Observatoire des armes nucléaires françaises/CDRPC. Et d'ajouter : «Depuis 2002, six propositions de loi ont été déposées au Parlement, qu'attend donc le gouvernement pour les mettre à l'ordre du jour  des débats parlementaires?»
     Justement, en Polynésie française, la majorité des élus de l'Assemblée de Polynésie vient de décider la création d'une Commission d'enquête sur les conséquences des essais nucléaires aériens de 1966 à 1974 conformément aux dispositions du nouveau statut d'autonomie du Pays. À peine cette Commission venait-elle d'être mise en place que, le 29 juillet, le représentant de l'État en Polynésie française — le Haut-Commissaire de la République — a déposé une demande d'annulation de cette Commission devant le Tribunal administratif ! L'association Moruroa e tatou s'insurge contre cette nouvelle entrave de l'Etat au fonctionnement de la démocratie en Polynésie. «Trop c'est trop, s'insurge Roland Oldham, président de Moruroa e tatou. Non seulement la “Patrie des droits de l'homme” se refuse à la justice pour les victimes de ses expériences nucléaires, mais elle tente encore de bafouer la démocratie dans notre Pays au lieu d'assumer ses responsabilités.»
     Avec la rentrée judiciaire, plusieurs dizaines de nouveaux dossiers de vétérans et d'anciens travailleurs de Moruroa vont être déposés devant les tribunaux.
     L'Aven, Moruroa e tatou et l'Observatoire des armes nucléaires/CDRPC affirment à nouveau leur volonté de faire rendre justice à toutes les victimes des essais nucléaires et demandent aux parlementaires et au gouvernement français, à l'exemple d'autres pays, l'adoption d'une législation spécifique pour les personnes concernées par les conséquences des 210 essais nucléaires français.
suite:
C. R. de l'audience de la C.I.V.I.
(21 Octobre 2005 à PARIS)

     La Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infraction Pénale (C.I.V.I.) s'est réunie à PARIS (Palais de Justice) le 21 Octobre 2005 pour connaître de cinq dossiers de Victimes des essais nucléaires français (E.N. F.) couvrant la période de 1960 à 1970. Les cinq personnes concernées sont toutes adhérentes de l'A.V.E.N
     En plus de la constitution du Bureau de la Commission, assistaient à cette audience:
     Le Procureur de la République
     L'Avocat du Fonds de Garantie d'Indemnisation
     Les Avocats de l'A. V. E. N. (Maîtres TESSONNIERE et TOPALOFF) assistés de Cécile LABRUNIE
     Une greffière
     Les cinq Vétérans concernés:
     · Gérard DELLAC (Sahara – Année 1960)
     · Lucien PARFAIT (Sahara – Année 1962)
     · Christine LECULLEE veuve de Bernard LECULLEE (Sahara – 1963)
     · Jean-Paul RUET (P. F. MORUROA et FAGATAUFA – Année 1968)
     · Claude BARREAUX (P. F. HAO – Années 1967 à 1970)
     Les Vétérans étaient soutenus par 150 Vétérans du Sahara et de Polynésie avec à leur tête, Jean-Louis VALATX (Président de l'A.V.E.N.) et Michel VERGER (Vice-Président). 
     A l'initiative de l'A. V. E. N. en général et de Michel VERGER en particulier, une forte couverture médiatique de cette audience a été assurée par les T. V. nationales et régionales, les Radio périphériques, R. F. O. et la presse écrite.
     Après les préludes habituels, interdiction de faire des photos et limitation du bruit dans la salle, nous avons été informés que tout débordement était passible de poursuite pénale. 
     Maître Jean-Paul TEISSONNIERE (JPT) à partir du dossier de Gérard DELLAC a présenté rapidement les 5 dossiers des Vétérans concernés par l'audience en précisant que la période concernée allait de 1960 à 1970 et qu'ils étaient représentatifs des autres cas du Sahara et de Polynésie Française.
     Les essais nucléaires français rappelle JPT ont débuté le 13 Février 1960 à REGGAN au Sahara (Série de quatre tirs Gerboises) et se sont terminés le 25 Avril 1961. Une deuxième série de tirs souterrains a eu lieu un peu plus tard, à IN EKER (Sahara) du 27 Novembre 1961 au 16 Février1966 (Série de 13 tirs de Agathe à Grenat Georgette).
     A partir de Juillet 1966, après avoir envisagé de transférer le C. E. en Corse, la France a repris ces expériences en Polynésie le 2 Juillet 1966 (Tir Aldébaran).
     Au total la France a pratiqué 210 expériences (17 au Sahara et 193 en Polynésie). 
     A ce stade du débat, la Présidente de la C. I. V. I. donne la parole à l'Avocat du Fonds de garantie (F. de G.) sur la recevabilité de la plainte.
     Ce dernier déclare que le Fonds n'a pas compétence pour indemniser les victimes des essais nucléaires français. Il partage la peine et la souffrance des Vétérans et de leurs familles, mais précise que le F. de G. nie le droit des victimes à avoir recours à ses interventions (indemnisations).
     Les sommes dont disposent le F. de G. sont affectées aux indemnités versées au Victimes d'incidents. Il précise qu'en 2004: 17.000 dossiers ont été ouverts par les Victimes d'incidents pour des faits pouvant relever de sa compétence.
     Le Fonds de garantie n'est pas le Représentant de l'Etat. Les victimes des essais nucléaires français ne doivent pas se tromper d'endroit.


* Sites internet: site 1, site 2 et archives sur le Centre d'Expérimentation Nucléaires du Pacifique: Point-Zero-Canopus
p.26

     Il est fait état par le défenseur du F. de G. d'un arrêt de la chambre sociale de la Cours de Cassation (C. C.) du 7 Mai 2003 confirmé par un autre arrêt du 30 Juin 2005. En substance, la C. C. dit que les dispositions d'ordre public des accidents du travail ne s'appliquent pas aux maladies professionnelles et qu'elles ne peuvent pas être indemnisées par le fonds. Les tribunaux compétents, pour lui, sont :
     - Les Tribunaux des Affaires de Sécurité Sociale (T.A.S.S.) compétents,
     - Les Tribunaux des Pensions des Armées (T.P.A.) départementaux.
     C'est devant ces Juridictions administratives que les victimes doivent se retourner.
     L'Avocat du F. de G. cite la loi de 1977 créant la C.I.V.I. qui stipule qu'elle prend en compte que les faits postérieurs au Premier Janvier 1976. Or, les tirs nucléaires dont il est question aujourd'hui sont antérieurs à cette date, donc, les dossiers ne sont pas recevables.
JPT fait état de l'impossibilité d'agir devant ces juridictions de droit commun pour les Vétérans puisque les pathologies constatées sont découvertes plusieurs décennies après (entre 25 et 40 ans). La règle des 90 jours (déclenchement de la maladie après avoir quitté le service) ne peut pas de son point de vue leur être opposée.
     Plusieurs arrêts sont cités:
     - 18 Juin 1997 sur l'impossibilité d'agir devant les juridictions de droit commun
     - 28 Février 2002 sur la généralisation de la faute inexcusable
     - 7 Mai 2003 sur le revirement de jurisprudence
     - 30 Juin 2005 sur les accidents de service des fonctionnaires
     Par ailleurs dans un arrêt intermédiaire, le Conseil d'Etat a précisé qu'il n'existait pas de textes législatifs sur la réparation partielle.
Notre avocat déclare que la situation des militaires est radicalement différente.
    Leurs taux I.P.T. ne sont reconnus qu'à hauteur de 30 à 40% (Pourquoi les militaires ne sont-ils pas traités comme tout le monde?).
     Il faut également intégrer pour ces personnels le droit de bénéficier de la présomption. On parle de raisonnement par voix de présomption.
     Contre la prescription, il rappelle la Jurisprudence constante de la C.C. à savoir qu'un fait est composé de plusieurs éléments, le fait générateur et la maladie ou le décès sans qui, il n'y a pas de délit. Les maladies ou le décès sont apparus après 1976.
     Il n'y a donc aucune raison objective valable pour leur interdire l'indemnisation par le biais de la C.I.V.I.
     Le Procureur de la République précise que son rôle dans cette affaire est inhabituel. Il n'est pas là pour requérir, mais pour dire le droit.
     Le Ministère public reconnaît la souffrance des familles et le droit à indemnisation. Il émetcependantdesobservationspourque les règles d'ordre public soient respectées.
     Il s'associe aux requêtes du Défendeur du Fonds de garantie (Cf. ci-dessus).
     JPT lui oppose la Loi du 3 Janvier 1977 et notamment l'article 706-3 qui semble ne pas donner raison au F. de G.
     Le Procureur de la République se rapproche des observations de l'Avocat du F. de G. qui parle de limitation dans le temps des indemnisations. En effet pour les pathologies d'avant 1976 la Loi ne prévoit pas d'indemnisation des requérants.
     L'Avocat du F. de G. précise que ce dernier ne représente pas l'Etat.
     JPT précise que les acteurs principaux de la responsabilité de cette catastrophe sanitaire ne sont pas là et que la C.I.V.I. lui paraît l'endroit approprié pour débattre des cinq dossiers présentés et défendus aujourd'hui devant cette Commission.
     Le F. de G. demande un sursis à statuer.
     La Présidente de la Commission retient la recevabilité des procédures.
     Les cinq dossiers sont détaillés un à un par Maîtres TEISSONNIERE et TOPALOFF:
     - Lieu d'affectation
     - Date des séjours et dates des tirs nucléaires
suite:
     - Puissance de feu
     - Fonction(s) précise(s) occupée(s)
     - Moyen(s) ou non de protection de protection
     - Déroulement des tirs et l'après immédiat
     - Suivi médical ou non
     - Pathologies constatées
     - Demande de provision sur expertise

     Les cas de G. DELLAC, L. PARFAIT, B. LECULLEE et J. P. RUET relèvent tous d'une possible contamination immédiate ou résiduelle sur site de tirs nucléaires.
     Le cas de C. BARREAUX est particulier dans le sens que ce Vétéran n'a pas assisté directement au feu nucléaire. Il était sur la base avancée du C. E. P. à HAO donc à 450 Km environ du point zéro. Il a cependant était très probablement atteint par de la contamination résiduelle apportée par les avions Vautours, les bâtiments de la marine nationale en relâche dans le lagon et les poussières radioactives transportées par les vents de haute altitude. Il est à noter que dans son cas, deux experts civils indépendants avaient en 1971 proposé d'attribuer à l'intéressé une pension au taux de 30% et de reconnaître par preuve l'imputabilité de la maladie en cause constatée quelques mois après son retour du Pacifique à l'issue d'un séjour sur place du 29 Décembre 1967 au 30 Janvier 1970.
     Cette pension lui a été servie de 1971 à 1974 puis supprimée après avis de la C.C.M. qui avait estimée à cette époque que l'asthme n'était pas imputable au service par défaut de preuve et de présomption.
     L'Avocat du F. de G. reprend les dossier un par un et précise que:
     - G. DELLAC s'est vu refuser par le T.P.M. puis la C.R.P. concernés une demande d'indemnisation. Il conclut au rejet du dossier.
     - J. P. RUET la C.R.P. concernée a émis un avis favorable à sa demande et s'est vu accorder une pension. Il conclut au rejet du dossier.
     - L. PARFAIT a vu ses demandes de pension d'invalidité en 1970 et 1976 rejetées par les tribunaux compétents. Il conclut au rejet du dossier.
     - C. BARREAUX a vu sa demande de pension refusée en 1975 par le T. P. M. de QUIMPER. Il conclut au rejet du dossier.
     - Concernant Madame C. LECULLEE, il précise que son mari était militaire de carrière. Son décès est intervenu en 1976 après plusieurs séjours en Afrique. Sa veuve s'est vue allouer une pension au taux plein de 100% Il conclut au rejet du dossier.
     Pour terminer, l'Avocat du F. de G. voudrait faire une réflexion plus large. Il demande aux autorités compétentes la mise en œuvre d'une enquête sur les E.N.F. afin d'obtenir une Législation portant sur la présomption d'origine avec la mise en place d'une indemnisation en rapport.
     Commentaire du Rédacteur:
     En quelque sorte, la création d'un Fonds d'indemnisation pour les Victimes des essais nucléaires français.
     IN FINE il déclare: nous attendons l'intervention du Législateur.
     Le Procureur de la République confirme que de son point de vue, la C.I.V.I. est incompétente. Il reconnaît les maladies graves dont sont victimes les vétérans, mais demande: à qui la faute ?
     Il n'y a pas d'éléments dans les dossiers pour caractériser une infraction pénale.
     La Commission ne peut pas en l'état, statuer.
     Pour G. DELLAC (partie civile dans la plainte collective contre l'Etat) il doit y avoir compte tenu de cette procédure spécifique, sursis à statuer. Pour les autres dossiers il n'y a pas de raison de surseoir à statuer.
     Les débats étant terminés,
     Le Jugement est mis en délibéré, aussi bien sur la recevabilité des demandes que sur le fond.
     Il sera prononcé le 3 Mars 2006.

p.27

III/ URANIUM APPAUVRI
 A PROPOS DU RAPPORT DE L'ARTICLE 31 d'EURATOM
 
     La méfiance européenne à l'égard des stratégies militaires américaines - qu'on a pu récemment percevoir derrière la polémique au sujet des "armes à uranium appauvri" - va prendre un nouvel essor suite à la publication, le 6 mars dernier, d'un rapport d'experts sur le sujet, subtilement intitulé "Opinion du groupe d'experts". Je ne comprends pas cette affirmation gratuite: pourquoi les Européens se méfieraient-ils davantage des stratégies militaires américaines quand leurs propres experts disent qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter?
     Écrit dans un style extrêmement opaque, la préface du rapport est signée par un certain S. Kaiser, chef d'unité, et promet une analyse objective basée sur un grand nombre "d'opinions scientifiques indépendantes" mais, dans le même temps, méprise une des règles déontologiques fondamentales propres à tous les scientifiques, celle qui veut que l'identité des auteurs de travaux de recherche soit connue. Or, ce n'est pas le cas. Les auteurs concernés sont-ils physiciens, biologistes, médecins, épidémiologistes ou écologistes? Dans quels laboratoires ont-ils travaillé? Quelles méthodes ont-ils utilisées? Ont-ils publié leurs conclusions? Conclusions? Ce sont celles du rapport justement.
     Le rapport ne le dit pas. Pourtant, le peu qui est dit sur les expositions potentielles à l'uranium appauvri au Kosovo renvoie invariablement à de timides assertions du genre: "en l'absence d'informations sur le terrain (field data)", "sur base de l' information disponible", etc... Tout cela n'empêche pas que soit tirée une conclusion péremptoire faite "sur la base de calcul d'une exposition possible" et selon laquelle l'uranium appauvri ne présente aucun danger.
     Cette conclusion a constitué l'essentiel du communiqué de presse repris par tous les médias.
     Et pourtant les experts anonymes n'ont pratiqué aucun test et n'ont mené aucune recherche. De plus, les dizaines d'études sur les dangers potentiels de l'uranium appauvri (beaucoup d'entre-elles d'ailleurs financées par le gouvernement américain) ne sont pas mêmes mentionnées dans leur rapport.
     L'angoisse mondiale liée à ce type d'armement semble presque instinctive et, cependant, elle n'est que le reflet de dizaines d'années de longs débats scientifiques consacrés aux seuils d'exposition aux radiations.
     Aujourd'hui, deux "camps" se font face. D'un côté, les tenants de l'orthodoxie scientifique véhiculée par l'industrie nucléaire au travers notamment d'organisations telles que l'Agence Internationale à l' Énergie Atomique (AIEA)  et la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR). Ce sont précisément ces organismes qui fixent les seuils de radiation en-deça desquels nous ne devrions craindre aucun danger. De l'autre côté, on trouve des médecins et des biologistes parmi lesquels une conviction se répand toujours plus largement selon laquelle il n'existe aucune dose de radiations qui soit sans risque et sans effet sur la santé humaine.
     L'opinion des experts mandatés par la Commission Européenne se fonde sur la notion que propose la CIPR, soit celle d'une "dose effective" minimale (c.a.d. dangereuse). Signalons que cette "dose effective", avec les années, n'a cessé de diminuer (prouvant par là même le danger intrinsèque des radiations). A contrario, il est de plus en plus de scientifiques qui considèrent qu'aucune dose d'uranium appauvri pulvérulent n'est inoffensive en termes de santé dès lors qu'elle est ingérée ou inhalée. 
     En appliquant à la lettre les seuils autorisés par la CIRP aux niveaux possibles d'exposition sur les champs de bataille de l'OTAN, les experts ont pris le parti de l'orthodoxie dans le débat sur l'uranium appauvri et abandonné toute volonté de rationalité. Ce qui aurait pu avoir comme effet de réconcilier partisans et adversaires des armes à UA.
     D'un point de vue politique, une conclusion aussi hâtive et tranchée  peut avoir un air de déjà vu (lequel, quoi?), et, en ce qui concerne la "problématique uranium appauvri", le précédent est assez fâcheux.
     Il y a dix ans, assailli par des vétérans qui se plaignaient de maladies étranges et craignant qu'elles aient été causées par les armes à uranium appauvri, le Pentagone a mis en oeuvre une stratégie qui n'a eu pour effet que d'accentuer la polémique.
     Ils ont commissionné un panel d 'experts au travers de la "Rand Corporation" de façon à produire une étude sur l'uranium appauvri répondant au nom de “Rand Report”. Les experts se sont alors basés sur 50 ans de recherches sur la radiation et ce, tous azimuts: de la contamination des mineurs par le radon jusqu'aux études sur les survivants d'Hiroshima.
suite:
Ils se sont appuyés sur les modèles statistiques de la CIRP (déjà l'objet de controverses scientifiques) pour mettre en évidence le fait que l'uranium appauvri ne pouvait pas avoir affecté les vétérans du Golfe.
     Ils n'ont eu aucun contact avec les vétérans, ils ne se sont pas rendus sur le terrain et n'ont pas même daigné s'intéresser aux dossiers rentrés par quelque 183.000 malades auprès de l'administration des vétérans. Ils ont déclaré l'uranium appauvri inoffensif.
     Depuis cette publication, le Pentagone a répondu à toutes les questions et réfuté toutes les plaintes en se prévalant des conclusions du "Rand Report", "preuve" absolue de ce rien de ce qui arrive aux malades ne peut être lié aux expositions à l'uranium appauvri.
     Le document produit par le groupe d'experts à la demande de la Commission n'est rien d'autre qu'un "Rand Report" accommodé à la sauce européenne. Sous influence plus ou moins directe du Pentagone dans ce domaine, la Commission Européenne semble à présent adopter la stratégie des Américains en la matière pour gérer les problèmes politiques qui se posent.
     Ceci peut déboucher sur un précédent dont les retombées peuvent être beaucoup plus sérieuses que les effets de l'arme elle même. En effet, le "Rand Report” s'inscrit dans une tradition américaine bien connue depuis le "Manhattan Project" (l'entreprise industrielle et scientifique qui a accouché de la Bombe). Le Pentagone, depuis, au nom de la sacro-sainte recherche technologique, n'a jamais hésité à soumettre son personnel aux effets de la contamination. Ils ont notamment pratiqué, sans entraves d'aucune sorte, des expériences sur des centaines de milliers de vétérans (c'est pas un peu beaucoup ça?) soumis à des explosions nucléaires, sans parler des victimes de l'agent Orange utilisé durant la guerre du Vietnam.
     Tout ceci n'a été possible qu'à cause d'une jurisprudence fâcheuse: la "Doctrine Feres". 
     Cet outil juridique unique, interdit aux soldats américains de porter plainte contre l'armée et le gouvernement des États-Unis. Au cours des années 90, quand les vétérans du Golfe ont essayé d'assigner les autorités américaines en Justice en raison des effets putatifs de l'uranium appauvri sur leurs enfants génétiquement mal formés, l'application de cette fameuse loi a été élargie aux familles de vétérans, de façon à préserver l'État d'éventuels recours.
     Les gouvernements européens ne disposent pas de ce genre de protection. Plusieurs plaintes de vétérans incriminant l'uranium appauvri utilisé dans le Golfe et dans les Balkans sont déjà à l'instruction dans plusieurs pays. L'uranium appauvri est un cheval de Troie, un virus qui menace d'"américaniser" les relations entre l'Europe et ses vétérans.
     Vrai ou faux, des vétérans d'armées européennes diverses pensent avoir été empoisonnés par de l'uranium appauvri et aucune évaluation scientifique honnête ne peut écarter cette possibilité. Les tribunaux prendront bientôt l'affaire en main et les gouvernements européens constateront à quel point ils sont vulnérables en regard du Pentagone. Il faudra alors trouver des parades.
     En outre, il y a de quoi s'interroger au sujet de l'opinion hâtive délivrée par le groupe d'experts "indépendants", lesquels vont même jusqu'à réinventer la définition  de l'uranium appauvri en faisant figurer dans sa composition des corps radioactifs (U 236, Plutonium, Technétium, Neptunium, Américium) exclus jusque là de la composition généralement admise par toute la communauté scientifique et dont on ne trouve même pas trace dans le " Rand Report".
     L'association des Médecins contre la Guerre Nucléaire (IPPNW -prix Nobel 85) a adopté une position nettement plus prudente en proposant un moratoire sur ces armes sous réserve de ce que nous apprendraient de véritables études cliniques. 
     Partout où l'uranium appauvri a été employé, des civils et des soldats tombent malades pratiquement chaque jour et sans raison apparente. Plus urgent que de disculper l'uranium appauvri à des fins politiques, économiques et stratégiques, il est temps de mettre en oeuvre des études qui soient vraiment indépendantes. Veut-on que la vérité se sache ou se cache?
     Monique et Raymond Sené: physiciens retraités du CNRS
     Commandant Maurice Eugène André, Expert NBC.
     Roger Trilling, Martin Meissonnier, Frédéric Loore: Journalistes, Auteurs de "Uranium Appauvri : La guerre Invisible

Voir autres dossiers essais nucléaires et santé:
Site INFONUC: essais nucléaires et santé

p.28

DERNIÈRES NOUVELLES D'ALSACE 18/12/04
Sûreté nucléaire: Fessenheim et les séismes
Jean Jacques Rettig (CSFR)
   
     La terre a de nouveau tremblé dans notre région. Le Comité pour la sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin (CSFR), en tant qu'association siégeant à la Commission de surveillance de la centrale nucléaire de Fessenheim, et sous la plume de son secrétaire général, Jean-Jacques Rettig, apporte son éclairage attentif quant aux problèmes de sécurité de la centrale face aux tremblements de terre. 
     Les deux réacteurs sont construits sur une plate-forme située plus bas que la ligne d'eau du canal. En cas de séisme, la digue de ce canal peut être détruite ou fortement endommagée, permettant ainsi l'inondation du site. A la centrale du Blayais, en Gironde, lors de la tempête de décembre 1999, une telle situation a failli conduire à l'accident nucléaire majeur.
     La centrale nucléaire de Fessenheim est construite sur une faille active. Pour un séisme il y a toujours quatre inconnues:
     - on ne peut prévoir quand il aura lieu;
     - ni où se situera son épicentre;
     - ni de quelle profondeur partiront les phénomènes sismiques;
     - ni de quelle magnitude sera le séisme.
     Nous sommes en possession de documents d'EDF, dont des courriels entre responsables de la branche nucléaire. Il y est question des divergences entre l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) et EDF, à propos de la non-conformité de dix sites nucléaires (tout spécialement Bugey et Fessenheim) à la Règle fondamentale de sûreté face à l'aléa sismique.

Les risques
En voici quelques extraits:
     - "Des menaces très importantes apparaissent notamment sur les réacteurs de Bugey et de Fessenheim...".
     - "Pour l'ensemble des paliers, dans l'hypothèse où les spectres de l'IRSN nous seraient imposés, le coût des études et modifications, hors indisponibilité d'exploitation, a été estimé à 1.900 millions €".
     - "Deux dossiers importants concernent le séisme: souplesse planchers BAS/BL, séisme événement, tenue de la SDM".
     - "BERSSIN (service de l'IRSN) a clairement pointé les écarts expliquant les différences entre les spectres EDF et IRSN selon nouvelle RFS (Règle fondamentale de sûreté): en résumé, cela concerne soit la méthodologie d'application de la RFS, soit l'interprétation des cartes sismotectoniques (nous n'avons pas les mêmes)".

suite:
    - "Écarts pour Fessenheim: EDF: 0,13 g; IRSN: 0,28 g".
     - "Considérant de plus qu'il y a une conception ancienne, peu robuste ou même partielle pour Fessenheim, le risque est très fort pour les deux sites" (Bugey et Fessenheim).
     - "Nous savions que la menace planait".
     - "Il faut mobiliser stratégiquement au-dessus des experts pour lever la contrainte".
     - "Il faut trouver une échappatoire à cette menace. Dans la démarche projetée, c'est une étude d'impact qui doit définir jusqu'où il serait acceptable industriellement de réévaluer le séisme. Et donc de déroger, pour certains sites (ex: CPO), à l'application de la Règle fondamentale de sûreté".
     - "Une position ferme d'industriel est à défendre".
     - Les travaux de mise en conformité de Fessenheim, avec la Règle fondamentale de sûreté, face aux risques sismiques reviendraient, selon les propres calculs d'EDF, à "200 millions € par tranche" (un réacteur), donc à 400 millions € pour les deux, hors pertes par indisponibilité d'exploitation.

Raisons financières
     EDF cherche à fuir ses responsabilités pour des raisons financières, alors qu'elle mène une politique agressive de rachat d'entreprises à l'étranger.
     Dans ce bras de fer entre EDF et l'IRSN, les populations de la région sont prises en otages. Si on additionne tous les autres points faibles et à risques de cette installation nucléaire, qui travaille et travaillera dans les années à venir à perte, tout en faisant planer d'énormes dangers sur nous tous, il y a urgence à arrêter les frais et à fermer définitivement les deux réacteurs.
     Cela ne fera même pas 3% de la production électrique française en moins.
     L'alternative est parfaitement possible et la reconversion économique de Fessenheim et alentours peut être réalisée en très peu de temps..., sans départ d'EDF de la commune de Fessenheim.

      Il faut agir, Mesdames et Messieurs les politiques, avant qu'il ne soit trop tard. Ce n'est pas qu'à Paris mais également à Strasbourg, Colmar, Mulhouse... qu'il s'agit de décider du sort de notre région et de ses habitants..., même quand il est question de nucléaire.
     Nous ne voulons pas être les “Malgré nous” d'une industrie dangereuse et archaïque.

p.29

LETTRE du Conseil Mondial d'Abolition 2000
(Traduite de l'anglais par l'Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire)
Le 25 août 2005
A tous les représentants permanents auprès des  Nations Unies

Objet : Session plénière du Millenium + 5

     Excellence,

     Nous nous adressons à vous au nom du Conseil mondial d'Abolition 2000, qui représente un réseau international de plus de 2000 organisations oeuvrant dans plus de 90 pays pour un traité d'élimination des armes nucléaires.
     Notre réseau a été fondé en 1995, pendant la Conférence d'examen et de prolongation du Traité de Non Prolifération tenue pour le 25e anniversaire de son entrée en vigueur, et il a participé, en tant que représentant d'un important secteur de la société civile, aux deux Conférences d'examen de 2000 et 2005 et à toutes les réunions préparatoires. 
     Comme vous le savez, en ce 60e anniversaire des holocaustes atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki lors desquels 220.000 personnes, pour la plupart civiles, ont été anéanties, la Conférence d'examen de 2005 s'est achevée sur un désastre, sans le moindre accord sur la façon de réaliser les promesses arrachées en 1995 et en 2000, y compris l'engagement sans équivoque d'éliminer la totalité des armes nucléaires. 
     Liées par les règles du consensus, les nations n'ont pas davantage été capables de répondre au danger croissant de prolifération nucléaire, puisqu'il a suffi d'un ou deux pays pour bloquer toute espèce d'engagement significatif en faveur de mesures à prendre pour sécuriser les matières nucléaires et résoudre d'autres questions de prolifération nucléaire. 
     Vous réunissant pour le premier Examen quinquennal des objectifs visionnaires établis au Sommet du Millénium, nous vous demandons instamment de faire de l'abolition des armes nucléaires une priorité de votre programme désarmement et de non-prolifération nucléaires aux paragraphes 57 à 60 (dans sa version du 5 août 2005) du projet de Document Final soumis aux chefs d'État qui participeront à l'Assemblée Générale. Nous vous demandons de prendre les résolutions destinées à prévenir l'emploi d'armes nucléaires et à éliminer le fléau nucléaire. 
     Nous saluerions sans réserve l'adoption et la mise en œuvre des mesures que vous avez esquissées, mais ce serait folie d'ignorer que notre monde est confronté à une énorme crise du fait que les États nucléaires renâclent à accomplir leurs obligations en matière de désarmement nucléaire, tandis que parallèlement grandit la tendance d'États non nucléaires à utiliser les technologies nucléaires dites «pacifiques» pour acquérir la capacité de fabriquer leurs propres armes nucléaires, vues comme un moyen de protection contre la politique de «guerre préventive» et autres menaces brandies contre les «États voyous» et «l'axe du mal». Dans ces conditions, faut-il s'étonner que les armes nucléaires prolifèrent?

suite:
     Nous vous prions instamment d'inclure dans vos recommandations une proposition visant à établir un Fonds International pour l'Énergie Durable alimenté par les subventions d'État qui vont aujourd'hui aux combustibles fossiles et nucléaires, afin de nous permettre d'abandonner l'énergie nucléaire, avec toutes ses implications relatives à la prolifération militaire, en procurant aux pays les moyens de progresser vers des énergies alternatives, sûres et propres, tirées notamment du soleil, du vent et des marées. Une telle mesure serait essentielle non seulement pour la cause du désarmement nucléaire, mais encore pour les autres objectifs du Millénium en ;faveur de l'environnement mis en danger, du développement durable et de l'élimination de la pauvreté[1]. Et qui a jamais entendu parlé d'une attaque terroriste contre une éolienne? 
     Nous demandons également que le Document Comité de l'Assemblée Générale soit publié de telle sorte que les nations volontaires puissent se mettre au travail dès cette année et commencer à négocier un traité d'élimination des armes nucléaires. 
     Nous ne devons en aucun cas traiter cet important examen du Millénium comme une « simple affaire courante ». Notre terre subit une grave crise nucléaire, et l'assemblée extraordinaire des Chefs d'État attendue cet automne à l'ONU doit faire face à cette question brûlante de notre temps. Nous pressons votre gouvernement de se saisir de cette opportunité pour travailler, avec la foule en expansion de la société civile, à un monde démocratique, libéré du nucléaire.

POUR AIDER le collectif français
     Le collectif Stop Essais/Abolition des armes nucléaires regroupe une quinzaine d'associations et édite un bulletin chaque mois. Les abonnements à ce bulletin et les dons sont les seules ressources de ce collectif.
     Le bulletin donne les toutes dernières informations et bilans sur le sujet des armes nucléaires.
Pour vous abonner:
Stop Essais
114 rue de Vaugirard
75006 Paris
stop.essais@wanadoo.fr / tél : 01 69 07 78 37 
                                  fax : 01 69 07 29 96
abonnement 1 an: 15 €
abonnement petit budget 1 an: 8 €
abonnement soutien à partir de 20 €
(Chèques à l'ordre de Stop Essais)
Amicalement,
Dominique Lalanne
Membre fondateur du GSIEN
PS: le GSIEN a une copie du bulletin en PDF, la Gazette peut vous en envoyer un spécimen
p.30
[1] Dans le même "esprit", un autre grand espoir est né: à l'instar du CERN, créé par l'UNESCO après les affres de la seconde guerre mondiale afin de ressusciter une coopération scientifique européenne plus que moribonde, le synchrotron SESAME est appelé à parachever ce rêve dans une toute autre région, ô combien explosive, le Moyen-Orient, théâtre du conflit israélo-arabe. De prime abord, installer une telle infrastructure dans un lieu si propice à la guerre apparaît dénué de bons sens, voire insensé. Un rapport relate les événements à l'origine de SESAME (…) et en indique les retombées scientifiques, technologiques et économiques.» Vous serez certainement intéressé de connaître le sous-titre du projet: «La Science au service de la Paix», "Synchrotron-Light for Experimental Science and Applications in the Middle East", implanté au sein de l'Université Appliquée d'Al-Balqa à 25 km d'Amman en Jordanie...
Extrait de la synthèse de la journée de travail
à l'Assemblée Nationale du 8 octobre 2005

     85 personnes ont assisté à cette réunion.
     La réunion avait pour but de permettre une information des militants et l'exploration de pistes de travail communes aux associations intéressées par la cause du désarmement.
     Il s'est dégagé:
     1- Un accord sur les objectifs
     Au niveau international: Il faudrait que la France soit à l'initiative d'une proposition européenne de désarmement. 
     Au niveau national: Il faut remettre en question le programme de construction des missiles M-51. Pour ce faire profitez des futures élections législatives et présidentielles de 2007.
     2- La volonté de travailler ensemble à des objectifs atteignables
     3- Un large consensus sur un discours à tonalité sociale
     Il convient de rattacher la question du désarmement aux préoccupations sociales des citoyens. Il a été prévu de promouvoir un argumentaire “une bombe = x hôpitaux”
    4- Deux cibles prioritaires : les décideurs politiques (élus et candidats) et leurs électeurs
     Les participants ont affirmé la nécessité d'interpeller directement au moyen de questionnaires, de pétitions, de rencontres.
     Ils ont aussi souligné la nécessité d'informer le grand public qui n'a pas assez conscience de la réalité de ce réarmement français.
     5- Des pistes possibles pour des actions communes fortes
     Les associations doivent s'informer mutuellement et organiser des événements communs pour attirer un vaste public et éviter une dispersion des forces.
     Il peut être envisagé un groupe d'étude parlementaire, une commission d'enquête citoyenne ou même une inspection citoyenne européenne d'un site français lié au programme M-51.


UN CDROM ÉDUCATIF
 CRDP Poitou-Charentes
GRAINE ( Poitiers )

     Sur le débat relatif à la gestion des déchets radioactifs et sur son appropriation par les citoyens, il n'existe que très peu de documents pédagogiques. 
     En proposant un cheminement éducatif qui s'appuie sur les questionnements concrets de jeunes, ce cédérom pédagogique permet la construction d'une "conscience citoyenne" en appréhendant de façon objective et plurielle la globalité du thème et des sous-thèmes qui en découlent (la radioactivité, la radioprotection, la santé, les risques technologiques, les choix énergétiques,  les économies d'énergie, le développement durable, la législation, le rôle du citoyen dans les débats de société...).

     Structuré en dossiers indépendants les uns des autres, il suggère une démarche pédagogique pour le formateur et apporte des connaissances scientifiques rigoureuses et des éléments de débat grâce à de très nombreux extraits d'articles de presse ou d'ouvrages qui respectent de façon stricte la diversité des points de vue et des courants de pensée.
     Ce cédérom s'adresse aux enseignants de collège (6ème à la 3ème) et  lycée (2nd à BTS) pour qui le débat trouve écho dans les programmes scolaires de  SVT, histoire - géographie, éducation civique, sciences physiques, technologie, sciences économiques et sociales, philosophie ou français. Il s'adresse aussi aux non enseignants (animateurs, ...) et à tout citoyen cherchant des éclairages historiques et actuels sur la question.
     Un livret de 50 pages et un CD (le tout représentant 600 pages) pour documenter les collégiens et les lycéens de FRANCE sur le nucléaire.
     Le Pôle national de ressources en éducation à l'environnement fait partie des pôles de ressources thématiques crées en 2002, dans le cadre du Plan Arts et Culture du Ministère de l'Éducation Nationale. Il est dédié à la culture scientifique et technique dans le domaine plus spécifique de l'éducation à l'environnement dans une perspective de développement durable. 
     Comme les autres pôles thématiques nationaux, il repose sur le principe du partenariat. Initialement les partenaires sont le Rectorat de Poitiers, l'IUFM de Poitou-Charentes, le CRDP Poitou-Charentes, l'Institut de formation et de recherche en éducation à l'environnement (Ifrée-ORE) et le GRAINE Poitou-Charentes. Le ministère de l'écologie et du développement durable ainsi que les collectivités territoriales se sont associés à cette démarche et apportent un important soutien.
     Les missions du Pôle sont à visée nationale. Il doit "initier et accompagner la mise en oeuvre d'actions d'éducation à l'environnement dans les domaines suivants:
     - inventaire et mise à disposition de ressources documentaires et d'outils pédagogiques,
     - formation de formateurs et de personnes-relais (…),
     - mise en relation au niveau national des acteurs de la formation et de la ressource (…),
    - production d'outils, de publications et diffusion des travaux de recherche. 
     C'est dans le cadre de sa mission de production et de diffusion que le Pôle accompagne ce document pédagogique sur une problématique particulièrement liée à une éducation à l'environnement soucieuse de développement durable : “citoyenneté et déchets radioactifs”.
     Sortie mi-novembre.
     Le document sera un livre + un cédérom pour 25 €
     Le cédérom comprend plus de 450 fiches en pdf.
     Il sera tiré à 1000 exemplaires au début (si le succès nous rattrape, on retirera).
     Le GRAINE aura pour son usage 80 exemplaires (qui seront destinés essentiellement aux éditeurs cités qui nous ont réclamé un exemplaire).
     Le document est commandable auprès du CRDP Poitou - Charentes
     Site à consulter:
http://www.dechetsradioactifs-citoyennete.org
p.31

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