L’IRSN
a remis à l’ASN, le 30 novembre 2016, son Avis
sur les risques de rupture des générateurs de
vapeur (GV) présentant une teneur anormalement
élevée en carbone dans l’acier constitutif
de leur fond. Les teneurs en carbone mesurées sur
ces fonds sont voisines localement de 0,4%, à
comparer à la valeur maximale attendue de 0,22%.
Cette anomalie a nécessité le réexamen des risques
de rupture des GV concernés dans la mesure où les
propriétés mécaniques de l’acier sont modifiées.
(suite)L’avis concerne les GV des réacteurs de 900 MWe dont les fonds ont été produits par la société Japan Casting and Forging Corporation (JCFC). L’évaluation des risques de rupture des GV consiste à examiner les risques d’initiation d’une rupture à partir d’un défaut connu ou postulé dans l’acier. Aussi, l’IRSN a particulièrement évalué la taille des défauts postulés par EDF, les chargements sollicitant les défauts, c’est-à-dire les chocs thermiques pouvant affecter les GV dans toutes les conditions de fonctionnement des réacteurs, ainsi que les propriétés mécaniques de l’acier retenues, en tenant compte des premières données fournies par EDF pour de l’acier avec 0,4% de carbone. L’évaluation réalisée par l’IRSN a permis de conclure à l’absence de risque de rupture des GV de fabrication JCFC équipant les réacteurs de 900 MWe concernés (1), à l’exception des trois réacteurs Bugey 4, Fessenheim 1 et Tricastin 4, sous réserve des recommandations effectuées par l’IRSN pour limiter l’amplitude des chocs thermiques envisageables et des résultats des contrôles prescrits par l’ASN. Pour les trois réacteurs précités, l’étude reste à finaliser et à transmettre par EDF. Pour conforter son évaluation des propriétés mécaniques des aciers présentant des teneurs élevées en carbone, l’IRSN a sollicité son homologue d’expertise belge BEL-V, membre du réseau européen ETSON (2). L’ASN et l’IRSN se sont également rendus au Japon chez le fabricant JCFC pour mieux comprendre l’origine des teneurs excessives en carbone observées. |
suite:
L’avis de l’IRSN est publié ce jour son site
Internet (www.irsn.fr) et sera également présenté
au Haut Comité pour la transparence et
l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)
lors de sa réunion du 6 décembre 2016. Par
ailleurs, en liaison avec l'Association nationale
des comités et commissions locales d'information
(l’ANCCLI) et l’ASN, une réunion est prévue en
février 2017 pour échanger avec les parties
prenantes de la société, dans le prolongement du
dialogue technique initié avec l’ANCCLI, la
Commission Locale d'Information (CLI) de
Flamanville et l’ASN concernant les anomalies
similaires affectant la cuve du réacteur EPR de
Flamanville.
p.8notes 1- Il s’agit des réacteurs Bugey 4, Dampierre 3, Fessenheim 1, Gravelines 2 et 4, Saint-Laurent-des-Eaux B1 et Tricastin 1, 2, 3 et 4. 2- Le réseau ETSON (European Technical Safety Organisation Network) rassemble l’IRSN et ses homologues européens. L’IRSN, établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) – dont les missions sont désormais définies par la Loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (TECV) – est l’expert public national des risques nucléaires et radiologiques. L’IRSN concourt aux politiques publiques en matière de sûreté nucléaire et de protection de la santé et de l’environnement au regard des rayonnements ionisants. Organisme de recherche et d’expertise, il agit en concertation avec tous les acteurs concernés par ces politiques, tout en veillant à son indépendance de jugement. L’IRSN est placé sous la tutelle conjointe du ministère de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer, du ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, du ministère des Affaires sociales et de la Santé, du ministère de la Défense. |
Réf.: [1]
Lettre ASN CODEP-DEP-2016-016497 du 22 avril 2016
(suite)[2] Avis IRSN N° 2016-00277 du 11 août 2016 [3] Lettre ASN CODEP-DEP-2016-041872 du 4 nov 2016 À la suite de l’anomalie détectée sur les calottes de la cuve du réacteur EPR de Flamanville, EDF a informé l’ASN que certains fonds primaires de générateurs de vapeur (GV) fabriqués par Creusot Forge (CF) et Japan Casting and Forging Corporation (JCFC) pouvaient être affectés de ségrégations majeures positives résiduelles de carbone. Cette anomalie remet en cause les hypothèses prises à la conception pour l’étude du risque de rupture brutale de ces fonds primaires. L’ASN a demandé à EDF, par lettre en référence [1], de lui apporter dans les plus brefs délais les éléments permettant de justifier le maintien en service de chacun des équipements concernés. Dans ce cadre, afin d’identifier les GV concernés, de caractériser l’étendue et le niveau de ségrégation et de rechercher les défauts éventuellement présents dans les composants, l’ASN a demandé à EDF de mesurer la teneur en carbone et de réaliser des essais non destructifs sur les fonds primaires de GV fabriqués par CF et JCFC. Dans l’avis cité en référence [2], l’IRSN a considéré que la démarche mise en œuvre par EDF pour justifier l’absence de risque de rupture brutale des GV affectés était acceptable, sous réserve notamment du renforcement des mesures compensatoires proposées par EDF et de la finalisation de la caractérisation des zones ségrégées. Sur cette base, l’ASN a autorisé le redémarrage de certains réacteurs concernés. Toutefois, la mise en évidence, sur les fonds de GV de fabrication JCFC du réacteur n°1 de la centrale nucléaire du Tricastin, d’une teneur en carbone plus élevée que celle prise en compte dans la démarche de justification précitée a conduit EDF à réévaluer l’analyse du risque de rupture brutale pour les fonds de fabrication JCFC. À cette fin, l’exploitant a transmis un dossier spécifique d’analyse du risque de rupture brutale des fonds de GV de fabrication JCFC qui équipent des réacteurs de 900 MWe. Par lettre citée en référence [3], l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sollicite l’avis et les observations de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sur la démonstration présentée par EDF dans le dossier spécifique précité. Plus particulièrement, l’ASN souhaite recueillir l’avis de l’IRSN sur les points suivants: * concernant la taille des défauts: - la pertinence de l’ensemble des mesures prises par EDF pour s’assurer de l’absence de défaut dans les fonds primaires JCFC issus de lingots 90 et 120 tonnes, à l’exception des défauts sous le revêtement en acier inoxydable déposé sur la face interne des fonds primaires des GV; - l’adéquation entre les défauts postulés dans les notes de calculs et les défauts détectables lors des divers examens non destructifs; * concernant les propriétés mécaniques du matériau: - le caractère approprié et conservatif de l’estimation du décalage de la température de transition fragile-ductile du matériau, dite RTNDT, établie par EDF en présence d’une ségrégation du carbone proche de 0,4%; - le caractère approprié et conservatif de l’estimation du décalage de RTNDT établie par EDF en face interne du fond primaire, sous le revêtement; - l’opportunité de s’appuyer sur la courbe issue de l’annexe ZG du code RCC-M (1), dans le contexte d’un matériau fortement ségrégé pouvant présenter un décalage de RTNDT inhabituel (supérieur à 100°C); - les hypothèses retenues dans l’analyse mécanique permettant d’évaluer les marges vis-à-vis de l’initiation d’un défaut (seuil minimal de ténacité de 20 MPa/m et ténacité minimale considérée en cas de choc chaud de 28 MPa/m); |
suite:
*
concernant les chargements sollicitant les
défauts sur les GV des réacteurs de 900 MWe:
p.9- l’exhaustivité et la pertinence de la caractérisation des transitoires de chocs froids qui ont été sélectionnés par EDF; - l’efficacité des mesures compensatoires proposées par EDF en cas de chocs froids; * concernant l’analyse du risque de rupture brutale des GV des réacteurs de 900 MWe: - les hypothèses de calcul prises en matière de modélisation des fonds de générateurs de vapeur, de conditions aux limites, de chargements et situations; - la pertinence de la localisation des défauts et des sections de dépouillement; - la valeur maximale du facteur d’intensité de contrainte en correction plastique en situations normales et perturbées annoncée par EDF (13,6 MPa/m); - les résultats des calculs mécaniques obtenus. Le présent avis expose les conclusions de l’analyse de l’IRSN. Démarche d’analyse
La démarche d’analyse
retenue par l’IRSN se situe dans le cadre du
traitement d’une anomalie affectant certains
réacteurs du parc en exploitation. Ce traitement
vise à acquérir une raisonnable assurance que
l’anomalie ne remet pas en cause l’appréciation
du risque de rupture brutale des équipements
concernés.À cette fin, l’IRSN s’est appuyé sur: * les premiers éléments de justification transmis par EDF, comprenant notamment des résultats d’essais sur un matériau prélevé dans une pièce sacrificielle représentative des teneurs en carbone observées sur les fonds de GV; * les données de la littérature et les résultats de recherche disponibles; * ses propres moyens de calcul. En outre, l’IRSN a conforté sa position sur les propriétés mécaniques des aciers présentant des teneurs élevées en carbone en s’appuyant sur l’organisme belge d’expertise BELV, membre du réseau ETSON qui réunit l’IRSN et ses homologues européens. Les premiers éléments transmis par EDF seront complétés ultérieurement, notamment par les résultats du programme de caractérisation des matériaux sur la base de pièces sacrificielles qu’EDF a prévu de mettre en œuvre. L’IRSN rappelle que l’objectif de l’analyse du risque de rupture brutale d’un équipement est de démontrer l’absence d’initiation d’une rupture à partir d’un défaut connu ou postulé. Cette démonstration requiert plusieurs données d’entrée: * la taille des défauts connus (s’il en existe) et de ceux qui sont postulés en tenant compte de la limite de détection des moyens de contrôle; * les propriétés mécaniques du matériau, notamment la ténacité en fonction de la température, qui est affectée par la teneur en carbone de l’acier; * les chargements sollicitant les défauts. Adéquation des tailles de défauts utilisées dans l’analyse spécifique de rupture brutale avec les contrôles réalisés L’analyse de l’IRSN porte sur l’ensemble des types de défauts envisageables à l’exception des défauts sous revêtement, conformément à la saisine de l’ASN. EDF a indiqué que les contrôles réalisés au stade de la fabrication n’ont pas mis en évidence de défaut. Sur cette base et compte tenu des performances attendues pour ces contrôles, l'IRSN considère que la présence de défauts de taille supérieure à ceux postulés dans les analyses de rupture brutale a été écartée. |
Par ailleurs, pour conforter ses justifications,
EDF réalise des contrôles dans le cadre du
traitement de l’anomalie:
(suite)* en fond de GV, par ressuage et par ultrasons selon la technique dite Time Of Flight Diffraction (TOFD); * en zone de transition de la tubulure du GV, selon la technique Pulse-Écho. L’IRSN considère que ces méthodes de contrôle sont bien adaptées pour détecter des défauts de taille supérieure à ceux postulés. En conclusion, l’IRSN estime qu’il y a adéquation des tailles de défauts utilisées dans l’analyse spécifique de rupture brutale avec les techniques de contrôle employées. Propriétés mécaniques du
matériau
L’ensemble des éléments de
justification transmis par EDF est fondé sur
l’hypothèse que les fortes teneurs en carbone
observées en peau externe de certains fonds de GV
JCFC résultent d’un phénomène de ségrégation. Des
investigations menées par l’IRSN, notamment à
l’occasion d’une mission d’expertise effectuée
conjointement avec l’ASN auprès du fabricant JCFC
au Japon, il que l’hypothèse du phénomène de
ségrégation fournit effectivement la meilleure
explication des teneurs observées.Hypothèses relatives à la teneur en carbone dans la zone ségrégée Les fonds primaires de GV JCFC sont fabriqués en acier ferritique de nuance 18 MND 5. La teneur en carbone à la coulée est une donnée représentative de la teneur moyenne en carbone du lingot. Le phénomène de ségrégation de carbone se produit lors du refroidissement du lingot. Dans l’analyse spécifique qu’il a transmise, EDF retient une teneur en carbone en face externe atteignant au plus 0,39%. Ce taux de ségrégation apparaît très élevé, puisque la teneur à la coulée des pièces concernées était voisine de 0,18% d’après le fabricant. La valeur de 0,39 % retenue par EDF est fondée sur des mesures de teneur en carbone effectuées au moyen de deux méthodes. La méthode de mesure par spectroscopie par étincelage a été mise en œuvre in situ. Elle a relevé une teneur maximale de 0,39%. Pour effectuer les mesures, EDF a pris des précautions visant à s’affranchir de l’effet de la décarburation de l’acier en surface qui résulte du procédé de forgeage. À cette fin, EDF a indiqué avoir effectué chaque mesure, soit sur une zone suffisamment usinée pour ne pas être affectée par cette décarburation, soit après avoir procédé à un meulage. Les points présentant les teneurs en carbone les plus élevées ont fait l’objet d’une caractérisation chimique en laboratoire par combustion de copeaux prélevés à une profondeur visant à s’affranchir des effets de la décarburation, aboutissant à une teneur maximale de 0,36% selon ce moyen de mesure, dont l’incertitude est plus faible. Sous réserve que ces mesures aient été réalisées dans les règles de l’art et en conformité avec les précautions annoncées par EDF à l’égard de la décarburation, l’IRSN considère que l’hypothèse d’une teneur en carbone au plus égale à 0,39% en face externe est recevable pour la suite de la démonstration. Pour l’estimation théorique de la teneur maximale en carbone en face interne, l’exploitant a considéré un repositionnement hypothétique de la pièce fabriquée dans le lingot brut, cohérent avec une teneur en carbone de 0,39% en face externe. L’IRSN estime que cette approche est appropriée et qu’elle aboutit à une estimation conservative (0,26%). Ténacité de l’acier 18 MND
5 dans la zone ségrégée
La ténacité de l’acier 18 MND 5
est évaluée de manière indirecte par la courbe de
l’annexe ZG du code RCC-M indexée sur la
température RTNDT. La RTNDT de la zone ségrégée
est définie comme la RTNDT mesurée en zone de
recette des fonds de GV augmentée d’un décalage de
température dépendant de la teneur en carbone dans
la zone ségrégée. Les zones de recette sont en
effet éloignées de la zone ségrégée. |
suite:
EDF a estimé ce décalage de RTNDT en se fondant
sur les données de la littérature et les premiers
résultats du programme d’essais actuellement en
cours pour justifier l’aptitude au service de la
cuve de l’EPR de Flamanville. EDF a ainsi retenu,
pour l’acier en peau externe des fonds de GV, un
décalage de 180°C, correspondant à une teneur en
carbone de l’ordre de 0,4% et, pour l’acier en
peau interne, un décalage de 70°C, correspondant à
une teneur en carbone de l’ordre de 0,3%. Au vu du
dossier d’EDF, qui retient des hypothèses
pénalisantes notamment en regard des résultats
d’essais de caractérisation de matériaux
disponibles, et des estimations menées par l’IRSN
sur la base des éléments de connaissance dont il
dispose, l’IRSN considère que ces deux valeurs
de décalage de température de transition sont
conservatives.
p.10Une revue des données de ténacité disponibles dans la littérature pour des aciers ferritiques laminés ou forgés confirme le caractère enveloppe de la courbe de ténacité prescrite par le code RCC-M sur une large plage de température (T-RTNDT), à savoir de -200°C à +50°C. Des résultats sur des aciers fortement fragilisés par l’irradiation (décalage de température de transition de l’ordre de 150°C) apparaissent également bornés par la courbe du code RCC-M. Par conséquent, l’IRSN n’a pas de remarque quant à l’utilisation de la courbe issue de l’annexe ZG du code RCC-M, y compris dans le contexte d’un matériau fortement ségrégé pouvant présenter un décalage de RTNDT important (supérieur à 100°C). Dans le cadre de son analyse, EDF considère que la ténacité des aciers ferritiques des fonds de GV ne peut pas physiquement être inférieure à 20 MPa/m. L’hypothèse d’une valeur minimale de 20 MPa/m, formulée en 1983 pour les aciers ferritiques, a fait l’objet de plusieurs études qui n’ont pas conduit à la remettre en cause. Aussi, cette hypothèse n’appelle pas de remarque de la part de l’IRSN. Des résultats de mesure de ténacité apportés par l’exploitant sur un matériau présentant un taux de carbone comparable à celui de la peau externe des fonds de GV ont montré des valeurs proches de celles attendues pour le matériau non ségrégé. La ténacité mesurée sur ces échantillons est de 45 MPa/m à -130°C; or, la courbe exprimant la ténacité en fonction de la température, utilisée dans les études du risque de rupture brutale due à un choc chaud, donne une valeur de 28 MPa/m pour une température de -130°C. En conséquence, l’IRSN n’a pas de remarque concernant la valeur minimale de 28 MPa/m pour la ténacité du matériau des fonds primaires retenue par EDF en cas de choc chaud. Exhaustivité et
pertinence de la caractérisation des
situations retenues pour les transitoires de
chocs froids pour les GV des réacteurs de
900 MWe
La présence d’une teneur en
carbone plus élevée qu’attendue en face externe de
certains fonds de GV de fabrication JCFC nécessite
d’examiner les contraintes induites par des
transitoires de choc chaud, objets de l’avis de
l’IRSN en référence (2). Compte tenu de
l’estimation des propriétés mécaniques en face
interne, il est également nécessaire d’examiner
les contraintes induites par des transitoires de
choc froid sur les faces internes de ces fonds de
GV.À cette fin, EDF a réalisé une sélection de chocs froids parmi les transitoires les plus pénalisants du dossier des situations (DDS) du circuit primaire principal. Ont ainsi été notamment retenues diverses brèches primaires. EDF a complété cette sélection par la recherche de transitoires additionnels pénalisants pour le risque de rupture brutale d’un fond de GV, sur la base de l’identification de l’ensemble des sources froides et chaudes susceptibles de causer un choc froid ou une succession de chocs chauds et de chocs froids. Ont ainsi été ajoutées des situations de choc froid consécutives au passage d’un bouchon d’eau froide résultant de l’injection d’eau de refroidissement des joints de pompes primaires en état d’arrêt à froid. EDF a réalisé des analyses de risque de rupture brutale qui couvrent tous ces transitoires. |
La démarche mise en œuvre par EDF pour définir les
chocs froids à étudier est convenable dans son
principe. Toutefois, lors de l’évaluation
réalisée, l’IRSN a mis en évidence des
transitoires qui n’avaient pas été identifiés par
EDF et qu’il convient de prendre en compte dans le
traitement de l’anomalie affectant les GV. En
outre, l’IRSN a relevé des lacunes dans la
caractérisation de certains transitoires pour
lesquels il convient de retenir des hypothèses
plus pertinentes à l’égard de l’étude du risque de
rupture brutale des fonds de GV. Au cours de
l’instruction, EDF a réalisé de nouvelles analyses
de risque de rupture brutale pour ces transitoires
à l’exception de deux d’entre eux.
(suite)À cet égard, dans le cadre de l’analyse du risque de rupture brutale associé aux situations de petite brèche primaire en puissance pour lesquelles un dénoyage des fonds de GV est suivi d’un renoyage rapide par les moyens d’injection de sécurité, EDF a utilisé une hypothèse relative au coefficient d’échange entre le fluide et la paroi qu’il considère plus réaliste que celle utilisée conventionnellement. Bien que la valeur retenue apparaisse faible, des compléments fournis par EDF montrent qu’une accélération notable du refroidissement de la paroi ne conduirait pas à un risque de rupture brutale. Ceci permet à l’IRSN de considérer que l’étude transmise est acceptable dans le cadre du traitement d’une anomalie. Toutefois, l’IRSN estime nécessaire qu’EDF conforte son étude, notamment en approfondissant son analyse de la valeur du coefficient d’échange à retenir. Ce point fait l’objet de la recommandation n°1 en annexe 1. Les deux transitoires qui n’ont pas fait l’objet de nouvelles analyses du risque de rupture brutale correspondent à des transitoires pour lesquels des lacunes de caractérisation ont été identifiées par l’IRSN; il s’agit: * des situations faisant appel à la conduite en «gavé-ouvert», notamment la situation de rupture d’une tuyauterie d’eau alimentaire du GV; * d’une situation particulière de surpression à froid résultant du redémarrage inopportun d’une pompe primaire à la suite d’un événement d’ouverture intempestive de la vanne qui régule le débit dans les échangeurs du circuit de refroidissement à l’arrêt ayant conduit à arrêter la dernière pompe primaire en fonctionnement. Pour ce qui concerne les situations faisant appel à la conduite en «gavé-ouvert», l’IRSN estime qu’elles peuvent être assimilées à une situation d’ouverture des soupapes du pressuriseur, couverte par l’étude des risques de rupture brutale du GV en cas de petite brèche primaire. Toutefois cette conclusion reste à conforter par EDF. Ce point fait l’objet de la recommandation n°1 en annexe1. Pour ce qui concerne la situation de surpression à froid précitée, le redémarrage de la pompe primaire ne peut résulter que d’une erreur humaine. Il convient de noter que cette situation est retenue dans le DDS. Compte tenu des lacunes qu’il a identifiées dans la caractérisation de ce transitoire, l’IRSN estime nécessaire qu’EDF réalise une étude du risque de rupture brutale sur la base d’une caractérisation adaptée. Ce point fait l’objet de la recommandation n°1 en annexe 1. En l’attente, il convient qu’EDF retienne des dispositions visant à diminuer la probabilité d’un redémarrage inopportun d’une pompe primaire par l’opérateur. Ce point fait l’objet de la recommandation n°2 en annexe 1. L’IRSN n’a pas d’autre remarque pour ce qui concerne l’exhaustivité et la pertinence de la caractérisation des situations retenues pour les transitoires de chocs froids pour les GV des réacteurs de 900 MWe. Pour les réacteurs de 1450 MWe équipés de GV de fabrication JCFC (Civaux 1 et 2), les éléments de justification restent à transmettre par EDF. Mesures compensatoires
pour les chocs froids
En complément des mesures déjà
prises à l’égard des chocs chauds, EDF a retenu
les mesures compensatoires suivantes à l’égard des
chocs froids: *mesures à appliquer lors des arrêts de tranche dès lors que le circuit primaire est monophasique: - mesure n°1: la vitesse de refroidissement du fluide primaire doit être inférieure à 14°C/h jusqu’à l’arrêt de la dernière pompe primaire; - mesure n°2: en conduite normale, dès qu’une pompe primaire est arrêtée, la cellule de son moteur doit être débrochée pour se prémunir d’une remise en service inappropriée. Si le débit d’eau dans le circuit primaire est nul, il faut s’assurer que l’écart entre la température de l’eau injectée aux joints des pompes primaires et la «température du primaire» est inférieur à 15°C; - mesure n°3: après arrêt de la dernière pompe primaire, la pression sera amenée à une valeur inférieure ou égale à 7 bar dans les plus brefs délais compatibles avec les contraintes d’exploitation (et notamment avec la réalisation des essais périodiques du chapitre IX des règles générales d’exploitation); * mesure à appliquer lors des redémarrages de tranches: si les pompes primaires sont arrêtées, il faut s’assurer que l’écart entre la température de l’eau injectée aux joints des pompes primaires et la «température du primaire » est inférieur à 15°C. L’IRSN estime que ces mesures permettent de se prémunir contre la survenue de chocs froids dont l’amplitude dépasserait celle prise en compte dans les analyses du risque de rupture brutale des fonds de GV JCFC ségrégés des réacteurs de 900 MWe. Cependant, les hétérogénéités de température dans le circuit primaire étant des facteurs de risques de chocs froids, la notion de «température primaire» utilisée dans les mesures compensatoires n’est pas suffisamment précise. Ce point fait l’objet de l’observation en annexe 2. |
suite:
Par ailleurs, dans le cas de la mise en œuvre de
cyclages de GV avec l’eau de leur alimentation de
secours afin d’accélérer leur refroidissement lors
des arrêts pour intervention, l’IRSN estime qu’EDF
doit prévoir une mesure compensatoire visant à
limiter l’amplitude d’un éventuel choc froid dû à
ce procédé, ce qui fait l’objet de la
recommandation n°3 en annexe 1.
p.11Enfin, l’IRSN rappelle que l’efficacité de ces mesures repose sur la fiabilité de leur mise en œuvre et de l’application des règles de conduite normale. Il importe qu’EDF s’organise pour garantir cette fiabilité. Conclusions sur l’analyse
du risque de rupture brutale
Conformément à la saisine de
l’ASN, ces conclusions ne portent que sur les
réacteurs de 900 MWe. L’ensemble des éléments
n’est pas disponible pour les réacteurs de 1450
MWe concernés (Civaux 1 et 2).La méthode d’analyse du risque de rupture brutale doit être déclinée par EDF sur chaque GV pour prendre en compte notamment sa géométrie et les efforts extérieurs qui lui sont appliqués, qui dépendent de la configuration précise des tuyauteries auxquelles il est relié. Pour ce qui concerne les sollicitations associées à des chocs chauds, EDF a apporté des justifications de l’absence de risque de rupture brutale pour l’ensemble des réacteurs de 900 MWe concernés. L’IRSN n’a pas de remarque concernant les chargements retenus, la méthodologie employée, la taille de défaut postulée, le modèle de calcul tridimensionnel développé par EDF, les conditions aux limites et les sections de dépouillement utilisées dans le calcul. Les facteurs de marge obtenus sont supérieurs à 1, ce qui n’appelle pas de remarque de la part de l’IRSN. Pour ce qui concerne les sollicitations associées à des chocs froids, EDF a apporté des justifications de l’absence de risque de rupture brutale pour l’ensemble des réacteurs de 900 MWe, sauf pour les réacteurs Fessenheim 1, Bugey 4 et Tricastin 4 dont les études sont en cours. L’IRSN n’a pas de remarque concernant la méthodologie d’analyse du risque de rupture brutale, le modèle de calcul tridimensionnel développé par EDF, les conditions aux limites et les sections de dépouillement utilisées dans le calcul. Les facteurs de marge obtenus sont supérieurs à 1 pour l’ensemble des transitoires étudiés par EDF dans le cadre de l’instruction. Néanmoins, compte tenu de la recommandation n°1 ci-dessus, des compléments devront être apportés par l’exploitant. Par ailleurs, la valeur maximale du facteur d’intensité de contrainte en correction plastique en situations normales et perturbées annoncée par EDF (13,6 MPa/m), qui fait l’objet d’une question spécifique de l’ASN, est cohérente avec les études transmises et n’appelle pas de commentaire de la part de l’IRSN. Le caractère acceptable des études du risque de rupture brutale ne préjuge pas des résultats des contrôles prescrits par l’ASN afin de vérifier la conformité aux hypothèses qu’elles retiennent. Les éléments transmis par EDF constituent, en l’état actuel des connaissances, un traitement satisfaisant de l’anomalie, sous réserve des compléments demandés dans les recommandations en annexe. Ils seront complétés par les résultats du programme de caractérisation des matériaux sur la base de pièces sacrificielles, qu’EDF a prévu de mettre en œuvre. Annexe 1 à l’avis
IRSN/2016-00369 du 30 novembre 2016
Recommandation n°1Recommandations L’IRSN recommande qu’EDF définisse, sous six mois, une caractérisation enveloppe des situations de petite brèche primaire (avec et sans reprise de la circulation naturelle), de surpression primaire à froid ainsi que de toutes les situations faisant appel à la conduite en «gavé-ouvert», pour couvrir les chocs froids potentiels correspondants sur les fonds de GV, et réévalue les facteurs de marge associés en justifiant le conservatisme des hypothèses et de la méthode de calcul retenues. Recommandation n°2 L’IRSN recommande qu’EDF retienne des dispositions visant à diminuer la probabilité d’un redémarrage inopportun d’une pompe primaire par l’opérateur à la suite d’un événement d’ouverture intempestive de la vanne qui régule le débit dans les échangeurs du circuit de refroidissement à l’arrêt ayant conduit à arrêter la pompe primaire en fonctionnement. Recommandation n°3 L’IRSN recommande qu’EDF définisse, sous un mois, une mesure compensatoire visant à limiter l’écart entre la température au refoulement du circuit de refroidissement à l’arrêt et la température de l’eau de l’alimentation de secours des générateurs de vapeur dans les situations où un cyclage de ces générateurs est mis en œuvre. Annexe 2 à l’avis IRSN/2016-00369 du 30 novembre 2016 Observation
L’IRSN estime qu’EDF devrait
préciser que la température primaire mentionnée
dans les mesures compensatoires à l’égard des
risques de chocs froids correspond à la
température au refoulement du circuit de
refroidissement à l’arrêt. notes 1. Règles de conception et de construction des matériels mécaniques des îlots nucléaires |