Par Chloé COUPEAU
CAEN (France), 19 mars 2011 (AFP)
Le séisme du Japon relance la question
de la sûreté des piscines à combustibles nucléaires
usagés, qui ne sont jamais pourvues d'enceintes de confinement,
y compris à l'usine Areva de la Hague, ou d'énormes quantités
de matière radioactives sont entreposées.
"La sûreté des piscines, c'est
LA question après Fukushima. Aucune au monde n'est protégée
par une enceinte de confinement" de la radioactivité, comme
c'est le cas pour les réacteurs, souligne le physicien David
Boilley, président de l'Association pour le contrôle de
la radioactivité de l'Ouest.
A Fukushima, les Japonais se battent pour
éviter que les combustibles des piscines des réacteurs 3
et 4 n'émergent de l'eau dont le niveau baisse en raison de l'évaporation,
liée à la panne des systèmes de refroidissement.
Si le combustible dégradé se
retrouvait à l'air libre, le
rayonnement pourrait être tel qu'il risquerait d'interdire l'accès
au site, où plusieurs autres réacteurs sont dans une situation
critique.
Toutes les centrales nucléaires du
monde disposent d'une piscine destinée à recueillir les combustibles
irradiés.
Mais l'usine de retraitement d'Areva à
la Hague, l'un des plus gros entrepôts de matière radioactive
au monde, préoccupe particulièrement les écologistes,
à commencer par Yannick Rousselet, chargé des questions nucléaire
de Greenpeace France.
"C'est le site qui concentre le plus de radioactivité
au monde: 60 des 74 tonnes environs de plutonium recensées en France
se trouvent à La Hague", affirme-t-il.
Toutefois, nuance Monique Sené, chercheuse
au CNRS et co-fondatrice du Groupement des scientifiques pour l'information
sur l'énergie nucléaire (GSIEN), la nature des combustibles
diffère de ceux d'une centrale: "On aurait plus de temps pour
agir à La Hague que pour les piscines de réacteurs car les
combustibles y sont moins chauds. Mais si on échoue, c'est plus
grave", souligne cette scientifique.
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A noter qu'en
France, l'électricité dans son ensemble correspond à
environ 42% de l'énergie primaire (et "seulement" 22% de l'énergie
finale...); comme elle est produite à 75% par le nucléaire,
celui-ci-ci ne représente qu'environ 16% de l'énergie*...
Mais comme elle (la France) concentre la majeure partie de ses combustibles
usagés dans les piscines de la Hague (où travaillent 5.000
personnes), cela représente 48.000 m3 d'eau. Celle du
réacteur 4 de Fukushima ne fait que 1.000 m3.
En 2001, un rapport du cabinet Wise au Parlement
européen évaluait à "67 fois Tchernobyl" les conséquences
d'un attentat contre le site. Cela "semble exagéré",
avait alors commenté l'Autorité de sûreté nucléaire
(ASN).
Areva relativise aujourd'hui toute comparaison
avec le drame de Fukushima.
"Nos combustibles ont passé un à
deux ans dans les piscines des centrales avant d'arriver à La Hague.
Ils sont dix fois moins chauds que ceux de Fukushima", argumente le
directeur de la communication de l'usine, Christophe Neugnot.
Aussi, en cas de panne totale des systèmes
de refroidissement et de secours, "il faudrait au moins une semaine"
pour que les combustibles commencent à émerger, assure Areva
qui souligne disposer d'une réserve de 250.000 m3 d'eau.
Le site, juché à 180 m d'altitude,
est à l'abri d'un tsunami et le risque sismique, modéré,
a été pris en compte, selon cette source.
Pour Mme Sené et M. Rousselet, le site
n'est toutefois pas à l'abri d'une déficience technique et
peut également être exposé à une attaque terroriste:
après le 11-Septembre, des lance-missiles avaient été
positionnés durant plusieurs mois autour de l'usine pour parer à
une éventuelle attaque par avion. Ce dispositif avait toutefois
été rapidement levé, "le temps pour les militaires
de prouver que si un gros porteur se déroute, un avion de chasse
aurait vite fait" de l'intercepter,
selon l'ASN.
clc/phs/js
* (voir site http://www.developpement-durable.gouv.fr/) |