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N°54/55
II - Informations sur les mines: le cas de Saint-Priest


A. Analyse multicritères des différentes options envisagées pour la gestion des résidus de traitement du site de Saint-Priest (Forez)
(N. FOURCADE et P. ZETTWOOG, ARD 1/012/M S - Rapport interne SPT n° 293, juin 1982)

     Dans un rapport précédent* , différentes solutions de gestion du site de stockage des résidus de traitement de l'ancienne usine de Saint-Priest (Forez) ont été présentées, ainsi qu'une liste des différents critères à prendre en compte pour en faire l'évaluation. On examine ici une procédure de recherche de la solution optimale. 
      Cette méthode n'est pas l'application formelle de la méthode de l'analyse coût-bénéfice telle qu'elle est recommandée par la CIPR (n°26, principe d'optimisation).
     L'analyse coût-bénéfice ne paraît, en effet, pas adaptée pour les problèmes posés par les résidus de traitement de minerai d'uranium:
     1. Sur le plan technique, incertitude trop grande sur le coût radiologique des scénarios à long terme et leur probabilité d'occurrence ;
     2. sur le plan économique, impossibilité de tenir compte des coûts radiologiques du futur très éloigné (300-10.000 ans) par les méthodes habituelles d'actualisation.
     Nous avons donc préféré une méthode multicritères qui est proposée ci-dessous.

I. ENSEMBLE DE SOLUTIONS 
     Des solutions de gestion ont été recherchées et ont été réparties en cinq groupes principaux. 

1. Statu quo
     On se contente de maintenir la surveillance appliquée actuellement sans qu'aucuns travaux d'amélioration du confinement ne soient faits. Les niveaux actuels d'exposition étant tout à fait acceptables. 

2. Restitution du site en son état initial après transfert des résidus vers un site de stockage plus approprié 
     On peut penser à un nouveau stockage en carrière par exemple. 

3. Restitution du site en son état initial après utilisation contrôlée des résidus traités. 
     Il s'agit de la fabrication de granulats réutilisables sous contrôle pour des travaux de génie civil. En compression simple on obtient, avec les résidus stabilisés chimiquement par réaction pouzzolanique, 50 à 80 bars. En valeur relative, la lixiviation peut s'avérer 10 à 20 fois plus faible. 

4. Constitution d'un site agricole et forestier sur les résidus asséchés.
     Après assèchement par une méthode bien adaptée au site et apport de terre végétale, on crée plus de 10 hectares de terrain plat recherché en région montagneuse.

suite:
5. Valorisation du plan d'eau 
     On peut valoriser le site en y créant à la fois une base nautique et une centrale hydro-électrique qui pourrait fournir de 0,3 à 1 MW de puissance électrique. L'entretien du site est alors assuré. 

II. ENSEMBLE DE CRITÈRES 
     Pour juger ces solutions, on a défini des critères à appliquer. 
     Certains critères définis ici sont relatifs à la sûreté et à la protection, d'autres sont des critères industriels et économiques. 
     1. Critère de sûreté et de protection

     A1 Réduction du risque d'enlisement 
     A2 Réduction du risque géotechnique 
     A3 Réduction du risque de vol de sables 
     A4 Réduction du risque de lotissement 
     A5 Réduction du risque d'ingestion de radium 
     A6 Réduction du risque d'inhalation de radon 
     A7 Stabilité à long terme en l'absence de surveillance. Risque géomorphique

     2. Critères industriels et économiques 

     B1 Coût de mise en ¦uvre 
     B2 Coût de surveillance 
     B3 Faisabilité industrielle 
     C Retour économique

     Un voile d'étanchéité sur la digue du bassin de stockage du Forez coûterait de 4 à 9 millions de francs et la stabilisation chimique de 1 million de tonnes de résidus: 130 à 140 millions de francs. 
     Le coût de la surveillance peut aller jusqu'à 0,5 million de francs par an. 
     Pour un critère donné, on peut faire un classement relatif des solutions.

III. INDICE DE PRÉFÉRENCE DES SOLUTIONS SELON CHAQUE CRITÈRE
     Le classement selon chaque critère peut être fait à l'aide de la grille présentée en bas de page.
     Pour un critère donné, l'indice 1 désigne la meilleure solution, l'indice a une valeur d'autant plus grande que la solution est moins bien adaptée. L'ordre de préférence que cette grille fait apparaître dans chaque critère n'est pour le moment que le résultat de notre intuition et devra donc être confirmé dans une analyse plus quantitative.


* N. FOURCADE, P. ZETTWOOG - Evaluation de différents scénarios de gestion d'un stockage de résidus de traitement de minerai d'uranium, AIEA-SM-262/18 (voir extraits dans cette Gazette)
p.8
Critères Solutions
Sûreté - Protection
Statu quo Transfert Routes Ponts Revégétation Loisirs Electricité
Enlisement 3 1 1 1 2
Géotechnique 4 1 1 2 3
Vol de matériaux 4 5 3 2 1
Lotissements 4 1 1 3 2
Radium 4 1 1 2 3
Radon 4 1 1 3 2
Long terme 3 1 1 2 3
Economie
Investissement 1 5 4 3 2
Surveillance 4 1 1 2 3
Faisabilité 1 2 4 5 3
Valorisation 4 3 2 3 1

IV. AGRÉGATION DES DIFFÉRENTS CRITÈRES

     Bien que la grille ne soit constituée que de manière intuitive, on peut cependant en tirer quelques remarques qui nous semblent avoir une certaine validité.
     La recherche de la solution la plus adaptée dépend de la méthode d'agrégation des différents critères, c'est-à-dire du poids qu'on accorde à chacun d'eux. Sans entrer dans une analyse rigoureuse qui n'aura de sens que lorsque les valeurs de la grille auront été confirmées, on peut remarquer:
     1. Ne s'intéresser qu'aux critères purement économiques aboutit à la solution du statu quo. 
     2. Ne s'intéresser qu'à la stabilité à long terme conduirait:
     - soit à faire des granulats, 
     - soit à assécher et dévier la rivière dans un lit formé dans le substratum rocheux.
     3. En ce qui concerne les préoccupations de l'administration, on peut dire que les solutions n° 2 à 5 vont dans le sens souhaité en France.
     4. En ce qui concerne les municipalités, qui espèrent pouvoir transformer la région en une zone de repos-détente, la création d'un plan d'eau est la plus intéressante.
     5. En ce qui nous concerne, nous considérons qu'en application du principe d'optimisation, il faut prendre en compte à la fois:
     - les critères économiques,
     - les critères de sûreté et de protection.
     Nous accordons une très faible valeur au critère de stabilité à long terme. Nous considérons que les sociétés du futur seront capables d'assurer leur stabilité politique et administrative. Elles auront donc les organismes compétents pour assurer la protection et la surveillance de ce site. De toute façon, les sociétés du futur devront assurer une surveillance générale de la radioactivité naturelle qui est un facteur biotique fondamental. 
     Si les sociétés évoluaient et entraient en décadence et si elles perdaient leur stabilité administrative, elles auraient à souffrir de bien d'autres maux (NDLR: c'est nous qui soulignons). 

     Nous sommes amenés en tant que radioprotectionniste à favoriser la solution de création d'une zone de loisirs associée à une centrale hydro-électrique. 
     Le problème du radon est bien traité et le risque radium subsistant est vraisemblablement bien compensé par le bénéfice résultant de la valorisation du site.

B. Extraits du rapport AIEA-SM-282/18 (Résumé - Description - Examen des dispositions)

Méthodes d'évaluation des différents scénarios envisagés pour la stabilisation et la gestion d'un stockage de résidus de traitement de minerai abandonné d'un million et demi de mètres cubes
(N. FOUCADE et P. ZETTWOOG)

     Dans le centre de la France, une mine située dans le massif granitique des Bois Noirs (Forez) a été fermée en 1980 après vingt ans d'exploitation, et l'usine de traitement de minerai associée a été démantelée. Plus de deux millions de tonnes de résidus (masse du produit sec) ont été produits dont 1,3 millions, contenant 2.200 g de radium 226, sont stockés derrière un barrage. 

suite:
     On décrit le stockage (conception, implantation, mise en place des résidus, drainage). On donne les compositions radioactives, chimiques et granulométriques des produits stockés. On évalue quantitativement le radium 226 transféré dans l'environnement par la voie aquatique (actuellement environ 109 Bq.an-1, soit 30 mg par an) et de radon 222 par diffusion dans l'atmosphère (actuellement environ 1012 atome.s-1). 
     On a mesuré les concentrations en radium 226 dans des milieux récepteurs physiques et biologiques ainsi que dans des produits de la chaîne alimentaire en provenance de ces milieux. Dans la chaîne alimentaire, on constate que les concentrations sont plus fortes, d'un facteur ne dépassant pas 10 en général, tant en aval qu'en amont, sauf dans les légumes où rien de significatif n'apparaît. 
     On a mesuré en continu l'énergie alpha potentielle en descendants du radon 222. Les valeurs obtenues sont, en fait, du même ordre de grandeur que celles relevées dans d'autres régions uranifères avant exploitation. 
     Cependant, on peut calculer que les quelques personnes du public qui constituent le groupe critique sont susceptibles de recevoir au maximum:
     - par incorporation de radium 226, des équivalents de dose de l'ordre de la dizaine de uSv.an-1(1);
     - par inhalation de descendants du radon 222, de l'ordre de 500 uSv.an-1 environ.
     Il n'est pas possible d'évaluer expérimentalement la contribution exacte du stockage étant donné qu'avant exploitation, des indices de forte irradiation externe avaient été relevés dans la vallée et qu'il n'a pas été fait d'état initial. 
     D'une manière générale, l'Administration en France souhaite qu'à la suite des opérations d'extraction de matériaux du sous-sol:
     - toutes les précautions soient prises pour que les risques d'accident corporel pouvant survenir à la population soient éliminés;
     - que le paysage soit reconstitué, les sols restaurés en vue de permettre la réutilisation dans la cadre de l'économie locale.
     Différents scénarios de gestion et de stabilisation sont envisagés et étudiés sur le plan de la faisabilité et de leur impact environnemental. 

RAPPORT CONDENSÉ(2)

     1. Description du stockage des résidus de traitement de minerai de l'usine des Bois Noirs 
     De 1958 à 1980, l'usine de traitement installée à proximité du gisement de minerai d'uranium du Limouzat, dans le massif des Bois Noirs, au nord des monts du Forez, a traité 2,4 millions de tonnes de minerai sec, produisant 7.500 tonnes d'uranium. On se trouve dans une zone humide et boisée où l'altitude varie de 700 à 900 m. 
     Le massif des Bois Noirs est l'un des trois compartiments d'un horst qui s'est soulevé jusqu'à 1.100 m, au tertiaire, entre deux failles nord-sud actuellement occupées par les sédiments de la limagne de l'Allier à l'ouest et de la limagne de la Loire à l'est. Ces trois compartiments sont séparés par deux vallées occupées, l'une par le Sichon, l'autre par la Besbre. 
     Les déchets solides produits par l'usine ont été, pour un peu plus de la moitié, stockés dans un bassin créé en amont d'un barrage élevé en travers de la vallée de la Besbre, rivière torrentueuse passant au pied de l'usine. Le barrage est du type des grands barrages installés pour les retenues d'eau créées pour les centrales hydroélectriques. Sa longueur est de 500 m, sa largeur 180 m en bas et 10 m en haut, sa hauteur 41 m environ. Un schéma est donné figure 1.

p.9
(1) NDLR: le SIEVERT (Sv) est la nouvelle unité internationale qui remplace le Rem. 1 Sv = 100 Rem - 1mSv = 0,1 mRem
(2) Ce texte est la version condensée d'un rapport interne SPT n°285, portant le même titre et les mêmes noms d'auteurs.
Figure1: Horst, Montage du Bourbonnais

     Sous le barrage, le sol a été décapé jusqu'au substratum rocheux du fond de la vallée. Le décapage concernait le sommet d'une couche alluvionnaire de 2 mètres d'épaisseur environ, cette partie décapée a été remplacée, pour assurer l'étanchéité entre le substratum et la digue, par un parafouille de 6 mètres de large et constitué d'argile compacté. 
     Les sources émergeant à l'emplacement de la digue ont été captées et collectées par 6 drains traversant la digue, ces drains collectent également une partie de l'eau reçue par le barrage (eau de pluie et eau d'infiltration venant du bassin). 
     Le fond du bassin n'a pas fait l'objet d'une préparation particulière. La surface totale est de l'ordre de 20 ha. La rivière Besbre a été déviée dans un canal de 1.200 m, le débit moyen de la Besbre a été estimé à 1000 m3.h-1, mais il peut être 5 à 10 fois plus important.

     1.1. Mode de dépôt et quantité stockée 
     Après lavage et addition de sulfate de chaux, les résidus de traitement du minerai et les boues chimiques (hydroxydes) étaient rassemblées et se présentaient sous forme de boues pompables qui étaient envoyées dans le bassin.
     En fonction des besoins de la mine, une partie de ces boues était cyclonée ; la partie supérieure à 50 m était envoyée dans la mine souterraine pour le remblayage des vieux travaux (1.100.000 tonnes). Les résidus fins restants étaient dirigés dans le bassin où ils sont sédimentés couche par couche en fonction de la position des buses de rejet.
     Donc, on trouve dans le bassin, sur une épaisseur de 1 à 19m:
     - 600.000 tonnes, en poids sec, de résidus fins appelés «fines» stockés dans la partie centrale du bassin, immergés sous 1 à 11 m d'eau. Pour 90% des matériaux, la granulométrie est inférieure à 50 m;
     - 700.000 tonnes, en poids sec, de produits bruts d'usine ou «tout venant» stockés principalement sur les bords du bassin, en dehors du plan d'eau, pour la plus grande partie. Pour 90% des matériaux, la granulométrie est inférieure à 500 m, et pour 30 à 40% inférieure à 50 m. Ces produits «tout venant» se présentent comme un beau sable fin. (...)

4. Examen des dispositions à prendre en ce qui concerne le devenir de ce stockage 
     4.1. Les données du problème 
     4.1.1. Le contexte administratif et réglementaire
     La COGEMA, qui est la société minière ayant exploité le gisement d'uranium des Bois Noirs, est restée propriétaire du site de stockage des résidus et en est donc responsable vis-à-vis de l'administration départementale. Elle a, en particulier, I'obligation d'en assurer la surveillance, dont elle a confié l'exécution à l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire (IPSN) du CEA.

suite:
     Dans la période transitoire actuelle, cette surveillance concerne:
     - le comportement géotechnique du barrage et notamment les relevés piézométriques et le débit des drains;
     - le relâchement du radium et son comportement dans les eaux de surface, et certains indicateurs permettant de suivre la chaîne alimentaire locale;
     - l'émission du radon et son comportement dans l'atmosphère.
     Cette période transitoire, qui se termine le 30 juin 1983, a été accordée par l'administration à la COGEMA pour lui permettre:
     1. De faire un constat approfondi des conséquences environnementales de ce stockage dans la situation actuelle;
     2. d'examiner, compte tenu des différents risques qui sont à associer dans l'avenir à ce stockage, différentes solutions visant à la suppression de ces risques et de proposer la plus acceptable.
     La collecte des données nécessaires à l'établissement de ce dossier a de nouveau été confiée par le COGEMA à l'IPSN. 
     D'une manière générale, I'administration en France souhaite qu'à la suite des opérations d'extraction de matériaux du sous-sol (mines et carrières):
     1. Toutes les précautions soient prises pour que les risques d'accident corporel pouvant survenir à la population soient éliminés ; 
     2. que le paysage soit reconstitué, les sols restaurés en vue de permettre la réutilisation dans le cadre de l'économie rurale locale, et que, si possible, on procède à la valorisation des modifications apportées à la topographie du site. 
     En ce qui concerne les aspects radiologiques posés par les stockages de résidus de minerais d'uranium, c'est la première fois, à l'occasion de cette exploitation des Bois Noirs, que le problème se pose avec une réelle ampleur. Il n'a donc pas été mis en place, en France, une réglementation applicable à ce type de stockage. Il existe, bien sûr, celle qui résulte des directives générales applicables dans la Communauté européenne en ce qui concerne les rayonnements ionisants, et des recommandations de la CIPR. Mais des objectifs plus spécifiques relatifs à la sûreté des ouvrages de confinement et à la protection des populations vis-à-vis des rejets continus ou accidentels, ainsi que des règles limitant ces rejets et précisant la manière d'assurer la surveillance n'ont pas encore été élaborés. Il est considéré, en France, où, en matière de réglementation sur l'environnement, des positions pragmatiques ont toujours été favorisées, qu'à l'occasion de ce dossier des Bois Noirs, les problèmes réels pourront être concrètement identifiés et traités efficacement sur le plan réglementaire.
p.10

     4.1.2. Principes de base et hypothèse de travail 
     La collecte des données nécessaires à l'établissement du dossier que la COGEMA doit remettre à l'administration, doit d'abord comporter un constat de la situation actuelle. Les aspects radiologiques de cette situation ont fait l'objet du chapitre 2.
     Mais il faut examiner également les solutions proposables pour l'avenir : à cet effet, il nous fallait nécessairement prendre position par rapport à l'un des problèmes qui sont les plus discutés au niveau des réunions internationales, celui des dispositions qu'il convient de prendre pour assurer, dès maintenant, la sûreté et la protection à long terme de ces stockages, le long terme signifiant absence de surveillance et possibilité d'occurrence de modifications géologiques majeures. 
     Nos réflexions nous conduisent à affirmer les trois principes ci-dessous:
     1. Tant qu'il existe un cadre institutionnel accepté par tous, les problèmes de sûreté et de protection peuvent être traités de façon parfaitement rationnelle sur les plans techniques et économiques et de façon acceptable par les populations. Dans ce cadre, des organismes nationaux de gestion du stockage et de surveillance de l'environnement, qui existent d'ailleurs en France, peuvent exercer avec efficacité leurs compétences. 
     2. La mise en évidence récente que la radioactivité naturelle est un facteur biotique important, qu¹il faut prendre en compte de toute façon au même titre que la météorologie par exemple, conduit inéluctablement les sociétés évoluées à mettre en place, et ce de façon définitive, des organismes de contrôle de la radioactivité des milieux physiques et biologiques et des matériaux de construction. La surveillance à long terme de ces stockages par les générations futures n'est donc pas une charge excessive à leur imposer. 
     3. Un accroissement de la charge en radium dans la chaîne alimentaire, à la suite de la saturation des barrières qui assurent encore sa rétention, tel que le barrage, et sans doute certaines alluvions, est également un risque possible à l'échelle de quelques dizaines d'années.

     4.2. Examen des différentes solutions envisagées
     4.2.1. Maintien à long terme de la situation transitoire actuelle (statu quo) 
     On pourrait faire une estimation théorique du risque d'apparition des effets stochastiques pour les personnes du groupe critique en considérant un taux d'apparition égal à 10-2 Sv-1, ce qui conduirait, au bout de cinquante ans à un risque inférieur à 5.10 (cas du radium) ou 2,5.10-4 (cas du radon). 
     Dans le cadre de la solution du statu quo, bien sûr sous surveillance, ce niveau de détriment individuel pourrait être maintenu, ou tout au moins ne pourrait croître que lentement, ce qui laisserait le temps de prendre les mesures conservatoires nécessaires. Toutefois, aucun des risques évoqués plus haut ne serait réellement pris en compte. De plus, le financement d'éventuelles mesures conservatoires, si elles devenaient nécessaires à moyen terme, risquerait d'être difficile à trouver. 
     4.2.2. Déplacement des résidus vers un site de stockage plus approprié et restitution des sols à leur état initial 
     Le stockage des résidus dans des anciennes carrières est considéré comme le plus satisfaisant par les experts, et une solution de ce type a été recherchée car elle supprimait tous les risques locaux. Ici, cette solution n'est pas possible car il n'y a pas de carrière dans la région capable de recevoir 1.500.000 tonnes de produits et capable d'isoler à long terme ces produits du public. 

     4.2.3. Stabilisation des boues in situ et reconstitution d'un nouveau paysage après recouvrement
     Deux scénarios de stabilisation sont examinés:
     - couverture générale des résidus,
     - stabilisation chimique de l'ensemble du stockage ou partiel.

suite:
     Dans les deux cas, la difficulté provient de ce que les engins lourds ne peuvent pas manoeuvrer sans précaution sur les boues.
4.2.4. Utilisation des résidus et du barrage en tant que matériaux valorisables pour les opérations de génie civil et restitution des sols à leur état initial
     Au lieu de chercher à confiner les radionucléides dans la zone de stockage, il s'agit ici d'examiner les conditions dans lesquelles les résidus radioactifs pourraient être dispersés de façon contrôlée sur le territoire régional On supprimerait par là même les risques liés à la concentration en un seul point des matériaux radioactifs et les risques liés à la sûreté du stockage lui-même. On satisferait les souhaits de restitution du site à son utilisation primitive exprimés par l'administration
     C'est dans cet esprit qu'est examinée la possibilité de fabriquer les granulats utilisables en génie civil. 
     En France, des problèmes d'obtention de matériaux pour les travaux de génie civil commencent à se poser par suite des restrictions d'ordre environnemental apportées à l'ouverture des carrières et à l'extraction des sables des rivières. 
     Les points à étudier en détails concernent:
     - les traitements particuliers à mettre en ¦uvre pour satisfaire aux exigences techniques;
     - le risque d'exposition aux rayonnements des travailleurs pendant les manipulations des produits et ultérieurement pour les travaux de reprise et réfection des ouvrages;
     - le risque de lixiviation des produits sur place;
     - le recensement des lieux d'utilisation;
     - les coûts de transport et de mise en oeuvre. 
     En France, nous disposons actuellement de 15 millions de tonnes de résidus de traitement de minerai. 
     Une variante de ce type de solution, qui aurait pu être mise en ¦uvre immédiatement, était l'utilisation en matériaux de soubassement de route, mais la réalisation de l'autoroute située à proximité est trop avancée pour que les quantités disponibles soient utilisées.

     4.2.5. Valorisation des modifications topographiques apportées au site par l'exploitation 
     Il s'agit ici de tenter de faire un bien d'un mal. Une solution présentant pour les municipalités locales un intérêt certain est la transformation du bassin en base nautique, qui donnerait un attrait touristique évident à la région. 
     Un certain nombre de travaux seraient nécessaires pour rehausser le niveau de l'eau et recouvrir d'eau les plages actuelles constituées de résidus de traitement. Ceci supprimerait les risques d'enlisement et d'irradiation du public. Le recouvrement de l'ensemble des résidus pourrait par la suite ralentir les transferts verticaux de radon et de radium soluble. Des apports de sables de rivière seraient nécessaires pour reconstituer des plages qui ne présenteraient plus de risques d'irradiation pour le public. 
     Dans cette solution, seuls les risques présentés par les transferts de radium à l'environnement par infiltration dans le sous-sol et au travers du barrage ne sont pas pris en compte. On a vu que, dans la situation actuelle, le détriment radiologique qui pourrait résulter de ces infiltrations était de l'ordre de 10-7 an-1, ce qui est dans le domaine de l'acceptable. 
     Indépendamment ou conjointement à cette solution, il est envisagé d'utiliser le bassin comme la retenue amont d'une petite centrale hydro-électrique. On valorise ici la capacité de stockage d'énergie potentielle offerte par le barrage qui permet de disposer d'un volume d'eau de l'ordre du million de mètres cubes sur une hauteur de chute de 50 mètres.

p.11

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