8 avril L’énergie nucléaire est incompatible
avec la santé humaine, l’humanisme, la préservation de la
biodiversité, la croissance économique, la démocratie
et la transparence, analyse Corinne Lepage (eurodéputée,
présidente de Cap21, ancienne ministre de l'Environnement, et avocate
spécialisée en droit de l’environnement). Une activité,
selon elle, totalement non-durable...
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Des conséquences à court terme restent encore indéterminées en ce qui concerne la santé humaine. La dissimulation des niveaux réels de radioactivité rend l’évaluation impossible. Mais, malheureusement, il semble que les «liquidateurs» japonais soient dans une situation d’exposition très importante et l’étendue géographique de l’exposition laisse craindre des conséquences sanitaires importantes tant en raison de l’ingestion de produits contaminés que de l’irradiation elle-même. Le coût humain et financier est immense. Autrement dit, humanisme et respect de la personne humaine comme priorité sont incompatibles avec le nucléaire. Des conséquences à court, moyen et long terme pour les activités économiques sont actuellement inchiffrables : à commencer par l’agriculture rendue impropre à la consommation dans une zone qu’il conviendra de délimiter mais à continuer par toutes les activités économiques situées dans la zone contaminée qui sera interdite à l’exportation et même à l’utilisation sur le territoire japonais. Autrement dit, la croissance économique et même un développement modeste sont incompatibles avec le nucléaire. Des conséquences à long terme qui condamnent le territoire pour des dizaines, voire des centaines d’années, en raison de la présence de strontium à 5 cm sous la terre. L’eau est contaminée, ce qui signifie que la chaîne alimentaire, la faune, la flore terrestre et maritime sont contaminées dans des proportions et pour une durée indéterminable à ce jour et sans doute indéterminée. Autrement dit, la préservation de la vie et de la biodiversité sont incompatibles avec le nucléaire. Il résulte de ce qui précède que nous sommes en face de la quintessence de la non-durabilité tant sur le plan du fonctionnement démocratique de la société que du développement. Le développement ou plutôt, l’évolution soutenable implique une gouvernance partagée et un développement qui permette celui des générations suivantes ce qui signifie des ressources et des choix possibles. Il est clair que notre croissance fondée sur le nucléaire et les ressources fossiles tourne le dos à cette évolution. Il est donc urgent de sortir de l’hypocrisie: soit nous changeons pour nous orienter vraiment vers le développement soutenable ; soit nous arrêtons la référence constante au développement durable. Mais, le double discours ou plutôt l’océan croissant entre actes et paroles n’est plus tenable. L’humanité doit se ressaisir ou risque de se priver d’avenir. Il est temps de revenir à la raison. Comme le disait Oscar Wilde, le chaînon manquant entre l’Homme et l’animal, c’est nous. Corinne Lepage
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