Nous avons évoqué
succinctement dans la Gazette Nucléaire
No105/106, janvier 1991) les principes nouveaux sur
lesquels la Commission Internationale de Protection Radiologique tente
de fonder ses nouvelles recommandations (CIPR 60 de nov. 1990 et publiée
en 1991). Dans ce doesier nous les analysons d'une façon plus détaillée.
I - L'absence de seuil
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La mise en évidence de la non existence d'un seuil aux faibles doses à partir d'observations directes est difficile. Il en est de même d'ailleurs, mais on ne le dit pas, pour la mise en évidence d'un seuil. La CIPR prend le soin d'expliquer le problème: "Pour de petits incréments de dose au-dessus du fond naturel, la probabilité d'induction d'un cancer additionnel est certainement petite et la valeur attendue du nombre de cas attribuables à l'incrément de dose dans un groupe exposé peut être bien inférieur à 1, même dans un groupe important. Ainsi il est presque certain qu'il n'y aura pas de cas additionnels, mais cela ne fournit pas la preuve de l'existence d'un vrai seuil" (Art. 69). II - Les facteurs de risque
1) Les effets cancérogènes
sont réévalués à la hausse
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Les nouveaux facteurs de risque
sont les suivants:
- pour les travailleurs : 4.10-2 Sv-1 (soit 400 cancers mortels par million de rem x homme ou 10.000 Sievert x homme; - pour la population: 5.10-2 Sv-1 (soit 500 cancers mortels par million de rem x homme ou 10.000 Sv x homme). Cela représente un accroissement du risque d'un facteur 4 par rapport aux estimations de 1977 et, en fait, beaucoup plus puisque désormais il n'est plus dit que ce facteur majore le risque. La CIPR fonde son estimation du facteur de risque cancérogène à partir du suivi de mortalité des survivants japonais des bombardements atomiques. Elle divise le résultat brut de cette étude par un facteur 2 et justifie cette réduction par le fait que la radioprotection concerne des faibles doses reçues à faibles débits de dose (chroniques) alors qu'à Hiroshima et Nagasaki il s'agissait de fortes doses reçues à fort débit de dose. Dans le premier cas les réparations cellulaires fonctionneraient mieux ce qui conduirait à un risque plus faible. Ce point demanderait un examen détaillé que l'on peut résumerainsi: a) La cohorte recensée à Hiroshima et Nagasaki, afin d'être suivie sur toute la vie, comporte un nombre important de personnes ayant reçu des doses relativement faibles: la dose moyenne des individus de la cohorte est de 20 rem (0,2 Sv) et 77% des cancers ont été observés chez ceux ayant reçu des doses comprises entre 3 et 16 rem (voir la traduction de l'article d'Edward Radford dans la Gazette Nucléaire N°84/85, janvier 1988). b) L'étude de mortalité des survivants japonais ne montre pas d'augmentation du risque cancérogène par unité de dose quand la dose croît, sauf peut être pour les leucémies. c) La réduction du facteur de risque pour les faibles débits de dose (effet chronique) ne s'appuie sur aucune étude épidémiologique. Il s'agit là d'un véritable postulat. d) La valeur du risque retenue par la CIPR avant sa réduction par un facteur 2 est déjà une valeur réduite par rapport à l'estimation faite en 1987 par la Fondation officiellement chargée de l'étude sur les survivants japonais (D.L. Preston et D.A. Pierce, Rapport RERF 9-87). Depuis cette date de nouvelles estimations faites à partir des mêmes données conduisent à des valeurs plus faibles sans qu'il soit aisé d'en comprendre les raisons. Ce sont les estimations les plus faibles qui ont retenu l'attention de la CIPR. 2) Les effets héréditaires
3) Effets des irradiations prénatales,
cancers et retard mentaux
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Il semble également que la prédisposition à l'induction de certaines affections malignes soit plus élevée au cours de la période prénatale et de l'enfance que dans l'âge adulte" (CIPR 26, Art. 65). Dans ses nouvelles recommandations la CIPR est plus explicite: "Pendant la période qui va de 3 semaines après la conception jusqu'à lafin de la grossesse, il est probable que l'irradiation peut causer des effets stochastiques dont il résultera un accroissement de la probabilité de cancer pour les enfants nés vivants... La Commission suppose que le coefficient de probabilité de mortalité est au plus égal à plusieurs fois celui de la population prise dans son ensemble" (Art. 91). "Des valeurs du coefficient intellectuel (QI) plus faibles que celles attendues ont été signalées pour certains enfants exposés in utero à Hiroshima et Nagasaki... Un coefficient d' environ 30 points de QI par Sievert pour la dose reçue par le foetus pendant la période qui va de 8 semaines à 15 semaines après la conception" (Art. 92). "Le second résultat (observé sur les enfants irradiés in utero à Hiroshima et Nagasaki) est un accroissement, lié aux doses reçues, de la fréquence d'enfants classés comme "sévèrement retardés". Le nombre de cas est faible, mais les données indiquent une probabilité de l'excès de retard mental sévère de 0,4 à la dose de 1 Sv" (Art. 93). La CIPR dans sa publication 49 de 1986 avait déjà donné ces indications (voir Gazette Nucléaire N°96/97, juillet 1989). Le concept de retard mental grave défini par la CIPR s'applique à un individu qui ne peut pas formuler des phrases simples, ne peut effectuer des calculs arithmétiques simples, ne peut pas prendre soin de lui-même, est placé dans une institution. La CIPR à la fin de son chapitre sur ces effets tient à atténuer la gravité de ses propos: "Toutes les observations sur les QI et les retards mentaux sont faites à partir de fortes doses reçues à fort débit de dose et leur utilisation directe surestime probablement le risque" (Art. 93). Cet optimisme de la CIPR n'est guère justifié. En effet le recensement n'a été effectué à Hiroshima et Nagasaki qu'en 1950, 5 ans après les bombardements. Les survivants immédiats des bombardements ont connu une situation catastrophique dans des villes totalement détruites. Les enfants sévèrement attardés dans de telles conditions n'avaient guère de chance de survie et aucune d'être placés "dans une institution". Une grande partie des enfants touchés a donc pu éehapper aux statistiques de l'étude épidémiologique. III - Les limites de dose et le système de radioprotection
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2) L'importance des facteurs
économiques et sociaux
En principe les membres de la CIPR ont été sélectionnés (par cooptation) sur des critères de compétence scientifique en radioprotection. Il est donc assez curieux de constater que la CIPR insiste de plus en plus sur l'importance des facteurs économiques et sociaux dans les procédures de radioprotection. Il serait logique que la CIPR admette en son sein des économistes, des sociologues et même des psychologues et des psychiatres puisque la Commission tient à protéger la population de l'anxiété radioinduite! "Le but premier de la protection radiologique est de fournir une norme de protection des hommes sans limiter indûment les pratiques bénéfiques qui conduisent à des irradiations" (Art. 15) (souligné par nous). Lorsque l'industrie nucléaire irradie des individus cela ne peut être que globalement positif et la protection de ces individus ne doit pas se faire au détriment des pratiques industrielles. La CIPR 60 n'introduit là rien de nouveau car cette déclaration de foi se retrouve depuis fort longtemps dans les textes de la Commission mais il est bon de le rappeler. La CIPR ne se veut pas contraignante et laisse aux différents pays le soin d'adapter leur propre système à leurs besoins particuliers, c'est-à-dire à leur propre situation socioéconomique: "Comme les conditions d'application diffèrent pour les différents pays, la Commission n'a pas l'intention de fournir un texte réglementaire" (Art. 10). Là aussi rien de bien nouveau par rapport aux textes antérieurs. La CIPR n'en est pas à réclamer un droit d'ingérence (pour utiliser un concept à la mode) dans les affaires d'Etat pour protéger les individus. 3) Il n'est pas possible de fonder la radioprotection
uniquement sur la base de critères scientifiques (!)
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Il est bien évident qu'en pratique, seuls les experts décideurs peuvent être habilités à faire ce genre d'optimisation. Les individus susceptibles d'être irradiés auraient naturellement tendance à considérer leur propre protection comme l'élément déterminant pour juger de la validité de la pratique qui les implique. La Commission exprime clairement qu'elle ne peut fonder son système de radioprotection sur des considérations de santé alors que ses membres sont censés avoir été sélectionnés pour leur compétence dans ce domaine. "L'intention de la Commission est de choisir les valeurs des limites de dose telles que toute irradiation continue juste au-dessus des limites de dose, conduise à des risques additionnels qui peuvent être raisonnablement décrits comme "inacceptables" dans des circonstances normales. Ainsi, la définition et le choix des limites de dose implique des jugements sociaux... Pour des agents tels que le rayonnement ionisant pour lesquels on ne peut supposer l'existence d'un seuil dans la courbe de réponse aux doses pour certaines conséquences de l'exposition, cette difficulté est incontournable et le choix de limites ne peut être basé sur des considérations de santé" (souligné par nous) (Art. 123). "L'approche multi-factorielle de la Commission pour la sélection des limites de dose, inclut nécessairement des jugements sociaux appliqués aux divers facteurs de risque" (Art. 170). Malheureusement la Commission reste très vague sur ces divers facteurs qui ont déterminé ses jugements si ce n'est qu'elle considère qu'ils ne sont pas de son ressort mais doivent être sous la responsabilité des Etats: "Ces jugements ne seraient pas nécessairement les mêmes dans tous les contextes et pourraient en particulier être différents dans diverses sociétés. C'est pour cette raison que la Commission propose que son guide soit suffisamment flexible pour s' adapter aux variations nationales ou régionales" (Art. 170). 4) Les principes fondateurs des limites
de dose et d'acceptabilité du risque
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ìDans la pratique, plusieurs
idées fausses sont apparues dans la définition et la fonction
des limites de dose. En premier lieu, la limite de dose est largement,
mais d'une façon erronée, considérée comme
une ligne de démarcation entre l' "inoffensif" et le "dangereux".
En second lieu elle est aussi largement, mais aussi d'une façon
erronée, vue comme le moyen le plus simple et le plus efficace pour
maintenir les irradiations à des niveaux faibles et pour contraindre
à faire des améliorations. Troisièmement, elle est
communément considérée comme la seule mesure de contrainte
du système de protection. Ces idées fausses sont, dans une
certaine mesure, renforcées par l'insertion des limites de dose
dans les documents réglementaires" (Art. 124).
Le respect des normes quelles qu'elles soient n'est pas une garantie de protection des individus. Dans les discours officiels, si les normes ne sont pas dépassées il n'y a aucun danger. La CIPR considère ces discours comme résultant de conceptions erronées. Dans ces conditions, la notion de "dangereux", très couramment utilisée, demande à être précisée. A la question "Est-ce dangereux ?" on ne peut répondre avant que l'on réponde à une question préalable: à partir de combien de morts dans un groupe donné considérez-vous qu'une situation est dangereuse? Risque "inacceptable", "tolérable",
acceptable"
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5) Les nouvelles limites de dose, une réduction insuffisante. Pour les travailleurs: En 1977 la CIPR avait fixé la limite de dose à 50 mSv par an (5 rem/an). Cette limite semblait alors trop élevée mais la Commission précisait qu'avec une telle limite, dans les faits les doses moyennes ne dépasseraient pas 5 mSv/an (0,5 rem/an). D'autre part la pratique de l'optimisation des procédures et des installations respectant le concept ALARA (As Low As Reasonably Achievable: au niveau le plus bas qu'on puisse raisonnablement atteindre) devait assurer une réduction automatique des doses sans avoir besoin de baisser les limites maximales admissibles. C'est vraisemblablement l'échec de cette conception de la radioprotection qui a poussé la CIPR à réduire les limites de dose. Elle recommande pour les travailleurs une limite comptabilisée sur 5 ans égale à 0,1 Sv (10 rem) soit en moyenne une limite annuelle de 20 mSv (2 rem/an), sans dépasser à aucun moment 50 mSv/an (5 rem/an). Pour la population:
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a) pour les travailleurs
Une limite de dose annuelle moyenne de 20 mSv associée à un facteur de risque cancérogène de 4.10-2 Sv-1 conduit à un risque de mortalité de 8.10-4 (8 morts par an pour 10.000 travailleurs) soit 8 fois le risque déclaré comme acceptable en 1977. Si l'on ajoute le risque génétique on aboutit à un risque de 1 pour 1.000 soit 10 fois le risque professionnel considéré comme acceptable en 1977. b) pour la population Une limite de dose annuelle de 1 mSv et un risque cancérogène de 5.10-2 correspondent à 5 morts par an pour 100.000 personnes soit de 5 à 50 fois plus que le risque admis en 1977 qui était de 1 à 10 morts pour 1 million de personnes. Si l'on ajoute le risque génétique l'écart est encore plus grand. Dans ce risque les retards mentaux graves ne sont pas comptabilisés. Ainsi les nouveaux critères subjectifs permettent à la CIPR de relever d'un facteur 10 les niveaux de risque qu'elle considérait jusqu'à présent comme acceptables. 6) Les modalités d'application des
nouvelles recommandations
IV - Le rayonnement médical
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Ce bilan revient à comparer l'efficacité des dépistages (nombre de personnes guéries) et les coûts correspondants. Pour la CIPR ce coût ne se réduit pas aux dépenses mais doit aussi inclure le "détriment", c'est-à-dire le nombre de personnes qui développeront un cancer radioinduit. Brutalement cela revient à dire qu'il faut comparer pour chaque type d'examen systématique le nombre de personnes que l'on sauve et le nombre de personnes que l'on condamne à terme. Une bonne connaissance des effets biologiques du rayonnement est nécessaire pour faire ces évaluations. C'est certainement la raison pour laquelle la CIPR terminait ses recommandations concernant l'irradiation médicale par un article relatif à la formation professionnelle: "La Commission tient à souligner l'importance qu'il y a à inclure une formation suffisante en protection contre les rayonnements dans l'enseignement et la formation générale des individus qui s'engagent dans une profession médicale ou paramédicale... Une formation plus approfondie en protection contre les rayonnements est nécessaire pour ceux qui projettent de s'engager dans la voie de la radiologie ainsi que pour les scientifiques et les techniciens qui apportent leur assistance dans l'utilisation médicale des rayonnements" (Art. 208). La CIPR dans ses nouvelles recommandations est plus explicite concernant les irradiations médicales. Elle intitule un de ses paragraphes "Optimisation de la protection dans le cas des irradiations médicales". "Parce que la plupart des procédures qui sont cause d'irradiation médicale sont à l'évidence justifiées et que ces procédures sont habituellement directement bénéficiaires à l'individu exposé, moins d'attention a été portée à l'optimisation de la protection dans le cas des irradiations médicales que dans la plupart des autres applications des sources radioactives; il en résulte un champ d'action considérable en ce qui concerne la réduction des doses en radiodiagnostic. Des mesures simples et peu coûteuses sont disponibles pour réduire les doses sans perdre d'information dans le diagnostic, mais l'étendue de l'application de ces mesures varie beaucoup. Pour des investigations similaires les doses couvrent un domaine qui peut atteindre deux ordres de grandeur (deux ordres de grandeur = un facteur 100). On doit mettre à l'étude des questions telles que l'emploi de contraintes de dose, ou de niveaux d'investigation, sélectionnés par des spécialistes appropriés ou l'agence réglementaire pour leur application dans certaines procédures courantes de diagnostic" (Art. 180). La Commission ne semble pas penser que ses recommandations de 1977 concernant l'amélioration de la formation médicale sur les effets biologiques du rayonnement ont été efficaces. Elle propose maintenant un système plus contraignant pour s'assurer que les patients reçoivent le minimum de dose au cours des diagnostics ou des traitements par rayons X que leur état rend nécessaire. V - Le rayonnement naturel
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«La seconde approche
est de fonder le jugement sur les variations des niveaux de dose existants
du fait des sources naturelles. Ce fond naturel peut ne pas être
sans danger mais il donne seulement une petite contribution au détriment
sanitaire que la société subit. Il peut ne pas être
le bienvenu, mais les variations d'un endroit à un autre (à
l'exclusion des fortes variations de dose dues au radon dans les habitations)
peuvent difficilement être appelées inacceptables" (Art.
190).
Puis, renonçant à tout autre critere objectif d'acceptabilité la Commission fonde ses limites de dose uniquement sur le niveau du rayonnement naturel: "En excluant les niveaux d'irradiation très variables dus au radon, la dose efficace annuelle due aux sources naturelles est d'environ 1 mSv, avec des valeurs en haute altitude et dans certaines régions géologiques, au moins deux fois plus fortes. Sur la base de toutes ces considérations, la Commission recommande une limite annuelle de dose efficace de 1 mSv" (Art. 191). On a vu comment ce critère conduisait à considérer comme acceptable pour la population en 1990 un niveau de rayonnement de 5 à 50 fois supérieur à celui que la Commission considérait comme acceptable en 1977. Il n'est pas venu à l'idée des experts que les populations pourraient éventuellement donner leur avis sur ce qu'elles sont prêtes à accepter. Dans sa publication 26 de 1977 la CIPR avait bien défini son point de vue concernant le rayonnement naturel et les critères d'acceptabilité: "Ainsi on considère que les variations régionales de 1'irradiation naturelle impliquent une variation correspondante du détriment exactement de la même manière que, par exemple, les variations régionales des conditions météorologiques ou l'activité volcanique entraînent pour les différentes zones des risques de dommage qui sont différents. Compte tenu de ce qui précède, il n'y a aucune raison pour que ces différences dans l'irradiation naturelle influent sur les niveaux acceptables des expositions provenant des activités humaines, pas plus que ne devraient le faire les différences inhérentes à d'autres risques naturels" (CIPR 26, Art. 90). Les experts de la CIPR ont pris en 1990 une position que les experts de 1977 (pour beaucoup ce sont les mêmes) jugeaient déraisonnables, sans avoir eu le souci d'expliquer un changement aussi radical de leurs critères. VI- Le système de protection en cas d'intervention
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Au cours même d'un incident grave, l'action urgente nécessaire pour sauver des vies, pour prévenir des dommages aux personnes ou pour éviter une augmentation substantielle des proportions de l'incident, peut obliger à exposer quelques travailleurs au-delà des limites fixées pour une exposition exceptionnelle concertée. Ces travailleurs devraient être des volontaires et il est souhaitable qu'une information sur les risques dus à des expositions qui dépassent les limites soit donnée, dans le cadre de leur formation normale, à des groupes de travailleurs parmi lesquels on pourrait, dans un tel cas, trouver des volontaires (CIPR 26, Art. 191). Dans une publication de mai 1984, consacrée à la protection en cas d'accident majeur, la CIPR réaffirmait ce principe du volontariat (CIPR 40, Art. 45). "Une fois l'événement initial maîtrisé, il restera le problème du travail de réparation. Celui-ci devra généralement être effectué en assurant le respect des limites recommandées par la Commission, mais, exceptionnellement, on peut rencontrer des cas dans lesquels l'application des limites impliquerait une dépense excessive, une durée excessive des opérations ou le recours à un nombre excessif de personnes. Il conviendrait alors d'examiner s'il ne serait pas juste d'autoriser une exposition exceptionnelle concertée pour un nombre limité de personnes qui effectueraient diverses opérations essentielles" (CJPR 26, Art. 192). Tchernobyl (1986) est certainement un banc d'essai valable pour juger de la possibilité d'appliquer de tels principes. 1) Ne pas dépasser pour les interventions concertées (en cas d'accident on peut supposer que toutes les interventions sont concertées) deux fois les limites de dose soit 0,1 Sv (10 rem). Les "responsables" soviétiques avaient-ils ce principe en tête quand ils envoyèrent des intervenants sur le toit du réacteur en détresse? 2) Ils pouvaient envoyer ces gens, mais ce devait être des volontaires bien informés des risques qu'ils allaient courir. Les militaires que l'on a utilisés peuvent-ils être considérés comme des volontaires? Ont-ils eu des indications précises sur les effets biologiques du rayonnement, sur les conséquences pour leur santé, voire pour leur survie? A ce propos une information émanant d'EDF (Direction de la Production et du Transport) doit être mentionnée: "Prescription au personnel Troisième partie-projet "Opérations sous rayonnements ionisants" Nous avons par ailleurs considéré que tous les agents de catégorie A (travailleurs sous rayonnement) doivent recevoir une information spéciale sur les risques des expositions dépassant les limites, et, sont "a priori volontaires" pour participer éventuellement à une intervention impliquant une exposition d'urgence" (publié par le Canard Enchainé du 19juillet1989). Les travailleurs sous rayonnement sont d'une façon générale tenus dans l'ignorance des risques qu'on leur fait subir ... La notion de volontaire "a priori" est assez nouvelle. Les employés d'EDF doivent ignorer qu'ils ont été déclarés a priori volontaires pour recevoir en cas de nécessité des doses importantes de rayonnement. L'usage de l'armée pour des interventions en cas d'urgence exclut a priori le critère de volontariat. De fait, la Commission en 1990 n'indique plus dans ses recommandations que les intervenants qui auraient à subir des irradiations à des doses supérieures aux limites doivent être choisis parmi des volontaires. Les recommandations de 1990 en ce qui concerne les interventions en cas de situation d'urgence ou pour la gestion postaccidentelle à long terme demeurent vagues afin de laisser plus de souplesse aux décideurs: p.8
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"Il ne sera jamais correct
d'appliquer les limites de dose à tous les types d'exposition, dans
toutes circonstances. Pour les circonstances auxquelles elles ne sont pas
destinées, comme les cas d'urgence ou au cours d'opérations
spéciales d'importance considérable, elles peuvent souvent
être remplacées par des prescriptions de limites spécialement
développées ou par des niveaux spécifiés de
dose requis pour la mise en oeuvre et le déroulement d'une action"
(Art. 125).
"Le système de protection radiologique recommandé par la Commission en cas d'intervention est basé sur les principes généraux suivants: a) L'intervention projetée doit apporter plus de bien que de mal, c'est-à-dire que la réduction des doses doit être suffisante pour justifier le mal et les coûts, coûts sociaux inclus, de l'intervention. b) La forme, l'étendue et la durée de l'intervention doivent être optimisées afin que le bénéfice net de la réduction des doses, c'est-à-dire le bénéfice de la réduction des doses moins les coûts de l'intervention, doit être aussi grand qu'il est raisonnablement possible de le réaliser. Les limites de dose ne s'appliquent pas dans le cas d'une intervention" (Art. 113). "Le coût d'une intervention ne se réduit pas au seul coût monétaire. Certaines actions de protection ou en vue de remédier à la situation peuvent impliquer des risques non radiologiques ou des impacts sociaux sérieux. Par exemple l'évacuation des gens pendant de courtes périodes n'est pas très coûteuse mais cela peut causer la séparation temporaire des membres d' une famille et une anxiété considérable peut en résulter. Une évacuation prolongée et un relogement permanent sont coûteux et ont parfois été hautement traumatisants" (Art. 213). "Il s'ensuit des paragraphes précédents qu'il n' est pas possible de définir des niveaux quantitatifs d'intervention pour des applications rigides en toutes circonstances" (Art. 214). Ainsi les contre-mesures en cas d'accidents doivent tenir compte des critères qui sont bien loin de la protection de la santé des individus. Les critères socio-économiques deviennent prépondérants. D'ailleurs le détriment dû au rayonnement (décès par cancers, etc.) est généralement traité d'une façon comptable. Dans la publication 40 de 1984 on peut voir (Art. 40) des diagrammes sur lesquels les experts ajoutent le coût des contre-mesures et le détriment. L'école primaire nous a appris qu'on n'a le droit d'ajouter que des éléments de même nature. Malheureusement on ne trouve aucune indication sur le coût d'un décès par cancer radioinduit ou d'un enfant gravement retardé mentalement. VII- La protection des individus?
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2) Il peut y avoir des conflits d'intérêt entre divers groupes de la population concernant leur protection. La CIPR en mentionne quelques-uns: "Si l'irradiation du public est due au relâchement de déchets dans l'environnement, une réduction de cette irradiation pourrait conduire à un accroissement de l'irradiation professionnelle dû au retraitement additionnel et au stockage des déchets" (Art. 208). "L'inspection systématique des installations peut réduire la probabilité des défaillances mais seulement aux dépens d'une irradiation professionnelle additionnelle, et la réduction de l'irradiation du public par un accroissement du stockage des déchets peut causer un accroissement des irradiations potentielles des travailleurs et du public" (Art. 209). La protection optimale des travailleurs peut ne pas coïncider avec celle de la population. Elle peut être en contradiction avec la protection de leur propre famille qui fait partie de la population. On ne voit guère comment résoudre ce genre de contradiction mais occulter ces problèmes n'est certainement pas le meilleur moyen d'y arriver. Evolution des normes de radioprotection de la CIPR Pour les travailleurs:
Pour la population:
Nota: En France la réglementation fixe les limites annuelles à 50 mSv (5 rem) pour les travailleurs et à 5 mSv (0,5 rem) pour la population. La réglementation française ne respecte donc pas les recommandations de la CIPR. Effets cancérogènes à long terme La réponse dépend de l'institution qui effectue l'estimation! CIPR-26(1977): 125
CIPR: Commission Internationale de Protection Radiologique.
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LES EXPERTS FRANÇAIS S'OPPOSENT
AUX NOUVELLES RECOMMANDATIONS
DE LA COMMISSION INTERNATIONALE DE PROTECTION RADIOLOGIQUE
La CIPR a élaboré
en février 1990 un premier projet de Recommandations devant remplacer
celles de 1977 (CIPR 26) en tenant compte des dernières éwdes
sur les effets biologiques du rayonnement, recommandant entre autres
une réduction des limites de dose annuelles pour les travailleurs.
Ce projet a circulé pour avis dans les instances officielles des
différents pays. Une deuxième version de novembre 1990 a
été adoptée après modifications mineures et
les nouvelles Recommandations figurent dans la publication CIPR de 1991
(CIPR 60, vol. 21, 1-3, 1991).
Un rapport de 18 pages ("Analysis of the ICRP text", 26 mars 1990) a été fourni à la CIPR par les experts français. Cette analyse, et les critiques qui en découlent, exprime le point de vue officiel français concernant les principes généraux de la radioprotection. Les principaux intéressés, les travailleurs et la population, n'ont pas été consultés ni même informés. Seuls les experts impliqués dans l'industrie nucléaire ont été habilités à donner leur avis. Il faut remarquer que la procédure choisie par la CIPR pour établir ses nouvelles recommandations est des plus curieuses. En effet les membres de la CIPR insistent beaucoup sur leur totale indépendance vis-à-vis des divers pouvoirs. Dans ces conditions on ne comprend pas pourquoi ils ressentent la nécessité de consulter ces pouvoirs avant de prendre des décisions. Nous commenterons dans l'analyse des experts français les points qui nous paraissent les plus représentatifs de la position officielle française et qu'on retrouve finalement sous une forme ou sous une autre dans tous les textes et déclarations émanant du pouvoir médical qui, dans le domaine de la radioprotection, a davantage le souci de protection de l'industrie nucléaire et des utilisateurs de sources de rayonnement que de la protection des travailleurs et de la population. La CIPR et le facteur de risque cancérogène
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On voit que la CIPR est toujours largement en retard par rapport aux connaissances acquises sur les effets biologiques du rayonnement. Loin d'avoir une position "conservatrice" vis-à-vis de la protection des individus, la CIPR a manifestement une position "conservatrice" vis-à-vis des promoteurs de l'industrie nucléaire. Le suivi des survivants Japonais des bombes
A
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Nos experts auraient-ils lu nos protestations à
ce sujet dans la Gazette? Par contre nous n'avons pas eu connaissance
de réclarnations provenant des chercheurs de l'Institut de Protection
et de Sûreté Nucléaire employés alors par le
CEA ou d'autres épidémiologistes, de l'Institut Gustave Roussy
par exemple...
2 - Affirmation aujourd'hui erronée: depuis quelques annèes ces données sont accessibles aux scientifiques. L'épidémiologiste anglaise Alice Stewart a pu vérifier la validité de ses hypothèses concernant la mortalité par maladie autres que les cancers grâce à une copie informatisée des données. 3- Edward Radford (Président du comite BEIR III de l'Académie des Sciences des USA) après un séjour d'un an à la fondation RERF a pu faire sa propre analyse des données. Il a rendu son étude publique en novembre 1986 (voir la Gazette Nucléaire N°84/85, janvier 1988). Toujours à propos de l'étude des survivants japonais nos experts font remarquer que "de nombreux aspects (de cette étude) peuvent donner lieu à des critiques car l'irradiation par une explosion atomique est très différente de l'irradiation observée dans le champ couvert par la protecdon radiologique". C'est l'évidence même, les survivants de telles catastrophes sont certainement très différents d'une population "normale" soumise à de faibles doses chroniques. Mais la rationalité de nos experts n'est pas choquée quand ils affirment que les malades traités par radiothérapie représentent une population normale et qu'on peut déterminer le risque cancérogène en étudiant les cancers secondaires causés par le rayonnement diffusé aux organes. En somme un malade et un individu bien portant sont identiques. Il est évident que le suivi de toute cohorte particulière présente des difficultes lorsqu'on veut étendre les résultats à une population différente. La première critique dans ce sens date de 1972. Elle a éte formulée par Alice Stewart et fut rejetée a priori par les experts officiels. Le biais qui pouvait être introduit par cette population qui avait survécu à une situation catastrophique conduisait à sous-estimer le risque cancérogène lorsqu'on déterminait le facteur de risque aux faibles doses par extrapolation à partir des fortes doses (Gazette Nucléaire N°56/57, déc. 1983). Il en est est certainement de même, pour des raisons différentes, pour les malades traités par radiothérapie. Un malade est une personne qui d'une façon générale est en mauvaise santé et a une forte probabilité de mourir avant que le cancer radioinduit par son traitement ait pu s'exprimer. Quant aux travailleurs qui ont utilisé le radium, la dosimétrie est calculée à partir de modèles qui ne s'appuient guère sur des données expérimentales. Rejeter actuellement une étude qui met en évidence un risque plus élevé que prévu, alors qu'auparavant elle était adoptée sans critiques est la marque de tricheurs qui désirent que les règles du jeu ne soient définies qu'après que les cartes aient été distribuées. Facteur de risque et coerncients de réduction
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L'hypothèse du seuil Enfin nos experts reprochent à la CIPR de rejeter l'hypothèse du seuil. Pour réfuter le choix de la CIPR nos experts s'appuient sur un court passage du Rapport du Comité BEIR (Comité de l'académie des sciences des USA pour l'étude des effets biologiques des rayonnements ionisants) dans leur publication BEIR V "Effets sanitaires de l'exposition à de faibles niveaux de rayonnement ionisants" (1990) qui indique: «De plus, les études épidémiologiques ne peuvent en toute rigueur exclure l'existence d'un seuil dans le domaine du millisievert (la centaine de millirem)". Mais à ce propos ils sont plus royalistes que le roi puisque dans le Sommaire de 8 pages qui chapeaute le livre et dont on peut penser qu'il représente l'essentiel du message du Comité BEIR il est précisé: "Les données nouvelles ne sont pas en contradiction avec 1'hypothèse, du moins en ce qui concerne l'induction de cancers et les effets génétiques héréditaires, que la fréquence de tels effets augmente avec des niveaux de rayonnement faibles selon une loi linéaire sans seuil enfonction de la dose". Et plus loin il est ajouté: "Le Comité reconnaît que ses estimations de risque deviennent plus incertaines quand elles sont appliquées aux très faibles doses. Cependant, l'écart par rapport au modèle linéaire à très faible dose pourrait soit augmenter, soit diminuer le risque par unité de dose". Il est donc envisagé qu'aux très faibles doses le modèle soit quadratique (diminution de l'effet) mais également supra-linéaire (augmentation de l'effet). La CIPR modifie les limites de dose
"Les conséquences de l'abaissement des limites de dose.
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On voit clairement dans ces critiques
que pour nos experts en radioprotection les critères économiques
passent avant les critères sanitaires.
La réglementation pour les mineurs d'uranium a toujours été particulière. La limite était pour eux supérieure à celle adoptée pour les autres travailleurs sous rayonnement (Gazette Nucléaire N°111/112, nov. 1991). Lorsque la CIPR tenta au début des années '80 de normaliser la situation et recommanda pour les mineurs une limite stricte annuelle de 5 rem en y incorporant l'action du radon et des particules radioactives, les responsables miniers déclarèrent l'impossibilité de respecter cette réglementation. Le passage à 20 millisievert par an (2 remian) avec les nouvelles recommandations rend la situation encore plus difficile. Les experts français font remarquer que les nouvelles normes risquent de compliquer la gestion de l'industrie nucléaire. Ainsi: "Certaines activités comme la fabrication du combustible, la maintenance des réacteurs, les actions d'urgence lors d'accidents de fonctionnement et les travaux nécessités par le démantèlement des installations ont pour conséquence des niveaux d'irradiation dépassant 100 mSv en 5 ans pour de petits groupes d'individus de très haute compétence technique. On estime qu'il y a environ 1.500 personnes qui dépassent le seuil [la limite] de 20 mSv par an dans l'ensemble des installations nucléaires françaises. (souligné par nous). On peut également escompter des difficultés dans l'estimation de la contamination interne. La mesure des activités correspondant aux LAI de 1988 [limites annuelle d'incorporation] est déjà extrêmement difficile - sinon impossible - à réaliser. Quelles dispositions devront être prises au cas où les LAI seraient diminuées dans le futur ? De nouvelles difficultés apparaîtraient aussi dans la dosimétrie externe des neutrons. Il y a de nombreuses incertitudes quant à la façon dont la réduction des limites de doses individuelles vont affecter les nombreuses limites et variables dérivées (LDCA, Limite Dérivée de Contamination de l'Air), décharges, débit de dose en bordure des sites, contenu des colis de produits radioactifs lors du transport, commerce des produits alimentaires en cas d'accident nucléaire etc.). Si ces limites sont réduites dans la même proportion que les limites de dose des travailleurs cela aura des conséquences majeures dans de nombreux secteurs."(Souligné par nous). Ainsi nous voyons que l'abaissement des limites de dose annuelle pose de graves problèmes à l'industrie nucléaire française, tant dans les mines d'uranium que dans de nombreux autres secteurs du cycle nucléaire. Nos "responsables" en radioprotection s'inquiètent des futures diminutions des Limites Annuelles d'Incorporation qui peuvent gêner le nucléaire. Où est donc exprimée leur sollicitude quant à la protection des populations et des travailleurs? "En médecine
L'exposition professionnelle des femmes
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Voici ce qu'en pensent nos experts: "..La gestion de l'exposition des femmes enceintes avec une limite de dose de 1 msv entre la 8e et la 15e semaine de gestation peut être délicate et poser des problèmes psychologiques résultant de l'exclusion des femmes enceintes hors des zones contrôlées dans certains services. En d'autres termes la limite de 5 mSv ne devrait causer aucun problème, leur exclusion des départements de radiothérapie et de médecine nucléaire étant fréquemment observée dans la pratique." Pour notre part, il nous paraîtrait souhaitable que les femmes défendent le droit à l'intégrité mentale et physique de leur enfant à venir et qu'elles puissent être soustraites complètement à l'exposition aux radiations - sans brimades professionnelles -quand elles le demandent. "Quand de nouvelles techniques sont introduites dans le domaine de l'irradiation médicale, des périodes de développement sont fréquemment nécessaires pour obtenir un bénéfice net (de cette pratique par rapport au risque que cette pratique engendre). Ceci justifie un degré de flexibilité dans la réglementation des limites de dose." Cette remarque de nos experts montre que la radioprotection avec pour objectif la réduction des doses est rarement intégrée par les concepteurs de nouvelles techniques et que leur mise en oeuvre n'implique pas obligatoirement un "bénéfice net". Là encore des normes plus contraignantes avec la ferme volonté de les appliquer pourraient modifier d'une façon bénéfique pour tous, la pratique des concepteurs de techniques nouvelles. "Autres conséquences
En conclusion
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Les experts français ont proposé
à la CIPR une limite de dose cumulée sur la vie professionnelle
de 1 Sievert. Avec le facteur de risque cancérogène de l'étude
du NRPB sur les travailleurs du nucléaire du Royaume-Uni, 10% par
Sievert, cela revient à condamner 10 travailleurs sur 100 qui cumuleraient
cette dose à mourir d'un cancer professionnel radioinduit!
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Les premiers résultats
d'une étude de mortalité portant sur plus de 95.000 travailleurs
de l'industrie britannique ont été publiés en janvier
1992 par le National Radiological Protection Board (organisme chargé
de conseiller le gouvernement sur les problèmes de radioprotection).
L'étude montre une augmentation statistiquement significative de la mortalité par leucémies en fonction de la dose reçue (leucémie lymphoïde chronique exclue). Pour les cancers dans leur ensemble l'association est également positive entre l'excès de morts et la dose sans toutefois être statistiquement significative au stade actuel de l'étude. Il a été tenu compte de 1' "effet du travailleur en bonne santé" (the "healthy worker effect") et des temps de latence (2 ans pour la leucémie, 10 ans pour les autres cancers). La dose moyenne cumulée est faible: 33,6 mSv (3,36 rem). Les facteurs de risque trouvés sont sensiblement 2 fois plus élevés que ceux pris en compte par la CIPR en novembre 1990 lorsqu'elle a recommandé de diminuer les limites de dose annuelle des travailleurs. L'irradiation des travailleurs par exposition chronique à faibles doses apparaît donc aussi dangereuse à dose cumulée égale que l'exposition unique en un temps très court (cas des survivants d'Hiroshima et Nagasaki) et 2 fois plus dangereuse que ne l'a admis la CIPR en 1990. Néanmoins le NRPB juge inopportun sur la base de cette étude de rediminuer les nouvelles limites de dose en alléguant que les marges d'erreur sur les facteurs de risque sont grandes et incluent les valeurs recommandées par la CIPR en 1990. (suite)
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L'étude a commencé en 1976 par l'établissement d'un Registre National groupant les informations relatives aux travailleurs sous rayonnement (National Registry for Radiation Workers, NRRW). La cohorte de cette première analyse regroupe les travailleurs dépendant du Ministère de la Défense, les travailleurs du secteur de la fabrication des combustibles nucléaires, des centres de recherche, de l'industrie électronucléaire (3). Pour chaque travailleur sont enregistrées 24 informations concernant son identification civile et professionnelle, la dosimétrie externe, la contamination interne et les incidents radiologiques éventuels. L'enregistrement de 1976 a été effectué sur la base du volontariat: 1.304 travailleurs ont refusé de faire partie du registre NRRW. Les publications de janvier 1992 donnent les résultats préliminaires du suivi de mortalité jusqu'au 31 décembre 1988. L'étude doit se continuer pour accroître la durée du suivi (jusqu'au 31 décembre 1990) et pour augmenter la cohorte. La prochaine publication est prévue pour 1994. Quelques indications sur les données
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Pour l'instant il n'a pas été
tenu compte de la dose d'irradiation par contamination interne. Les 13.663
travailleurs contrôlés pour contamination interne ont recu
une dose externe supérieure à la moyenne, 47 mS v).
- Répartition sociale: ouvriers: 59,0%, non-ouvriers 37,1%, non spécifiés: 3,9%. - Bilan de mortalité au 31 décembre 1988: vivants: 86.636, décédés: 6.660(7,1%), émigrés: 1.850, perdus de vue: 69. Parmi les 6.612 morts certifiés en décembre 1988 il y a 1.828 morts par cancers. Le rapport du NRPB comporte 102 pages dont 33 pages de tableaux numériques fournissant l'essentiel des données de base et des résultats. Les résultats
1 - L'effet du travailleur en bonne santé
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Dans les industries à risque il y a une sélection, à l'embauche sur des criteres médieaux, ou très rapidement par élimination aux postes de travail pénibles des travailleurs ayant une trop mauvaise santé pour supporter les contraintes imposées par les conditions de travail. Disons tout de suite que cette notion n'a pas encore pénétré à l'IPSN (Institut de Protection et de Sûoeté Nucléaire) car les études qui y sont produites n'en tiennent guère compte. Pour éviter le biais que peut produire cet effet du travailleur en bonne santé, le NRPB a effectué, comme autrefois Mancuso, Stewart et Kneale, une analyse interne à la cohorte, c'est-à-dire une étude détaillée de mortalité en fonction des niveaux de dose reçue. Ainsi on peut supposer que les travailleurs ayant reçu des doses très faibles ou nulles servent en fait de référence interne en supposant que l'efficacité du tri sanitaire a été la même pour eux que pour le reste de la cohorte. Cependant cette référence interne est traitée d'une façon qui est loin d'être évidente dans les deux publications sur les travailleurs du Royaume Uni. Pour l'instant il n'est tenu compte que des doses externes. 2 - Le problème des temps de latence
3- L'étude met en évidence
un excès de mortalité par leucémies lié à
la dose de rayonnement
4 - L'étude met en évidence
un excès de mortalité par tumeurs solides lié à
la dose de rayonnement
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Les barres d'erreur incluent la valeur choisie en 1990
par la CIPR ce qui, aux yeux du NRPB, justifie la non prise en compte de
ce résultat nouveau pour établir les normes de radioprotection.
En clair, cette étude conduit à des facteurs de risque cancérogène du rayonnement voisins de ceux obtenus dans l'étude de mortalité des survivants d'Hiroshima et Nagasaki. L'utilisation par la CIPR (et par la plupart des experts en radioprotection) d'un facteur de réduction pour tenir compte de la différence des conditions d'irradiation n'est pas justifiée. A dose cumulée égale, le fait d'irradier à faible débit de dose (chronique) ne réduit pas le risque par rapport à une irradiation rapide (aiguë). Le risque par unité de dose n'est pas plus petit aux faibles doses qu'aux fortes doses. Robert Clarke, le Directeur du NRPB, dans le communiqué qu'il a publié pour annoncer la sortie de cette étude termine par: "Environ 95% de la population étudiée est encore en vie. Par conséquent, pour atteindre une puissance statistique comparable à celle des données sur les survivants japonais des bombardements atomiques, il sera nécessaire d' effectuer un suivi sur une période beaucoup plus longue de la cohorte NRRW. Néanmoins, l'étude est importante. Elle ne fournit aucun appui à ceux qui accusent la CIPR de choisir d' une façon irréaliste une estimation de risque trop élevée. L'exposition professionnelle aux rayonnements conduit à des risques et les estimations courantes de ces risques utilisés pour les normes de radioprotection ne sont pas déraisonnables". Il semble bien que ces remarques visent les experts français. Quelques commentaires à propos de cette étude
2- L'effet du travailleur en bonne santé
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L'utilisation d'une cohorte hétérogène provenant de l'agglomération de groupes venant d'établissements variés, situés dans des régions géographiques différentes peut introduire un biais important. Vouloir mélanger dans une même cohorte l'ensemble des travailleurs de l'énergie nucléaire britannique, américaine, voire française afin d'augmenter la précision statistique des résultats risque fort de diluer les risques pour aboutir à une sous-estimation notable du risque cancérogène du rayonnement. C'est la tendance actuelle des nouvelles études qui sont en projet. 3 - Les erreurs statistiques
4 - Le suivi de mortalité est court
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À CROIRE QUE TOUS LES MATINS, C'EST AU NUCLÉAIRE QUE JE ME RASE? Pourtant, le nucléaire est là.
Aujourd'hui, 75% de l'électricité est nucléaire C.R.I.N. (Comité Régional d'information sur le Nucléaire) |
QU'ON POURRA PAS CONTINUER À BRONZER IDIOT? Pourtant, le nucléaire est là.
Aujourd'hui, 75% de l'électricité est cancérigène C.R.I.N. (Comité Régional d'informatIon sur le Nucléaire) p.16
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OUI JE... CROIX. Pourtant, DIEU est là.
Aujourd'hui, 75 % de DIEU est nucléaire
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