La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°147/148
Rejets radioactifs et... chimiques des centrales
Dossier EDF et commentaires GSIEN
Centrale de référence Nogent-sur-Seine
Voir aussi:
* Centrales nucléaires: des fuites et rejets en pagaille (Sortir du nucléaire 2014)


Importance des rejets radioactifs liquides
    La règle fondamentale résultant de l'arrêté du 10 août 1976, prise pour la protection de la santé publique, limite l'activité supplémentaire apportée par les rejets liquides aux valeurs suivantes:
     - 0,8 Bq/1 (20 pCi/l) pour l'ensemble des radioéléments autres que le tritium, le potassium 40 et le radium,
     - 80 Bq/1 pour le tritium.
    Dans ce cadre, les limites des rejets radioactifs liquides, telles qu'elles existent actuellement, soit pour une centrale de 2 x 1300 MWé 80 TBq/an (2160 Ci/an) pour le tritium et 1,1 TBq/an (30 Ci/an) pour les autres éléments, sont fixées pour assurer l'innocuité des rejets après leur dispersion dans l'eau du fleuve. Dans ces limites qui permettent de couvrir tous les cas rencontrés en exploitation de la centrale en conditions normales, l'exploitant prend toutes les dispositions pour que les activités rejetées soient aussi basses que possible.
    A titre d'exemple, pour l'année 1985, les statistiques font ressortir les valeurs moyennes suivantes, calculées sur les 30 tranches 900 MWé en exploitation industrielle:

                        Arrêtés             Moyenne 1985         Pourcentage
Tritium            28 TBq                  17 TBq                        60%
                       (750 Ci)                (460 Ci)
Hors tritium   0,37 TBq               0,085 TBq                     25%
                 (10 Ci)                  (275 Ci)

Accumulation des radioéléments hors chaîne alimentaire
    L'objet de l'étude d'impact est d'évaluer le transfert vers l'homme de la radioactivité rejetée. Pour cela, les voies de transfert prépondérantes sont recherchées.
    Dans le cas des rejets radioactifs liquides, la voie prépondérante est celle de l'ingestion d'aliments contaminés par irrigation, d'eau de boisson et de poissons prélevés à l'aval des rejets.
    L'exposition par voie externe à des sédiments contaminés n'apparaît pas comme une voie prépondérante et ne donne pas lieu à des niveaux d'exposition significatifs, elle n'est donc pas développée dans l'étude d'impact.

Nota: Les calculs sont effectués en considérant une situation où l'équipement libre s'est établi entre les apports et les sorties (entraînement par l'eau, absorption par les végétaux, décroissance naturelle,...). Cet équilibre est atteint au bout de quelques mois de fonctionnement régulier de la centrale.

Vulnérabilité des cuves de stockage des effluents radioactifs
    La conception des réservoirs T (et S) de rejet des effluents radioactifs liquides est guidée par les impératifs suivants:
- les réservoirs et leurs tuyauteries jusqu'au premier isolement sont dimensionnés pour rester étanches en cas de séisme de manière a éviter un rejet massif d'effluents ayant une activité non contrôlée,
- les réservoirs et leurs tuyauteries associées sont dimensionnés pour résister aux sollicitations résultant d'une explosion (cas d'un accident survenant sur un transporteur de matières dangereuses sur une route ou voie ferrée à proximité du site).

suite:
    Il existe autour de ces réservoirs un système de détection et de rétention des fuites constitué par:
     - l'absence de calorifuge qui permet un contrôle visuel des fuites extérieures éventuelles des réservoirs,
     - l'installation des tuyauteries de liaison venant des BAN et des tuyauteries de brassage et de rejet dans des galeries visitables, permettant la détection et la collecte vers des puisards des fuites éventuelles,
     - un cuvelage étanche autour des réservoirs, avec muret de rétention permettant de collecter les fuites vers un puisard.
    Compte tenu des dispositions de sûreté décrites ci-dessus, cette capacité de rétention n'a pour objet que de retenir et collecter les fuites minimes qui pourraient se produire sur les vannes en exploitation ainsi que les eaux de pluie pouvant être contaminées par ces fuites. En cas de difficulté, il existe également la possibilité de transférer le contenu d'un réservoir T fuyard vers un réservoir de santé S, après toutefois accord de SCPRI.

Volume et fréquence des rejets radioactifs
    Le volume d'effluents radioactifs produit est variable, fonction de l'état de la tranche (fonctionnement ou arrêt pour rechargement) et de son mode d'exploitation (fonctionnement en base ou en suivi de charge).
    En valeur indicative, on peut cependant estimer le volume annuel à rejeter par le circuit KER (réservoirs T) à 25.000 m3/an et par tranche qui se répartissent en 8 100 m3 provenant du TEP et environ 16.000 m3 provenant du TEU.
    Cette valeur représente la capacité d'une soixantaine de réservoirs T, pour deux tranches, ce qui conduit au rejet de un à deux réservoirs par semaine.
    Le débit maximal de vidange est de 150 m3/h. Cependant, les contraintes apportées par la nécessité de la prédilution et le respect de la limite de concentration maximale ajoutée peuvent réduire le débit de vidange.
    Pour le circuit SEK (réservoirs Ex), le volume annuel rejeté est estimé à 100.000 m3 par tranche. Le débit maximal de vidange est de 300 m3/h. Les effluents étant réputés non ou très faiblement radioactifs, il n'y a pas de contrainte de rejet liée à la prédilution ou à la concentration maximale ajoutée.

p.18

Les rejets d'acide borique d'une tranche REP de 1300 MWé (voir aussi Gazette N°98/99 - 1989)

1 - LE TERME SOURCE
    L'acide borique est utilisé dans le circuit primaire pour la régulation de la réaction nucléaire; l'atome de bore de la molécule d'acide borique possède, en effet, la propriété d'absorber les neutrons. La diminution de la teneur en acide borique, donc en atomes de bore, du circuit primaire permet de compenser tout le long du cycle du combustible les effets de l'épuisement de celui en éléments fissiles producteurs d'énergie. La courbe ci-après présente grossièrement la variation de la concentration de l'eau primaire au cours d'une année, entre 6.600 ppm et 0. I1 convient de noter que lorsque le réacteur est à l'arrêt, la teneur en acide borique est portée à 12.000 ppm pour prévenir tout redémarrage intempestif de la réaction nucléaire.

1.1 - Les rejets d'acide borique
    Le fonctionnement d'une tranche nucléaire à eau sous pression nécessite des mouvements d'eau plus ou moins importants suivant son état (fonctionnement en base ou en suivi de charge, arrêt de tranche), ce qui se traduit par une production d'effluents qui sont tous collectés et traités en regard de leur activité.
    Le schéma, ci-après, montre les circuits de production et de rejets d'acide borique, ainsi que les volumes annuels mis en œuvre.

    Les quantités rejetées dans ces conditions sont essentiellement fonction du terme source (épuisement du combustible) et de la nécessité du traitement sur évaporateur, conditionnée par l'activité des effluents, qui élimine l'acide borique.

1.1.1 - Les productions exceptionnelles
    Les concentrats de l'évaporateur du circuit de traitement des effluents réutilisables ont une teneur de 42.000 ppm en acide borique et sont stockés dans des réservoirs avant leur réutilisation par mélange avec l'eau d'appoint au circuit primaire. Dans certaines circonstances (intervention sur le réservoir, qualité de l'eau non conforme aux spécifications), il peut être nécessaire de pratiquer une vidange, ce qui conduit à un transfert de 3.150 kg d'acide vers le circuit de traitement des effluents usés (75 m3). La probabilité d'occurrence d'une telle vidange est d'une fois par an au plus.

1.1.2 - Les quantités rejetées

    L'efficacité du traitement par évaporation peut être estimée à 10: l'évaporateur retient les 9/10 de l'acide borique qu'il traite. Avec cette hypothèse, la concentration de l'effluent dans le réservoir «T» de rejet est d'environ 300 ppm. La quantité d'acide rejetée annuellement est de l'ordre de 6.300 kg par tranche, à laquelle il faut ajouter le rejet exceptionnel provenant du transfert visé ci-dessus: 315 kg (3150/10), soit un montant total de 6.615 kg/tranche.

suite:
    Si l'activité des effluents ou les indisponibilités de l'évaporateur font qu'aucun traitement n'est pratiqué, les rejets totaux d'acide seraient de 66 150 kg/tranche.
    L'expérience d'exploitation des tranches de 900 MWé montre que la réalité se situe à mi-chemin entre ces deux extrêmes.
    Les rejets d'acide borique d'une tranche de 1300 MWé s'élèvent donc à 34.000 kg/an.
    Les autorisations de rejets d'effluents radioactifs liquides étant accordées pour la vie de la centrale, les quantités demandées sont donc des enveloppes maximales. I1 a donc été fait l'hypothèse que, dans un même réservoir, on cumule sans traitement sur évaporateur les rejets normaux (teneur 3000 ppm) et la vidange d'un réservoir de stockage d'acide borique concentré à 42.000 ppm, ce qui conduit à une concentration de 7.200 ppm et à une quantité à rejeter arrondie à 5 000 kg.
    I1 faut toutefois noter que, dans la pratique, la quantité d'acide la plus fréquemment rejetée dans le milieu récepteur est de l'ordre de 200 kg pour une vidange d'un réservoir «T». Elle correspond au cas où l'effluent est rejeté après retraitement (soit plus de 80% des rejets).
    Si la prédilution de 500 imposée par le SCPRI aux rejets des réservoirs «T» n'est pas un facteur limitant du temps de vidange, le flux maximal d'acide sur 24 h est donc de 5.000 kg, ce qui correspond à un flux de 2.000 kg en 2 h, le débit maximal de vidange étant égal à 150 m3/h.

1.2 - Les concentrations maximales ajoutées au milieu récepteur
    Les calculs qui suivent sont effectués pour un débit du fleuve égal à 20 m3/s, de valeur inférieure généralement retenue dans les autorisations de rejet d'effluents radioactifs liquides. Les concentrations sont exprimées en bore (mg/l) et en acide borique (mg/1 H3BO3).

2 - L'IMPACT DES REJETS D'ACIDE BORIQUE
2.1 - Sur la potabilité de l'eau
    Les normes américaines pour les eaux de surface sont identiques aux valeurs guides à ne pas dépasser, édictées par la Directive du Conseil des Communautés Européenne (C.C.E) du 16 juin 1975, concernant la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire. Cette valeur est de 1 mg/1 en bore; pour la C.C.E, cette eau est conforme lorsque cette valeur est respectée pour 90% des échantillons, ceux-ci étant prélevés «à intervalles réguliers».
    Néanmoins, d'après l'United States Atomic Energy Commission, dans l'eau de boisson, on considère que les concentrations en bore ne sont pas dangereuses jusqu'à 30 mg/1.

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2.2 - Sur l'agriculture
2.2.1- Le bore en agriculture - Besoins et toxicité
    Le bore est présent à l'état naturel dans l'eau et la solution du soi sous la forme neutre H3BO3. Ce n'est qu'au- dessus de pH 9,2 que la forme H3BO3 domine. H3BO3 est retenu par les argiles et les polyhydroxydes de fer et d'aluminium. En revanche, il migre rapidement dans les sols sableux de faible pH.
    Le bore est un élément indispensable à la croissance des plantes. Dans les sols sableux ou limoneux des climats tempérés, on observe des déficiences en bore que l'on corrige en apportant les engrais à raison de:
- 1,2 à 3,2 kg/ha pour les plantes ayant des besoins élevés en bore (légumineuses, betteraves)
- 0,6 à 2 kg/ha pour les autres cultures.
    Dans les vergers, on a recours à des traitements foliaires à raison de 0,2 kg/ha en vaporisant des solutions de bore contenant 550 mg/1.
    Les quantités de bore présentes naturellement dans les sols (7 à 80 ppm) ne provoquent aucun phénomène de toxicité. On ne rencontre de toxicité que si les engrais boratés sont appliqués en quantité trop importante ou si l'eau d'irrigation est trop riche en bore. Les phénomènes de toxicité sont corrigés par le chaulage (apport de Ca).
    Pour les eaux d'irrigation, la tolérance des différentes cultures est présentée dans le tableau ci-joint. Toutes les cultures supportant des concentrations inférieures à 0,3 mg/1. Les cultures céréalières sont sensibles à des concentrations de l'ordre de 2 mg/1; la betterave, plus résistante, n'est sensible qu'à des concentrations dépassant 4 mg/1.
    Ces ordres de grandeur correspondant à des concentration moyennes dans l'eau sur toute la période d'irrigation.
    Lorsqu'il s'agit d'apport discontinu, les tolérances des cultures sont beaucoup plus élevées. Ainsi, sur le mais, en application unique, il faut apporter 1,12 kg/ha sur les plantules pour constater une diminution de rendement. Si l'on considère que cet apport est effectué lors d'une irrigation de 30 mm (durée 4 à 5 h environ), cela correspond à une concentration moyenne dans l'eau d'irrigation de 3,7 mg/1. Pour le petit pois, il faut 5 kg/ha en apport unique pour constater une diminution de rendement (soit 16,7 mg/1 dans 30 mm d'eau d'irrigation).

2.2.2 - Impact des rejets en bore d'une centrale nucléaire
    La teneur actuelle de l'eau de Seine est en moyenne de 0,05 mg/1. En rejet normal, la concentration de l'eau de Seine atteint une fois par semaine pendant 5 heures la valeur de 0,15 mg/1. En faisant l'hypothèse que les cultures sont irriguées une fois par semaine, et uniquement au moment où ont lieu les rejets, on obtient une concentration moyenne de l'eau d'irrigation de 0,15 mg/1, inférieure d'un facteur 2 au seuil de toxicité des cultures les plus sensibles.
    Si l'on considère que l'irrigation s'étend sur 20 semaines, à raison de 30 mm une fois par semaine, l'apport par hectare est de 0,9 kg, ce qui correspond aux doses recommandées pour les engrais.
    Dans le cas du rejet exceptionnel, une fois par an au plus, la concentration de l'eau de Seine serait de 2,3 mg/1 pendant 2h et de 0,48 mg/1 en moyenne sur 24h. Si une irrigation a lieu à ce moment-là, elle peut être comparée à un apport unique qui n'est toxique qu'à des concentrations de l'ordre de 4 à 16 mg/1.
Dans tous les cas, même en se plaçant dans des conditions pénalisantes de rejet et d'irrigation simultanées, on se trouve en dessous des seuils de toxicité.

suite:
Tolérance des cultures au bore apportée par l'eau d'irrigation

CULTURES SENSIBLES
Tolérance comprise entre 0,3 et 1 ppm

Pamplemousse    des plus sensibles
Avocat
Orange
Abricot
Pêche
Cerise
Raisin
Pomme                 aux
Poire
Prune
Haricot sec
Topinambour
Noix             moins sensibles

CULTURE SEMI-TOLÉRANTE
Tolérance comprise entre 1 et 2 ppm

Patate douce      des plus sensibles
Potiron
Poivron
Avoine
Maïs
Blé
Orge                                aux
Olive
Petit pois
Radis
Tomate
Coton
Pommes de terre
Tournesol            moins sensibles

CULTURES TOLÉRANTES
à des concentrations entre 0,2 et 4 ppm

Carotte         des plus sensibles
Laitue
Chou
Navet
Luzerne
Betterave rouge      aux
Betterave sucrière
Datte
Asperge         plus résistantes

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2.3 - Sur la vie aquatique
    Le bore ne présente des effets toxiques sur la vie aquatique qu'à de fortes concentrations. Ces valeurs sont à rapprocher des concentration maximales rejetées sur 2 heures: 13,9 mg/1 en acide borique ou 2,3 mg/1 en bore.
    Ainsi SHEETS (1957) et HERMANN (1959) rapportent que la perturbation de la microfaune impliquée dans les mécanismes d'autoépuration de la matière organique n'apparaît qu'à partir de concentration en acide borique de l'ordre de 500 mg/1.
    Les doses létales pour le poissons sont encore plus élevées. Dans le tableau ci-dessus, il apparaît qu'il faut maintenir un poisson au moins pendant 18 heures dans une eau contenant environ 6 g/1 d'acide borique pour constater la mortalité de 50% des individus testés.

Commentaire GSIEN
Analyse des hypothèses de contamination (§ 2.2.2 )
    Dans la première hypothèse et en considérant le fonctionnement simultané de 2 tranches, on arrive en concentration au seuil de toxicité pour les cultures les plus sensibles.
    Dans la deuxième hypothèse avec 2 tranches on double les doses recommandées pour les engrais.
    Dans la troisième hypothèse, toujours avec deux tranches on arrive à des concentrations toxiques.
Si les agriculteurs utilisent simultanément des engrais contenant de l'acide borique, les effets sont amplifiés.

En conclusion:
1 -Il apparaît important de réduire les rejets d'acide borique au moins d'un facteur 4 pour rester en dessous des seuils toxiques.
2 - Les agriculteurs utilisant l'eau de Seine pour irriguer devraient être avertis, soit pour irriguer en dehors des périodes de rejets polluants, soit pour ajuster leurs engrais et tenir compte de la qualité des eaux d'irrigation.

Dans tous les cas une réduction importante des rejets semble la solution la plus simple.

Remarque sur le §1.2
    Il n'est pas clairement indiqué si les rejets seront interdits pour des débits de la Seine inférieurs à 20 m3/s. Il faudrait prendre en compte le fait que les périodes d'étiage coïncident avec les périodes de sécheresse pendant lesquelles l'irrigation est la plus importante.

suite:
Les rejets de phosphates
Les réservoirs «T»
Les phosphates peuvent avoir trois origines:
     1 - L'acide phosphorique utilisé pour la décontamination de matériels ou le nettoyage des circuits, lorsque ceux- ci sont nécessaires.
     2 - La vidange d'une file du circuit de refroidissement des circuits auxiliaires de la chaudière nucléaire (100 m3 conditionnés 500 g/m3), ce qui a lieu au plus une fois par an et par site.
     3 - Les fuites du circuit de refroidissement des auxiliaires de la chaudière nucléaire, collectées dans des puisards.
    La concentration maximale, cas 1 et 2, est de l'ordre de 150 g/m3. Elle est atteinte une fois par an et conduit à un rejet de 110 kg en 24 h. (45 kg en 2h), soit la quantité contenue dans un réservoir T.
    La concentration la plus probable, cas 1 est de l'ordre de 50 g/m3 avec une quantité rejetée d'environ 40 kg en 24 h. Compte tenu de l'expérience acquise, cette valeur est largement estimée.

Les réservoirs «Ex»
    Ces réservoirs collectent les fuites ou vidanges d'appareils parcourus par l'eau du circuit de refroidissement des auxiliaires de la salle des machines, ou bien, au plus une fois par an et par site, la vidange de ce circuit lui- même.
    Avec ces hypothèses, les concentrations en phosphates varient de 2,5 g/m3 à 120 g/m3, cas majorant. Le rejet maximal correspondant est donc de 90 kg pour un réservoir.

Les quantités annuelles rejetées
    Que ce soit par une voie ou par l'autre, les quantités annuelles rejetées sont très variables et dépendent des interventions sur les circuits.

Commentaires sur les rejets de phosphates
    La phrase relative à la dilution de la «bouffée» ne concerne pas «l'augmentation de la teneur naturelle du fleuve» puisque les concentrations qui sont indiquées sont celles obtenues après dilution totale par le débit de 20 m3/s.
    A la sortie de l'émissaire cette concentration peut atteindre 150 mg/1 (150/m3), valeur indiquée dans le premier paragraphe.
    A l'évidence des problèmes peuvent être rencontrés entre le point de rejet et le point de dilution totale.
    I1 est fait référence aux observations faites sur les autres centrales mais sans indications précises. Pour mieux comprendre il serait opportun de fournir les rapports précisant les mesures effectués et les procédures des prélèvements.

Les conséquences des rejets de phosphates sur le milieu récepteur
    On peut estimer, en moyenne, que la vidange d'un réservoir T ou Ex apporte une dizaine de Kg (fuites des circuits de refroidissements des auxiliaires), ce qui, pour un débit du fleuve égal à 20 m3/s, conduit à un pic de concentration en phosphate inférieur à 0,1 mg/1.
    Les rejets maximaux que l'on peut rencontrer une fois par an, 185 kg en 24 h et 95 kg sur 2 h, vont se traduire par une augmentation locale de la teneur naturelle du fleuve en phosphates, de l'ordre respectivement de 0,1 mg/1 et 0,65 mg/1 (débit = 20 m3/s). Cette bouffée est emportée par le courant et se dilue rapidement en raison des effets de la diffusion et des apports du bassin versant intermédiaire.
    De ce fait, les risques d'eutrophisation restent très limités.
    La directive européenne du 16 juin 1975 relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire prévoit une valeur guide maximale de 0,7 mg/1 en P205 (soit 0,5 mg/1 en P04) en valeur moyenne pouvant être dépassée 10% du temps.
    Les rejets maximaux de phosphates sont donc acceptables.

p.21

Conclusions
    Les rejets annuels des phosphates pour les deux tranches de la centrale de Nogent peuvent être estimés à 2.400 kg. Les flux maximaux rejetés sur 2 h et 24 h sont respectivement de 95 kg et 185 kg. Ils correspondent à la vidange simultanée d'un réservoir T et d'un réservoir Ex.
    I1 apparaît donc que les rejets de phosphates n'ont pas d'influence significative sur la qualité des eaux.
    En outre, EDF exploite actuellement 42 tranches nucléaires à eau sous pression dont tous les rejets, notamment ceux de phosphates, sont similaires du fait de la standardisation des installations. Or, les programmes de surveillance mis en œuvre sur chaque site n'ont pas détecté de modification du milieu récepteur, en particulier pour les centrales en bord de Loire, fleuve sujet à des risques d'eutrophisation.
    On peut donc conclure à l'absence d'impact des rejets de phosphates.

Rejets d'ammoniaque (extraits)
    Le rejet maximal est obtenu à la vidange de la solution de conservation du circuit secondaire, conditionné à 80 g/m3, ce qui conduit, en principe une ou deux fois par an, à un rejet de 60 kg par jour, soit la quantité contenue dans un réservoir (flux sur 2h: 48kg)

Les rejets annuels
    En conclusion, les rejets annuels peuvent être estimés à environ 200 kg par an et par tranche.

Concentration ajoutée au milieu récepteur et impact
    Avec l'hypothèse de rejet la plus pessimiste et un débit d'étiage de 20 m3/s, les concentrations maximales ajoutées sur 2 h et 24 h sont respectivement de 0,4 mg/1 et 0,05 mg/1.
    La directive européenne du 16 juin 1975 relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire fixe comme valeur «impérative» maximale 1,5 mg/1, valeur moyenne pouvant être dépassé 10% du temps.
    La directive européenne du 12 octobre 1978 relative à la qualité des eaux douces ayant besoin d'être protégées ou améliorées pour être aptes à la vie des poissons, prévoit une valeur impérative de 1 mg/1 (moyenne mensuelle).

Conclusions
    Les rejets annuels d'ammoniaque pour les deux tranches de la centrale de Nogent peuvent être estimés à 400 kg. Les flux maximaux rejetés sur 2 h et 24 h sont respectivement de 60 kg et 100 kg. Ils correspondent à la vidange simultanée d'un réservoir T et d'un réservoir Ex.
    En conséquence, les rejets d'ammoniaque sont donc sans influence notable sur la qualité des eaux, même en retenant les hypothèses les plus pessimistes.
    En outre, EDF exploite 42 tranches nucléaires à eau sous pression dont tous les rejets, notamment ceux d'ammoniaque, sont similaires en raison de la standardisation des installations. Or, les programmes de surveillance mis en œuvre sur chaque site n'ont pas détecté de modifications significatives du milieu récepteur. On peut donc conclure à l'innocuité des rejets d'ammoniaque.

suite:
Les rejets d'E.D.T.A L'origine des rejets
    L'E.D.T.A (éthylène diamine-tétracétique) est un produit utilisé pour la décontamination de matériels. Son usage est relativement limité puisque la quantité annuelle consommée par an et par tranche est de l'ordre de 25 kg en moyenne. Néanmoins, le flux maximal rejeté sur 2 h est estimé à 15 kg.
    Si l'on fait l'hypothèse que le débit du fleuve est de 20 m3/s, le pic de concentration que l'on obtiendrait avec les rejets maximaux serait de l'ordre de 0,1 mg/1.

L'impact des rejets
    Les effets toxiques de l'E.D.T.A ne se manifestent qu'à de très fortes concentrations.
    Ainsi, on note une inhibition de la multiplication des cellules de Microcystis aerogina (algue bleue fréquente lors des pullulations algales lacs ou rivières) à partir de 76 mg/1.
    L'inhibition de la multiplication de Pseudomonas pudita (bactérie courante des eaux superficielles) intervient à partir de 105 mg/1.

Conclusions
    Les rejets d'E.D.T.A sont donc sans influence sur le milieu récepteur. Ceci est d'ailleurs confirmé par les programmes de surveillance mis en œuvre sur les sites équipés de tranches nucléaires à eau sous pression. Il s'agit en fait de rejets en «bouffées», répartis de façon aléatoire tout au long de l'année.
    Cependant, l'expérience d'exploitation montre qu'ils peuvent être estimés à 1.200 kg par an et par tranche.

Commentaire GSIEN
Les rejets d'E.D.T.A.
    - La concentration maximum au point de rejet n'est pas indiquée, seule la concentration après dilution totale est précisée.
    - Les sels d'E.T.D.A sont utilisés comme agent chélateur pour les métaux lourds. Il pourrait donc y avoir au point de rejet une remise en suspension de ces métaux.

Débit de la Seine
    Le débit de 20 m3/s a été utilisé dans les calculs comme débit minimum. Des étiages plus prononcés sont possibles (page 5 du rapport de Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France).
    Le taux de confiance pour le calcul des crues d'occurrence centennale et millénale n'est pas indiqué. Il serait important de connaître quel point de la plage de confiance a été pris comme référence.
    La fréquence des débits donnant lieu à des débordements en aval de Nogent (105 m3/s) n'est pas indiquée.

Les rejets d'hydrazine et de morpholine
    L'hydrazine (NH2 - NH2) est un réducteur puissant utilisé pour éliminer l'oxygène dissous dans l'eau du circuit secondaire, selon une réaction rapide qui donne de l'azote, de l'eau et des traces d'ammoniaque.
    La concentration en hydrazine dans le circuit secondaire est maintenue égale à 0,01 mg/m3. La morpholine (C4OH8NH) est également un produit de conditionnement anticorrosion du circuit secondaire qui maintient le pH aux alentours de 9. Sa concentration est égale à 6 g/m3.

p.22

Les rejets vers les réservoirs «T»
    En fonctionnement normal, les purges des générateurs de vapeur sont recyclées au condenseur après avoir subi un traitement d'épuration. Toutefois, après les arrêts de tranche, ces purges sont dirigées pendant quelques heures vers les réservoirs «T» pour éviter la saturation des systèmes de traitement.
    Quelque fois par an, les réservoirs «T» contiennent donc de l'hydrazine et de la morpholine.
    Dès qu'un réservoir est rempli, il est isolé et son contenu brassé pour obtenir une homogénéisation. Pendant cette opération, l'eau est aérée, ce qui dégrade l'hydrazine dont les rejets sont négligeables.
    Le rejet maximal de morpholine correspond au remplissage complet d'un réservoir par les purges des générateurs de vapeur: 4,5 kg.

Les rejets vers les réservoirs «Ex»
    Les fuites de la salle des machines, les vidanges des capacités et des circuits du poste d'eau sont collectées et acheminées vers les réservoirs Ex.

L'hydrazine
    Pendant le fonctionnement de la tranche, les rejets d'hydrazine suivent les mêmes voies que ceux de morpholine. Compte tenu de l'oxydation rapide de l'hydrazine, les quantités rejetées sont négligeables.
    Pendant les périodes d'arrêt de tranche, la conservation humide d'une partie de l'installation nécessite un volume d'eau conditionnée à 200 g/m3 d'hydrazine.
    La vidange de ce volume dans un réservoir Ex conduirait à la concentration maximale théorique dans ce réservoir de 200 g/m3, ce qui correspondrait à un rejet de 150 kg. Cependant, l'oxydation de l'hydrazine qui peut être achevé par addition d'eau oxygénée, conduit en réalité à des rejets négligeables. En considérant que 90% de l'hydrazine est détruite au cours du stockage, le rejet effectif serait de 15 kg avec les flux suivants:
- flux maximal sur 24 h: 15 kg
- flux maximal sur 2 h: 10 kg

La morpholine
    Compte tenu de la dilution, la concentration la plus probable dans les réservoirs est de 3 g/m3. La concentration maximale correspond à une vidange partielle du circuit secondaire au début de conditionnement chimique au démarrage. Le rejet maximal est calculé pour deux vidanges en un jour, de réservoirs à 6 g/m3:
- flux maximal sur 24 h: 9 kg
- flux maximal sur 2 h: 3,6 kg.
    Dans la pratique, les rejets les plus probables sont de l'ordre de 2 kg par jour.

Les concentrations maximales ajoutées pour un débit de 20 m3/s

L'hydrazine
    Les concentrations maximales ajoutées dans la Seine pour un débit de 20 m3/s et pour les flux indiqués ci- dessus sont respectivement de 0,07 mg/1 sur 2 h et 0,008 mg/1 sur 24 h.

La morpholine
    La concentration maximale ajoutée sur 2h égale à 0,04 mg/1 (0,008 mg/1 en moyenne sur 24 h).

Les quantités annuelles rejetées
    Compte tenu de l'expérience d'exploitation des tranches nucléaires à eau sous pression, les consommations moyennes annuelles sont estimées, pour les deux tranches 1300 MWé de la centrale de Nogent, à:
- 2.000 kg pour la morpholine
- 150 kg pour l'hydrazine

suite:
Impact des rejets d'hydrazine
    L'hydrazine ne figure pas dans la liste des paramètres dont les teneurs sont normalisées par les différentes normes françaises ou européennes (eau de boisson, eau de baignade, vie piscicole.. .).
    L'oxydation rapide de l'hydrazine se fait suivant la réaction:
N2 H4 H2O + O2 = 3H2O + N2
(hydrate d'hydrazine)
    (Sous certaines conditions, excès d'hydrazine, il peut se former des traces d'ammoniaque).
L'action toxique de l'hydrazine se situe à ces deux niveaux:
- I'abaissement des teneurs en oxygène de l'eau, qui peut conduire à la mort des espèces les plus dépendantes de ce facteur pour leur survie,
- compétition dans les phénomènes de nitrification et inhibition de ces réactions par action sur les populations bactériennes responsables.

Toxicité vis-à-vis des micro-organismes aquatiques
    Les concentrations inhibitrices minimales rapportées sont de l'ordre de 3 mg/1; pourtant, les doses les plus souvent avancées sont nettement plus élevées (de 10 à plus de 50 mg/1).

Toxicité vis-à-vis des poissons
    Les doses létales pour les poissons signalées dans la littérature débute à 0,5 mg/1 mais sont très variables, suivant l'espèce testée, l'âge de l'individu, le temps d'exposition et la température de l'eau.

Impact des rejets de morpholine
    Les données relatives à la toxicité de la morpholine montrent qu'il faut au moins 3 mg/1 de ce produit pour noter les perturbations pour les organismes aquatiques (algues).
    Pour la faune aquatique et notamment les poissons, les doses létales sont nettement plus élevées puisque de l'ordre de 100 mg/1.

Conclusions
    Pour l'hydrazine, la quantité annuelle rejetée par les deux tranches est estimée à 150 kg. Les flux maximaux rejetées sur 2 h et 24 h sont respectivement de 10 kg et 15 kg.
    Pour la morpholine, la quantité annuelle rejetée par les deux tranches est estimée à 2 000 kg. Les flux maximaux sur 2 h et 24h sont respectivement de 5,6 kg et 13,5 kg, correspondant sur 2h à la vidange simultanée d'un réservoir T et de deux réservoirs Ex.
    En ce qui concerne la morpholine, il apparaît que les rejets, même maximaux, sont acceptables.
    En ce qui concerne l'hydrazine, sa rapide dégradation ainsi que la dilution de la «bouffée» font que la concentration effective à laquelle sont exposés les poissons et les algues est bien inférieure aux seuils de toxicité. En outre, les programmes de surveillance mis en œuvre sur tous les sites où sont exploitées des unités à eau sous pression, n'ont jamais mis en évidence de modifications significatives du milieu dues aux rejets, notamment d'hydrazine. Cette constatation permet d'assurer l'innocuité de ces rejets.

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Commentaire GSIEN sur les rejets d'hydrazine et de morpholine
Hydrazine
     Dans la mesure où il est recommandé de réduire si c'est possible les rejets chimiques, les rejets d'hydrazine devraient être nuls puisque ce corps peut être détruit par addition d'eau oxygénée.
     Pour l'hydrazine il est indiqué:
     - flux maximal sur 24 h: 15 kg
     - flux maximal sur 2 h: 10 kg
    Pour un débit de la Seine de 20m3/s et après dilution totale on obtient les concentrations de 0,008 mg/l sur 24 h et 0,07 mg/l sur 2 h. Pour deux tranches on a bien sûr le double.
     I -I1 ne s'agit pas des limites imposées par la réglementation mais des conditions évaluées par l'exploitant.
     2 - De toute évidence entre le point de rejet et l'endroit où la dilution sera totale, la concentration est beaucoup plus élevée. Dans la cave la concentration est 200g/m3 (200 mg/l). En supposant une réduction d'un facteur 10 par oxydation pendant le stockage on arrive au point de rejet à une concentration de 20 mg/l soit 40 fois la valeur totale indiquée pour certains poissons. On peut donc s'attendre à des problèmes sur la faune aquatique.
    EDF cite les autres centrales mais ne donne aucun rapport. L'expression employée «modifications significatives» ne permet pas d'affirmer «l'innocuité des rejets» puisqu'il n'y a aucun élément permettant de comprendre ce que l'on compare.

Morpholine
    La concentration à la sortie de l'émissaire serait 6 mg/l. Avant l'endroit où l'on pourra considérer la dilution comme totale, la concentration en morpholine pourra perturber les algues (seuil indiqué:3 mg/l).
 
 
 

Conclusion
    Une dilution plus importante avant rejet devrait être imposée pour hydrazine et morpholine.

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Voir également la Gazette N°253

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