Remarques préliminaires à
propos du bilan sanitaire officiel de la catastrophe de Tchernobyl
Sous le titre «Tchernobyl, cancers des enfants et chromosome 21 », l'éditorial du sérieux British Medical Journal du 16 juillet 1996 (vol. 309) avait en sous-titre « probably nothing to worry about », il n'y a probablement pas de souci à se faire ou plus prosaïquement, il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Cela a choqué et entraîné quelques réponses indignées parmi les scientifiques qui travaillent sur les cancers de la thyroïde des enfants en collaboration avec les Biélorusses. C'est cynique, mais ce n'est pas différent de ce qui ressort de la conférence internationale tenue à Vienne du 8 au 12 avril 1996 sous l'égide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et de la Commission européenne. Un résumé de la position officielle répercutée par les médias sur le bilan sanitaire de la catastrophe de Tchernobyl 10 ans après, a parfaitement été exprimé le 20 avril 1996 sur Radio France Internationale par des représentants d'EDF, de l'IPSN (Institut de Protection et Sûreté Nucléaire) et du WANO (AMEN, association mondiale des exploitants du nucléaire) : il y a des problèmes thyroïdiens indéniables avec des centaines d'enfants atteints de cancers de la thyroïde surtout en Belarus et en Ukraine et dans une moindre mesure en Russie, les "liquidateurs" ne vont pas bien et on prévoit parmi eux un excès d'environ 200 cancers mortels, mais on n'a observé ni augmentation de leucémies et de cancers ni d'effets génétiques, il y a beaucoup de difficultés économiques et psychologiques chez les habitants des zones contaminées à cause de l'incertitude sur la santé des enfants et il faut continuer à aider les populations sur place et continuer à aider à améliorer la sûreté des réacteurs des pays de l'Est. Ainsi, malgré l'accumulation de rapports de médecins locaux et de témoignages faisant état d'une aggravation de la morbidité en Belarus, Ukraine et Russie, le point de vue officiel est, qu'à part les cancers de la thyroïde, dont on nous assure qu'une fois opérés tout va bien, les conséquences sanitaires de Tchernobyl seraient limitées et essentiellement d'ordre psychologique. (On ne nous dit pas quelle est l'influence sur le développement mental et sur la croissance, de l'ablation de la thyroïde chez de tout jeunes enfants). Les autorités en ont conclu qu'il faut faire en France une distribution préventive de comprimés d'iode stable pour parer à toute éventualité et qu'ainsi on serait protégé des conséquences néfastes d'un accident nucléaire grave. Alors, doit-on croire qu'il n'y a et qu'il n'y aura "que" les cancers thyroïdiens chez les enfants? Cela ferait de Tchernobyl une catastrophe "relativement peu catastrophique" en nombre de morts et c'est bien cela que voulaient dire les éditorialistes du British MedicalJournal. (suite)
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En somme, les iodes mis à part, tout se passe comme si le cocktail de radionucléides rejetés, les césiums 134 et 137, le ruthénium 106, l'argent métastable 110, le strontium 90 etc., plus les particules "chaudes" qui renferment les plutoniums et autres transuraniens, une fois inhalés et ingérés ne conduisent pas à une irradiation interne. Tous ces radionucléides ingérés, inhalés, n'auraient aucun effet sur la santé des habitants. Chez nous des experts en médecine nucléaire l'affirment « ces radionucléides, autres que les iodes, comme le césium par exemple, ne vont pas sur un organe particulier, ils vont partout » [ce n'est pas vrai pour le strontium et les plutoniums, entre autres] alors selon ces spécialistes il en résulte que leur action sur l'organisme est nulle... Comme si le fait d'aller partout dans le corps ne causait aucun effet et annulait le risque de cancer. (Si ces spécialistes ajoutaient que le césium ne donnera aucun cancer spécifique à un organe particulier, ce serait correct mais ce n'est pas ce qu'ils disent). Il se pourrait qu'il y ait, derrière cette affirmation, la croyance que seuls existent des effets déterministes du rayonnement avec des doses de rayonnement relativement importantes et la négation des effets stochastiques (non déterministes) cancérigènes et génétiques des faibles doses de rayonnement. Peut-être n'est-ce là que l'application du "pas vu pas pris": s'il n'est pas possible pour les individus d'identifier les cancers radioinduits non spécifiques, alors il n'est pas nécessaire pour les gestionnaires et leurs conseillers scientifiques d'en tenir compte. Au contraire des cancers de la thyroïde qu'il a été impossible de nier longtemps, les cancers non-spécifiques sont faciles à camoufler car, étant donné leur temps de latence ils apparaissent bien plus tard et il faut des statistiques élaborées pour mettre en évidence s'ils sont en excès par rapport aux cancers "naturels". La position de ces professeurs de médecine revient à nier l'effet cancérigène du rayonnement pour les habitants qui, non seulement ont été soumis à l'exposition externe tant du panache radioactif pendant les émissions du réacteur accidenté que des dépôts au sol, mais aussi à l'irradiation interne par ingestion d'aliments contaminés et inhalation de poussières radioactives. Ils ont dû vivre, et vivent encore, car peu ont finalement été évacués malgré les plans élaborés par les autorités biélorusses en octobre 1989, sur des territoires contaminés. Rappelons que la période du césium 137 est de 30 ans, que le strontium 90 commence seulement à être pris en compte dans les incorporations et qu'on ne voit pas comment tenir compte des particules chaudes dans la contamination et pourtant elles agissent ! Remarquons aussi qu'en Belarus les autorités manifestent des inquiétudes concernant la contamination prochaine des nappes phréatiques. p.20
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Tchernobyl a montré qu'après
une catastrophe nucléaire les cancers à apparaître
dans le futur ne sont pas les seules conséquences sanitaires à
déplorer. Depuis 1986 une augmentation visible de la morbidité
est constatée chez les habitants des territoires les plus contaminés
de l'ex-URSS mais elle est attribuée au stress par les officiels
et surtout pas à une quelconque action du rayonnement liée
à Tchernobyl (le stress a remplacé le terme de "radiophobie"
très mal accepté par la population). Il ne s'agit là
que de déclarations faites
a priori sans fondements objectifs
s'appuyant sur des études précises.
Outre les multiples pathologies thyroïdiennes s'ajoutant aux cancers de la thyroïde, les médecins rapportent une augmentation des pathologies de tous les systèmes fonctionnels: affections gastro-intestinales apparues dès 1988, maladies respiratoires dont la tuberculose chez les adolescents, atteintes du système endocrinien, maladies ORL avec émergence de formes graves de sinusite, maladies hématologiques (surtout chez les enfants nés de parents ayant été évacués), augmentation des maladies congénitales. Il apparaît aussi que le système immunitaire des enfants a été affecté dès les premiers mois ayant suivi la catastrophe. Lors des congrès internationaux officiels la voix des scientifiques et médecins locaux est noyée dans le concert des ténors occidentaux. La plupart du temps ils n'osent pas intervenir même quand les mensonges énoncés sont flagrants comme en témoigne le Pr Fernex qui a assisté au congrès de Vienne (lire son témoignage dans Ionix, octobre 1996, n°145). Il faut signaler que des "contre-colloques" avec la participation de scientifiques et médecins confrontés aux réalités quotidiennes des habitants des zones contaminées de l'ex-URSS se sont tenus en parallèle des colloques officiels, tant de celui de Minsk (18-22 mars 1996) organisé par la Commission européenne et les ministères de la santé de Belarus, Ukraine et Russie que de celui de Vienne (8-12 avril 1996), grand "show" international de la Commission européenne, de l'AIEA et de l'OMS. Une session plénière (n°3) de cette conférence de Vienne résume ainsi le bilan officiel : à part l'augmentation dramatique des cancers de la thyroïde chez ceux qui ont été exposés en tant qu'enfants il n'y a pas d'évidence jusqu'à maintenant d'un problème majeur de santé publique résultant de l'exposition au rayonnement suite à l'accident de Tchernobyl dans les trois pays les plus affectés (Belarus, Ukraine et Russie). Une nuance subtile tempère légèrement le propos car il est tout de même dit que quelques augmentations de la fréquence des cancers ont été rapportées dans les populations exposées mais il est ajouté aussitôt que ces résultats sont difficiles à interpréter principalement à cause des différences d'intensité du suivi et des méthodes utilisées pour comparer les populations exposées à la population générale qui sert de témoin. Alors que des médecins locaux, tant ukrainiens que biélorusses, s'inquiètent de l'augmentation des maladies du sang chez les enfants, anémies, leucémies et lymphomes, ces observations devront être avalisées par des scientifiques occidentaux (et pas n'importe lesquels) pour être reconnues. Souvenons-nous que les cancers de la thyroïde des enfants biélorusses ont d'abord été niés. Ils ont fini par être admis non seulement parce qu'il devenait difficile de les nier alors que leur nombre était tellement en excès par rapport à la normale, mais aussi parce que quelques scientifiques occidentaux réputés ont fait le forcing pour qu'on en tienne enfin compte. Nous nous intéresserons ici à quelques aspects négligés nous paraissant très importants du point de vue de leur implication sanitaire. Malformations congénitales et effets génétiques, leucémie des enfants, santé des liquidateurs etc. tous ces faits dérangeants auraient dû être répercutés par les médias. Mais ce texte ne reflète qu'une infime partie des études effectuées en Ukraine, Belarus et Russie qui, elles-mêmes, ne reflètent que partiellement l'ampleur des conséquences sanitaires affectant les populations depuis Tchernobyl. II - Les liquidateurs
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Autopsie de liquidateurs Dans le journal de pneumologie (Pulmonology, 1993, vol. 4, 56-59) Y. Reva et al rapportent l'étude des tissus obtenus par autopsie de liquidateurs décédés, par microscopie électronique à balayage et microanalyse par rayons X. Les auteurs donnent l'exemple de deux liquidateurs de 27 et 25 ans décédés respectivement 1 an et 2 ans 1/2 après leur travail à Tchernobyl durant l'automne 1986; le premier est décédé suite à une hémorragie cérébrale, le second d'une leucémie aiguë. Leurs dossiers médicaux indiquent une dose d'environ 20 rem avant leur départ de la zone de Tchernobyl. Les auteurs retrouvent dans les tissus du foie et des poumons les mêmes "particules chaudes" de 1 à 30 microns que dans l'environnement proche du réacteur, renfermant des émetteurs a,b,g,. Suit une liste de plus de 30 radioéléments... Les particules chaudes trouvées dans le sang ont également la même composition isotopique que dans l'environnement. Dans une communication à l'Institut de pneumologie du ministère de la santé publique de Russie (1991) Y. Reva indique que des particules chaudes sont trouvées aussi dans les cellules macrophages de la moelle osseuse. [Les macrophages sont des globules blancs qui phagocytent les cellules étrangères et les débris]. Les auteurs soulignent que ces particules résident longtemps dans l'organisme avec leurs produits de filiation y causant des troubles divers (comme des désordres de microcirculation et des thromboses) et peuvent aussi induire la croissance de tumeurs. En pénétrant dans les tissus liquides ces particules chaudes peuvent modifier les réactions cellulaires qui font intervenir les radicaux libres. Dans leur conclusion Y. Reva et al insistent : « en présence de "particules chaudes" on doit tenir compte de leur activité locale très élevée, ce qui n'est jamais fait. Les concepts habituels de l'action cancérigène et génétique des faibles doses de rayonnement sont inadaptés aux phénomènes liés à l'action des "particules chaudes" sur les organismes vivants ». Même si leur contribution à la dose totale reçue par l'ensemble du corps relève des faibles doses, localement leur action relève des fortes doses. Lavages broncho-pulmonaires effectués sur des malades
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Reva et al attribuent les
radicaux libres à la présence de mélanine qui proviendrait
de "micromycètes", micro-organismes de la classe des champignons
(dont font partie divers Aspergillus). L'irradiation g prolongée
à faible débit de dose pourrait provoquer une mutation "adaptative"
de ces micromycètes les rendant radiorésistants et chimio-résistants.
Reva et al pensent que la poussière radioactive et les micromycètes
pathogènes ont été inhalés dans les poumons
des liquidateurs durant leur travail autour du réacteur n°4
de Tchernobyl.
Ainsi une des conséquences de Tchernobyl pourrait être l'apparition d'affections pulmonaires du type aspergillose chez les liquidateurs, et l'affaiblissement radio-induit de leurs réactions immunitaires peut faire que ces affections soient résistantes aux traitements. [A la conférence officielle de Vienne la contribution de Reva s'est bornée à quelques mots au cours d'une des sessions et ne figure pas dans les résumés des communications]. 2 - Les désordres neurologiques: "encéphalopathie post-radiative"
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Les patients développent une altération de tous les systèmes fonctionnels: vasculaire, immunologique, endocrinien, gastro-intestinal ; une altération du métabolisme avec des désordres graves impliquant tous les phénomènes cellulaires (...) et créant un ensemble défavorable les transformant en "inaptes" [en "invalides"] (...) ». Cet ensemble complète les observations sur 255 liquidateurs concernant l'encéphalopathie post-radiative telle qu'elle est décrite par O.R. Vinnitsky dans un rapport collectif de l'Académie des sciences d'Ukraine (Kiev, 1993, Institut de neurochirurgie, directeur A. P. Rodomanov). Au vu de la description des invalidités affectant les liquidateurs, le commentaire de Radio France Internationale cité au début de ce dossier comme quoi on s'attend à un excès de 200 cancers mortels chez les liquidateurs, ne reflète pas vraiment la détérioration de la santé des liquidateurs et la dégradation de la qualité de leur vie quotidienne... Pour "espérer" devenir cancéreux il faudrait qu'ils ne meurent pas d'autre chose avant. On peut mesurer à quel point les responsables sanitaires de l'ex-URSS ont été cyniques en refusant que les maladies des liquidateurs soient considérées comme étant dues à Tchernobyl sous prétexte que ces maladies n'étaient pas répertoriées en tant que maladies pouvant être radioinduites (et pour cause on n'en avait pas l'"expérience") et que les doses reçues étaient trop faibles (Gazette Nucléaire n°109/110, B. et R. Belbéoch Tchernobyl, une catastrophe Éd. Allia 1993) Les auteurs ne précisent pas quelles doses approximatives leurs patients ont reçues. La limite autorisée "officielle" était de 25 rem pour les liquidateurs. Il est vraisemblable, même si les doses individuelles répertoriées (quand elles l'ont été), sous-estiment les doses réelles, qu'il ne s'agit pas de doses très élevées responsables d'effets déterministes de la maladie des rayons tels qu'on les trouve habituellement dans la littérature. Ces doses très élevées, supérieures à 200 rem, ont été reçues d'une façon aiguë par les intervenants "rapprochés" des premiers jours autour du réacteur accidenté et c'est parmi eux qu'on compte les 29 morts par "syndrome d'irradiation aiguë". Remarquons que le Dr H. Bocquet, dans les "conférences de sécurité" tenues à au Centre d'études nucléaires de Saclay (1966-1967), indiquait qu'une dose aiguë de 75 rem pouvait déclencher un "petit mal des rayons". Ce "petit mal des rayons" du Dr Bocquet n'est jamais signalé dans d'autres ouvrages. Pourtant, tous ceux qui, pour raisons professionnelles, ont été accidentés par les rayonnements ionisants, reconnaîtront des symptômes familiers dans la description de la première phase décrite par les médecins ukrainiens. Ils s'accompagnent d'anomalies de la formule sanguine (baisse transitoire des globules blancs, anémie) et pour certaines femmes de troubles des menstruations. Qu'est-ce qui fait qu'un liquidateur développe ultérieurement la phase de décompensation avec des signes aussi dramatiques pour la vie quotidienne? On peut se poser des questions naïves : que devient le seuil de dose du Dr Bocquet en cas d'action conjuguée chronique de rayonnement externe et de contamination interne? Ne peut-il pas être abaissé et dépendre des individus? De toutes façons il semble bien évident que le domaine des doses "moyennes" de 25 à 100 rem (0,25 à 1 Sievert) soit très mal connu concernant les effets de morbidité. De nombreuses études essaient par ailleurs de reconstituer les doses reçues par les liquidateurs. Citons par exemple celle de W.L. Bigbee et al (British Medical Journal vol. 312, 27 april 1996) sur des soldats des pays baltes, basée sur le dosage biologique des modifications des globules rouges du sang (érythrocytes) [résultant de "mutations de la Glycophorine A des cellules souches de la moelle osseuse"]. D'après les valeurs déduites de cette dosimétrie biologique les doses reçues par ces soldats auraient été probablement inférieures à 10-20 cGy [10-20 rad]. Si cela est vrai les faibles doses reçues par les liquidateurs ont manifestement des effets sur la santé beaucoup plus considérables que ce qui était admis jusqu'à présent... p.22
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Des mesures
cyto-génétiques basées sur le dénombrement
des aberrations chromosomiques des lymphocytes du sang (globules blancs)
indiquent des doses plus élevées durant la première
année ayant suivi l'accident en particulier chez les constructeurs
du sarcophage. Le rapport de l'Académie
des sciences de Belarus (Minsk, 1996) estime quant à lui que sur
les 77 386 liquidateurs biélorusses de 1986-1987, 30% ont reçu
50-100 mSv (0,5-10 rem), 47% 100-250 mSv et 7,3% 250-500 mSv.
Lorsque l'irradiation est externe toutes les méthodes paraissent plus fiables. Comment ces diverses méthodes tiennent-elles compte du métabolisme de tous les radioéléments incorporés d'une façon chronique? Qu'en conclure sinon que la "reconstruction" des doses des liquidateurs est quasiment impossible et qu'en priorité devraient compter les maux dont ils souffrent même si on ne sait pas à quelles doses il faudrait les attribuer. Ne pas être capable de quantifier scientifiquement un événement n'enlève rien à sa réalité. III - Les "particules chaudes" et la population
IV - Malformations à la naissance
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Ces effets sont stochastiques (non déterministes), ce qui veut dire qu'à dose reçue égale certains auront une descendance affectée, d'autres pas. Le risque génétique du rayonnement définit le nombre de descendants affectés à la première générationet dans les générations suivantes à l'équilibre. On admet que la relation entre les effets et la dose est linéaire, sans seuil. D'après l'UNSCEAR (Comité des Nations Unies sur les effets des radiations atomiques) pour 1 million d'enfants nés vivants issus de parents exposés à 0,01 sievert on compterait environ 18 affections héréditaires sévères supplémentaires: le facteur de risque est 0,18 10-2 par sievert à la première génération. Il est de 1,2 10-2/Sv à l'équilibre des générations, valeur voisine de celle admise par la Commission Internationale de Protection radiologique 10-2/Sv en 1990 (CIPR 60). Ces estimations correspondent à une dose de doublement du risque naturel de 1 sievert. Certains généticiens, comme V.A. Chevtchenko pensent que ces valeurs sous-estiment notablement le risque génétique. 2 - En Belarus, augmentation des malformations congénitales
depuis Tchernobyl, principalement dans les régions les plus contaminées.
Avortements légaux: augmentation des malformations dans les
zones contaminées.
Malformations congénitales chez les nouveau-nés: l'incidence
augmente avec le niveau de contamination radioactive du sol.
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Les auteurs comparent l'incidence
des malformations enregistrées au cours de deux périodes,
antérieure à l'accident (1982-1987) et postérieure
à l'accident (1987-1993) pour 1000 nouveau-nés, dans les
différents districts classés selon leur niveau de contamination
en césium 137.
L'étude considère trois régions à niveaux de contamination différents: - région "témoin", comportant 30 districts [considérés comme "légalement" non contaminés] où le niveau de contamination en Cs137 est inférieur à 1Ci/km2 - région où la contamination est comprise entre 1 et 15 Ci/km2, 54 districts. - région où la contamination est supérieure à 15 Ci/km2, 17 districts. L'incidence des malformations à déclaration obligatoire a augmenté en Belarus depuis 1987: L'augmentation est de 39% dans les districts "témoins" et elle croît avec le niveau de contamination du sol, 44% pour les districts contaminés entre 1 et 15 Ci/km2 et 79% pour ceux contaminés à plus de 15 Ci/km2. Ainsi tout le territoire est concerné, y compris celui qui est considéré comme "légalement" non-contaminé. Il est donc clair que la catastrophe de Tchernobyl a induit dans toute la république de Belarus des malformations, visibles tant chez les nouveau-nés que dans les foetus issus des avortements légaux. Parmi les malformations à déclaration obligatoire dont la fréquence a augmenté depuis Tchernobyl d'une façon statistiquement significative dans les régions contaminées à plus de 1 Ci/km2 on trouve essentiellement la polydactylie et les malformations multiples, l'atrophie ou l'absence de membres ainsi que l'anencéphalie, spina bifida, bec de lièvre et malformation du palais. Pour tester l'hypothèse de mutations dans les gamètes qui seraient responsables des malformations observées, Laziuk et al ont tenté de relier malformations congénitales et doses d'irradiation pré-conceptuelles qu'auraient reçues les parents, déduites de mesures cyto-géniques par dénombrement des aberrations chromosomiques dans le sang. Ils n'ont pas trouvé de corrélation statistiquement significative. Malformations à composante mutationnelle nouvelle : polydactylie
et malformations multiples
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Outre le rayonnement, d'autres facteurs défavorables de conditions de vie découlant de la catastrophe peuvent intervenir dans cette poussée de la fréquence des malformations mais les auteurs précisent dans leur conclusion : « (...) l'augmentation dans les zones contaminées des fréquences de maladies congénitales particulières [polydactylie, malformations multiples et atrophie des membres] avec mutation héritée à caractère dominant est une preuve indirecte de leur relation avec les rayonnements ionisants » (Actes du Symposium Belarus-Hiroshima-Nagasaki, oct. 1994). Insistons sur le fait que cette étude montre sans ambiguïté qu'il est impossible de trouver en Belarus une population "témoin" non affectée par les retombées de Tchernobyl. Les études tant sur les effets génétiques que sur les effets somatiques sont vouées à des études internes de tendance en fonction des doses reçues et plus sommairement en fonction des niveaux de contamination des lieux de résidence vu la difficulté de "reconstruire" les doses reçues par les habitants. 3 - En Ukraine, l'exemple des malformations du système nerveux
central chez les nouveau-nés
Evolution au cours du temps V - Altération du génome des animaux et des hommes
: mise en évidence de l'augmentation du taux de mutations héréditaires
dans les zones contaminées.
p.24
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1 - Mise en évidence d'une augmentation des mutations
héritées chez les habitants en Belarus liée au niveau
de contamination du sol.
Cette étude de Dubrova et al est le fruit d'une collaboration de généticiens russes, anglais et biélorusses (Institut de génétique générale de Moscou, Département de génétique de l' université de Leicester, Institut de médecine des radiations de Moghilev). Les analyses du sang montrent un nombre élevé d'aberrations chromosomiques chez les habitants des régions contaminées, signe d'un effet des rayonnements qui peut se traduire par des effets somatiques et génétiques. Conjointement nous avons vu que la fréquence des malformations congénitales a augmenté en Belarus. Cependant en ce qui concerne les effets génétiques on ne connaît pas précisément l' effet mutationnel d'une irradiation chronique sur les cellules germinales (cellules de reproduction) de ces habitants qui se transmettrait chez leurs descendants. Le problème consiste donc à examiner s'il existe des mutations nouvelles apparues chez un enfant par rapport aux gènes de ses parents qui ont vécu dans des zones contaminées depuis la catastrophe de Tchernobyl, si oui, les dénombrer et comparer la fréquence de ces mutations à celle d'une population témoin et étudier sa variation en fonction du niveau de contamination du sol à défaut de connaître les doses engagées de chaque habitant. Y. E. Dubrova et al utilisent des marqueurs particuliers du génome : les minisatellites. Ce sont des régions du génome caractérisées par la répétition en tandem d'une même séquence d'ADN. Les minisatellites permettent d'établir une véritable empreinte génétique individuelle où chaque individu apparaît comme la résultante d'un assortiment particulier de gènes (allèles) parentaux. C'est une méthode utilisée en médecine légale. Certains minisatellites sont localisés (sur un seul locus) d'autres sont dispersés sur plusieurs chromosomes. Ces minisatellites disséminés ont été découverts en 1985 par A. J. Jeffreys (Université de Leicester, UK), un des auteurs de l'article. Ils peuvent être explorés simultanément avec une même sonde. Avec les sondes multi-locus de Jeffreys « l'image obtenue est pour chaque individu d'une extraordinaire spécificité » (Biologie moléculaire et médecine, J.C. Kaplan-M. Delpech, Éd. Médecine-Sciences, 1993). Les minisatellites ont un taux élevé de mutations spontanées. Il y a mutation quand le locus minisatellite est un fragment d'ADN dans l'empreinte génétique de l'enfant qui ne peut être attribué ni au père ni à la mère. Dans cette bande mutante le nombre des répétitions du locus minisatellite est modifié et par conséquent sa longueur qui est mesurée à l'aide d'une sonde. La méthode des minisatellites est très sensible et nécessite l'étude d'un nombre d'individus beaucoup moins important que dans les méthodes génétiques habituelles. La fréquence des mutations nouvelles a augmenté d'une
façon anormale depuis Tchernobyl
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La fréquence des mutations nouvelles est corrélée au niveau de contamination du sol. Dans une deuxième approche Dubrova et al comparent la fréquence des mutations nouvelles apparues chez les enfants en fonction du niveau de contamination du sol du lieu de résidence des parents. Les enfants dont les parents ont résidé dans des zones contaminées à plus de 6,8Ci/km2 ont une fréquence de mutations qui est 1,5 fois celle observée chez ceux dont les parents ont résidé dans des zones contaminées à moins de 6,8 Ci/km2 et la différence est significative. Selon les auteurs: « Nous pensons que cette étude fournit la première preuve expérimentale que la fréquence des mutations dans les cellules germinales des êtres humains peut être augmentée par les rayonnements ionisants ». Le phénomène d'initiation de la mutation d'un minisatellite est apparemment plus complexe qu'une simple rupture de la double hélice d'ADN et les auteurs formulent quelques hypothèses à ce sujet. D'autre part cette fréquence accrue de mutations est apparue pour des doses de rayonnement beaucoup plus faibles que ce qui est admis généralement et dans la discussion de leurs résultats Dubrova et al indiquent : « La relation dose-effet reliant les mutations minisatellites au rayonnement reste inconnue. L'estimation de la dose à la thyroïde due à l'iode 131 de la population rurale de ces districts de la région de Moghilev est de l'ordre de 0,185 gray par personne (18,5 rad). Par contre, il a été estimé que l'irradiation externe et interne (par exposition à la contamination chronique du Cs 137) est inférieure à 0,5 millisievert par an. Cette dose est très inférieure à la dose de doublement pour les humains [la dose de doublement pour une mutation donnée est la dose nécessaire pour porter le taux de mutation au double du taux de mutation spontanée, au cours d'une génération]. Elle est aussi inférieure aux valeurs attendues qu'on peut déduire des expériences sur les souris. Ainsi il semble que l'augmentation observée du taux de mutations minisatellites, si elle résulte de l'irradiation, ou bien a été causée par l'exposition initiale aiguë à l'iode 131 ou bien que les doses d'irradiation chronique par le Cs 137 ont été notablement sous-estimées. Une autre alternative, il est possible que des doses faibles d'irradiation chronique soient plus efficaces dans l'induction de mutations que des dose plus élevées d'irradiation aiguë. D'autres études de populations sont nécessaires pour tester si l'irradiation induit des mutations minisatellites et pour examiner l'impact relatif d'une exposition aiguë ou chronique sur l'instabilité des cellules germinales ». Cette étude a été critiquée par P. Voisin, de l'IPSN (Nucleonics Week, May 2, 1996) parce que Dubrova et al n'ont pas pris une population témoin en Belarus et n'ont pas tenu compte explicitement de la possibilité de mutagènes autres que le rayonnement ionisant. On remarquera que Dubrova et al envisagent cette possibilité de mutagènes autres que le rayonnement dans la première partie de leur travail lorsqu'ils comparent l'augmentation de la fréquence de mutations héritées en Belarus par rapport à celles observées au Royaume-Uni: «Des mutagènes environnementaux pourraient inclure des polluants industriels ou agricoles aussi bien que la contamination radioactive post-Tchernobyl ». De toute façon cette ambiguïté est levée par l'étude interne en fonction du niveau de contamination du sol qui montre que l'effet mutationnel augmente avec la contamination (si des polluants autres que le rayonnement ont un effet mutationnel ces polluants doivent être corrélés à la contamination radioactive du sol). D'autre part, avec une étude interne de tendance en fonction du niveau de contamination on n'a plus besoin de population témoin. De telles études sont effectuées dans d'autres districts ruraux en Belarus (communication personnelle). p.25
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2 - Niveaux élevés de changements génétiques
chez les rongeurs de Tchernobyl
Il s'agit d'un travail dans la zone interdite résultant de la collaboration de deux équipes américaines et d'une équipe ukrainienne (Baker et al, Nature vol. 380, 25 april 1996, p.707-708 ; département des sciences biologiques de Texas university, du Laboratoire d'écologie de Savannah River et de l'Agence internationale pour la recherche et le développement de Kiev). Baker et al comparent les changements génétiques intervenus depuis l'accident de Tchernobyl sur deux groupes de rongeurs. L'un comprend des spécimens très exposés vivant dans la zone très contaminée du site de Tchernobyl appelée la "forêt rousse" qui a particulièrement souffert de la contamination au point de changer de couleur, d'où son nom. Les rongeurs "exposés" vivent ainsi dans un environnement particulièrement radioactif, ont une nourriture extrêmement contaminée et sont eux-mêmes radioactifs. L'autre groupe comporte des individus peu exposés gitant dans un endroit relativement peu contaminé à 32 km au sud-est du réacteur qui a explosé. Au départ il y a 9 rongeurs en tout de 2 espèces différentes (deux variétés de campagnols) pour le site de Tchernobyl, 10 rongeurs des deux mêmes espèces pour le site de contrôle et l'étude porte sur la progéniture. Les auteurs étudient chez les descendants, les taux de substitution des paires de base affectant un gène particulier de mitochondrie (gène du cytochrome b de mitochondrie). Le taux de substitution affectant les séquences des "acides aminés du cytochrome b" des rongeurs irradiés de Tchernobyl est sans précédent dans les populations de mammifères étudiées jusqu'à présent alors que pour les rongeurs "contrôle" ce taux a un niveau de variation comparable à ce que l'on observe chez d'autres rongeurs. Les taux de mutation/substitution sont 100 fois plus élevés que ce qui est trouvé généralement pour les mitochondries de vertébrés. L'augmentation incroyablement élevée des taux de mutation/substitution observés dans la lignée ne peut pas être attribuée à une "immigration" de rongeurs venant de l'extérieur de la zone interdite. Les auteurs soulignent combien les effets de la pollution résultant de Tchernobyl sont différents de ceux résultant des essais des armes nucléaires. Aux radiations se superposent les effets mutagènes des métaux lourds et des produits chimiques. Ils concluent: « Les conséquences biologiques de l'accident de Tchernobyl ne peuvent pas être prédites de façon adéquate à partir des résultats antérieurs des études de laboratoire ou des investigations poussées des effets de Hiroshima et Nagasaki ». Le zoologiste D. Hillis dans son commentaire insiste sur l'effet sans précédent qui est rapporté. Chaque rongeur adulte de Tchernobyl qui est examiné présente une séquence différente d'acides aminés (du cytochrome b). Cela n'avait été vu jusqu'à présent que chez des virus à ARN. C'est un résultat important du point de vue de la théorie de l'évolution. En fait, écrit D. Hillis « des changements qui ont lieu sur des millénaires ont été comprimés sur quelques années ». « Les deux études, [de Dubrova et Baker], donnent un premier aperçu des effets génétiques des accidents nucléaires graves ». Ces études « vont stimuler une réévaluation des effets génétiques et autres effets d'une exposition à des déchets nucléaires (...). [Elles] « laissent peu de doute sur le fait que les conséquences génétiques de l'accident de Tchernobyl sont importantes et dureront longtemps même si les causes, les mécanismes, la distribution, l'étendue et les effets phénotypiques des mutations sont mal connus ». Insistons sur le fait que si le rôle exact sur la santé de ces mutations nouvelles est inconnu par contre on ne peut pas affirmer qu'elles n'auront aucun effet négatif sur la santé tant sur les descendants de la première génération que sur les générations à l'équilibre. Elles contribueront à accroître le fardeau génétique. (suite)
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suite:
VI - Leucémies en Grèce: augmentation de l'incidence de la leucémie chez des nourrissons irradiés in utero suite à Tchernobyl. Les études consacrées aux conséquences sanitaires des bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki ont montré une incidence anormale de leucémies dès la deuxième année après les bombardements. Les experts s'attendaient donc à une augmentation des leucémies chez les enfants (et pas du tout à une augmentation des cancers de la thyroïde). Plusieurs études ont été publiées sur les leucémies des enfants après Tchernobyl en particulier en Finlande et en Suède, pays parmi les plus touchés par les retombées radioactives : aucune augmentation suite à Tchernobyl telle est la conclusion de ces études. Néanmoins une augmentation est observée dans les zones les plus contaminées mais elle n'est pas statistiquement significative (British Medical Journal, vol. 309, 16 July 1994, A. Auvinen et al, p. 151-154, U. Hjalmars et al, p. 154-157). C'est une conclusion toute différente qui est publiée par la revue scientifique Nature. Un article sur la leucémie des jeunes enfants en Grèce remet en cause les estimations du risque de leucémie des nourrissons après irradiation in utero suite aux retombées de Tchernobyl. Source : « Leucémie des nourrissons après irradiation in utero suite à Tchernobyl » (Infant Leukaemia after in utero exposure to radiation from Chernobyl, E. Petridou et al, Nature, vol. 382. 25 july 1996. p.352-353). L'article est précédé d'un commentaire de deux épidémiologistes britanniques réputées S. Darby et E. Roman, sous le titre « Links in Leukaemia » p.303-304 (« En relation avec la leucémie» ). Résumé : (...) l'étude montre que l'incidence de la leucémie des nourrissons de moins d'1 an ayant été exposés in utero à l'irradiation due à Tchernobyl est 2,6 fois plus élevée que l'incidence de la leucémie des nourrissons non-exposés nés avant Tchernobyl ou après. De plus, les nourrissons exposés, nés de mères qui vivaient dans les zones les plus contaminées, ont une incidence de leucémie plus élevée que dans les zones moins contaminées (...). En Grèce tous les cas de leucémie des enfants sont recensés depuis 1980 à l'aide d'un réseau national de registres de cancer et au moment de l'étude le recensement était complet jusqu'au 31 décembre 1994. [A noter qu'en France le plus ancien registre de cancer des enfants, celui de la région "Lorraine" date seulement de 1983]. Il est connu que l'incidence de la leucémie infantile en fonction de l'âge des enfants est maximum entre 2 et 4 ans et on suspecte une influence pendant la grossesse. Les auteurs analysent la totalité des leucémies diagnostiquées en Grèce avant que les enfants aient atteint l'âge de 4 ans chez tous les enfants nés entre le 1/1/1980 et le 31/12/ 1990, D'autre part le rayonnement peut avoir un effet cancérigène plus ou moins grand concernant l'induction des différentes formes de leucémies. Or il semble prouvé que la leucémie des nourrissons de moins d'1 an est une maladie spécifique dans 2/3 des cas associée à une anomalie chromosomique (chromosome 11) et il est très probable que cette mutation a son origine dans la vie intra-utérine, période durant laquelle la susceptibilité aux effets du rayonnement est supposée être particulièrement élevée. Les auteurs vont donc se focaliser sur cette classe d'âge particulière des nourrissons de moins d'1 an. La Grèce fait partie des pays ayant eu des régions très touchées par les retombées radioactives de Tchernobyl hors de l'ex-URSS. «L'exposition de la population grecque aux rayonnements de Tchernobyl a démarré peu de temps après l'accident et a été notable pendant environ 1 an ; la dose moyenne a été estimée à environ 2 mSv» écrivent les auteurs de l'article. L'étude va s'intéresser aux enfants nés de mères dont la grossesse s'est déroulée pendant la période post-accidentelle la plus pénalisante du point de vue de l'irradiation c'est à dire durant la première année ayant suivi l'explosion du réacteur, période au cours de laquelle embryons et foetus ont été le plus exposés ce qui n'avait jamais été fait auparavant. p.26
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Résultats
Ces enfants qui ont été exposés in utero (enfants "exposés") sont comparés à ceux nés avant Tchernobyl et à ceux nés plus de 20 mois après (enfants "non-exposés"). Les trois cohortes de naissance comprennent: "exposés": 163 337 enfants nés entre le 1/7/1986 et le 31/12/1987 "non-exposés": 801 175 enfants nés entre le 1/1/1980 et le 31/12/1985 et 311 391 enfants nés entre le 1/1/1988 et le 31/12/1990. 1- Incidence de la leucémie en fonction de l'âge: les bébés de moins d'1 an exposés in utero ont plus de leucémies que ceux nés avant ou après Tchernobyl: -Les auteurs ne trouvent pas de différences significatives quel que soit l'âge entre les deux cohortes d' enfants considérés comme "non-exposés" c'est à dire ceux nés avant Tchernobyl et ceux nés plus de 20 mois après. Ils ne trouvent pas non plus de différence d'incidence de leucémie chez les enfants de 1 à 4 ans qu'ils soient "exposés" ou "non- exposés". Par contre la différence est notable pour les bébés de moins d'1 an: Alors que les bébés de moins d'1 an "non-exposés" ont une incidence de leucémie de 27,9/106/an (soit 27,9 cas pour 106personnes-années: sur un million d'enfants de moins d'1 an on recense en moyenne 27,9 cas, IC intervalle de confiance à 95%: 18,9 à 39,5), les auteurs trouvent que: les bébés de moins d'1 an qui ont été exposés in utero ont une fréquence de leucémie 2,6 fois plus élevée que les "non-exposés" nés avant Tchernobyl ou plus de 20 mois après et c'est statistiquement significatif. (Intervalle de confiance IC à 95%: 1,4 à 5,1; p» 0,003), (12 cas diagnostiqués chez 163.337 enfants). Les auteurs analysent ensuite l'incidence de leucémie chez ces nourrissons "exposés" en fonction du niveau de contamination du lieu de résidence des mères pendant la grossesse. Trois niveaux de contamination sont considérés, faible, moyen élevé. 2 - L'incidence de la leucémie des bébés de moins d'1 an ayant été exposés in utero augmente avec la contamination radioactive du sol. Pour 1 million de personnes-années elle est de: -32,2 dans les districts à faible contamination (IC 1,6 à 159,8), 1cas observé. -71,4 dans les districts à contamination moyenne (IC 31,2 à 141,3), 7 cas observés. -141,3 dans les districts les plus contaminés (IC 37 à 281,3 ) 4 cas observés. Ces deux dernières valeurs sont nettement supérieures à 27,9, incidence pour les enfants "non-exposés" et c'est statistiquement significatif, avec p respectivement égal à 0,02 et 0,004. L'effet semble donc bien être corrélé au niveau de rayonnement. Les auteurs soulignent que le rayonnement ionisant est une cause bien établie de leucémie lymphoblastique aiguë et que la vie intra-utérine est une période de grande sensibilité. Comme la leucémie des nourrissons a vraisemblablement une origine prénatale dont la nature n'est pas inhérente à la constitution du foetus, l'action des rayonnements ionisants in utero devient une cause très plausible de cette maladie. Ils ajoutent que les études antérieures n'ont pas examiné spécifiquement les leucémies des enfants de moins d'un an mais qu'une récente étude suédoise signale 3 cas de leucémie chez des bébés de moins d'un an qui étaient in utero au moment de Tchernobyl. « Les études consacrées à l'évaluation de l'effet des expositions prénatales lors des examens par rayons X sur les cancers des enfants n'ont pas indiqué de susceptibilité particulière [dans l'induction] des leucémies des nourrissons [de moins d'1 an]vis-à-vis de l'action cancérigène du rayonnement. Cependant ces examens diagnostics par rayons X sont la plupart du temps effectués en fin de grossesse et par sessions discrètes. (suite)
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suite:
Il est possible que la période en début de la grossesse, qui correspond à la période d'exposition dans notre étude, représente une phase à haut risque ou contient un créneau de grande susceptibilité. Les données obtenues à partir des examens par rayons X au cours de la grossesse et effectués à différentes étapes du développement intra-utérin sont remarquablement en accord avec ce point de vue [bien qu'elle ne soit pas citée cette conception a toujours été défendue par l'épidémiologiste A. Stewart qui a été la première à mettre en évidence en 1956 un excès de cancers et de leucémies chez les enfants dont les mères ont subi des radiodiagnostics obstétricaux durant la grossesse] cependant il n'est pas indiqué que la leucémie des nourrissons se distingue par une sensibilité accrue à une irradiation fétale précoce ». En conclusion, « nous apportons des arguments probants indiquant que la leucémie des bébés de moins d'1 an peut être causée par l'irradiation in utero à de faibles niveaux de rayonnement ; d'autre part les retombées radioactives dues à l'explosion de Tchernobyl peuvent avoir multiplié par un facteur 2 à 3 l'incidence des leucémies de ces bébés parmi les enfants grecs qui ont été exposés in utero ». Les auteurs ajoutent que l'irradiation à de faibles niveaux avant la conception n'a pas montré d'effet sur le risque de leucémie (contrairement à l'hypothèse de Gardner). Remarques
Tchernobyl en France I - A propos des médias
p.27
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Il nous paraît
nécessaire de donner quelques exemples précis parmi tant
d'autres expérimentés par chacun d'entre nous, où
une "reprise" par les médias des informations fournies par les quelques
associations indépendantes qui se battent en France pour une information
sur le nucléaire aurait peut-être aidé à amorcer
un changement dans la politique nucléaire française.
1 - A propos de la "gestion" de la crise post-Tchernobyl
en France
2 - A propos de la contamination qui défraie
la chronique actuellement, des trois bassins versants français du
Var, de la Moselle, de la vallée du Tavignano en Corse.
Le bassin versant du Var
(suite)
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« Si les normes européennes avaient été en vigueur dès le début du mois de mai, de nombreuses récoltes auraient dû être détruites». Le Boréon, dans la vallée de la Vésubie, situé à une quinzaine de kilomètres à vol d'oiseau d'Isola 2000 est une tache très contaminée : « le sol forestier du Boréon représente le maximum des activités trouvées dans la région et probablement en France » à savoir : 28 460 Bq/m2 pour Cs 134 63 175 Bq/m2 pour Cs 137 [1,7 Ci/km2] 160 218 Bq/m2 pour Ru 103 65 210 Bqm2 pour Ru+Rh 106. On note en plus la présence notable d'Argent 110m, d'Antimoine 125 et du couple Cérium+Praséodyme 144. « Si on fait la somme des radioactivités gamma d'origine artificielle on trouve 322 000 Bq/m2 [8,7 Ci/km2]. On multiplie encore ces valeurs si on ajoute à cela les radionucléides à vie courte qui avaient disparu au moment des prélèvements. En particulier pour le seul iode 131 à peu près 12 fois plus abondant que le césium 134, on trouve un dépôt estimé à 340 kBq/m2 [340 000 Bq/m2] ». H. Maubert précisait pour la forêt du Boréon « C'est un haut-lieu touristique niçois où l'on cueille en saison myrtilles et champignons ». Ainsi on peut légitimement se poser des questions concernant les problèmes thyroïdiens dans cette région. Il n'y a eu aucune mise en garde de la population et aucun écho dans la presse. Le bassin versant de la Moselle
3 - Pellerin toujours. Lettre ouverte au Ministre
de la santé Claude Evin (mars 1990)
p.28
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Ces déclarations
faites en tant que représentant de l'OMS conduisaient à diminuer
le nombre d'habitants à évacuer des zones contaminées
alors que les dirigeants ukrainiens et biélorusses étaient
en train de peaufiner à la baisse leurs programmes d'évacuation
1989-1995 concernant des centaines de milliers de personnes. Ces déclarations
qui avaient pour but de contrer les scientifiques tant d'Ukraine que de
Biélorussie ont été évidemment très
bien accueillies par les autorités soviétiques c'est pour
cette raison qu'"on" l'avait fait venir M. le Professeur Pellerin. Il a
préconisé des doses-vie 2 à 3 fois supérieures
aux limites légales en France et nous voulions savoir si c'était
sur ordre du ministre de la santé que Pellerin prônait de
telles limites contraires à notre législation, et si c'était
celles qui seraient appliquées en France en cas d'accident.
Pas de suivi dans la presse. Une délégation se rend au ministère de la santé en juin pour une audience avec le ministre. Nous y serons reçus par l'irremplaçable Dr Girard avec une promesse de réponse du ministre en septembre qui bien sûr ne sera pas tenue. Si quelques articles paraissent dans la presse, le rôle spécifique de Pellerin y est rarement critiqué car « il ne faut pas personnaliser » selon la formule d'une journaliste... II - Les cancers de la thyroïde en France
(suite)
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suite:
En Lorraine: 7 cas ont été enregistrés entre 1983 et 1994 (1 seul cas entre 1983 et 1986) pour une population couverte de 500 000 enfants de moins de 15 ans ce qui représente une incidence brute de 1,17/106/an. 3 cas sont de type médullaire, 4 de type papillaire dont 3 survenus après Tchernobyl. En tenant compte des deux types de cancers l'incidence est plus élevée qu'en Angleterre et au Pays de Galles ainsi qu'en Belarus avant Tchernobyl. Région PACA-Corse : 18 cas ont été enregistré entre 1984 et 1994 sur une population de 834 000 enfants de moins de 15 ans dont 16 sont de type papillaire (2 cas enregistrés en 1985 et 1 en 1986). Sur la période 1984-1994 cela représente une incidence brute de 1,96/106/an et elle monte à 2,25/106/an sur les 8 années 1987-1994 avec 15 cas enregistrés. Il paraît difficile d'ignorer un tel résultat d'une incidence 4 fois plus élevée qu'en Angleterre! On ne peut certainement pas en conclure que ce n'est pas dû à Tchernobyl. A tout le moins cela nécessite une enquête approfondie sachant que le sud-est de la France et la Corse ont été bel et bien contaminés et que des niveaux comme ceux de la forêt du Boréon ont pu se retrouver ailleurs comme en témoignent les analyses effectuées par la CRII-Rad. La présomption est donc très forte pour incriminer Tchernobyl et le laxisme des autorités sanitaires françaises, leur non-mise en garde de la population tant en Corse que dans le sud-est de ne pas consommer le lait puis les baies des forêts et les champignons, tout cela est très grave. Les comprimés d'iode stable
p.29
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De toute façon
insistons sur le fait que les comprimés d'iode stable doivent être
pris avant le rejet des iodes radioactifs pour avoir le maximum
d'efficacité. Il faut donc avoir des chefs de centrale compétents
et soucieux de la santé publique...
D'autre part soulignons que l'iode stable ne protège que des iodes radioactifs et pas des autres radionucléides pour lesquels il n'y a pas de recette miracle. III - Des malformations congénitales ?
A propos de l'augmentation de leucémie
chez les nourrissons de moins d'1 an en Grèce après Tchernobyl.
Analyse de l'article
de S. Darby et E. Roman (« Links in Childhood leukaemia »,
["En relation avec la leucémie"],
Nature, 25 July 1996, vol.
382, p. 352-353).
(suite)
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suite:
« En outre il y a des preuves en grand nombre à partir d'études cas-témoins où l'exposition des personnes présentant la maladie [les "cas"] est comparée à celle des personnes saines [les "témoins"], que les examens par rayons X de l'abdomen des femmes enceintes peut causer la leucémie des enfants » [c'est moi qui souligne]. La première publication d'Alice Stewart et al en 1956 montrait que les enfants atteints de leucémie (les "cas") appariés à des enfants sains (les "témoins") avaient été plus exposés in utero par les examens radiographiques obstétricaux de leur mère que les enfants sains. Bien sûr A. Stewart n'est pas citée dans les références]. « Par contre les études de cohortes où l'on compare l'incidence de la maladie chez les personnes exposées et non exposées n'ont pas confirmé cette association [entre leucémie et exposition au rayonnement] peut-être à cause de leur faible puissance statistique ». S. Darby note qu'aujourd'hui, parce que les doses délivrées au cours des examens par rayons X ont diminué et aussi parce qu'on radiographie beaucoup moins les femmes enceintes, la proportion de leucémies radioinduites in utero par les radiodiagnostics ne dépasse pas 1%. Selon S. Darby d'autres agents, biologiques, physiques et chimiques sont suggérés comme pouvant présenter des risques potentiels d'exposition in utero et post-natale : rayonnement électromagnétique, hydrocarbures, pesticides, vitamine K ; les études épidémiologiques donnent des arguments en faveur du rôle joué par des agents infectieux (mais on n'en a pas identifié un seul). « Il semble raisonnable d'admettre aussi que le rayonnement naturel peut causer une fraction des leucémies des enfants [souligné par moi]. La proportion qui peut être attribuée au rayonnement naturel ne peut pas, cependant, être estimée directement car la plupart des enfants sont exposés à des débits de dose similaires. Des estimations indirectes basées sur l'extrapolation des données obtenues à partir des survivants des bombardements au Japon exposés à de plus fortes doses et à des débits de dose élevés indiquent qu'environ 7% des leucémies infantiles pourraient être dus à l'exposition postnatale au rayonnement naturel. Les estimations du risque à partir des effets des rayons X pendant la grossesse indiquent que peut-être 7% pourraient être aussi dus à l'irradiation in utero. ». S. Darby indique que jusqu'à présent les études effectuées sur des populations ayant été affectées par les retombées des essais nucléaires des années 60 ou bien affectées par Tchernobyl n'ont pas fourni d'arguments qui remettent en cause les estimations du risque du rayonnement obtenues à partir des extrapolations des expositions au rayonnement tant médicales que des tests de bombes. « Mais aucune de ces études n'avait spécifiquement étudié la leucémie des enfants en bas âge ayant été irradiés in utero. C'est ce que Petridou et al ont fait en se focalisant sur l'incidence de la leucémie chez les bébés grecs après Tchernobyl ». Le point important souligné par S. Darby est que la dose engagée "officielle" est de 1 mSv pour la première année qui a suivi Tchernobyl (d'après le rapport de 1988 de l'UNSCEAR) c'est à dire du même ordre de grandeur que la dose annuelle provenant du rayonnement naturel. « Si les estimations faites à partir des extrapolations sont fausses et qu'une proportion importante des leucémies des enfants en bas âge est causée par le rayonnement naturel alors on doit s'attendre à ce que l'exposition due à Tchernobyl entraîne approximativement un doublement du risque en Grèce ». Or c'est effectivement ce qui a été observé par Petridou et al - risque de leucémie multiplié par 2,6 pour les enfants de moins d'1 an ayant été exposés in utero aux radiations de Tchernobyl, lorsqu'ils sont comparés à ceux nés avant Tchernobyl ou plus tard. De plus parmi les enfants grecs exposés in utero aux radiations de Tchernobyl, ceux nés de mères vivant dans des zones à forte radioactivité ont eu des taux d'incidence plus élevés que ceux nés de mères vivant dans des zones à faible radioactivité ». Ainsi S. Darby souligne que l'action cancérigène du rayonnement naturel pourrait être beaucoup plus élevée que ce qui est admis jusqu'à maintenant. Remarquons que S. Darby ne remet pas en cause l'estimation officielle de la dose engagée en Grèce de 1 mSv la première année après Tchernobyl. p.30
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Les critiques
et recommandations sont alors énoncées:
« Il est important de ne pas faire l'hypothèse que l'association trouvée est causale ». 1- « parce qu'il n'y a pas de raison a priori de supposer que la leucémie des enfants de moins d'1 an est plus facilement induite par une exposition aux rayonnements in utero que ne le seraient les leucémies d'enfants plus âgés ayant été irradiés in utero, or pour eux il n' a pas été observé d'augmentation de leucémie ». En fait, les données de Petridou et al pour les leucémies diagnostiquées chez les enfants de 1 à 4 ans indiquent pour ceux "exposés" in utero une légère augmentation de 10% par rapport à l'incidence des "non-exposés" mais elle n'est pas significative. Question naïve de ma part: ne peut-on pas penser que s'il existe réellement une "fenêtre" de sensibilité accrue en début de grossesse, le temps de latence pourrait être raccourci et affecter ainsi davantage l'incidence des enfants les plus jeunes? Alice Stewart émet depuis longtemps l'hypothèse de l'existence d'une période, en début de grossesse, plus susceptible au rayonnement que le dernier trimestre; c'est la raison pour laquelle elle pense qu'à dose de rayonnement reçue équivalente, le rayonnement naturel est plus "efficace" du point de vue de son action cancérigène que les examens par rayons X au cours de la grossesse. Ceux-ci sont en effet effectués presque toujours juste avant l'accouchement alors que le rayonnement naturel intègre obligatoirement la période sensible, selon elle, du début de grossesse (voir par exemple dans Radiation and Health: the Biological Effects of Low-level Exposure to Ionizing Radiation, Ed. R.R. Jones et R. Southwood, publié par John Wiley, 1987). 2 - « Bien qu' on observe un gradient dans l'incidence de leucémie des enfants en fonction du niveau de contamination des différentes zones, depuis les faibles niveaux jusqu'aux niveaux élevés en passant par des zones de contamination moyenne, la question se pose de savoir si ceux vivant dans les zones les plus contaminées ont reçu les doses les plus élevées puisque la majorité de l'exposition de Tchernobyl vient de l'ingestion d'aliments contaminés ; de plus il n'est pas tenu compte du fait que les expositions dues à Tchernobyl ont duré plusieurs années , de sorte que les enfants nés après la période définie comme étant celle des enfants "exposés" auront eux aussi reçu quelque exposition de Tchernobyl ». Commençons par la fin: il est évident que la contamination n'a pas disparu au bout d'1 an. Elle dépend de la façon dont le césium 137, le radioélément le plus abondant, migre dans le sol, de la façon dont le strontium 90 sera "mobilisé" dans les végétaux etc. Mais il est certain aussi que les habitants des zones les plus contaminées ont reçu les premiers mois une dose externe par le panache et les dépôts au sol beaucoup plus importante que le reste du pays. Le rapport de l'UNSCEAR de 1988 estime que la dose externe reçue au cours du 1er mois équivaut à celle des 11 mois suivants. Le cocktail de radioéléments à vie courte que sont, outre les iodes, les zirconium 95 (période 1,4 h), tellure 132 (78h), baryum 140 (12,8 jours), cérium 141 (33 jours), ruthénium 103 (39,6 jours) strontium 89 (52 jours) contribuent à la dose externe des premiers mois. (Ils contribuent aussi à la dose interne par inhalation et par contamination des végétaux). Dans le maquis d'informations du rapport UNSCEAR de 1988 consacré à Tchernobyl on trouve, comme l'indique S. Darby, que pour les pays méridionaux, dont la Grèce fait partie, l'essentiel de la dose efficace de la 1ère année serait dû à la contamination interne. A partir du moment où l'on estime, ce qui est fait dans le rapport UNSCEAR, que la première année d'exposition après Tchernobyl est la plus "irradiante", la plus pénalisante en ce qui concerne la dose efficace, il est légitime de considérer comme "exposés" ceux des enfants pour lesquels la grossesse couvre la période la plus "irradiante" c'est à dire sensiblement une année après Tchernobyl (suite) |
suite:
Or la période de grossesse considérée comme donnant naissance à des enfants "exposés" va du 1er octobre 1985 (naissances à partir du 1er juillet 1986, 2 mois après Tchernobyl) au 1er avril 1987 (naissances avant le 31décembre 1987), c'est à dire qu'elle couvre une période de 11 mois après Tchernobyl, période raisonnablement la plus critique des retombées avec effet les plus importants des radioéléments à vie courte. La phase aiguë, les 3-4 mois suivant Tchernobyl, concerne à la fois les mois de fin de grossesse (les moins radiosensibles) pour ceux nés après juillet 1986, et de débuts de grossesse (les plus radiosensibles) pour ceux nés vers le 1er février 1987 et les 2-3 mois suivants. Quant à l'argument selon lequel la contamination serait en somme "démocratiquement" répartie grâce à la contamination interne par les aliments contaminés indépendamment de la contamination du sol sur lequel vivent les habitants, c'est oublier que la Grèce est assez rurale et que pas mal d'habitants des zones rurales sont en auto-subsistance. Une certaine "démocratisation" s'effectue surtout quand tout le pays est contaminé ou que les régions agricoles qui fournissent les aliments de base sont fortement contaminées. (C'est ce qui est arrivé en Biélorussie mais il n'empêche que c'est dans les régions les plus contaminées que les habitants sont les plus exposés). 3 « Les résultats sont basés sur seulement 12 cas de leucémies de nourrissons affectant des enfants ayant été in utero pendant la phase d'exposition aiguë, parmi eux 4 seulement sont nés de mères vivant dans des zones très contaminées au moment du diagnostic ». Ainsi on retombe
toujours sur le problème des petits nombres.
p.31
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