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N°15/16
LE RAPPORT SCHLOESING

I. - LA POLITIQUE DE L'ENERGIE
(Nota: pour raison de clarté, toutes les références ont été mises en fin de dossier)

A. UNE SITUATION DEFAVORISEE

     En dépit de la superficie moyenne de son territoire, la France ne dispose pas de ressources énergétiques significatives. Nous n'avons pratiquement pas de pétrole et nos modestes réserves de gaz s'épuisent à un rythme rapide. Par comparaison avec d'autres pays, nous ne possédons que peu de charbon et relativement peu d'uranium. Il n'y a guère qu'en ce qui concerne l'hydrolectricité et les énergies nouvelles, notamment la géothermie[1] et l'énergie solaire, que nous puissions nous trouver à égalité avec les pays voisins, voire en meilleure situation.

I. Ce qne nous n'avons pas.
a) Le pétrole[2]

     En 1976, la France a produit, à partir de son sol, 1 million de tonnes de pétrole. C'est une production parfaitement négligeable puisque la même année nous avons importé 121 millions de tonnes(1). La France est, à cet égard, réellement très défavorisée. Les campagnes de prospection depuis une génération ont couvert la plus grande partie du territoire, sans résultats significatifs. Il reste des espérances en mer d'Iroise, mais à l'heure actuelle l'espérance n'est pas encore une énergie fiable...[3].
     S'agissant des réserves de pétrole, la France n'est généralement pas citée au nombre des pays qui en possèdent. Certes, par tradition, on met en relief la médiocrité des réserves mondiales d'hydrocarbures. Aux dires des compagnies, la planète n'a jamais disposé de plus de vingt à trente ans de consornmation devant elle; que cette présentation des faits ait été propice à la stratégie des grandes compagnies multinationales, nul n'en disconvient. Cependant, à la récente conférence mondiale de l'énergie, tenue à Istanbul, le président de l'Institut français du pétrole a évalué de 250 à 300 milliards de tonnes les réserves disponibles, dans la limite d'un prix de revient de 20 dollars le baril, ce qui représente cent années de consommation 1977. 


(1) La consommation du marché intérieur civil a été de 104 millions de tonnes [4]

Il y ajoute même 200 à 300 milliards de tonnes supplémentaires d'un pétrole, actuellement non exploitable, mais qui compte-tenu des technologies à mettre en oeuvre, pourrait être mobilisable à compter de la fin du siècle, dans la limite d'un prix de revient de 25 dollars le baril[5]. Certes, ce pétrole serait cher (le prix actuel est de 12 dollars le baril) et son extraction implique que de nombreuses conditions soient réunies. Que d'ici à l'an 2000 le pétrole doive augmenter n'est pas pour surprendre même si les conséquences d'une telle évolution ne sont pas minces. Mais le fait est que, globalement, la pénurie physique n'est pas pour demain. Il ne serait pas convenable de tirer de cette constatation des conclusions excessives que son auteur, lui-même, récuserait. Dans le long terme, les besoins énergétiques de la planète ne seront certes pas couverts par le seul pétrole. Mais il suffirait de gagner vingt années pour que le relais des énergies nouvelles prenne, si l'on y consacre les moyens nécessaires, une dimension significative[6]. Les perspectives du problème mondial de l'énergie s'en trouveraient, dès lors, modifiées  il convenait de le souligner.
b) Le gaz

     Nos possibilités ne sont pas nulles mais elles sont faibles et le gisement de Lacq, dont la production plafonne, est en voie d'épuisement. En 1976, la production française a été de 7 milliards de mètres cubes(2); soit 0,5% de la production mondiale. En 1975, la Roumanie avait produit 32 milliards de mètres cubes, le Royaume-Uni 35 milliards de mètres cubes, les Pays-Bas 90 milliards de mètres cubes, l'Union soviétique 290 milliards de mètres cubes et les EtatsUnis 580 milliards de mètres cubes. Nos réserves sont encore plus modestes que notre production. En 1976, on évaluait les réserves mondiales à plus de 60.000 milliards de mètres cubes (ces estimations demanderaient sans doute à être actualisée: en fonction des rapports présentés à la conférence d'Istanbul). Nous en possédions 0,24% (3).


(2) soit l'équivalent de 7 millions de tonnes de pétrole.
(3) Ici, comme dans la suite de ce rapport, nous avons fait largement appel à la documentation chiffrée contenue dans le Bulletin d'informations scientifiquce et techniques (n° 221, janvier et février 1977) publié par le CEA
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     Le rapport n° 3131 a été fait au nom de la Commission des Finances, de l'Economie Générale et du Plan* sur le projet de loi de finances pour 1978 (n° 3120) par M. Maurice PAPON. L'annexe n° 23, relative au domaine de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat, a pour rapporteur spécial M. Edouard SCHLOESING. Elle analyse et commente la politique de l'énergie et la politique industrielle de la France. Elle indique les recommandations énoncées par la Commission. *Cette Commission est composée de MM. Icart, président; Maurice Papon, rapporteur général; Montagne, Ribes, Louis Sallé, vice-présidents; Robert Bisson, Cornet, Voisin, secrétaires; MM. Alduy, Ballanger, Bardol, Baudis, Mario Bénard, Benoist, Alain Bonnet, Boulloche, Caro, Chauvet, Chevènement, Combrisson, Jean-Pierre Cot, Crépeau, Cressard, Dehaine, Denvers, Destremau, Duffaut, Fossé, Frelaut, Ginoux, Gosnat, Hamel, Hoffer, Josselin, Pierre Joxe, Lamps, Larue, Leenhardt, Le Tac, Le Theule, Madrelle, Marette, Marie, Mayoud, Mesmin, Neuwirth, Partrat, Plantier, Pons, Pranchère, Ribadeau Dumas, Rieubon, de Rocca Serra, Rohel, Savary, Schloesing, Sprauer, Sudreau, Tissandier, Torre, Robert-André Vivien, Vizet.
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2° Ce que nous n'avons guère.
a) Le charbon.

     Les quantités de charbon dont nous pouvons actuellement disposer sont médiocres. Il n'est pas toujours de très bonne qualité. Il est souvent d'exploitation difficile. Les gisements s'épuisent. Le rendement stagne depuis quinze ans dans le Nord  Pas-de-Calais et, depuis sept ans, en Lorraine. Le coût d'extraction va croissant.[7]
     Notre production de houille a été de 22 millions de tonnes en 1976, soit cinq fois moins que la République fédérale d'Allemagne et six fois moins que le Royaume-Uni. La Chine a produit plus de 450 millions de tonnes et les Etats-Unis, comme l'Union soviétique, entre 550 et 600 millions de tonnes.
     Pour l'essentiel, seuls les gisements lorrains paraissent pouvoir encore fournir du charbon dans des conditions intéressantes pour les dix ou quinze prochaines années.
Relativement, nos réserves sont encore plus modestes. En novembre 1975, elles étaient estimées à 430 millions de tonnes, ce qui représentait vingt années de production. Les réserves du Royaume-Uni atteignaient 3.870 millions de tonnes, celles de la République fedérale d'Allemagne 30.000 millions de tonnes, celles de la Chine 100.000 millions de tonnes, celles des Etats-Unis d'Amérique 123.000 millions de tonnes et celles de l'Union soviétique 165.000 millions de tonnes[8]Nous disposons de 0,09% des réserves prouvées exploitables dans le monde. Les réserves de houilles estimées à 500 milliards de tonnes doivent assurer à la planète deux cents ans de production sur la base de 1975. Une autre évaluation conclut à 275 années de production sur la base de la consommation de 1973. Il faut savoir et souligner que le charbon est une énergie abondante et relativement bon marché[9].
 

en milliards de Tec (*)
Les grands pays producteurs minimum maximum ressources en place dont en principe 30 à 50% récupérables
URSS 150 300 5700
Chine 80 300 1000
Etats-Unis 180 360 2900
Europe occidentale 30 60 500(?)
Pologne 20 40 100
Afrique du Sud 15 30 100
Canada 5 10 40 à 60
AUstralie 25 75 200(?)
Inde 15 30 100
Indonésie - - 100(?)
Amérique latine 3 9 40
Total mondial 600 1400 10700
*Réserves exploitables dans les conditions économiques et techniques proches de celles d'aujourd'hui.
Sources: Conférence Mondiale de l'Energie 1974, Lardinnois et divers
     Comme on peut en juger, les données sur lesquelles peut se baser le Ministre montrent à l'évidence l'abondance du charbon qui est susceptible de couvrir la demande d'énergie mondiale pendant au moins 400 ans!
suite:
b) L'uranium[10]

     Pour l'uranium, notre situation relative est meilleure. Les ressources assurées et estimées seraient de 95.000 tonnes en France, pour 210.000 tonnes en Espagne, 300.000 tonnes en Suède, 350.000 tonnes en Afrique du Sud[11], 400.000 tonnes en Australie, 780.000 tonnes au Canada et 1.800.000 tonnes aux Etats-Unis (1)[12]. Or, nos besoins en 1985 seraient de l'ordre de 10.000 tonnes par an. Ce qui nous assurerait environ dix années de consommation. Même si l'on tient compte de nos intérêts en Afrique, c'est une situation encore un peu fragile pour être assurés de l'indépendance. Au reste, comme nous le verrons, il ne suffit pas de posséder du minerai pour disposer du combustible convenant à l'alimentation de toutes les centrales en service.

3° Ce que nous avons.
a) L'hydro-électricité.

     L'hydro-électricité fut la grande ressource des années 1950. Aujourd'hui encore notre production nous situe à un bon niveau: 49 milliards de kWh en 1976, année de grande sécheresse, après 60 milliards de kWh en 1975, soit l'équivalent de 11 à 13 millions de tonnes de pétrole. Le gisement est, à terme prévisible, inépuisable. C'est une fois et demie le gisement de Lacq mais pour l'éternité. En 1975, l'Europe des Neuf, y compris la France, a produit 127 milliards de kWh d'hydro-électncité soit 12% du total de l'électricité produite, alors que pour notre pays ce pourcentage s'est établi à 34% en 1975 et 25% en 1976. Notre production d'hydro-électricité représente 4% du total mondial: ce même pourcentage, appliqué aux hydrocarbures, nous aurait donné 11.0 millions de tonnes de pétrole en 1975.
Il est difficile de se faire une idée précise de nos réserves. Depuis des années on a voulu considérer l'hydro-électricité comme une énergie périmée[14] aussi n y a-t-i1 pas de recensement de ressources aisément disponible, si ce n'est pour démontrer que cette forme d'énergie n'a plus d'avenir. Certes, les plus grands sites ont sans doute été équipés mais il resterait à faire le bilan exact des équipements possibles aux divers niveaux de puissance[15]. En fait, nous ne savons pas, parce qu'EDF a consacré ses efforts à d'autres sources d'énergie.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


(1) Les évaluations sont faites sur la base d'un coût inféricur à 30 dollars pour une livre d'oxyde d'uranium.
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b) Les énergies nouvelles.

On va répétant que ces énergies ne pourront pas donner des résultats significatifs dans l'avenir et qu'elles ne pourront representer au mieux que 1% de notre consommation. Il est vrai que les efforts faits en leur faveur ne peuvent aboutir qu'à des résultats médiocres. Cependant, nos possibilités en ce domaine ne sont pas négligeables.[16]
     S'agissant de la géothermie, la France possède des nappes profondes notamment dans le Bassin parisien, le Bassin aquitain, en Alsace et dans le Massif central. Leur utilisation a été jusqu'alors quasi nulle si l'on excepte quelques rares expériences. Pourtant, des informations fournies voici quelques années dans les Annales des mines donnaient à penser que les possibilités sont loin d'être négligeables: la réserve brute totale de la nappe du seul Bassin parisien a été évaluée à 18 millions de tonnes d'équivalent-pétrole (tep).
En 1973, la puissance électrique installée était de 390 MW en Italie. C'est évidemment peu mais elle était nulle en France[17]. Pour notre part nous ne prévoyons pour 1980 qu'une puissance de 25 MW en Guadeloupe, alors que de nombreux pays sont en voie de s'équiper dans des proportions sensiblement plus importantes.
S'agissant de l'énergie solaire[18], la zone tempérée dans laquelle nous sommes situés n'est pas spécialement favorisée mais notre territoire est relativement étendu et sa partie sud n'est pas mal située.Jusqu'à présent, aucun effort n'a été réellement tenté à l'échelle industrielle. Il est dès lors facile de faire valoir que le coût des expériences jusqu'alors réalisées est élevé. On rappellera seulement qu'en Israël il existe 200.000 installations pour le chauffage domestique de l'eau et qu'on en compte deux millions au Japon.[19]
     Sans évoquer la gazéification et la liquéfaction du charbon ou encore l'utilisation de l'hydrogène comme combustible, possibilité intéressante mais à terme éloigné et pour l'heure aléatoire, on constate que la France n'est pas dépourvue dans le domaine de l'hydro-électricité et des énergies nouvelles. En tout cas, sa situation relative y est meilleure que pour les énergies traditionnelles.

suite:
En guise de bilan sommaire, on peut avancer que notre pays reste pauvre en énergie. En Europe occidentale, nous sommes avec l'Italie le pays le plus dépendant de l'extérieur parmi les Etats d'importance comparable[20]. Nous importons plus des trois quarts de notre énergie. La République fédérale d'Allemagne et le Royaume-Uni n'en ont importé que 50% en 1975.
     Face à cette situation singulièrement médiocre, qu'avons-nous fait?

B. JUSQU'EN 1973: LE «TOUT PETROLE»

     Au cours des années 1960, la France a progressivement négligé l'hydro-électricité, organisé la régression du charbon et, en fin période, abandonné une politique active de recherche pétrolière. En contrepartie, elle a fondé sa croissance sur un approvisionnement massif en hydrocarbures.

3° Les abandons.
a) L'abandon de l'hydro-électricité.

     Jusqu'au début des années 1960, l'électricité d'origine hydraulique et l'électricité d'origine thermique progressaient selon des courbes grossièrement parallèles. A partir de 1963, les courbes de production ont divergé. La part de l'hydro-électricité n'a pas cessé de régresser tandis que celle de l'électricité d'origine thermique progressait vivement. Jusqu'à ces dernières années, le montant des investissements hydroélectriques a diminué au point de ne plus constituer qu'un appoint dans le programme d'équipement d'EDF[21]
     Du point de vue financier, l'entreprise nationale avait raisons. Le prix du fuel a en effet décru régulièrement en francs constants jusqu'en 1973. Or, EDF fonde sa politique sur un chiffre: le prix du kWh aux bornes de la centrale. On peut considérer que cette façon de voir les choses manque d'ampleur mais il est de fait qu'il appartenait au Gouvernement d'avoir une vue plus large du problème et d'imposer ses choix aux entreprises nationales.

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     Certes, l'investissement hydro-électrique coûte cher. Mais une fois l'effort initial accompli, l'exploitation est fatalement peu onéreuse puisque le combustible est gratuit. En 1976, d'après le rapport d'EDF, le prix de revient du kWh hydraulique s'est établi à 5,67 centimes alors que ce prix était de 11,37 centimes pour le kWh thermique (y compris le nucléaire); la proportion est dans le rapport de 1 à 2. Le prix de revient du kWh acheté aux tiers s'est élevé, pour sa part à 10.83 centimes.
     Selon la réponse donnée à votre commission des Finances, le coût moyen du kWh d'origine hydraulique est passé, notamment à cause de la diminution de la production due à la sécheresse, de 5.0 centimes en 1975 à 7,0 centimes en 1976 alors que le kWh nucléaire atteignait 9,5 centimes et le kWh thermique 10,6 centimes. Quels que soient les chiffres, on peut admettre que l'hydro-électricité est une énergie bon marché permettant à EDF d'améliorer des résultats financiers qui, autrement, seraient très lourdement déficitaires.
Au surplus. cette forme d'énergie comporte des avantages annexes: énergie non polluante, aménagement touristique, irrigation et développement agricole[22], effort en faveur des zones de montagne. Du point de vue de l'économie générale, ces avantages sont, à coup sûr, importants mais ils ne sont pas pris en compte dans les calculs de l'entreprise nationale qui dispose pourtant d'une équipe d'économistes de qualité. Bien au contraire, EDF a souvent soutenu que le surcoût de l'équipement hydraulique devait être mis à la charge des collectivités locales. C'est une démarche qui consiste à ignorer les avantages et à souligner les inconvénients[23]. Au reste, s'agissant d'investissements d'intérêt national, c'est à la nation d'en assumer l'éventuel surcoût. Il en a été ainsi pendant vingt années pour les réacteurs expérimentaux du Commissariat à l'énergie atomique; EDF ne raisonne pas autrement pour Superphénix mais pour l'hydro-électricité, ce même raisonnement n'a pas été retenu.
Enfin, on croit utile de rappeler que l'hydro-électricité est une énergie totalement nationale qui ne dépend ni des cours mondiaux ni des événements du Moyen-Orient. Ce fait n'a pas été pris en compte, ni par l'établissement national, ni par le ministère de l'industrie, ni par le gouvernement[26].
     Naturellement, cette politique a conduit EDF à acheter à des prix fort peu rémunérateurs l'hydro-électricité vendue par des tiers. Les petits producteurs n'en ont pas été encouragés, non plus que la compagnie nationale du Rhône. En trente années, cette derniere n'a pas encore achevé l'équipement du grand fleuve.

b) La régression du charbn.

     La situation sur le terrain rendait cette régression inévitable mais depuis dix ans, elle s'est singulièrement accélérée. En 1967, nous avons produit 48 millions de tonnes de houille et en 1976, 22 millions. Dans le même temps, la production de la Grande-Bretagne est passée dé 175 millions de tonnes à 122 millions de tonnes et celle de l'Allemagne de 117 millions de tonnes à 96 millions de tonnes.
     De 1972 à 1976, l'Europe des Six a perdu un peu plus de 20% de ses effectifs au fond et l'Europe des Neuf environ 16%. Pour la France, la diminution a été de 29%.
     La production a évolué parallèlement. Elle a diminué de 17% dans l'Europe des Six, de 9% dans l'Europe des Neuf et de 26% en France de 1972 à 1976. Durant la même période, la République fédérale d'Allemagne a réduit ses effectifs de 16% et sa production de 10%.

suite:
     Les conditions difficiles d'exploitation de certains bassins peuvent expliquer une régression plus marquée qu'ailleurs mais il est difficile de justifier les proportions qui viennent d'être rappelées. Le rendement au fond des houillères du Centre-Midi est du même ordre que celui du Royaume-Uni; quant au rendement au fond des bassins de Lorraine, il est supérieur à celui de l'Allemagne fedérale.
     Cette situation est lourde de conséquences. Dans une industrie telle que l'industrie charbonnière, quand on ne renouvelle plus les effectifs et qu'on ne forme plus les hommes, le terme paraît proche. Quand un puits est abandonné, il l'est définitivement.
     Cette régtession trop vive de notre production charbonnière paraît procéder de deux erreurs. En premier lieu, une erreur de prévision a sans doute été commise sur l'avenir du charbon.


ENCART 1

LA POLITIQUE CHARBONNIERE

     Dans sa réponse à M. Edgar Pisani, le Ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat indique:
     «L'abondance des ressources charbonnières de notre planète et la persistance sur le marché international de prix sensiblement inférieurs à ceux des produits pétroliers a conduit de nombreux pays à réexaminer le rôle à réserver au charbon dans leur approvisionnement. Il est clair que les pays tels que les Etats-Unis qui disposent de réserves très importantes exploitables à ciel ouvert, peuvent, dans des conditions économiques compétitives, avoir très largement recours au charbon pour la production d'électricité et l'approvisionnement en énergie de l'industrie.
     Des informations récentes semblent cependant prouver que les exigences de production de l'environnement (désulfuration des fumées des centrales thermiques, réhabilitation des sites) tendraient à obérer fortement la compétitivité du charbon. Le problème est plus délicat pour un pays comme la France qui est tributaire des importations pour une grande part de son approvisionnement. La place à réserver au charbon doit s'analyser sous deux aspects essentiels en termes économiques et en termes de sécurité des approvisionnements».

Journal Officiel des débats du Sénat
du 20 septembre 1977.
     Il nous semble qu'il y a au moins deux autres aspects tout aussi essentiels à examiner: d'une part les conditions d'exploitation et de travail des mineurs, d'autre part la modernisation des modalités de distribution du produit.
     Sur ce dernier point, une politique de recherche et de développement doit chercher à promouvoir les techniques de gazéification, de transformation du minerai en poudre, donnant lieu à un transport et une distribution moins onéreux, à perfectionner les procédés de désulfuration...
     C'est au prix de ces efforts, menés dans le cadre d'une politique volontariste, que ce matériau peut retrouver une place de choix dans l'éventail de nos ressources énergétiques.
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     S'il était entendu que nos possibilités étaient limitées, au moins aurait-on pu rechercher dans d'autres pays ce que notre sol ne nous offrait pas. Les Français ont couru le monde pour découvrir du pétrole et du gaz ainsi que divers minerais. Il ne semble pas leur être venu à l'idée de chercher du charbon. Il n'aurait sans doute pas été inutile, au surplus, d'acheter quelques mines susceptibles de nous assurer un approvisionnement ou une contrepartie significative de notre consommation charbonnière. Or, pendant cette période, rien de tel n'a été réellement entrepris. Carence surprenante alors que cette énergie est abondante dans le monde occidental.
     Le seconde erreur procède de la politique qui a été pratiquée en matière de prix. Les prix des charbons sont administrés. Alors que les charbonnages sont une industrie de main-d'oeuvre, alors que les cours mondiaux auraient souvent permis de mieux valoriser notre production, les prix des charbons français ont toujours été les derniers à être ajustés. Dans son rapport (n° 2903) sur la loi de finances rectificative pour 1977, le Rapporteur général de la commission des Finances relevait que les prix de vente en France des charbons importés d'Allemagne fédérale et d'Union soviétique (rendus région parisienne) destinés aux foyers domestiques étaient supérieurs, au 1er mars 1977, de 12 à 74% suivant les provenances et les qualités aux prix des mêmes charbons vendus par les Houillères du Nord et du Pas-de-Calais. Il importait peu que les charbonnages perdent de l'argent pourvu que l'on sauvegarde, autant que faire se pouvait, l'indice des prix. Cette politique revenait à écouler à prix réduit une énergie nationale alors que nous étions obligés d'acheter, parfois à prix plus élevé, une energie importée. Cette politique avait pour conséquence d'opérer un transfert au bénéfice de la sidérurgie - ce qui n'a pas empêché sa déconfiture - et au bénéfice d'EDF à qui les charbonnages ont vendu leur charbon et leur électricité sur la base d'un prix très inférieur au prix moyen du fuel. Ces déficits, transférés d'une entreprise à une autre, n'ont pas de justification économique; ils altèrent les résultats et faussent les perspectives.[27]
     Des prix plus normaux auraient permis dès lors une exploitation plus rationnelle de notre charbon, justifié une décélération moins vive de la production, une évolution plus raisonnable et partant une meilleure sauvegarde de notre patrimoine énergétique.

c) L'abandon d'une politique active de recherche pétrolière.

     La France avait mené avant et après la dernière guerre une politique pétrolière qui ne manquait pas d'ambition. La découverte des gisements sahariens en avait révélé les fruits au grand public. La survenance de l'indépendance algérienne nous avait contraint à un redéploiement[28] de notre approvisionnement. Après cette indépendance, on avait semblé reprendre la voie traditionnelle de la recherche. Le Fonds de soutien aux hydrocarbures avait reçu des dotations non négligeables et les efforts s'étaient poursuivis souvent avec succès, au Canada, au Nigéria, au Gabon. au Congo, en Iran et en Extrême-Orient.
     Mais ce sursaut fut bref. Une politique des prix contraignante a obligé les entreprises et notamment les entreprises nationales à modérer leurs investissements. Surtout, nous avons conduit une politique budgétaire restrictiye qui, au cours des dernières années, a été régulièrement dénoncée par votre commission des Finances. Les concours publics à la recherche ont rapidement diminué puis ont été pratiquement supprimés. La rentabilité est devenue l'impératif à l'ordre du jour; or, dans l'immédiat, la recherche ne rapporte guère.

suite:
Les entreprises ont diversifié leur activité. L'E.R.A.P. - élément essentiel de notre politique de recherche - a revendu certains de ses permis et s'est fait simple opérateur pour le compte d'autres compagnies. Faute de moyens financiers appropriés, nous avons, pour l'essentiel, «manqué» la mer du Nord[29].
     Des chiffres traduisent de façon éloquente la diminution de notre effort de recherche. Exprimés en mois-équipes, les travaux de sismique ont diminué de près des trois quarts en volume de 1961 à 1973. Durant la même période, le nombre des appareils de forage utilisés est passé de 80 années-appareil à 30 et celui des mètres forés de 800.000 à 420.000 environ. Cette évotution s'est produite précisément pendant la période où nos besoins en pétrole ont cru très rapidement.
     Notre pays s'en est remis aux circuits traditionnels pour approvisionner le marché. Le pétrole, il est vrai, était abondant et peu onéreux.

2° Le règne du pétrole.

     Pour l'essentiel, la France s'est convertie au pétrole pendant cette période. Cette énergie a prévalu dans les domaines du chauffage domestique, des transports, de l'industrie et pour la fabrication de l'électricité. Calculant au centième de centime, EDF s'est massivement approvisionnée en fuel et a accéléré l'édification de centrales thermiques.
En 1960, le pétrole représentait 30% de l'énergie consommé en France et nous importions 22.6 millions de tonnes de pétrole. En 1973[30], le pétrole a représenté 69% de l'énergie consommée en France et nous avons importé 110 millions de tonnes de pétrole.
     Là encore la politique des prix conduite par le gouvernement a conforté cette évolution. Cette politique ne s'est pas caractérisée par sa hauteur de vue. En réalité, on ne discutait pas des orientations à donner à notre politique ni de la répartition de nos besoins entre les diverses formes d'énergie. On négligeait la réalité des choses pour en considérer seulement la dernière conséquence: l'indice des prix. Comme si l'ultime bout de la chaîne était maîtrisable quand on néglige de s'intéresser aux maillons qui précèdent.
     Cette conjoncture rencontrait les voeux du ministère de l'Economie et des Finances:
     - on s'approvisionnait en énergie à très bas prix,
     - les prix finaux régressaient en francs constants,
     - les concours budgétaires de l'Etat étaient au plus bas.
Ce faisant, on encourageait indistinctement toutes les consonmmations. Au surplus, en se référant constamment à un prix du pétrole anormalement bas, on laminait les possibilités de financement des autres secteurs, on limitait l'investissement et l'on se fermait toute possibilité de changer de politique dans de bonnes conditions[31]. Enfin. ce comporlemeni consacrait la dépendance de la France d'autant que nos importations n'étaient pas diversifiées: en 1975, 79% du pétrole importé par notre pays provenait du Moyen-Orient.
En bref, depuis 1960, nous avons négligé les minces atouts dont nous disposions pour fonder notre croissance sur la source d'énergie dont nous étions précisément dépourvus.[32]

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C. - DE 1974 A 1976: LE TOUT NUCLÉAIRE

     La crise survient brutalement. Le résultat en est le quadruplement du prix du pétrole et une forte majoration du prix des autres formes d'énergie. Les spécialistes sont désemparés. Des désordres apparaissent dans le système monétaire et dans l'économie des pays les plus directement touchés. Pour la France, la «facture» est impressionnante. Le déficit de notre balance énergétique a été de 51,5 milliards de francs en 1974; 45,7 milliards de francs en 1975 et 60,9 milliards de francs en 1976. Notre balance commerciale est devenue structurellement déficitaire.
     L'on s'aperçoit des résultats de la politique passée. Mais, étrange constatation. personne n'avoue s'être grossièrement trompé.
     Il cst temps de réagir. Que va-t~n faire?
     Contrairement aux apparences, on ne change pas complètement de politique. On entend simplement remplacer le pétrole par l'énergie nucléaire, nouvelle panacée.
En dehors du désintérêt que l'on continue à manifester envers l'hydro-électricité et les énergies nouvelles, la période se caractérise par un «petit» plan charbonnier, par une politique pétrolière toujours aussi étriquée et par un programme électronucléaire d'une grande ambition.[33]

1° Les énergies traditionelles.
a) Le plan charbonnier.

    Nous avons redécouvert avec timidité le charbon. Un plan de relance a été préparé. Mais dès le départ, les contraintes financières étaient telles que ces objectifs ne pouvaient être que limités. Il convenait en effet de limiter à 3 centimes ou 3,5 centimes la thermie le coût du charbon extrait. C'était encore une façon de s'aligner sur le fuel et de marquer la prépondérance du calcul à court terme sur toute autre considération. Les motifs qui ont amené les pouvoir publics à fixer cette limite n'ont d'ailleurs jamais été tout à fait explicités.
     Le plan de relance n'a pas été sans mérites. Depuis 1975, la production charbonnière ne décroît plus qu'à une cadence de l'ordre de 0.8 million de tonnes par an[34]. Par rapport au rythme précédent, le changement de tendance est marqué. Toutefois, cette inflexion a eu pour effet de creuser le déficit des Houillères. S'il ne saurait être question de discuter les avantages consentis aux hommes du fond, les conditions dans lesquelles le statut du mineur est appliqué aux autres catégories de personnel demanderaient sans doute à être revues.

     Cependant. la politique des prix maintenait les Charbonnages de France dans une situation diminuée. Le prix du charbon vendu à EDF a été, en 1976, inférieur, à francs courants, à ce qu'il était en 1975. En 1976. les quantités d'électricité livrées par les Houillères à EDF ont augmenté de 50,5% par rapport à 1975, mais le prix perçu n'a été majoré que de 24,5%. Alors que les Charbonnages permettaient à leur acheteur de réaliser une soudure difficile au cours d'une année particulièrement critique, une telle évolution des prix n'est pas rationnelle.
On peut avancer qu'une meilleure politique des prix[35] permettrait une meilleure utilisation de notre patrimoine charbonnier, notamment en Lorraine.
     Ce plan ne s'est pas accompagné d'une sensible modification de notre politique d'approvisionnement à l'étranger. Certes, nous diversifions dans des conditions que l'on peut considérer comme satisfaisantes la provenance de nos importations. Mais les investissements miniers à l'étranger sont encore faibles. Il est juste de souligner une modification de l'attitude des Pouvoirs publics à cet égard. Toutefois, les réalisations sont modestes puisque deux opérations seulement sont actuellement engagées. Les Charbonnages de France participent, avec des sociétés sidérurgiques, à un groupement qui a pris le contrôle d'une société minière aux Etats-Unis. Par ailleurs, l'entreprise nationale participe à l'exploitation d'une mine en Australie[36]. Une telle orientation devrait être confirmée et poursuivie avec une plus grande ampleur. Encore faudrait-il que les concours des Pouvoirs publics accompagnent une telle politique.

b) Une politique pétrolière toujours étriquée.

     L'effort de recherche qui avait atteint son point le plus bas en 1973 s'est quelque peu développé en 1974 et 1975. Mais, depuis lors, il tend à nouveau à diminuer, puisqu'il stagne en francs courants. Par ailleurs le domaine minier des compagnies est en nette diminution.
     Les décisions prises en ce domaine ne sont d'ailleurs pas pour favoriser une expansion soutenue. La provision pour reconstitution de gisement a vu son taux diminuer sans que l'on puisse intégrer cette mesure dans une politique d'ensemble. Le Gouvernement a fait état, voici deux ans, d'une nouvelle orientation de notre politique pétrolière, mais elle ne s'est pas, depuis lors, traduite dans les faits. Ce ne sont pas les 100 millions de francs inscrits au Fonds de soutien aux hydrocarbures qui peuvent être à la dimension des besoins à satisfaire; encore faudrait-il les consommer en temps utile et ne pas les utiliser à redresser des comptes d'exploitation quelque peu défaillants.

p.7

     La politique des prix s'est faite plus sévère. Il est difficile d'en apprécier à la fois les motifs et les conséquences. On comprend le souci du Gouvernement de ne pas permettre aux grandes sociétés internationales de réaliser des profits importants. Mais la structure de ces sociétés leur permet précisérnent de localiser le profit là où elles le jugent opportun. En revanche, une politique des prix stricte s'applique avec son plein effet aux sociétés nationales, notamment lorsqu'elles n'ont pas la facilité de s'approvisionner en brut à un coût privilégié. C'est pourquoi une telle politique laisse l'observateur perplexe quant à ses objectifs et inquiet quant à ses résultats.
     La situation de l9ndustrie du raffinage, en particulier, fait problème. D'aptes les renseignetnents communiqués à votre comrnission des Finances, le -compte d'exploitation consolidé du raffinage, faisait apparaître, en résultat net économique, une perte 'de 1.193 millions de francs en 1975 et de 2.482 millions de francs en 1976. Il tst vr~i que ces résultats sont largement corrigés par l'effet de la revalorisation comptable des stocks et par la prise en compte de la provision pour fluctuation des cours. En définitive, et toujours d'aptes les renseignements communiqués par le Gouvernement, le résultat reste cependant négatif, bien qu'il se soit amélioré "d'une année sur l'autre.
     Il n'est évidemment pas possible de tirer de chiffres aussi gl~ baux des conclusions tranchées. Il convient de se montrer prudent lorsque l'effet des prix sur les stocks et le jeu des provisions annulent pour une large part le résultat économique. Cependant, un tel mécanisme n'est pas sain et il serait souhaitable de faire apparaître des résultats économiques normaux, quitte à confisquer plus ou moins complètement les bénéfices nets enregistrés à la suite des effets sur stocks, des fluctuations de cours ou des variations de change.

2° Le programme nucléaire.

     La crise de l'énergie a conduit le Gouvernement à décréter un programme ambitieux de production d'électricité d'origine nucléaire. Ce programme a été présenté à l'opinion publique comme devant à la fois garantir notre approvisionnement en énergie et assurer notre indépendance.

a) L'importance du programme.

     Cette importance est attestée par les objectifs qui ont été avalisés par le Gouvernement pour 1985. En 1973, l'électricité d'origine nucléaire représentait 3,13 millions de tep (1), soit 1,8% de nos besoins. Pour 1985, l'énergie d'origine nucléaire devrait représenter 60 millions tep soit 25% de nos besoins énergie. Il ne s'agit donc de rien moins que de multiplier par près de 20 notre production d'électricité nucléaire en douze ans.
(1) tep = tonne équivalent pétrole
suite:
     L'électricité d'origine nucléaire devrait représenter, toujours en 1985, 14% des besoins en énergie du Japon, 16% en République fédérale d'Allemagne, environ 16% également aux Etats-Unis et ~ 9% pour l'ensemble du monde. Plus encore, alors que l'électricité nucléaire devrait couvrir en 1985. 25% de la consommation totale d'électricité au Japon, 30% aux Etats-Unis et 32% en Europe occidentale, le pourcentage pour la France devrait atteindre 70%.
     Aucun des responsables ne paraît s'être montré surpris de l'importance de la mutation proposée de sa rapidité et des bouleversements qu'elle ne m'inquerait pas d'entraîner. En effet, l'électricité d'origine nucléaire constitue un noyau de production énergétique à partir duquel se définit la place des autres formes d'énergie qui ne sont plus considérées que comme des énergies d'appoint. Ce programme implique la régression du thermique classique et l'on parlait le plus sérieusement du monde de mettre au rebut une partie des centrales actuellement en service. La régression du pétrole entraîne la reconversion de l'industrie du raffinage. Seul, à l'horizon 1985, le gaz (importé) devrait accroître sensiblement sa part dans notre bilan énergétique.
EDF n'hésite pas à accentuer le caractère excessif de cette politique.[37] D'après un tableau provenant de l'entreprise nationale (2), l'hydraulique qui a produit 60 milliards de kWh en 1975 en produirait 63 en l'an 2000. Ainsi se trouve confirmée l'idée que l'état-major d'EDF se fait de cette source d'énergie[38]Le fuel et le charbon[39] qui ont produit 101 milliards de kWh en 1975 en produiraient 48 en l'an 2000. Quant au nucléaire,  il passerait de 17,5 milliards de kWh en 1975 à 744 milliards de kWh en l'an 2000! Ainsi certains esprits ne s'étonnent pas devant une projection qui multiplie par 43 en vingt-cinq ans la production d'électricité d'origine nucléaire.
     Les moyens à mettre en oeuvre pour accomplir une tâche aussi formidable n'ont pas été programmés. L'intendance, on le sait, est faite pour suivre. Pour sa part, votre commission des Finances au cours des dernières années, a émis de sérieuses réserves sur nos possibilités de conduire à bonne fin un tel programme.
     Cependant, au fur et à mesure que le temps passait, les faits l'emportaient sur les prévisions. Il convient de rappeler cette évolution.
 
 
 
 


(2) Voir L'Expansion, de novembre 1977
p.8

ENCART 2
LE RAPPORT SCHVARTZ
     A propos de la politique pétrolière poursuivie ces dernières années, il est sans doute opportun de prendre en considération le rapport Schvartz déjà cité. Cet important document, qui date de 1974, indique dans ses conclusions générales (3ème partie, tome II) un certain nombre de points importants à souligner:
     «Dans chacun des pays concernés (par la crise de l'énergie), la croissance colossale des projets d'investissements dans les différentes sources d'énergie dans le même temps où un effort massif doit être fait pour rééquilibrer, grâce à une augmentation du potentiel industriel, la balance des paiements, ne peut se faire qu'au détriment des dépenses de caractère social et de redistribution des revenus. Est-il par exemple véritablement indispensable que la France participe à des énormes efforts de recherche pétrolière hors du Moyen-Orient? Le coût de la découverte d'un baril supplémentaire est de 3 cents dans la région du golfe persique, de 17 cents au Venezuela, de plus d'l dollar aux Etats-Unis et de 1 dollar 1/2 à 2 dollars en Mer du Nord»...
     ... Les pays consommateurs ont apparemment ébauché leur politique écbnomique comme si aucun accord ne pouvait intervenir entre les pays producteurs et eux-mêmes. Au maximum, certains d'entre eux ont envoyé au Moyen-Orient des missions mercantilistes...
     ... Pour ce qui la concerne, la France doit prendre l'initiative de rechercher la conclusion, avec les Etats producteurs, de contrats d'Etat à Etat...
     ... Le premier indice sur la voie de la raison serait l'établissement d'un prix unique du pétrole brut pour tous les acheteurs. Un second résiderait en l'établissement d'un indice raisonnable d'indexation du prix du pétrole brut sur une période suffisamment longue pour qu'une politique économique puisse être formulée*...


*Qu'est-il advenu de tels souhaits depuis 1974? 
suite:
     En fait, la recherche de l'indépendance nationale qui était à l'origine des efforts de l'Etat en matière de maîtrise des approvisionnements pétroliers, a consisté à partir de cette date dans l'effort industriel considéré comme la priorité des priorités. Cependant, ce pari industriel reposait en grande partie sur l'importation à bas prix d'un pétrole abondant, dans le même temps où la solidarité des pays de l'OPEP devenait de plus en plus efficace. On a le sentiment qu'en cette affaire la technocratie a supplanté la politique...
     ...Mais ne nous attardons pas sur le passé. Il importe cependant de faire en sorte qu'un tel processus ne se renouvelle pas, d'autant que votre Rapporteur est inquiet de voir se multiplier les déclarations péremptoires des partisans du tout nucléaire qui font irrésistiblement penser aux démonstrations non moins péremptoires de ceux qui étaient partisans du tout fuel. Ce sont d'ailleurs parfois les mêmes»...
     Il n'est pas inintéressant de noter, à l'occasion de l'examen de l'activité des compagnies pétrolières, combien celles-ci se sont déjà intéressées - et engagées - dans le domaine du nucléaire.
     Les perspectives affichées par un certain nombre de grandes et moyennes compagnies américaines sont données dans le tableau suivant:

p.9

b) Coût et financement.

     Le programme nucléaire a été fondé sur le coût du kilowatt-heure (kWh). Des études "très fines" ont permis de garantir que le kWh d'origine nucléaire revenait à peu près moitié moins cher que les kWh fabriqués à partir d'une centrale thermique. C'est cette constatation qui a justifié l'ampleur du programme; elle n'est plus vérifiée aujourd'hui.
En effet, le coût du kWh, tel qu'il est calculé par les pouvoirs publics, est passé de 3,83 centimes en 1973 à 9,7 centimes au 1er janvier 1977. Une telle majoration bouleverse les données du problème. Tous les éléments[40] du prix ont augmenté dans de fortes proportions. Le coût de l'investissement a plus que doublé; les charges d'exploitation ont pratiquement triplé et il en est de même du coût du combustible.[41]
     Il est à penser que cette évolution va se poursuivre surtout si l'on considère les termes de la réponse qui a été fournie à votre commission des Finances et dont on peut extraire les alinéas suivants:
     «Les valeurs retenues en 1977 qui ont été estimées à partir du devis de la centrale de Paluel, anticipent certaines hausses prévisibles, mais on ne peut toutefois pas exclure une augmentation des coûts au fur et à mesure que se développeront les études d'éxécution, indépendamment de toute nouvelle exigence réglementaire ou de sûreté.
     D'autres contraintes réglementaires (protection du littoral par exemple) ou de nouvelles exigences de sûreté (les analyses de sûreté du palier de 1.300 MWe ne sont pas terminées; le Président Carter a annoncé un renforcement des règles de sûreté...) pourraient également entraîner de nouvelles augmentations.

Enfin, il n'est pas impossible que l'expérience d'exploitation des premières tranches PWR conduise à revoir les projets afin d'en améliorer les conditions d'exploitation, notamment en ce qui concerne l'entretien.[42]
Compte tenu de l'expérience acquise, il semble toutefois qu l'ensemble de ces augmentations devraient rester limitées.[43]
     Il faut également noter que cette évolution n'est pas spécifique du cas français et se retrouve dans tous les pays réalisant des programmes nucléaires
     Dès lors, le prix du kWh nucléaire s'est sensiblement rapproché du kWh «charbon» (11,6 centimes) et son écart avec le kWh «fuel» (13,3 centimes) s'est notablement amenuisé, encore qu'il demeure significatif. D'ores et déjà, il n'est plus question de substituer le nucléaire aux centrales thermiques existantes, la compétitivité du nucléaire nouveau n'étant que faiblement positive par rapport au centrales existantes à fuel et négative par rapport aux centrales charbon.[44]
     A elle seule, cette évolution devrait conduire à réexaminer le objectifs précédemment fixés.
Au surplus, on peut, à bon droit, émettre quelques réserves sur les conditions dans lesquelles les calculs présentés par les pouvoirs publics sont opérés. En ne calculant pas simplement le coût du kWh aux bornes de la centrale mais en tenant compte du coût total c'est-à-dire en y incluant les frais de transport et de distribution (qui sont du même ordre que le coût de production) la différence relative entre les différentes formes d'électricité se réduit encore. Or, on peut admettre que c'est le prix de revient global qu'il convient de considérer et non seulement un élément de ce prix[45].
p.10

     Le coût du kWh nucléaire est calculé en fonction d'un taux de disponibilité des centrales relativement élevé, puisque l'on suppose qu'au cours d'une année ces centrales fonctionneront pendant au moins trois heures sur quatre. Or, ce taux de disponibilité n'a pas jusqu'alors été vérifié. Si l'on se réfère aux deux centrales nucléaires construites en participation avec la Belgique (réacteurs PWR), le taux de disponibilité de ces installations a été jusqu'alors de l'ordre de 60%. On sait, au surplus, que la moyenne pondérée de la filière graphite-gaz s'établissait au 31 décembre dernier à 57%. Il apparaît à l'évidence que si le taux de disponibilité des centrales devait en pratique être inférieur à celui de la prévision, le coût du kWh s'en trouverait sensiblement majoré. Un problème de même nature est posé par le refroidissement. Dans la mesure où les centrales situées sur les fleuves devraient s'arrêter temporairement de fonctionner dans les périodes de forte chaleur pour éviter d'élever la température de l'eau dans des proportions excessives, le coût de ces arrêts non programmés se retrouverait nécessairement dans le prix du kWh. Il ne semble pas que cette éventualité ait été prise en compte. On notera cependant. qu'en 1976, année de particulière sécheresse, la production thermique nucléaire a diminué de 14% par rapport à 1975.
Le mode de calcul utilisé par les pouvoirs publics ne permet pas non plus de prendre en compte le prix du démantèlement des centrales parvenues au terme de leur période de fonctionnement[46].Un article du Nouveau Journal en date du 20 octobre 1977 faisait récemment état des préoccupations des Américains sur ce point. Le coût du démantèlement fait problème et les méthodes à utiliser sont encore en question. La solution qu'il faudra bien apporter au problème des déchets pourrait enfin majorer à nouveau le prix du kWh nucléaire.
Des facteurs de majoration du prix existent donc à l'heure actuelle. On peut prévoir un nouvel accroissement du coût du kWh nucléaire, à supposer que techniquement le fonctionnement des centrales ne pose pas de problème sérieux[47]. Dès maintenant, le fondement chiffré du programme nucléaire doit être revu.
     Cependant, l'énormité du programme conduit EDF à mobiliser des ressources financières très importantes. Ses besoins de financernent sont de l'ordre de 16 milliards de francs en 1977 et de 20 milliards de francs en 1978.      L'autofinancement de l'entreprise étant insuffisant, comme l'a souvent relevé la commission des Finances, EDF est amenée à se porter sur les marchés financiers pour des montants considérables: environ 9 milliards en 1977 et plus de 13 milliards en 1978. L'entreprise nationale est donc lourdement endettée et elle acquitte actuellement près de 5 milliards de frais financiers par an. Sa dette extérieure s'accroît dans de fortes proportions (3.7 milliards en 1976) et les risques de change qui en résultent sont sérieux.
suite:
     EDF fait valoir que l'effort qu'elle consent en faveur du nucléaire n'atteint pas, en valeur relative, celui qui a été effectué, voici vingt ans, en faveur des grands équipements hydrauliques. Cet argument ne peut être retenu. La France de 1976 est devenue une puissante nation industrielle et un pays exportateur. Des activités de tous ordres se sont développées et diversifiées. En conséquence, les besoins de financement de maints secteurs sont de beaucoup supérieurs à ce qu'ils pouvaient être après la guerre. Dès lors, il n'y a aucune chance que l'on puisse, sans inconvénient grave, collecter l'épargne dc façon privilégiée au bénéfice d'EDF comme on le faisait voici près d'un quart de siècle.
     La place qu'occupe EDF sur le marché financier français limite les possibilités de financement des entreprises privées; elle peut donc restreindre leurs possibilités d'investissement. Cette éventualité n'est pas sans gravité, de même qu'il n'est pas sans importance de s'endetter lourdement à l'étranger.

c) La maîtrise du programme(1).

Il est certain que le programme électro-nucléaire contribuera à réduire notre dépendance vis-à-vis des producteurs de pétrole. Mais il n'est pas exact de dire qu'il garantira par là même notre indépendance. Qu'il s'agisse en effet de la construction des centrales ou du cycle de l'uranium, le dossier n'est pas aussi simple que la présentation du Gouvernement pourrait le laisser entendre.[48]
     La France, et singulièrement le Commissariat à l'énergie atomique, ont fondé initialement le développement de l'énergie nucléaire en France sur l'avenir de la filière uranium naturel - graphite - gaz. De fait, la plupart des centrales nucléaires fonctionnant actuellement en France participent de cette filière. On sait cependant qu'elle a été abandonnée voici quelques années à la demande d'EDF. Les motifs de la décision intervenue n'ont jamais totalement été explicités. On a avancé les raisons de fiabilité qui ne paraissent pas aujourd'hui vérifiées; on a fait état d'une différence dans les taux de rentabilité que les faits n'ont pas confirmée.
Quoi qu'il en soit, le choix des centrales à eau pressurisée a conduit la France à faire appel aux brevets de la firme américaine Westinghouse. Jusqu'en 1982 au moins, la France devra, pour construire ces centrales, verser à l'entreprise américaine des redevances dont on a dit - sans que cette assertion ait été démentie - que leur montant suffisait à financer intégralement le programme de recherche de l'entreprise titulaire des brevets.[49]
Pour échapper à cette dépendance et à cette contrainte financière, il avait été entendu que le procédé américain serait francise à partir de 1982. Si des progrès sont réalisés dans cette voie, il ne paraît pas certain qu'ils soient suffisants pour nous permettre de nous dégager de la licence américaine à partir de 1982. A tout le moins, serait-il bon que le Gouvernement puisse réaffirmer ses objectifs en ce domaine.[50]


1) Pour notre documentation, nous avons largement fait appel à la brochure L'industrie nucléaire française élalorée par les soins du CEA en 1977.

p.11

     Le choix d'une licence américaine a entraîné la constitution d'un ensemble industriel que nous ne maîtrisons pas totalement. D'une part, s'agissant des cuves (îlot nucléaire) aussi bien que des turbo-alternateurs (îlot conventionnel), l'entreprise nationale qui fondait initialement sa politique sur la concurrence doit désormais s'adresser à un seul fournisseur qui se trouve dès lors en situation de monopole, à savoir Creusot-Loire pour l'îlot nucléaire et Alsthom pour l'îlot conventionnel (1). La capacité de négociation de l'entreprise nationale s'en trouve réduite.
     La construction des cuves est conduite par la société FRAMATOME dans laquelle le groupe Creusot-Loire détient la majorité (51%). Or, ce groupe se trouve en fait dépendre du groupe Belge Empain lié par ailleurs avec la firme américaine Westinghouse. Cette dernière firme possède d'ailleurs directement une participation de 15% dans le capital de FRAMATOME. Certes, le CEA est entré dans cette dernière société, mais sa participation de 30% ne lui permet pas de disposer de la minorité de blocage.[51]
Dans la situation actuelle, la prépondérance du groupe Empain dans la fabrication des cuves comme le recours à une licence américaine ne permettent pas d'affirmer que l'énergie nucléaire nous soustrait à toute contrainte extérieure.
     Cette constatation est vérifiée si l'on considère ce qu'il en est du cycle de l'uranium.[52]

**

     Le cycle du combustible nucléaire est long et complexe.. Il exige une structure industrielle diversifi& et des investissement lourds. Une fois le minerai d'uranium extrait il se passe, selon le Commissariat à l'énergie atomique, 21 mois avant que le combustible soit introduit dans le réacteur. Il y reste trois ans. A la sortie du réacteur, il faudra encore deux années pour traiter le combustible irradié. C'est dire que le cycle industriel avant et au sortir de la centrale est plus long que le temps pendant lequel l'uranium est à l'intérieur du réacteur.
     L'extraction du minerai exige la mise en oeuvre d'exploitations importantes et le traitement de quantités considérables. Pour alimenter une centrale de 1.000 MWe, on admet qu'il convient d'extraire en moyenne 77.000 tonnes de minerai. Le minerai extrait, il convient de le concentrer sous forme d'oxyde d'uranium par un processus çhimique complexe. puis de le convertir pour obtenir des produits destinés soit directement à la fabrication des éléments combustibles (uranium naturel), soit à l'alimentation des usines d'enrichissement (uranium enrichi).


(1) EDF a toutefois commandé des turbo-alternateurs pour deux groupes de l.300 MWe à la Compagnie électromécanique, filiale du groupe suisse Brown-Boveri.
suite:
En effet, alors que la filière française graphite-gaz permet d'utiliser directement l'uranium naturel qui ne contient que.0,7% d'uranium 235 fissile, le procédé Westinghouse suppose l'utilisation d'un uramum enrichi contenant environ 3% d'uranium 235. Cette distinction est capitale, car l'enrichissement de l'uranium est une technique industrielle complexe et financièrement lourde.
     A l'heure actuelle, la France ne dispose pas encore d'usine d'enrichissement pour ses centrales nucléaires productrices d'électricité. Il lui faut donc faire appel pour l'alimentation de la nouvelle filière à des fournisseurs extérieurs. L'uranium enrichi est actuellement fourni par l'E.R.D.A. des Etats-Unis (Energy Research and Development Administration). Quelques contrats d'enrichissement ont été conclus avec l'Union soviétique, mais ils ne représentent qu'une faible part de nos besoins. Il est clair que, dans cette situation, notre dépendance est totale, tant en ce qui concerne les quantites livrées que leur prix. C'est pourquoi, la France s'est engagée dans la construction d'une usine d'enrichissement de l'uranium située sur le site du Tricastin. Les travaux sont actuellement en cours et leur terme est prévu pour 1980. Une telle entreprise est toutefois très onéreuse et le coût de cette installation est actuellement évalué à 13 milliards de francs, compte non tenu des intérets intercalaires et du prix des centrales électriques destinées à alimenter l'usine. Or, il ne faudra pas moins de quatre centrales nucléaires pour pourvoir aux besoins de l'usine d'enrichissement; il est vrai que la technologie française a porté son choix sur un procédé d'enrichissenient particulièrement vorace en énergie(2). Pour rassembler de tels capitaux, la France a fait appel à des concours extérieurs. La société EURODIF qui conduit l'opération est constituée par l'A.G.I.P. (Italie) pour 12,5%, par le C.N.E.N. (Italie) pour 12,5%, par l'E.N.U.S.A. (Espagne) pour 11,11% et par la S.O.B.E.N. (Belgique) pour 11,11%. Ces intérêts étrangers représentent déjà à eux seuls
47,2%. Les 52,8% majoritaires sont partagés entre le CEA (COGEMA) pour 27,8% et la société SOFIDIF pour 25%.
Toutefois, cette dernière société est constituée par le CEA (60%)
et par l'organisation de l'énergie atomique de l'Iran pour 40%. A l'intérieur de cette société, l'Iran détient la minorité de blocage, de sorte que, faute d'accord avec son partenaire iranien, la France n'est plus en mesure d'imposer ses vues dans EURODIF. La participation consolidée du CEA dans EURODIF n'atteint que 42,8% On ne peut que s'inquiéter à l'idée que les partenaires pourraient ne pas s'entendre.[53]
(2)
On a pu calculer que les réacteurs nécessaires à l'alimentation en électricité de l'usine d'enrichissement rejetteraient dans le milieu ambiant - donc sans l'utiliser - l'équivalent de la production thermique d'EDF en 1969.
 p.12

     Le lancement d'une deuxième usine d'enrichissement est envisagé qui permettrait de doubler les capacités d'enrichissement de la première usine à l'horizon 1990. Cette deuxième usine serait édifiée par la société COREDIF dans laquelle EURODIF détient 51% du capital. Les 49% restant sont partagés entre le CEA (29%) et l'Iran (20%). On voit que les difficultés susceptibles de surgir dans le fonctionnement. de la première société pourraient se reproduire dans la seconde.
     L'uranium une fois enrichi, il convient de fabriquer le combustible qui sera utilisé dans les réacteurs. Là encore, il s'agit d'un processus industriel complexe qui fait appel à une technologie de pointe. Actuellement, la fabrication du combustible aux réacteurs français PWR est effectuée par la société franco-belge de fabrication du combustible (F.B.F.C.). La fabrication de l'assemblage est effectuée dans une usine située en Belgique, en attendant qu'elle puisse être partiellement réalisée dans l'usine de Romans (Drôme). Il convient de souligner que la société F.B.F.C. est poesédée à 80% par la société EUROFUEL, les 20% restants se partageant entre une société belge (12%) et Westinghouse (8%). Le capital d'EUROFUEL  est  partagé  entre  Pechiney-Ugine-Kulmann (51%) et Westinghouse qui, avec 35%, possède la minorité de blocage. Aux 35% de Westinghouse s'ajoutent 14% de Creusot-Loire et de FRAMATOME. En définitive, la société qui assure la fabrication des éléments combustibles se trouve, si l'on considère la participation consolidée de ses actionnaires, dominée par des intérêts étrangers où l'on retrouve en bonne place la firme américaine Westinghouse. Cette entreprise occupe donc une place de choix dans la fabrication des cuves nucléaires et dans la fourniture du combustible. On mesurera mieux son influence, si l'on sait que, manquant d'uranium et menacée de procès aux Etats-Unis par les clients auxquels elle s'était engagée à en fournir, elle a obtenu du Commissariat à l'énergie atomique la fourniture de 1.200 tonnes d'uranium à livrer de 1977 à 1982. Ces 1.200 tonnes représentent 70% des besoins français en l976.[54]
     A la sortie du réacteur, le combustible irradié doit être retraité. On sait que ce retraitement pose des problèmes redoutables qui ne sont pas encore complètement maîtrisés. L'industrie américaine de retraitement se débat au milieu de difficultés dont elle ne paraît pas en voie de sortir. Pour le moment, seule la France avec l'usine de La Hague pourrait comencer à retraiter les combustibles de la filière à eau pressurisée, mais il faudra augmenter la capacité de l'usine, si l'on entend qu'elle traite les combustibles français et ceux qui lui sont, d'ores et déjà, promis par contrat. Le stockage des déchets soulève de son côté des problèmes dont la solution est difficile. En l'état actuel, le retraitement est le stade le plus délicat du cycle du combustible et son coût est en constante augmentation.[55]
suite:
     L'industrie nucléaire s'est développée en France à un rythme rapide et il s'y est constitué un ensemble ndustriel de grande valeur. L'influence des intérêts étrangers aux divers stades de la fabrication de l'énergie nucléaire ne peut toutefois être sous-estimée. Ainsi, les exportations de centrales, dont on fait grand cas, sans toujours en apprécier les effets au plan international, ne peuvent-elles être réalisées qu'avec l'accord de la société Westinghouse. A cet égard, on peut rappeler que la filière dite française (uranium naturel - graphite -gaz) avait permis de mettre sur pied un circuit de fabrication du combustible reposant sur des entreprises françaises et, par conséqùent, susceptibie d'être entièrement maîtrisé par les pouvoirs publics.

d) La rigidité et les risques de blocage[56]

     La construction d'une centrale nucléaire exige un délai de plusieurs années. La période préliminaire (dossiers administratifs, information et consultation des habitants) tend par ailleurs à s'allonger. C'est dire que le délai de réponse du programme nucléaire est long et qu'il ne  peut  s'adapter à  l'évolution  de la  conjoncture. En effet, la production d'électricité, dès lors que la centrale est en fonctionnement, est une production obligée dont le volume ne peut être modulé à volonté. Et l'arrêt d'une centrale nucléaire est une opération complexe et onéreuse qu'il importe de programmer. On mesure les risques qu'une telle rigidité fait courir aux fournisseurs des autres formes d'énergie qui seront demain en situation de supporter la totalité des variations de la consommation. Les coûts des autres formes d'énergie s'en trouveront augmentés, ce qui, d'une certaine façon, revient à transférer du secteur nucléaire aux autres secteurs une fraction du coût de notre énergie.
     Cette rigidité est illustrée par le développement du chauffage électrique. Le programme nucléaire, tel qu'il a été arrêté en début de période, supposait, pour que l'électricité produite soit consommée, que cette forme d'énergie se substitue à d'autres dans une proportion croissante. Au surplus, en encourageant la demande, l'entreprise s'assurait pour longtemps un marché captif. EDF a pensé que la pénétration de l'électricité dans le secteur du chauffage devait être encouragée sans plus tarder. D'où une campagne massive, permanente et efficace en faveur du chauffage électrique, paré, pour les besoins de la cause, de toutes les vertus. Cette campagne était sans doute excessive et, dans l'immédiat, inopportune. Excessive, car elle supposait la réalisation intégrale du programme nucléaire et la sagesse aurait dû conduire à laisser l'expérience confirmer ou infirmer les prévisions, avant de s'engager plus avant. Inopportune car en attendant la réalisation du programme nucléaire toute augmentation de la demande d'électricité ne peut être satisfaite qu'à partir du fuel.

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     Or, la transformation du fuel en électricité, puis d'électricité en chaleur, représente un gaspillage d'énergie que seuls peuvent nier ceux qui récusent les lois de la physique. Quelles que soient les arguties, il faut admettre que pour chauffer pendant un an une maison de 100 mètres carrés, raisonnablement isolée, il est nécessaire de consommer en moyenne moins de 2 tonnes de fuel lourd lorsque cette habitation est équipée d'un chauffage central au fuel domestique et près de 4 tonnes du même fuel lorsqu'elle est équipée du chauffage électrique. Comme pendant longtemps encore - et bien après 1985 - les consommations à la marge seront alimentées par du pétrole importé, il y a quelque paradoxe à soutenir que le chauffage électrique est une facon pour la France d'économiser et l'énergie et les devises.[57]
     Il n'empêche que les résultats de la campagne d'EDF ont été spectaculaires. Pour partie, la raison en est que le chauffage électrique est bon marché à l'investissement, mais au contraire fort onéreux à l'exploitation. Les promoteurs immobiliers ont donc compris, au bout de quelque temps, qu'il leur était aisé en proposant le chauffage électrique, de faire des économies sur le coût de construction et d'arrondir ainsi leur profit, la contrepartie de l'opération étant entièrement couverte par l'occupant du logement qui n'a pas fini d'être surpris par le montant de ses factures d'électricité. Dans ces conditions, le chauffage électrique s'est développé à un rythme soutenu. Par rapport au total des logements neufs raccordés au réseau, 7,5% d'entre eux étaient assortis du chauffage électrique au premier semestre 1974 et, au second semestre 1976, ce pourcentage était passé à 36,5%. L'entreprise nationale elle-même était dépassée par son succès, mais la conjonction de la campagne d'EDF et des intérêts bien compris des promoteurs avait fait exploser la demande. Il a fallu que le Gouvernement, tardivement, prenne des mesures de restriction pour limiter les méfaits de cette opération trop réussie.
     EDF poursuit par ailleurs dans la construction de ses centrales des économies d'échelle, les coûts étant supposés décroître en valeur relative à mesure qu'augmente la puissance des installations. L'effet tarde toutefois à se faire sentir. L'entreprise continue à élever la dimension de ses unités de production et après le pallier de 900 MWe, nous en sommes à celui des 1.300 MWe. Dans ces conditions, l'effet de série ne peut donner tous ses résultats avant que l'établissement ne passe au pallier supérieur. C'est une façon de multiplier les prototypes et avec eux les risques de jeunesse qu'implique tout nouveau modèle. Ces considérations ne sont pas de pure forme au moment où les incidents que l'on sait sont survenus à Fessenheim et au prototype Phénix. Il est certain que l'accroissement de la dimension des centrales va augmenter la rigidité du système.
suite:
     La difficulté où se trouve EDF de trouver des sites appropriés pour l'installation de ses centrales va conduire l'entreprise à rassembler plusieurs unités de production au même endroit. Cette concentration, outre qu'elle peut poser des problèmes de transport d'énergie pourrait, en cas de difficultés d'ordre social, permettre à quelques centaines de manifestants ou de grévistes de bloquer la production d'électricité de la France. Ce risque n'est pas actuellement inexistant, mais le programme nucléaire va l'accroître dans de singulières proportions. On peut se demander si cette vulnérabilité de notre alimentation en énergie correspond à l'intérêt public.
La dernière rigidité qu'il paraît utile d'évoquer est d'un ordre différent. On saît que toute la politique nucléaire française est élaborée et proposée par la commission de production d'électricité d'origine nucléaire[58] (commission dite PEON). Or, cette commission est composée pour une large part par les représentants d'EDF et du CEA ainsi que par les représentants des industriels intéressés à la réalisation du programme. Cette composition en elle-même fait problème. On n'imagine pas que la politique des constructions scolaires soit pour l'essentiel élaborée par les entreprises du batiment. On peut être assuré que les personnalités de grande capacité et de haute qualité qui composent la commission PEON savent, autant que d'autres, faire prévaloir ce qu'elles considèrent comme étant l'intérêt national. Mais leur formation comme leurs choix professionnels donnent à penser qu'ils examinent davantage les possibilités du développement du nucléaire que les orientations à donner à notre politique énergétique. Il en résulte que la place des différentes formes d'énergie se trouve prédéterminée, en quelque sorte sans débat au fond, dès lors que la commission a arrêté ses choix sur le déroulement du programme nucléaire. Il n'est pas rationnel qu'à partir de considérations essentiellement techniques, le sort des autres formes d'énergie soit traité par différence. La position centrale que la commission PEON se trouve occuper dans la détermination de notre devenir énergétique devrait conduire soit à en modifier la composition, soit plus normalement à créer une instance mieux représentative des divers intérêts en cause. Cette instance arrêterait les grands choix et la commission pour la production d'électricité d'origine nucléaire élaborerait, compte tenu de ces choix, les modalités de la politique à suivre dans lesecteur qui est le sien.
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D. - ELÉMENTS D'UNE POLITIQUE

1° La pression des événements

     Depuis quelques trimestres les faits se sont chargés de démentir progressivement les hypothèses qui avaient retenues pour fonder notre politique énergétique. La «facture» pétrolière, toujours aussi lourde, est demeurée partiellement impayée: en font foi et le déséquilibre de notre balance commerciale et le montant accru de nos emprunts à l'étranger. Progressivement, mais inéluctablement, le programme nucléaire a «dérapé»  et les décalages commencent à,rendre des proportions dont il faut bien tenir compte. Dérapage physique, en ce sens que les délais de construction, les problèmes industriels, les maladies de jeunesse ont retardé la mise en service des unités de production et que les prévisions sur la fiabilité des installations ne paraissent plus aujourd'hui aussi satisfaisantes qu'elles l'étaientt naguère. Dérapage financier, car les coûts vont croissant dans tous les domaines et l'on ne s'aventure plus à proclamer une compétitivité qui commence à faire problème. On pourrait même affirmer que si, d'aventure - hypothèse d'école évidemment - il fallait aujourd'hui remplacer la totalité du programme nucléaire par un programme de centrales thermiques classiques et de centrales hydrauliques, il n'en coûterait pas plus cher à la Nation.[59]
     Aussi, depuis l'année dernière, la politique précédemment arrêtée commence à évoluer quelque peu. EDF a redécouvert le charbon et il est envisagé la construction d'une centrale thermique classique. On reparle un peu des centrales hydrauliques; sans doute les réalisations sont-elles minces mais les hydro-électriciens sont en voie de n'être plus considérés comme les attardés de l'histoire[60].L'accent a été mis sur les économies d'énergie. Ces économies sont sans doute inférieures à ce qui est annoncé mais l'opinion publique a été, quoique tardivement, sensibilisée à ce problème. Enfin, les Pouvoirs publics poursuivent le développement de l'énergie gazière à un rythme soutenu.
     Ces infléchissements sont positifs mais ils demeurent très insuffisants. Les années 80 sont, d'ores et déjà, engagées et elles seront difficiles. Les erreurs stratégiques qui ont été commises successivement sur le pétrole et sur l'énergie nucléaire sont partiellement la cause des difficultés que nous allons rencontrer. On ne commet pas impunément des erreurs de cette dimension en l'espace de douze années sans que les conséquences en soient cruelles[61].

suite:
Il est bien vrai qu'en toute hypothèse les prochaines années auraient été délicates. Nous aurions eu grand besoin de la petite marge de manoeuvre que nous n'avons pas su nous ménager en conduisant des politiques trop brutales et trop peu diversifiées.
     Il faut aller plus loin, plus vite et plus fort dans la voie d'une nécessaire diversification.

2° La nécessité d'un réel changement.

     Le contenu d'un tel changement est inscrit dans les critiques qui précèdent. Toutefois, il paraît tout aussi nécessaire d'obtenir un changement dans les comportements que de modifier les orientations de la politique.

a) Un changement dans les comportements.[62]

     Les ingénieurs sont généralement inhabiles au contact populaire et souvent choqués lorsque l'on s'oppose à leurs thèses. Au vrai, c'est la première fois que cette aventure leur advient. D'ordinaire chacun est contesté dans sa vie professionnelle, sauf, jusqu'alors, les scientifiques qui ne discutaient guère qu'entre eux.
     Mais voilà qu'ils engagent le devenir et le mode de vie des autres membres de la Nation. Que l'on ne puisse pas examiner leurs choix serait anormal. Les assemblées politiques n'ont pas montré une grande aptitude à conduire ce genre de débat; quoi d'étonnant s'il a lieu ailleurs? Et pourquoi les habitants de la vallée du Rhône ne prendraient-ils pas la parole sur ce qui les concerne directement? La démocratie est. un mode de gouvernement difficile; c'est l'honneur des sociétés libres de la vivre et non pas seulement de la proclamer.
     Aussi, aimerait-on que les excès s'apaisent de part et d'autre, les excès du verbe comme les excès de l'écrit. Et naturellement l'on souhaite vivement qu'il soit mis un terme aux violences. Un attentat comme celui qui a été commis au domicile du directeur général d'EDF est inadmissible et hautement condamnable: que cela soit clair.
     Ira-t-on jusqu'à dire qu'on devrait pouvoir exiger des responsables davantage que ce qu'on peut attendre de leurs opposants, précisément parce qu'ils portent la responsabilité des affaires? Que ceux qui émettent des réserves sur le bien-fondé des thèses officielles ne soient pas - cela se voit - voués aux gémonies. Que l'on dise que les gens se trompent, si tel est le cas. Mais il est inutile d'ajouter qu'ils sont stupides et, au demeurant, de mauvaise foi.

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ENCART 3
LE PROGRAMME DEBUT FEVRIER 1978
     Nous avons donné, dans la Gazette N°8-9, le programme tel qu'il apparaissait à l'époque, mais compte tenu de sa relative mobilité, nous pensons intéressant de le donner tel qu'il apparaît actuellement d'EDF:

 
 
(1) Lieu géographique et numéro de la tranche nucléaire sur le site.
(2) La demande d'Utilité Publique est parfois demandée pour plusieurs tranches sur le site, dans ce cas est indiqué la date prévue pour la première tranche rencontrée.
(3) Début des travaux pour la première tranche ou le lot de tranches considéré.
suite:

 
(4) Date prévue de fonctionnement industriel.
(5) Puissance en MWe. Le symbole P veut dire PWR.
(6) Ce site pourrait être équipé avac deux tranches surgénérateur 1.800 MWe (projet Saône)
(7) Il faut également ajouter le surgénérateur de Creys-Malville de 1.200 MWe.
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Au reste, les erreurs commises au plus haut niveau dans la conduite de notre politique énergétique devraient conduire chacun à faire preuve de modestie intellectuelle. Que l'on évite l'anathème. Les guerres de religion n'ont jamais rien produit de bon.[63]
Dans cet esprit on souhaite que l'information officielle soit a la fois plus sérieuse et plus équilibrée; elle y gagnera en crédibilité.[64]
     On a vu EDF, pour défendre le chauffage électrique, comparer une habitation chauffée électriquement mais pourvue d'une bonne isolation thermique à une autre habitation chauffée au fuel mais non isolée! Au-dessous d'un graphique qui fait apparaître une extraordinaire progression de l'électricité d'origine nucléaire, le dernier numéro d'un mensuel économique a porté la légende suivante: «Pétrole et charbon se faisant rares, l'électricité devra se substituer à eux. Pour la fabriquer, on ne peut plus compter brûler des combustibles dans les centrales, ni édifier de nouveaux barrages, Il ne reste donc que l'uranium». Qu'un périodique de cette qualité profère autant de contre-vérités en si peu de mots est fächeux pour sa réputation, si l'on ajoute que les auteurs de l'article sont particulièrement bien informés, on ne peut que s'interroger.
     En ce domaine délicat, on souhaite que le bon sens et le sang-froid l'emportent sur l'excès et la violence. Il doit être possible en France de traiter convenablement le dossier de l'énergie. On ne peut donc que se féliciter hautement de la création, à l'initiative du Chef de l'Etat, du conseil de l'information électro-nucléaire. On peut raisonnablement en espérer une information objective et de grande qualité.

 b) Un changement de politique.

          · La politique des prix.

La commission des Finances a souvent dénoncé l'aberration que constitue la politique des prix conduite par les Pouvoirs publics. Elle aboutit, on le sait, à subventionner massivement la consommation d'énergie, le contribuable payant en définitive pour le consommateur. C'est déraisonnable et inéquitable. Il convient donc de rétablir la véracité des coûts[65] et de faire payer l'énergie à son prix[66]. Faute de cette nécessaire remise en ordre, il sera difficile de conduire une  politique raisonnable.

suite:
· Les économies d'énergie.[67]

     Il faut les réaliser effectivement. Il est bon de s'attaquer au chauffage domestique mais il est inutile d'édicter des règlernents si chacun s'aperçoit rapidement qu'on peut, sans inconvénient, ne pas les appliquer. Il convient de sensibiliser davantage encore l'opinion publique à ce problème et d'édicter des contraintes plus sévères à l'encontre du chauffage électrique. A cet égard, il faut surtout mettre en relief le coût de ce mode de chauffage pour l'utilisateur.
En outre, il ne faut plus que, à la lecture de ses factures, le consommateur ait l'impression que le prix de l'énergie diminue lorsque la consommation augmente; il convient donc de supprimer toute dégressivité dans les tarifs.[68]
     Il faut aussi économiser l'énergie dans les transports et dans l'industrie. La promotion des transports collectifs va en ce sens mais il conviendrait qu'elle soit réelle; encore faudrait-il ne pas promouvoir des modes de transports trop voraces. Dans l'industrie, aucun effort n'a réellement été tenté pour réduire sensiblement les consommations d'énergie. Les gains à attendre d'une politique de grande ampleur ne sont cependant pas minces; mais il faut disposer des moyens financiers indispensables.

          · Une politique active de recherche.

     Elle doit s'appliquer aussi bien aux. hydrocarbures qu'au charbon. La recherche pétrolière devrait pouvoir disposer de moyens accrus pour qu'en aucun cas l'effort de nos compagnies ne se ralentisse.
     Le recherche de charbon à l'extérieur devrait également être un élément de cette politique, politique qui devrait nous conduire à acquérir des gisements susceptibles de produire à peu près l'équivalent de nos importations.
Le Bureau de recherches géologiques et minières qui a parcouru le monde avait oublié naguère encore de dresser un inventaire des richesses minérales de notre sol. Il commence à le faire. Il faut l'encourager dans cette voie, en lui rappelant l'éminent intérêt des productions nationales.[69]

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· L'hydro-électricité.[70]

     Elle doit pouvoir être développée dans des limites certes restreintes mais néanmoins significatives. Il n'est pas indispensable de faire de très grands aménagements pour produire l'électricité nécessaire à la consommation locale.
     On sait qu'en 1977, année d'hydro-électricité exceptionnelle, il n'a pas été possible d'évacuer la totalité de l'énergie hydro-électrique susceptible d'être produite... faute des lignes de haute tension nécessaires. Peut-être conviendrait-il d'éviter à l'avenir ce genre d'inconvénient.
On comprend[71] qu'EDF répugne à multiplier les petits centres de production; mais la diversité des installations, dans leur taille et dans leur localisation, est aussi une garantie de souplesse qui doit être prise en compte.

· les énergies nouvelles.[72]

     Elles présentent de l'intérêt. On aimerait que les responsables évitent de les déconsidérer par des arguments qui ne sont pas de la meilleure venue. On explique, avec gravité, que pour construire une centrale solaire de 1.000 MW, il conviendrait d'occuper une superficie considérable. C'est exact(*). Mais qui a jamais pensé que l'énergie solaire doive être produite à partir d'une énorme centrale alors que son intérêt est précisément de s'accommoder d'équipements légers, de répondre à des besoins minimes, d'être en quelque sorte l'énergie de la décentralisation, évitant l'inconvénient du transport à longue distance?
     Il conviendrait aussi de ne pas insister outre mesure sur le coût prohibitif des prototypes qui peuvent exister actuellement. Si les Pouvoirs publics apportent un concours suffisant pour que l'on puisse passer à l'échelle industrielle, nul doute que les prix s'en trouveront très notablement réduits. Il n'a jamais été question, pour calculer le prix du kWh nucléaire, de prendre en compte les milliards de francs que la Nation a consacrés pendant vingt années au développement des prototypes des centrales. Il serait d'ailleurs intéressant de procéder à ce calcul, à titre d'information.
     Il serait souhaitable de développer raisonnablement la géothermie. Dans certains cas, les nappes d'eau chaude peuvent être exploitées à bon compte; il serait dommage de s'en priver.
     En second lieu, il convient de développer l'énergie solaire, pour les usages auxquels elle s'adapte particulièrement bien, tels que le chauffage de l'eau domestique et le chauffage de locaux. L'Etat doit, à cet égard, faire l'effort financier nécessaire pour que l'on puisse parvenir rapidement au stade industriel. Les utilisateurs ne manqueront pas.
     Le même effort et le même esprit doivent présider au développement de la pompe à chaleur qui peut, dans des cas précis, fournir une énergie à un coût appréciable.
     Il est vrai que le développement des énergies nouvelles ne réglera qu'en (encore faible pour l'instant) partie notre problème de l'énergie. Mais il ne faut pas, dès l'abord, les cantonner dans un rôle tout à fait accessoire. Si l'on ne consacre pas les moyens suffisants pour les développer, il est certain que leur avenir sera conforme à la médiocrité que leur assignent les prévisions officielles. Ces énergies sont à notre disposition. Elles sont pour partie gratuites. Elles sont adaptées à une multitude de petits besoins. Il serait sot de ne pas les utiliser au mieux.


(*) Ndwebmaistre: encore ne doit-on pas penser exclusivement aux terrains mais surtout aux immenses surfaces de toitures et autres parois verticales...
suite:
ENCART 4
LE RAPPORT «PINTAT» SUR L'HYDRAULIOUE

     Le 15 janvier 1975, le Ministre de la Recherche créait une Commission d'Étude de la production d'électricité d'origine hydraulique et marémotrice sous la présidence du Sénateur Pintat dont on parle par ailleurs dans cette Gazette. Ce rapport a été publié à la Documentation Française (Dossier de l'Énergie 9). il est intéressant de citer ici quelques-unes des recommandations de ce volume de 120 pages:

 · Recommandation 2
     Que sous réserve de circonstances locales particulières qui pourraient s'y opposer, les projets dont la rentabilité, avec la méthode d'évaluation proposée est supérieure au taux d'actualisation du plan, puissent être décidés et mis en oeuvre dans des délais rapides.

 · Recommandation 3
     Que la procédure de concessions des ouvrages hydrauliques soit revue, afin d'accélérer le rythme d'instruction des dossiers.

 · Recommandation 8
     Qu'une étude par sondage soit lancée par le ministère de l'Industrie avec l'aide d'un bureau d'études, pour estimer le potentiel de petites chutes équipables.

 · Recommandation 10
     Que les dossiers d'enquête administratifs soient ouverts, même si certaines administrations présentent des objections lors de la première concertation officieuse des services concernés.

 · Recommandation 12
     Que le financement des nouveaux équipements hydrauliques bénéficie des mêmes facilités que celui des économies d'énergie, et en particulier qu'il soit traité hors encadrement du crédit, la rentabilité de ces investissements étant estimée selon la valeur de l'énergie produite.

 · Recommandation 13
     Que les divers organismes intéressés par les ouvrages hydrauliques, collectivités locales, organismes à vocation de développement rural, soient incités à préfinancer l'étude d'avant projets d'ouvrages hydrauliques - en liaison le cas échéant avec les banques pouvant fournir un financement ultérieur.

     Ces recommandations, par ailleurs fort technocratiques, semblent avoir été oubliées à peine publiées... Dans son rapport au Sénat, cité par ailleurs, le Sénateur Pintat annonce les chiffres suivants: potentiel techniquement équipable: 100 milliards de kWh, dont 65 à 72 milliards économiquement exploitables et 3 à 6 milliards de kWh pour les petites installations.

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          · L'énergie nucléaire.

     Il ne s'agit en rien de la récuser, mais il faut la développer selon un programme raisonnable. L'expérience des dernières années devrait nous conduire à fixer des objectifs plus modestes mais aussi plus sérieux en prévoyant, autant que faire se peut, les difficultés et les aléas inhérents à ce type d'entreprise. Il faut espérer également qu'une étude de coût sera conduite qui intégrerait, plus qu'on ne l'a fait jusqu'à maintenant, tous les éléments d'un calcul économique aussi complet que possible. Ce programme ne serait toutefois arrêté que lorsque les moyens propres à le réaliser auraient été programmés. Moyens industriels certes, mais aussi moyens financiers, tant en ce qui concerne l'épargne nationale que les emprunts à l'extérieur.
Il faut aussi procéder au plus tôt à la francisation[73] des procédés de la filière à eau pressurisée. La République fédérale d'Allemagne a su se libérer des brevets étrangers. Tel doit être notre objectif. Toute politique qui ne nous permettrait pas de nous affranchir des licences dès 1982 ne correspondrait pas à l'intérêt public. Il conviendrait que le Gouvernement le fasse savoir avec détermination. Dans cet ordre d'idées, on pourrait se demander s'il faut considérer comme totalement abandonnées les autres filières de production, notamment la filière française dans laquelle le CEA a emmagasiné une somme de connaissances et un acquis technologique de grande valeur, et la filière, dite canadienne, à eau lourde dont certains regrettent encore, paraît-il, qu'elle n'ait pas été choisie.
Enfin, il faut utiliser nécessairement la chaleur nucléaire[74] sauf à laisser se répandre l'idée que l'électricité d'origine nucléaire est la méthode la plus raffinée qui ait été trouvée pour gaspiller l'énergie. Le bon sens récuse l'idée selon laquelle il faudrait mettre en place un énorme appareil industriel pour produire une énergie dont le tiers seulement serait utilisé. On sait, en effet, qu'une centrale nucléaire ne transforme en électricité qu'ùn tiers environ de l'énergie qu'elle produit, les deux autres tiers rejetés dans le milieu ambiant avec les problèmes d'environnement qui en résulte. Jusqu'alors EDF s'est, en fait, opposée à l'utilisation de la chaleur nucléaire. Les réacteurs actuels peuvent être adaptés de façon à produire un peu moins d'électricité et beaucoup de chaleur. Cette adaptation doit être entreprise. Encore faut-il qu'elle intervienne dès maintenant pour qu'elle puisse entrer dans les faits avant 1990.

suite:
     La commission des Finances a insisté à plusieurs reprises pour qu'il soit procédé à cette inflexion, toujours en vain jusqu'alors. Au reste, il existe des prototypes de petites centrales mixtes électro-calogènes ou purement calogènes qui paraissent assez bien adaptées au type de services qu'on en attend.[75] Ces réacteurs qui ont été développés par le Commissariat à l'énergie atomique sont à eau pressurisée et ils fonctionnent très convenablement. Le CEA en possède la licence et il n'est pas nécessaire pour les construire de faire appel à une firme étrangère. Certes, il ne saurait être question ici de prendre parti sur les techniques qui s'avèreront les meilleures. Mais le fait est qu'il faut utiliser massivement la chaleur nucléaire: l'heure n'est plus au gaspillage.
     Enfin, on souhaitera que la politique énergétique de la France soit élaborée par un organisme largement ouvert et indépendant. Actuellement, le ministère de l'Industrie paraît trop ancré dans les raisonnements qui ont été développés par les entreprises nationales pour opérer une indispensable synthèse. Au reste, comment être insensible aux arguments d'une entreprise publique quand elle oublie de faire parvenir ses factures aux fonctionnaires qui, précisément, ont pour mission d'exercer sur elle la tutelle de l'Etat. Faut-il rappeler ici les dispositions traditionnelles de l'article premier de la loi de finances:
     «Sont également punissables des peines prévues à l'égard des concessionnaires, tous détenteurs de l'autorité publique qui, sous une forme quelconque, et pour quelque motif que ce soit, auront, sans autorisation de la loi, accordé toute exonération ou franchise de droit, impôt ou taxe publique, ou auront effectué gratuitement la délivrance de produits des établissements de l'Etat. Ces dispositions sont applicables aux personnels d'autorité des entreprises nationales qui auraient effectué gratuitement, sans autorisation légale ou réglementaire, la délivrance de produits ou services de ces entreprises
Votre Rapporteur entend qu'il soit mis fin au plus tôt à ces abus et qu'ils soient sanctionnés.[76]
     Il serait bon que les propositions ainsi élaborées, par un organisme indépendant, puissent être réellement débattues dans des instances appropriées et dans des délais raisonnables. La politique énergétique de la France ne se bâtira pas sans un assentiment fondé et réfléchi des Français.
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ENCART 5
LE RAPPORT PINTAT SUR LE NUCLEAIRE
     Cette Gazette est consacrée au rapport de la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale. Parallèlement, travaille au Sénat une Commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi de finances pour 1978. Le tome IV est consacré à l'énergie et le rapporteur en est le Sénateur Pintat (Document n° 90). Ce document de 64 pages reprend dans ses grandes lignes l'argumentation officielle actuelle et il nous est apparu intéressant de citer certains passages qui pourront être comparés avec leurs homologues du rapport Schoesing. Le lecteur qui voudrait en savoir plus pourra, nous l'espérons, se procurer ce document à l'Imprimerie Nationale.

     Introduction: Le rapport foumit les chiffres de consommations mondiales des diverses énergies, compare les ressources et en déduit une ligne de conduite:
     «Les nations européennes ont donc à faire face à quatre impératifs:
     - ménager leurs ressources propres;
     - économiser les réserves mondiales d'énergie fossile
     - réduire leurs importations;
     - satisfaire aux besoins énergétiques croissants de leurs peuples.
     Or, s'il est possible dans le cadre européen d'atteindre les trois premiers objectifs, en acceptant une réduction sensible de notre consorrunation d'énergie, il faut savoir, n'en déplaise à tous ceux qui n'ont connu généralement aucune privation, que la portée des économies ou, si l'on veut, de la réduction des gaspillages, est très limitée et que le niveau d 'énergie (utile) consommée par tête est intimement lié à la mesure de la production nationale et, par voie de conséquence, au niveau de vie de la population.
     Le recours croissant à l'énergie est donc lié au problème de l'emploi et contribue, en conséquence, à résorber le chômage.
     Il existe de fait, pour un pays donné, un parallélisme frappant entre ces deux éléments et l'on ne peut donc vouloir à la fois que les facilités offertes aux plus favorisés bénéficient demain au plus grand nombre et prétendre réduire la consommation énergétique. Il est certes probable que les besoins ne croîtront plus dans ce domaine, dans nos pays, au même rythme que précédemment, mais on ne pourra éviter au minimum que la demande européenne à satisfaire soit multipliée par 1,5 d'ici à 1985 et par 3 d'ici la fin du siècle, ce qui représente à court terme 1 milliard et à plus longue échéance 2 milliards de tonnes d'équivalent charbon à découvrir

     Ainsi, dès le début le cadre est fixé et clair. On reste dans l'analyse traditionnelle.
     Après cette introduction, on trouve l'analyse du bilan énergétique français, puis le rôle des énergies fossiles traditionnelles, chapitre dans lequel on voit le nucléaire appeler le charbon au secours:
     «Si l'on souhaite, en effet, comme il était prévu, renoncer à peu près complètement à utiliser le fuel dans les centrales thermiques, malgré le retard, de l'ordre de 6.000 à 8.000 mégawatts, pris par le programme nucléaire, il serait indispensable de réaliser un programme réduit de centrales à charbon qui seraient alimentees à hauteur de 12 à 13 millions de tonnes par du charbon importé. On s'orienterait ainsi vers une production d'électricité basée au moins provisoirement sur le binôme: nucléaire-charbon. »

suite:
     En ce qui concerne le pétrole, le rapport est conscient des difficultés d'approvisionnement, on verra plus loin qu'il affiche par contre un bel optimisme pour l'uranium et pourtant... (voir Gazette n° 3):
     «Mais, comme nous l'avons déjà indiqué, les ressources mondiales en pétrole, bien qu'elles apparaissent encore considérables, sont limitées et, selon les conclusions du rapport présenté à Istanbul par M. Desprairies, un problème d'alimentation du marché pourrait se poser dès 1990, si comme il est prévu, la consommation continue à progresser même au rythme réduit de 3,5% par an (qui conduirait au chiffre de 6,5 milliards de tonnes à la fin du siècle)

     A propos de l'énergie hydraulique, on peut lire:
     «Sous cette réserve importante, le taux d'équipement actuel des sites possibles est naturellement fort différent suivant les régions. Il est inférieur ou égal à 1% en Afrique, Amérique du Sud et Asie du Sud-Est; il atteint 22% en Amérique du Nord et 34% en Europe. Notre continent est donc prêt d'avoir atteint le seuil de saturation

     On ne peut que s'étonner une nouvelle fois que l'on propose un peu partout du nucléaire, alors que les ressources hydrauliques sont si importantes en Afrique et en Amérique du Sud en particulier.
     Le Chapitre III est réservé à l'énergie nucléaire et examine tout d'abord les productions et ressources d'uranium. On peut y lire:
     «Il existe donc apparemment un hiatus entre nos besoins et notre production, puisque dès 1977 cette dernière ne suffira pas seule, sinon à nous approvisionner, du moins à nous permettre d'honorer nos contrats.
     (...) Si ces ressources semblent suffisantes à court terme, la situation apparaît moins rassurante quand on considère que les besoins mondiaux vont croître très rapidement pour atteindre 70.000 tonnes en 1980 et près de 130 à 140.000 tonnes en l985, alors que la production ne dépassait pas 25.000 tonnes en 1975.
     L'alimentation des programmes nucléaires risque donc de poser des problèmes à moyen terme, tant en raison de l'insuffisance des capacités productives (déprimées par la longue mévente de l'uranium) que de la difficulté d'avoir accès aux ressources des pays les mieux pourvus, tels que le Canada et l'Australie, vendeurs plus que réticents, les Etats-Unis résolument importateurs, et l'Afrique du Sud dont on connaît les problèmes.
     La situation de notre pays est certes relativement privilégiée compte tenu de nos réserves propres et de celles auxquelles nous avons accès en Afrique, mais il n'est pas certain que les difficultés de nos voisins ne viennent pas perturber cet état de chose.
    Comme nous allons le montrer, c'est seulement à plus long terme, en recourant aux surrégénérateurs que nous pourrons résoudre cette question d'approvisionnement, cette technique permettant de réduire dans des proportions considérables les besoins en uranium.»

p.20
     Voilà la boucle est bouclée! On lance un programme, on s'aperçoit qu'il ne peut avoir un sens que si on se lance à fond dans la course en avant...
     Pour l'enrichissement, relevons cette phrase assez caractéristique :
     «On notera, en terminant ce chapitre, que la réalisation d'une puissante usine d'enrichissement constitue une opération financièrement très lucrative pour notre pays, compte tenu des besoins mondiaux croissants en produits fissiles
     Le programme électronucléaire français: n'est-il pas extraordinaire de lire les propos suivants:
     «Au 31 août 1977, le parc nucléaire français en service avait une puissance totale installée de 2.758 mégawatts (MW) non compris les centrales franco-étrangères de Chooz (305 MW) (France: 50%), de Tihange (870 MW) (France: 50%) et Vandelios (480 MW) (France: 25%).
     A ces équipements, il convient d'ajouter les tranches de 890 MW de Fessenheim 1 et 2 couplées au réseau, la première au début de l'année, et la seconde en octobre.
     A la suite de divers incidents, Fessenheim 1 a dû être arrêtée à plusieurs reprises et ne fonctionne pas encore en pleine puissance.
     Quant à Bugey 2 (985 MW), elle devrait être couplée au réseau en avril 1978.
     Pour ces trois équipements, le retard dans la mise en service est de l'ordre de dix-huit mois.
     Cette situation, pour regrettable qu'elle soit, n'est pas surprenante, s'agissant de têtes de série et compte tenu des sécurités supplémentaires exigées par les pouvoirs publics.
     Quoi qu'il en soit, la mise en oeuvre de ces trois tranches marque le départ du programme qui va nous doter d'un parc de centrales entièrement nouvelles dont la puissance (en exploitation) devrait, en principe, atteindre 17.500 mégawatts en 1980 et 37.800 mégawatts èn 1985. »
     Cela ne va pas très bien, mais heureusement on va en faire beaucoup! A propos' des surrégénérateurs et en particulier de Superphénix, l'auteur avoue son incompréhension:
     «La France peut se féliciter d'avoir atteint dans cette technique de pointe une avance sensible sur tous les pays occidentaux y compris les Etats-Unis. Il serait donc tout à fait regrettable qu'une telle situation qui fait honneur à nos chercheurs et à nos techniciens puisse être compromise alors qu'aucune caractéristique fondamentale ne différencie, comme nous l'avons dit, ce type de réacteur des autres installations nucléaires.
     On s'explique difficilement les réticences de certains secteurs de l'opinion publique alors qu'une large majorité a constamment soutenu la réalisation du supersonique Concorde, autre prouesse technique certes, mais d'une utilité et d'une rentabilité beaucoup moins évidentes
suite:
     En ce qui concerne le retraitement, il n'y a pas à se poser trop de problèmes car l'enjeu est clair:
     «Nous avons dit de plus que le retraitement est la condition première de la mise en oeuvre des surrégénérateurs sans lesquels les réserves mondiales d'uranium seraient sans doute épuisées d'ici vingt-cinq ans.
     Enfin, répétons une fois de plus que le plutonium qui se forme dans les combustibles irradiés n'est pas produit par le retraitement mais simplement isolé par celui-ci et qu'une nation disposant d'un équipement technique suffisant pourra donc toujours en obtenir à partir de «piles» à uranium naturel et sans chercher à produire de l'électricité, comme nous l'avons fait d'ailleurs nous-mêmes.
     Il apparaît donc vain et à terme très dangereux sous prétexte d'éviter la production de plutonium de renoncer au retraitement de combustibles nucléaires irradiés, conditions indispensable de la mise en oeuvre d'une technique qui, nous l'avons montré, est seule capable d'apporter au monde l'apport massif d'énergie dont il a besoin
     Energies nouvelles: il est intéressant de comparer ce qui est dit de l'énergie solaire à usage thermique et ce qui est dit de la fusion:
     «Cette première application est de loin, aujourd'hui, la plus répandue et la plus intéressante d'autant que les usages thermiques domestiques, qui représentent en France de 18 à 19% de la consommation totale d'énergie, utilisent surtout du fuel.
     Les inconvénients de cette conversion directe en chaleur sont cependant non négligeables.
     En premier lieu, l'apport thermique varie en fonction inverse des besoins (maximum en été et à midi: périodes les moins froides, minimum en hiver et durant la nuit), d'où la nécessité d'un stockage d'eau chaude. En second lieu, l'énergie produite ne peut être utilisée que sur place. En troisième lieu, les panneaux solaires sont encombrants, relativement inesthétiques et coûteux (7.500 à 12.500 F pour un collecteur de 46,5 mètres carrés nécessaire au chauffage d'une maison moyenne [130 mètres carrés]).
     Enfin, il apparaît, en pratique, qu'un chauffage d'appoint reste indispensable, ce qui vient grèver sensiblement le coût de l'installation. »
     C'est pas beau, cela coûte cher... etc. Donc:
     «Pour notre pays, il ne faut donc pas attendre de l'énergie solaire mieux qu'un appoint et en aucun cas une production thermique ou électrique massive de nature à faire fonctionner une usine ou éclairer une agglomération
p.21
     Par contre, la fusion, «on ne sait pas faire, mais cela est prometteur»:
     «La réunion de telles conditions n'a pu être encore réalisée même en laboratoire  où l'on n'a pas encore dépassé douze millions de degrés - mais les spécialistes pensent que la «faisabilité» du procédé, non encore démontrée à ce jour, le sera d'ici quinze ans au plus et que son application industrielle interviendra vers 2020
     Cela est même tellement intéressant qu'il faut malgré tout tempérer l'enthousiasme
     « Les délais nécessaires à la réalisation de la fusion «commerciale» et les incertitudes subsistant concernant sa possibilité de mise en oeuvre n'autorisent cependant en aucun cas que l'on renonce aux techniques énergétiques connues, comme certains ont pu le prétendre, pour écarter notamment la mise en service des surrégénérateurs
     Le rapport examine ensuite les problèmes de l'électricité et s'indigne des récentes décisions relatives au chauffage électrique intégré:
     «Mais, quoi qu'il en soit, votre commission déplore encore une fois que le souci de réaliser des économies qui se révèlent marginales, et à incidence limitée dans le temps, ait conduit le Gouvernement à freiner une technique qui va incontestablement dans le sens du progrès et nous rendra d'ici à sept ans plus indépendants de l'étranger.
     Il offre enfin, à l'EDF un moyen de financer son programme nucléaire

     Enfin, la conclusion résume parfaitement l'esprit général du texte. Que l'on en juge par ces quelques extraits:
     «De même, notre alimentation en gaz naturel, produit auquel nous faisons de plus en plus appel, rencontre déjà quelques difficultés. Un recours au charbon, dont les réserves mondiales sont immenses, constitue-t-il un remède valable à cette situation? Le question mérite d'être posée mais, nous l'avons dit, exploiter de nouveaux gisements charbonniers et en transporter les produits posent de sérieux problèmes et les pays qui détiennent les plus grandes réserves de ce combustible paraissent peu disposés à en exploiter des quantités de loin en rapport avec les flots de pétrole provenant du seul golf Persique. Qu'on le veuille ou non, c'est donc à l'énergie nucléaire qu'il nous faut recourir car elle seule peut, par son apport massif, nous permettre non pas de nous affranchir du pétrole mais d'en limiter les importations à un niveau compatible avec nos possibilités exportatrices. Et ceci vaut aussi bien dans l'hypothèse souhaitable d'une poursuite de notre expansion économique et d'une amélioration de notre niveau de vie que dans celle d'une dégradation de notre situation qui entraînerait, certes, une réduction de notre consommation d'énergie, mais nous mettrait dans le même temps hors d'état de faire face à nos achats d'énergie comme d'ailleurs des autres matières premières.
     Il n'est donc pas question pour nous de mener je ne sais quelle croisade pour ou contre le nucléaire mais de reconnaître la nécessité impérieuse de recourir à cette technique comme le font d'ailleurs tous les pays du monde, même s'ils sont détenteurs des ressources énergétiques classiques les plus considérables.

suite:
     Nous n'ignorons pas, bien entendu, les réserves que suscite le nucléaire, du moins dans les pays occidentaux, marqué qu'il est par le souvenir d'Hiroshima,
mais nous estimons, pour notre part, qu'en raison de la rigueur des précautions prises et de la sévérité des contrôles, à la mesure du danger potentiel s'attachant aux matières employées, cette énergie est sans doute la plus sûre et la moins polluante de toutes alors que personne ne s'est soucié suffisamment, jusqu'à maintenant, des nuisances entraînées par l'utilisation du charbon et des hydrocarbures.
     Il serait donc tout à fait regrettable que l'avance que nous avons acquise sur ce point et que l'indépendance énergétique que nous pouvons ainsi espérer acquérir puissent être compromises par des prises de position où la défiance vis-à-vis de l'Etat et des techniques scientifiques et industrielles tient un rôle aussi important que la nostalgie d'un retour impossible à la vie pastorale.
     Il nous faut dire, à ce propos, un mot encore du rôle que pourront jouer demain et plus tard les énergies nouvelles dont on confond trop souvent le potentiel effectivement quasi illimité et les possibilités réelles d'utilisation. Sans revenir sur ce sujet, nous notons que l'intérêt de ce recours aux forces «naturelles» n'a pas échappé aux responsables énergétiques de tous les pays mais qu'aucun n'accorde à ces techniques mieux qu'une contribution de quelques pour cent aux bilans énergétiques nationaux. Quand on connaît la puissance des mouvements écologiques dans des pays tels que les Etats-Unis et le Japon, une telle unanimité est de nature à faire réfléchir.
     Nous nous devons enfin, en terminant, rappeler le rôle croissant qu'est appelé à jouer l'électricité notamment en France où sa place est encore bien modeste.
     On a souligné, à son propos, le danger de la concentration de sa production par des unités de taille de plus en plus impressionnante mais, a-t-on dit, en contrepartie, la contribution qu'elle apporte dès maintenant et doit apporter davantage encore demain à une décentralisation effective. En effet, par sa diffusion et l'égalité des moyens qu'elle fournit à toutes les régions, elle remédie aux inégalités inhérentes à l'éloignement et à la répartition défectueuse des ressources en énergie fossile.
     Pour nous, Français, elle est de plus le moyen le plus efficace de réduire notre dépendance et c'est ce qui nous a conduit à souhaiter que tout soit mis en oeuvre pour favoriser son développement.
     Nous souhaitons donc vivement en conclusion que le Gouvernement définisse très clairement ses objectifs au plan énergétique et y associe les forces vives de la Nation, la meilleure formule pouvant être, à notre avis, de soumettre au Parlement une loi-programme comme l'ont demandé la plupart des intervenants au cours du débat que le sénat a consacré à l'énergie le 18 novembre dernier.
     Ainsi l'ensemble des problèmes qui se posent dans ce domaine et les solutions à leur apporter seraient largement et publiquement débattus et l'on éviterait que beaucoup puissent continuer à affirmer non sans raison parfois, que notre politique énergétique a été décidée au sein des Administrations par quelques technocrates alors qu elle est et doit être l'affaire de tous

     Ne croierions-nous pas un texte officiel... écrit par un tenant du programme?...

p.22

Notes:
1 Voir la Gazette Nucléaire n°13.
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2 Voir le rapport SCHVARTZ (encart n° 2). Ce rapport (n° 1280) a été fait, au nom de la Commission d'Enquête parlementaire sur les conditions commerciales, financières et fiscales dans lesquelles les Sociétés pétrolières opérant en France approvisionnent le marché français et y assurent la distribution des différents produits pétroliers et sur leur rapport avec l'Etat.
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3 On peut s'interroger, à ce moment, sur l'espérance de production des «surrégénérateurs»
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4 Si l'on suppose que la différence de 17 Mtonnes (121-104) est à usage militaire, on se rend compte de l'énorme part (14%) absorbée par ce consommateur. A-t-on encouragé l'armée à faire des économies d'énergie?
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5 Les prix au baril indiqués ici sont à manipuler avec précaution. Lorsqu'on évalue les réserves disponibles sur la base d'un prix de revient de 20 dollars/baril, il s'agit sans doute d'un prix technique lié strictement aux difficultés et coûts de production; lorsqu'on parle du prix actuel de 12 dollars/baril, il s'agit d'un prix politique, nettement supérieur au coût de revient technique actuel.
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6 Voilà un discours avec lequel nous sommes tout à fait en accord... mais comment se fait-il que pas une des recommandations éditées en fin de ce rapport ne porte sur ce sujet ou ne développe cette perspective?
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7 Nul doute que la politique charbonnière menée en France depuis 10 ans ne soit responsable de ces faits. La stagnation du rendement et l'augmentation du coût d'extraction sont indiscutablement liée à la politique d'investissement et d'exploitation pratiquée. Avoir considéré que le charbon était une énergie périmée a conduit à fermer des installations (dont les charges financières ont continué à courir), à reconvertir du personnel (dont les frais de formation et de conversion ont été assurés par les Charbonnages), à ne pas entreprendre la modernisation du système de distribution du charbon.
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8 Il est intéressant de comparer les chiffres indiqués ici et émanant probablement du Bulletin d'Informations scientifiques et techniques (n° 221 - Janvier et février 1977) du CEA avec ceux donnés dans la réponse faite par le Ministre de l'industrie, du Commerce et de l'Atisanat à M. Edgar Pisani, qui lui avait posé une question écrite (J.O des débats du Sénat du 10 janvier 1978).
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9 Compte tenu du fait que nos ressources charbonnières sur le territoire national sont faibles, il n'est pas douteux que c'est par une politique d'approvisionnement intelligente que l'on doit traiter le problème... et ceci n'a rien de farfelu, puisque c'est exactement la même question que nous avons à résoudre en matière d'approvisionnement en U.
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10 Voir Gazette NucléaireN° 3 et 8/9.
11 L'importance d'un tel tonnage de réserves d'Uranium en Afrique du Sud n'est pas sans incidence sur la politique menée par la France à l'égard de ce pays: vente de centrales nucléaires, coopération pour le retraitement du combustible... Voir la Gazette Nucléaire N° 7.
12 Rappelons au sujet de la majorité des pays cités la remarque de M. Boiteux, notant qu'il s'agit de «pays de race btanche, protestants et développés».
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13 Se reporter à la Gazette Nucléaire N° 3 à propos de la contrainte politique que cela sous-entend.
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14 Ce qui s'est traduit dans les faits par le démantèlement quasi-total des Régions d'Equipement Hydraulique à EDF.
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15 Il faut rappeler à ce sujet les principales conclusions du rapport PINTAT (encart N° 4) qui considère:
     «que l'hydraulique constitue une ressource énergétique présentant sur le plan de l'approvisionnement une sécurité quasi-totale.
     qu'il était possible de dégager 2 à 6 TWh en matière de grands équipements.
     qu'il y avait lieu de favoriser l'initiative privée pour l'équipement des petites chutes (environ 1 TWh/an).»
     D'autres possibilités de développement d'emploi de l'hydraulique sont également développées dans un document provenant de la Région Hydraulique Alpes. Il s'agit en particulier d'utiliser les possibilités de «stockage» des retenues d'eau afin d'améliorer le coefficient d'utilisation de la production thermique classique ou nucléaire, en permettant de dépasser les «points de consommation». Un des avantages des retenues de haute-montagne est de permettre outre les stockages hebdomadaires et mensuels, des stockages saisonniers.
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16 Pourquoi ne pas traduire tout cela en termes de «Recommandations»
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17 ... et elle est, pour un temps certain, vouée à le rester car on ne dispose pratiquement pas de gisements à haute température dans le sous-sol français; or ceci est une condition indispensable à la production d'électricité puisqu'elle est faite à partir de vapeur.
     Dans le domaine de la géothermie, il est préférable, en France, d'insister sur les possibilités d'utilisation de l'eau chaude à basse température (50 à 80°C) à vocation de chauffage urbain et industriel. Voir la Gazette Nucléaire n°13.
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18 Ce thème fera l'objet d'une des prochaines Gazette. Un travail intéressant a été effectué récemment par le «Groupe de Bellevue»: il s'agit du projet ALTER «esquisse d'un régime à long terme tout solaire».
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19 ... dont l'ensoleillement n'est pas tellement différent de celui d'une bonne partie de la France.
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20 Parmi les pays d'Europe occidentale, il est intéressant de considérer le cas du Danemark qui se trouve dans la situation d'importer 99,6% de son énergie et ne développe pourtant pas l'énergie nucléaire.
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21 Pour les années 1977-78, l'équipement hydraulique augmentera de 625 MW. Dans le futur (1985), il est prévu à Grand'maison (Isère) un aménagement mixte avec suréquipement en pompage permettant un transfert de puissanco de 1.800 MW. Ceci est fait dans le but de suppléer pendant 240 heures à la défaillance de 2 tranches nucléaires de 900 MW. Les autres aménagements prévus représentent 500 MW... On voit que les perspectives sont fort réduites.
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22 Le fait de noyer une vallée de bon rapport agricole ne peut guère être considéré comme un facteur de développement; on peut citer à titre d'exemple le cas du barrage de Ste Croix-le-Verdon qui a noyé une vallée alluvionnaire particulièrement fertile... et dont le niveau du plan d'eau atteint juste la cote de la guarrigue et de la terre à moutons!...
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23 Il n'y a pas lieu ici de faire porter à EDF le poids d'investissements qui ne vont pas dans le sens d'une recherche du plus faible coût de l'énergie fournie. La question est de savoir sur qui la puissance publique doit répartir ce surcoût: à l'échelle nationale... ou à l'échelle locale.
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24 On ne doit pas oublier à ce point, que si les réacteurs expérimentaux du Commissariat à l'Energie Atomique ont bénéficié d'un financement national, c'est parce qu'ils répondaient aussi à une préoccupation «militaire».
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25 ... et qu'elle met en oeuvre une technologie exportable. On peut s'étonner à ce propos que l'on fasse si grand cas de l'exportabilité de nos centrales nucléaires - exportabilité d'une part qui reste à prouver et d'autre part, qui est dangereuse - alors qu'il y a des possibilités «intelligentes d'exportation d'équipements hydrauliques.
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26 Cela signifierait-il que le Parlement prêche dans le désert... et que la politique se fait ailleurs?!
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27 Il semble que dans l'esprit des membres de la Commission, les liens entre prix politique et politique charbonnière soient très serrés. Cela correspond à une conception technocratique de la gestion. En fait, il est concevable de mener une politique charbonnière, à l'intérieur d'une politique générale de l'énergie, et simultanément d'adopter un «prix politique» de l'énergie charbonnière; ce qu'il ne faut pas faire alors, c'est justifier la régression charbonnière par un bilan économique négatif.
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28 Il s'agit bien évidemment ici d'une «contrainte» que le gouvernement s'est imposée pour des motifs politiques. Economiquement et techniquement, il était parfaitement justifié de s'approvisionner en pétrole auprès de l'Algérie... politiquement aussi du reste, mais dans le cadre d'une «autre» politique
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29 Ce n'est sans doute pas la seule raison. Voir le rapport Schwartz (encart n° 2).
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30 Cet écart de 13 ans est intéressant à considérer! En effet, il est remarquable de constater qu'il a fallu une période courte pour modifier sensiblement la structure de notre consommation énergétique. Il est probable que lorsqu'on parle de la très grande inertie qui règne dans le domaine énergétique - d'où la nécessité de faire très vite les grands équipement nucléaires - on manque un peu d'objectivité. En tout cas, même si cette inertie est plus grande dans le domaine du nucléaire que dans d'autres, il n'en est sûrement pas de même dans le domaine des énergies nouvelles!
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31 Ce scénario se reproduit très exactement pour le nucléaire pour lequel l'importance des investissements, la formation unidisciplinaire des hommes, stérilisent le développement des autres formes d'énergie et rend moins reversible et moins diversifiable la politique energétique.
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32 Lourde est ici la responsabibté des pouvoirs publics! Mais où sont-ils?
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33 Signalons ici les chiffres du programme Messmer (3 mars 1974):
     - décision de lancer en 1974 et 1975 treize tranches nucléaires de 1.000 MWe chacune,
     - mise en chantier de 55 tranches entre 1974 et 1980 pour fonctionner en 1985,
     - objectif: 50.000 MWe nuléaires en 1985 - 200.000 MWe nucléaires en 2000.
Ces chiffres conduisent à ce que l'énergie nucléaire représente 30% de la production française d'électricité en 1980 et 75% en 1985.
Depuis ces chiffres ont été révisés... à la baisse, mais restent encore impressionnants!
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34 Les plans de production actuels prévoient qu'on extraiera en France, cette année (1978) environ 21,5 millions de tonnes de charbon, soit un million de moins qu'en 1977 où il y en avait un de moins qu'en 1976 (avant, trois ou quatre millions de tonnes de moins par an).
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35 Il est sans doute vrai qu'il faut faire une «bonne» politique des prix! Mais laquelle?
En tout cas probablement pas celle prévue par le contrat conclu entre l'Etat et tes Charbonnages de France le 20 janvier dernier. En effet, cet accord a donné l'occasion à M. Matteoli, président des Charbonnages de France, de trouver «naturel d'augmenter au 1er juillet prochain les prix de trente pour cent départ-mine à destination du secteur domestique». Dans la politique des prix ainsi prévue, le petit consommateur sera sollicité pour apporter les compléments nécessaires à l'équilibre de l'ensemble. En juillet, si la majorité actuelle est encore là, les prix de barème à l'industrie auront augmenté de 16%, contre 38% en direction du secteur domestique (Enerpresse n° 1998).
Alors, d'accord pour que les Charbonnages de France ne vendent pas à perte... mais attention à qui fait l'équilibre?
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36 En ce qui concerne les opérations engagées, il ne semble pas y avoir lieu d'être particulièrement optimiste. M. Gardent, directeur général des Charbonnages, a d'ailleurs reconnu que «les résultats de la mine américaine ne seront pas bons», les intempéries s'ajoutant aux grèves pour limiter l'exploitation. Quant à la mine australienne, «il y a des difficultés commerciales avec le Japon» qui, en période de crise, réduit ses importations de charbon étranger (Enerpresse n° 1998).
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37 Citons, pour illustrer cette opinion, M. Boiteux, dans une intervention faite le 2 mai 1977 à Salzbourg dans le cadre de la Conférence Internationale sur l'Energie d'origine Nucléaire, organisée par 1' AIEA:
     «En attendant, pour freiner l'exponentielle des besoins d'hydrocarbures, libérer le pétrole indispensable au développement des pays du tiers-monde et se donner le temps de trouver d'autres solutions aux problèmes énergétiques, le moyen pour des pays comme les nôtres de résoudre leurs problèmes sans aggraver celui des autres, la seule solution fiable et compétitive qui soit à l'échelle des besoins, c'est le recours à l'énergie nucléaire.»
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38 Encore une opinion illustrée par M. Boiteux au cours de la même intervention, en ces termes:
     «A s'en tenir aux énergies fossiles et à l'hydraulique, pas d'ambiguïté possible, les ressources nationales sont dérisoires. Elles couvrent - en comptant tout le charbon jugé techniquement récupérable, c'est-à-dire sans considération de coût - moins de 20% des hesoins cumulés d'ici à 2000.»
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39 Quant aux centrales thermiques classiques, ce n'est certainement pas M. Hug, directeur de l'Equipement à EDF qui poussera à leur réalisation (note Information-Euipement, 2.6.77):
     A la question: Peut-on envisager de construire des centrales thermiques pour pallier les retards des centrales nucléaires?
     Il répond: «En réalité, nous ne disposons pas, sauf cas particulier, de sites pouvant accueillir de telles unités et nous sommes en droit de penser que les procédures permettant de les ouvrir, seront, elles aussi, longues et difficiles. Rien ne prouve que le public français leur ferait bon accueil d'autant plus que le thermique à charbon n'est pas mieux reçu par les défenseurs de l'environnement que le nucléaire.
     Aux Etats-Unis, comme en Allemagne, la contestation s'est attaquée à ces moyens de production et des chantiers de centrales à charbon ont dû être stoppés.
     Bien que cette conclusion ait l'apparence du paradoxe, il faut dire que la meilleure façon de résoudre les problèmes soulevés par les retards du programme nucléaire est encore de faire du nucléaire. Il importe donc de tenir avec vigilance les plannings des opérations en cours, et de faire tous nos efforts pour répondre aux demandes de l'Administration durant l'instruction des opérations à engager.»
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40 On constate en effet que, quelle que soit la partie observée dans l'ensemble du cycle nucléaire, les coûts sont en hausse. Ainsi:
     - le coût de l'uranium naturel est passé de 0,55 centime/kWh en 1972 à 0,89 centime/kWh en 1976
     - la valeur ajoutée à l'uranium au cours du traitement pour l'amener à l'état de combustible nucléaire est passée de 0,92 c/kWh en 1972 à 1,26 c/kWh en 1976.
     - le coût de la construction des centrales nucléalres passe de 2068 F/kW en mars 75 à 2.340 F/kW en mars 77.
     Voir également l'analyse du coût du kWh nucléaire dans la Gazette n° 8-9.
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41 Signalons à propos de l'évolution du coût du combustible, la facon dont la firme Westinghouse a été amenée à réviser ses contrats de fournitures de combustible qu'elle avait établis avec un certain nombre de producteurs d'électricité.
     On connaît l'affaire. Il y a quelques années, tandis que Westinghouse faisait tout pour faire balancer en sa faveur un marché des réacteurs nucléaires qui avait plutôt tendance à s'élargir du côté de son concurrent General Electric, le grand chantre de l'eau pressurisée proposait aux électriciens qui choisissaient sa filière de leur garantir des livraisons d'uranium à des prix imbattables: 9,50 dollars la livre sur vingt ans. Le marché de l'uranium était alors déprimé et Westinghouse n'imaginait pas qu'un renversement significatif de tendance fut possible.
     C'est pourtant ce qui s'est passé, avec une accélération notable depuis les événements pétroliers d'il y a quatre ans. Les prix de l'uranium se sont envolés, Westinghouse n'a pas pu tenir le coup et a dénoncé ses contrats avec les électriciens, en tablant sur la clause de force majeure. Les électriciens (vingt-sept compagnies) ont refusé l'argumentation et traîné Westinghouse devant les tribunaux. Ceux-ci, plutôt que de trancher au fond, ont préféré inciter les parties à s'entendre.
     C'est ce qui se passe actuellement à Richmond, où l'affaire prend la forme d'un accord entériné par la justice. Accord collectif, puisqu'un seul électricien, Texas Utilities Services, a traité pour un groupe de trois, formé, outre lui-même, de ses deux collègues texans de la Dallas Power & Light et de la Texas Electric Service. Selon Westinghouse, l'accord est fondé sur une réduction des quantités initialement sous contrat (plus de deux millions de livres-poids) de l'ordre d'une grande moitié. Une petite moitié de cette grande moitié (470.000 lb) sera livrée aux électriciens aux tarifs contractuels, l'autre (500.000 lb) l'étant à un prix présenté comme «favorable», encore que non~indiqué.
     Une indemnité multiforme vient asseoir le propos. Divers équipements, matériels et services seront fournis gratuitement par Westinghouse aux trois électriciens, qui se verront en outre associés aux bénéfices d'une filiale uranifère de Westinghouse, la Wyoming Mineral Corporation, dont une fraction du capital passera entre les mains de la Texas Utilities Services. Westinghouse paiera cash quatre millions de dollars sous trente jours. L'opération lui coûtera au total vingt-sept millions de dollars, charges intercalaires comprises.
     Intéressant par l'ampleur des sommes mises en cause, l'accord l'est plus encore par la stratégie qu'il implique. Tout le monde s'attend en effet que Westinghouse, toujours à la recherche de son cas de force majeure, relance sa plainte pour cartel et entente contre ses propres fournisseurs d'uranium. On crédite la firme de l'intention de demander à la Commission de la Communauté européenne de se pencher sur l'affaire. (Enerpresse, 29, décembre 77, n° 1980)
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42 En particulier on évoque sérieusement le doublement du temps nécessaire au chargement-déchargement annuel du combustible qui passerait ainsi à 8 ou 10 semaines. Cette contrainte supplémentaire conduirait à diminuer le temps de production de la centrale et pourrait entraîner la nécessité de recharger en hiver plusieurs tranches.
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43 Hum, hum! Tout le monde ne partage pas cet optimisme:
     «Or, pendant ce temps, les prix continuent de monter à la construction en France même. Entre Fessenheim et Paluel, site difficile il est vrai, la dérive des coûts est de 40%, elle atteindrait même 50% si l'on prenait en compte le fameux effet de taille...» (Enerpresse du 15.02.78)
     L'effet de taille dont il est question ne serait-ce pas le palier 1.300 MWe pour lequel le prix du kW installé serait plus élevé que pour le palier 900 MWe?
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44 Souligné par la Gazette.
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45 Ce raisonnement est intéressant. Notons que le même raisonnement peut être tenu pour toutes les énergies. Depuis longtemps nous défendons l'idée que c'est d'abord du côté de la consommation qu'il faut regarder l'énergie. Remarquons également que ce raisonnement permet d'envisager la production par de petites sources d'une façon nouvelle, la compétitivité se situant différemment.
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46 Notons que nous touchons là une curiosité actuelle des calculs économiques: le coût du démantèlement rapporté en 1978, alors que l'éventuelle opération n'interviendrait que dans vingt ou trente ans, est très faible (choix du taux d'actualisation).
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47 Il n'y a pas trop d'espoir à avoir de ce côté-là. Dans la Gazette n° 8-9, nous disions déjà: «En ce qui concerne le nucléaire, l'expérience industrielle est insuffisante pour supposer un taux d'utilisation aussi optimiste que celui retenu par EDF. Il semblerait même qu'aux USA des maladies de vieillesse interviennent dès la cinquième ou sixième année de fonctionnement et font baisser les performances de la centrale du fait d'arrêts prolongés de plus en plus fréquents (conf.  le  rapport  Cormey  sur  les  centrales  américaines).
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48 On espère que le Conseil pour l'information sur l'Énergie Nucléaire, récemment créé (voir Gazette n° 14), a pris bonne note des observations de nos honorables parlementaires.
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49 Pour donner une idée plus précise à nos lecteurs, citons M. Boiteux qui, le 2 mai 1977, à une conférenoe internationale sur l'énergie d'origine nucléaire, déclarait à Salzbourg:
     «Peut-être objectera-t-on que les devises nécessaires au développement du programme nucléaire doivent être déduites de ce gain pour établir un bilan net. Mais le coût de l'assistance technique du licencieur, payable en dollars, est extrêmement faible:1,5% du coût de la centrale. La part des matériels importés des États-Unis est pratiquement négligeable. Pour le reste, il s'agit de matières premières ou de demi-prodruits dont l'importance n'est pas spécifique du programme nucléaire et dont le poids est peu élevé - quelques % - l'essentiel de la valeur ajoutée étant réalisé sur le sol national.»
     Ce qui amène le coût de l'assîstanoe technique à environ 30 millions de francs!
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50Voir note 73.
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51 Notons d'ailleurs que le CEA a acheté à Westinghouse sa participation de 30% en lui payant... en uranium dont Westinghouse avait grand besoin.
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52 Voir Gazette N° 3.
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53 Oh qu'en termes délicats ces choses-là sont dites!
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54 Voir 51.
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55 Nous avons déjà largement traité de cette question, voir Gazettes n° 4 et n°12. Notons que l'incertitude sur le retraitement n'enmpêche pas la COGEMA de passer des contrats de retraitement avec l'étranger.
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56 A propos des rigidités et risques de blocage, la dépêche suivante de l'Agence France Presse du 2 octobre 1976 n'est pas sans poser des interrogations:
WASHINGTON:  Renforcement des mesures de surveillance et de sécurité dans les centres nucléaires américains - Le danger croissant de voir un groupe terroriste s'emparer de matières fissiles a conduit l'Agence Fédérale pour la Recherche et le Développement de l'Energie (ERDA) à renforcer considérablement les dispositifs de surveillance et de sécurité des centrales nucléaires et des usines d'enrichissement de l'uranium a indiqué, le 22 octobre, M. Earl Hightower, directeur adjoint de l'ERDA.
Parmi les mesures prises figure le remplacement des revolvers et pistolets dont sont dotés les gardiens des centrales nucléaires par des fusils à tir rapide, et l'accompagnement de chaque convoi de transport de matériel nucléaire de véhicules blindés dotés de mitrailleuses. Les convoyeurs seront, pour leur part, armés de mitraillettes pendant toute la durée des trajets.
     Des équipes spéciales de gardiens sont en cours d'entraînement, dans le Nevada. Ceux du centre d'essais nucléaires ont reçu ordre de tirer à vue en cas d'attaque pour vol ou sabotage d'armes nucléaires.
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57 Dans un bulletin d'information des Chefs d'Unité d'EDF, on peut cependant lire des propos comme ceux qui suivent:
     «La plupart des attaques que subit l'établissement proviennent de cette situation. Cependant, nous n'avons pas le choix: la dépendance vis-à-vis du pétrole ne diminuera que si la production nucléaire augmente et si des kWh sont consommés à la place de mazout. En dépit des attaques, EDF ne peut, sans faillir à la mission qui lui a été impartie, abandonner son effort dans le sens de la substitution de l'électricité au pétrole, tout en s'associant pleinement aux économies d'énergie. (...)
     Les Pouvoirs Publics ont demandé à EDF de faire son possible pour que l'accélération du développement du C.E.I.(Chauffage électrique intégré) à effet Joule soit provisoirement stoppée. Les commerçants d'EDF doivent répondre à cette demande. (...)
     La tache des commerçants a donc beaucoup diminué en matière de «produits blancs». Elle reste importante pour le C.E.I., ne serait-ce que pour la chasse, plus nécessaire que jamais, aux contre-références.
     Mais il leur est demandé en outre de s'attacher à:
     - la mise au point de techniques économiques en énergie pour le chauffage des logements existants,
     - la pénétration dans l'industrie,
     - la recherche des applications des pompes à chaleur dans tous les secteurs de l'industrie et de l'habitat, neuf et ancien.
     Il s'agit, dans ces trois nouveaux domaines, exclusivement de substitution de l'électricité aux énergies traditionnelles et les actions sont plus difficiles à mener, ne serait-ce que parce qu'on ne dispose pas ici de recettes toutes faites. Mais ne sont-elles pas d'autant plus exaltantes qu'elles demandent un plus gros effort de réflexion et d'étude?
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58 Voir Fiche technique du GSIEN n° 7. On lira aussi avec intérêt le livre: Les Nucléocrates de Philippe Simonot aux Presses Universitaires de Grenoble.
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59 En somme quatre ans après le lancement du programme, il n'existe que parce qu'il a été lancé... Il serait malgré tout intéressant, même si c'est une «hypothèse d'école», que soient effectués de tels scénarii alternatifs, mais peut-être ne peut-on même pas envisager de savoir?...
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60 Il nous faut tempérer les propos tenus ici. Les nouvelles installations «classiques» demandées ne le sont pas dans un but de diversification, mais au contraire pour consolider la politique actuelle de pénétration de l'électricité. Le programme nucléaire ayant du retard, mais les objectifs généraux tendant à substituer l'électricité demeurant, il est nécessaire à titre de relais temporaires de disposer d'installations rapides à construire. L'hydraulique, quant à lui, semble beaucoup plus être considéré comme énergie d'appoint permettant de compenser le manque de souplesse des installations nucléaires fonctionnant «en base».
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61 Triste constat d'échec pour la technocratie... mais aussi pour le Parlement!
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62 Ce changemcnt dans les comportements nous apparaît également comme hautement souhaitable. Mais que penser lorsqu'on lit, dans le Bulletin de l'Association Suisse des Électriciens du 14 janvier 1978, les propos tenus par M. Broulhiet, ancien responsable du service des relations publiques d'EDF, actuellement chargé du service Prévention et Sécurité d'EDF:
     «3A. Dimension politique:
     Les électriciens ont à tenir compte du jeu politique mais ils ne peuvent y entrer. A défaut, ils donneraient du crédit aux accusations de détenir un pouvoir de décision de nature technocratique et productiviste empiétant sur les prérogatives des pouvoirs publics.
     Mais le fait politique devient de plus en plus contraignant pour la continuité des objectifs énergétiques et sa prise en considération entraîne d'abord la nécessité de donner à ceux qui participent aux décisions politiques une information approfondie leur permettant de se déterminer en toute connaissance de cause. Cette information est à donner aussi bien aux hommes politiques de la majorité au pouvoir qu'à ceux de l'opposition, d'une part pour ne pas associer les électriciens à une nuance politique au détriment d'une autre, et d'autre part pour que les renversements éventuels de majorité ne s'accompagnent pas de décisions qui n'auraient pas été mûrement réfléchies. C'est en effet devant la pérennité de l'Etat que nous sommes d'abord responsables avant de l'être devant ceux qui en pilotent les destinées pour une durée plus ou moins longue».
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63 Nous espérons pour notre part contribuer au débat dans le sens souhaité par les parlementaires. C'est pourquoi d'ailleurs nous envoyons la Gazette à plus d'une vingtaine d'entre eux
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64 Le Conseil d'information nucléaire pourra-t-il aller dans ce sens? Nous l'espérons malgré sa composition (voir Gazette n°14, encart 3).
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65 Que veut dire véracité des coûts? Il y a lieu à ce niveau de faire attention à certaine forme de calcul économique pratiqué qui consiste à ne comptabiliser qu'une partie des frais an oubliant par exemple les coûts sociaux, écologiques et autres.
66 Ce raisonnement strictement économique paraît curieux venant de parlementaires. Connaître les coûts est nécessaire certes, mais la politique des prix doit intégrer d'autres aspects: justice sociale, indépendance nationale... bref des aspects politiques. D'ailleurs plus loin, voir note 68, ne proposait-on pas justement une politique de prix qui ne correspond pas à la «véracité des coûts»?
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67 D'après une note interne du Ministère de l'industrie, les économies suivantes peuvent être réalisées dans l'habitat ancien:
     30% pour un coût de 50 F/m2
     50% pour un coût de 120 F/m2
     ce qui entraînerait l'emploi de l'ordre de 100.000 personnes pendant les 10 ans nécessaires pour isoler l'ensemble des logements anciens.
     Ainsi que nous le disions aussi dans la Gazette n° 14, les économies d'énergie sont une «source d'énergie nationale» et chaque franc investi dans ce domaine est automatiquement indexé sur le coût de l'énergie. On peut ajouter que cela peut également s'exporter dans la mesure où de nouvelles technologies sont mises au point.
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68 On espère que le raisonnement sera valable également pour l'industriel afin de l'inciter lui aussi à mieux connaître ses flux énergétiques et à les économiser.
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69 L'annexe 39 du même rapport de la Commission des Finances est consacré à la Recherche (rapporteur M. Mesmin). Que lisons-nous au chapitre réservé au B.R.G.M.?:
    «La commission des Finances s'étonne de constater que le budget de 1978 procède à une réduction de 2 MF des crédits du chapitre 62-12 consacré à cette activité. Elle recommande au Gouvernement de remédier à cette situation et de mettre le B.R.G.M. en mesure d'apporter à notre approvisionnement en matières premières la contribution que le pays est en droit d'attendre de sa compétence
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70Voir encart 4: le rapport Pintat de 1975.
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71 Ce point à lui seul mériterait un long développement sur la notion de «Service Public». Il est intéressant de citer quelques phrases d'une plaquette publiée par les organisations syndicales d'EDF en réponse au Rapport Pintat sur l'hydraulique citée ci-dessus:
     «Pourquoi la Direction d'EDF refuse-t-elle depuis trois ans d'étudier sérieusement le potentiel hydraulique?...
     Pourquoi la Direction d'EDF démolit-elle ses dernières équipes d'études et de réalisations hydrauliques susceptibles de faire face aux besoins incontestables d'études sur le sol national...
     Pourquoi, alors que la concertation exige des structures décentralisées, la Direction d'EDF essaie au contraire de centraliser ses services tout en parcellisant au maximum les taches, ce qui a pour effet principal de diluer les responsabilités et de compliquer la concertation?»
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72 Après avoir déclaré dans le chapitre 1 que les énergies nouvelles étaient intéressantes, on est un peu étonné dans ce paragraphe consacré aux éléments d'une politique de la faiblesse des propositions. Une nouvelle fois il nous faut affirmer que les énergies nouvelles ne se développeront que si des actions assez volontaristes sont menées. Le poids des «institutions énergétiques» actuelles est le principal obstacle à leur développement.
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73 La francisation des procédés de la filière PWR risque fort d'être un voeu pieux si on en croit M. Philippe Boulin, président de Framatome. Celui-ci, dans un interview à la revue Enerpress du 15 mars 1977 déclare en effet:
     «Je n'aime pas le mot francisation... le vrai problème n'est pas de planter un drapeau sur une technique, c'est d'acquérir la maîtrise avec le plus grand degré d'indépendance, d'un technicien valable». Et Enerpress poursuit:
     «On voit là justifié pour le directeur général de Creusot-Loire, le tandem avec Westinghouse. Celui-ci est évidemment ressenti comme une bonne chose, ce qui ne veut pas dire pour autant comme une chose immobile. Lorsque la licence Westinghouse tombera, en 1982, que se passera-t-il? «Personne n'en sait rien» affirme M. Boulin en remarquant que ce qui sera alors décidé dépendra essentiellement du rapport de force entre les programmes nucléaires respectifs de la France et des Etats-Unis.
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74 Nous reviendrons ultérieurement sut ce point de l'utilisation de l'eau chaude des réacteurs électronucléaires. Le problème est complexe car se posent les questions de la taille des unités actuellement: 1.000 MWe, soit environ 2.000 MW thermique! L'implatation, du fait qu'il faut équiper au moins deux réacteurs pour assurer la sécurité d'alimentation, et que le rendement électrique baisse encore pour une utilisation pendant quelques mois par an.
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75 Ces réacteurs que le CEA envisage de développer font appel également à de l'uranium enrichi. Le premier prototype est envisagé sur le site de Saclay et aurait une puissance de 50 MW thermique. Le caractère peu poussé de la première réalisation appelée Thermos fait que les problèmes techniques semblent plus facilement résolubles que ceux des réacteurs électronucléaires actuels. Cependant le problème du retraitement des combustibles reste entier et est aussi délicat que pour le combustible des PWR, on pourrait être conduit à envisager la nécessité d'un atelier spécial d'entrée dans la chaîne du retraitement.
     Citons, enfin, les propos de M. J. Despois (Ingénieur à la COGEMA) qui, dans un article de la Revue Générale du Nucléaire (n° 2, mars-avril 1977), déclare à propos du transport et du stockage de la chaleur:
     «La situation devient réellement critique pour les eaux à très basse température (50 ou 60 °C), si l'on veut les utiliser pour le chauffage urbain (les utilisations agricoles posent un problème différent). Dans ce cas, qui pourrait par exemple correspondre à un prélèvement dans des condenseurs de centrales électrogènes, tout transport devient alors économiquement impossible et il faudrait des progrès considérables dans le domaine du transport pour introduire une modification limitée de la situation. Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner les problèmes que pose la géothermie dans le Bassin de Paris, où l'on ne peut accorder aucun crédit aux évaluations globales des ressources, puique ces évaluations ne tiennent pas compte du fait que 95% des ressources sont inexploitables, car trop éloignées des zones de consommation, alors que le reste ne permettrait que la fourniture pendant un temps limité d'un débit d'appoint pour les agglomérations denses situées au-dessus du gisement. C'est donc pour des raisons de transport que, dans le Bassin de Paris, la géothermie ne peut être envisagée que pour des ensembles limités à densité moyenne de population. Au passage, on voit que pour ces raisons de coût de transport, un développement inconsidéré d'opérations ponctuelles de chauffage par géothermie dans des zones à forte densité aboutit à un écrémage du marché du chauffage, risquant de rendre plus difficle l'implantation de réseaux de chauffage nucléaire, et pouvant ainsi se traduire à long terme, par le maintien de la consommation de fuel-oil à un niveau plus élevé
     (Le passage souligné l'est par la rédaction de la Gazette. Il nous paraît en effet significatif de ce que nous disions dans la N°13 consacré à la géothermie).
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76 Le collectif de rédaction aimerait, lui, en savoir plus.
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