La G@zette Nucléaire sur le Net!
N°100!, mars 1990

G@ZETTE "100"

"SANS" NUCLEAIRE!
Editorial / SOMMAIRE


     Voici la Gazette Nucléaire No100. Cela fait maintenant 14 ans que nous publions ce journal et on raccrocherait bien notre plume. Mais quand on analyse la situation:
     - une centrale au Pakistan
     - toujours des ennuis à Superphénix (à quand l'arrêt définitif?)
     - l'usine MELOX
     - les essais dans le Pacifique et les seules bonnes nouvelles:
     - l'arrêt pour un an des prospections sur les sites de stockage
     - la mise en évidence de la non conformité (on est gentil) de la décharge de Monchanin.
     on y renonce.
     En fait, on vous prépare plusieurs Gazettes en même temps car il y a matière:
     - Tchernobyl aux développements si inquiétants pour les populations,
     - Sellafeld où d'études en études on précise les effets des faibles doses,
     - La technique aussi pose des problèmes. En phase d'exploitation, la routine s'installe vite. La sécurité des populations ne peut être assurée que si EDF se dote vraiment des moyens en hommes, matériels...
     Voilà pourquoi notre plume est parfois si accérée mais c'est parce que nous sommes inquiets. Inquiets (le mot est faible), nous le sommes depuis notre premier numéro il y a 14 ans. En dépit de tous les avertissements, Tchernobyl, Three Mile lsland, tout continue.
     L'inconvénient, c'est que ce n'est pas l'industrie et sa direction qui paient les pots cassés, mais c'est nous, les bailleurs de fonds et de santé. Si les choses ne sont pas faites correctement, ça veut dire des réparations chères en argent mais surtout dangereuses pour les travailleurs.
suite:
     Nous venons de prendre part à une bagarre, une fois de plus, contre une offensive de ce genre: la construction de l'usine MELOX. Les sirènes industrielles ont alléché les politiques «Voyez sur nos étagères ce plutonium inutilisé, il faut le mettre dans nos réacteurs, c'est pas cher et cela évite un stockage».
     Heureusement qu'il a été possible de faire comprendre l'engrenage fatal de cet argumentaire. Car qui dit plutonium, dit retraitement et qui dit retraitement dit problème de stockage des déchets. Il est donc illusoire de faire un moratoire d'un an pour la prospection des sites afin de remettre à plat toute la problématique de la fin du cycle du combustible et de se cacher derrière cette largesse pour démarrer l'utilisation du plutonium. Il faut être clair, le plutonium ne peut être obtenu qu'après retraitement du combustible, donc son utilisation nous condamne à continuer cette politique et à étendre la Hague.
     Et si nous retraitons, cela veut dire déchets contaminés par les émetteurs et donc nécessité de stockage surveillé, et de gros volumes. Cela veut dire aussi que l'on met la charrue avant les boeufs. Il faut cesser cette course en avant qui dure depuis 1945, du militaire au civil. Nous avons fait assez de sottises en refusant toute réflexion et tout dialogue. Voici d'ailleurs une fois de plus l'occasion de reprendre ce 'fameux (fumeux) dialogue.
     Après les rapports Schloessing, Brana, voici maintenant Rouvillois, Guillaume, Pellat, ces rapports ont tous souligné que le nucléaire était certes un beau fleuron français, mais un fleuron fort cher, pas rentable. Le dernier rapport nous a plû parce qu'il pourrait nous servir tel quel pour la Gazette. Enfin presque car ce rapport est curieux, d'un côté on chante les louanges habituelles, de l'autre on critique. Tous comptes faits, il est explosif. Comme tout le monde a le droit et le devoir d'être informé, réclamez ce dossier au ministère, au Conseil Supérieur à votre député, à votre mairie, etc... En cas d'échec possible (probable), la Gazette pourra vous le fournir mais il fait 140 pages et il faudra payer la photocopie!
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     Il y a cependant un truc pervers dans ce dernier rapport à propos du parc de réacteurs actuels. Nous avons fait trop de réacteurs à cause de mauvaises estimations sur la consommation d'électricité, dit-on maintenant. C'est excuser bien vite une politique définie par ceux qui avaient intérêt à construire au sein de la trop fameuse commission PEON (Production Electricité d'Origine Nucléaire). Framatome a rempli son carnet de commandes. Elle l'a si bien rempli que nous vendons maintenant nos kW excédentaires. Evidemment, à perte, mais comme l'électricité ne se stocke pas, que les réacteurs nucléaires n'aiment pas les chocs thermiques, c'est mieux que rien. Inutile de rappeler que nous ne vendons pas le kW avec en prime un fût de déchets radioactifs.
     Il est alors inquiétant de constater que seulement une trentaine de députés ont participé au «débat» sur l'énergie de décembre 89. Débat qui, bien sûr, conclue que rien ne presse.
     Rien ne presse s'il s'agit de construire d'autres réacteurs. Par contre ça urge pour s'assurer que les réacteurs marchent vraiment bien et surtout pour mettre en place une politique alternative diversifiée, prenant en compte l'environnement. Mais cela ne semble pas avoir été pris en compte par nos chers décideurs. Ils ont la vue basse et comme ils naviguent à vue avec comme balises les échéances électorales, cela augure mal de l'avenir.
     La politique énergétique mise en place en 1990 engage déjà l'an 2000.
     Les éditos se suivent et se ressemblent...
     Côté prolifération, nous ne constatons pas d'amélioration. La vente d'un réacteur au Pakistan est plus qu'une erreur, c'est une faute contre l'humanité. La France n'a pas signé le Traité de Non - Prolifération, mais tout de même !
     Nous ignorions que la déclaration des Droits de l'Homme dont nous sommes si fiers était celle du droit de s'entretuer avec des armes portant le label «qualité France».
     Quant aux essais à Moruroa, comment pouvons-nous justifier un tel mépris des peuples? Si nous sommes si sûrs de l'inocuité de ces essais, alors faisons-les dans le Massif Central. Ils sont un tel manquement aux désirs de paix que nous le répétons pour faire un pas vers la Paix et le Désarmement, arrêtons les essais en général et dans le Pacifique en particulier.
     Quant à la Hague, maillon de la prolifération puisqu'on y extrait du plutonium, on ferait bien de faire son bilan financier et de santé Au fait, à quand le registre de morbidité? Depuis trois ans, la Commission en la personne de son conseiller cherche désespérément à avoir un financement. Le financement complet est toujours absent. Si après moult démarches, la moitié de la somme (250 000 francs) a été trouvée, cela ne donne aucun engagement pour l'année suivante. Un registre, c'est du temps, du personnel et de l'ARGENT (soit environ 500'000 francs pour la mise en place, au moins 350'000 francs par année pour le dossier et ce pendant cinq, dix années).

Merci de vos réabonnements, on tiendra cette année. N'oubliez pas de nous envoyer vos critiques, vos suggestions.

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SOMMAIRE
EDITO
MELOX
Rapport Tanguy
TCHERNOBYL: Gestion post-Tchernobyl: critères d'évacuation, plans d'évacuation, point sur la situation. Chernobyl, le dossier norvégien; Brève: la décontamination mais c'est très simple!
Les surgénérateurs à la casse
Zones sous contrôle spécial (interview de P. Pellerin)
Nucléaire militaire: Lettre ouverte aux parlementaires; tableau des essais nucléaires dans le monde, appel du mouvement "Nevada"
Une statistique internationale sur les arrêts non programmés dans les centrales nucléaires.

     Nucléonics Week du 26 octobre 1989 cite le rapport annuel de la Commission de Sûreté Nucléaire du Japon sur la fréquence des arrêts non programmés (terme juridique pour désigner les pannes...) «Les plus récentes statistiques internationales disponibles, concernant les nombres d'arrêts non programmés par réacteur, indignent: 0,4 pour le Japon, 4,6 pour Etats-Unis, 6 pour la France, 2,5 pour l'Allemagne de l'Ouest et 2,1 pour la Grand Bretagne».

Commentaire Gazette:
     Lorsqu'on vise la production coûte que coûte, on attend la panne pour réparer. On augmente le taux d'arrêts non programmés mais on réduit aussi le taux d'arrêts programmés. On gagne peut-être en production de KWh mais on perd certainement en sûreté...


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