Le quadruplement du prix du pétrole
en 1973-74 aurait dû consacrer mondialement le triomphe des promoteurs
de l'énergie nucléaire. Dans plusieurs pays, en particulier
la France, c'est effectivement à cette période que
se situe l'accélération des programmes. Mais cette accélération
se heurte à de nombreuses difficuités dont certaines s'étaient
déjà manifestées les années précédentes
aux EtatsUnis.
L'extension et la mondialisation des usages industriels de l'énergie nucléaire trouvent en face d'elles: a) De nombreux problèmes techniques et économiques, doublés de conditions de sécurité qui rendent la phase d'industrialisation beaucoup plus difficile et incertaine que ne le laissait prévoir la phase des prototypes (déjà pas brillante). b) Une opposition croissante d'une partie importante et active de la population, consciente des dangers de ce développement et critiquant, à travers l'énergie nucléaire, le type de développement productiviste des pays industrialisés. On a pu dire que la «crise du pétrole» avait porté paradoxalement un coup au nucléaire car elle a obligé à réfléchir aux problèmes de l'énergie et de la croissance. c) L'imbrication, oubliée depuis les années 50, entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire qui réapparaît sur la scène internationale en 1974 avec l'explosion de la bombe atomique indienne et pèse dès lors sur les problèmes d'exportation d'installations nucléaires dans des pays hors du cercle des puissances nucléaires militaires et de leurs proches alliés. Les points b et c ont déjà été traités dans d'autres Gazettes... et le seront encore. Nous nous concentrerons sur les aspects techniques et industriels propres au système nucléaire, en intégrant les questions d'ordre politique lorsque cela sera nécessaire pour comprendre l'évoluton des choses. Les centrales nucléaires Aux Etats-Unis, dès 1975 et pour la
première fois depuis ses vingt ans d'existence, l'industrie nucléaire[19]
craint pour son avenir: «l'incertitude est la malédiction
de l'énergie nucléaire», déclare Carl Walske,
président du Forum de l'Industrie Atomique.
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La situation va évoluer dans le même sens en 1976 et 1977: la décroissance nette des commandes de centrales nucléaires s'accentue (General Electric n'enregistre aucune commande ces deux années; voir tableau 2) et va de pair avec un retard croissant dans trois secteurs importants l'enricliissernent de l'uranium. le retraitement des combustibles irradiés, le développement des surrégénérateurs. C'est dans ce contexte que le Président Carter, printemps 1977, va définir sa nouvelle politique de l'énergie (voir troisième chapitre). En Europe, l'industrie nucléaire a profité de la crise du pétrole en 1974 avec l'aide de pouvoirs politiques généralement plus farouchement pro-nucléaire qu'aux Etats-Unis. Mais les difficultés apparaissent par la suite, comme nous le verrons. Fin 1977, pour les pays des Communautés Européennes, 25.000 MWe sont en fonctionnement ou ont démarré dans l'année et 47.000 MWe sont en construction. Cela fait 70.000 MWe au moins qui devraient fonctionner en 1985. Il est intéressant de voir comment ont évolué les prévisions officielles pour 1985 de la puissance nucléaire installée dans la CEE:
Ces chiffres sont surtout le constat d'un retard
essentiellement dû à des difficultés techniques et
des délais de construction plus longs que prévus (la centrale
de Fessenheim en France a démarré avec deux ans de retard
et accumule les incidents techniques, la centrale de Caorso en Italie,
dont la construction a commencé en 1970 devrait démarrer
en 1978, les grandes unités de Biblis en RFA ont eu de nombreuses
difficultés). Il faut aussi tenir compte du fait que les perspectives
à long terme sur l'économie dans son ensemble sont de plus
en plus incertaines et que les prévisions énergétiques
à long terme deviennent plus prudentes.
19. Qui par ailleur a amorcé sa reconversion vers d'autres énergies 20. Admirons au passage le comportement technocratique... Peut-on vraiment croire que les prévisions à moyen ou long terme reposent sur des analyses technico-économiques parfaitement objectives?! p.6
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L'opposition sociale au nucléaire
a peu joué en Europe sur ce retard; par contre son poids devient
suffisamment important pour empêcher une révision en hausse
des programmes nucléaires et elle pourrait, dans certains pays,
entraîner un moratoire par sa conjugaison avec les difficultés
techniques et économiques rencontrées. C'est en Allemagne
et en Suède que cette opposition populaire s'est manifestée
avec le plus d'éclat. En RFA, depuis 1974, tous les partis ont soutenu
la politique du gouvernement Schmidt pour un fort programme nucléaire:
avoir 45.000 MWe en fonctionnement en 1985. Le ralentissement actuel considérable
de ce programme a pour origine l'énorme vague de protestation née
à l'automne 1976 contre l'implantation des centrales nucléaires.
Les «burgerinitiativen » ou «Comités de citoyens»
constituent une très large coalition d'origine diverse, très
décentralisée, qui ne s'attaque pas uniquement au nucléaire,
mais aussi à d'autres installations industrielles et utilise, à
côté des manifestations de masse, le recours juridique facilité
par la décentralisation administrative allemande.
La Suède possède une forte industrie nucléaire. En 1974 et 75 un large débat national s'instaure sur le nucléaire et la croissance énergétique. Le programme présenté par les socialistes, tout en réduisant de 4,5% par an à 2% la croissance énergétique jusqu'en 1985 pour tendre vers 0 aux alentours de 1990, prévoit la construction de 13 réacteurs nucléaires. Le parti du centre s'oppose aux centrales nucléaires et cette position pèse, semble-t-il, en grande partie pour le succès des partis bourgeois aux élections législatives de l'automne 1975. Les promesses électorales de M. Fälldin, premier ministre - arrêt et démantèlement des centrales - ne sont pas tenues; il autorise le démarrage d'un réacteur, mais fait voter une loi soumettant l'autorisation de démarrage à un contrat de retraitement des combustibles irradiés ou à une solution satisfaisante pour le stockage du combustible irradié sans retraitement. Et par suite d'un désaccord persistant entre les partis de la coalition bourgeoise, Tordjorn Fälldin est amené à présenter la démission de son gouvernement en octobre 78[21]. Affaire à suivre, donc... D'une façon générale, la situation européenne n'est pas homogène. En Norvège, Danemark et Pays-Bas, soit du fait d'autres ressources, d'une politique active d'économiès d'énergie et de l'opposition au nucléaire, le recours à çourt terme aux centrales nucléaires n'est pas envisagé. En Espagne, un programme très ambitieux, fixé en 1974 de 20000 MWe pour 1985, se réduit maifitenant à10 000, ce qui est encore important et se heurte à une opposition croissante. En Autriche[22] (un referendum vient d'avoir lieu) et en Suisse (un referendum est prévu), la situation est à l'attente; en Belgique où les firmes nucléaires sont puissantes (groupe Empain) un «Groupe des Sages » n'a pas tranché le problème et le Gouvernement hésite, bien que le plan actuel soit d'avoir 3 unités de plus en 1980. L'Angleterre, nous l'avons vu, préfère consacrer ses investissements au pétrole de la Mer du Nord et à la relance de l'exploitation du charbon; elle a d'ailleurs un excédent de production d'électricité par rapport à ses besoins. La décision récente du gouvernement italien de relancer un programme nucléaire (12.000 MWe) se heurte à de nombreuses difficultés. A l'heure actuelle, malgré les retards et une forte opposition, qui rend de plus en plus problématique l'implantation de centrales nucléaires sur de nouveaux sites, la France poursuit son programme qui a quand même été très légèrement ralenti (10.000 MWe pour 1977 et 1978). Au Japon, les prévisions de 1974 de 60 GWe pour 1985 sont devenues 30 MWe par suite de la longueur des délais d'autorisation, d'une forte opposition au nucléaire et des difficultés de financement d'un programme trop ambitieux. Le cycle du combustible nucléaire Nous n'avons parlé jusqu'ici que des
centrales nucléaires: elles sont en effet le résultat de
l'effort industriel et c'est leur développement qui permet de rendre
compte de la façon la plus simple de l'évolution de la situation
pendant les trente dernières années.
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Le retraitement est une opération complexe qui produit du plutonium et des déchets. Le plutonium peut être utilisé comme explosif de la bombe atomique ou combustible des réacteurs surrégénérateurs, dont nous parlerons au troisième chapitre traitant des stratégies énergétiques; les déchets radioactifs doivent être stockés pendant de très longues périodes. Ainsi, de la mine d'uranium au stockage des déchets, toute une série d'industries complexes et spécifiquement nucléaires sont chargées de la préparation et de la transformation du combustible c'est ce que l'on appelle le cycle du combustible nucléaire. Le première question qui se pose actuellement concerne l'approvisionnement en uranium naturel. Nous avons déjà traité de ce problème dans la Gazette N°3. Rappelons simplement que les pays ayant des ressources très importantes (hors Chine et pays de l'Est) sont les Etats-Unis, le Canada, l'Afrique du Sud, l'Australie. La France, quant à elle, dispose de 3 à 4% des ressources mondiales qui sont insuffisantes pour les besoins du programme actuel. Actuellement nous «contrôlons» des mines au Gabon, Niger, Tchad, Zaïre, etc. Il est pour le moins intéressant d'examiner la politique étrangère française en Afrique à la lumière des ressources. De plus, notons que: - le prix de l'uranium naturel est passé de 1973 à 1977 de 100 F le kilo environ à 400 F le kilo, - au niveau mondial, les ressources estimées exploitables économiquement ne permettaient pas d'assurer l'approvisionnement des programmes ambitieux prévus autour des années 1974 au-delà de 2010-2020, - l'Europe est dépendante de l'extérieur (pays africains en particulier) pour son approvisionnement en uranium. Cela la conduit à adopter une politique néocoloniale en Afrique. La question de l'exportation de l'uranium agite la scène internationale. Aux récentes élections législatives en Australie, les conservateurs, partisans de l'exploitation et de l'exportation de l'uranium, ont battu les travaillistes qui s'y opposaient, mais le gouvernement attend la prise de position des syndicats et des aborigènes (voir encart n° 2). Le Canada, qui a exporté des réacteurs en Inde, au Pakistan, à Taïwan et en Corée, est devenu, après l'explosion indienne de 1974, un des plus ardents partisans de la non-prolifération. Les fournitures d'uranium du Canada aux pays de la Communauté Européenne ont été suspendues depuis le début de 1977, mais des négociations en cours devraient amener leur reprise. Les questions actuellement débattues au Canada sont très liées au contexte international: retraitement ou non des combustibles irradiés (jusqu'ici ils ne sont pas retraités), exportation de l'uranium naturel, construction éventuelle d'une grande usine d'enrichissement. L'importance croissante du marché de l'uranium provoque bien entendu des batailles entre les grandes firmes minières pour la possession des gisements, mais aussi des ententes entre elles sur les prix et les conditions de vente. Dans la course à l'uranium, les états servent de relais à l'impérialisme des firmes: la «politique africaine» de l'Etat français place au premier rang de ses premières préoccupations la «protection» des pays actuellement fournisseurs d'uranium à la France[23]. De même l'Allemagne développe des relations privilégiées avec l'Afrique du Sud (voir Z. Ceuvenka et B. Rogers, The Nuclear Axis, éd. Julian Freedman Books, Londres). 21. A la suite du refus de changement des deux réacteurs construits de Rhinghals et de Forsmark. 22. En Autriche le débat tourne autour du traitement et du stockage des déchets. On parle de contrats avec l'Egypte qui mettrait un «désert» à la disposition de l'Autriche pour stocker les déchets, le Chah d'Iran ayant finalement retiré sa proposition (voir Gazette N°20). 23. Voir à ce sujet: «Main basse sur l'Afrique», livre de Jean Ziegler, édition du Seuil. p.7
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Le choix des réacteurs
à eau ordinaire et uranium enrichi impose une transformation de
l'uranium naturel qui ne peut leur servir de combustible. Les usines «d'enrichissement»
permettent d'obtenir de l'uranium à 3% d'uranium 235, au lieu de
0,7% dans l'uranium naturel. Ces usines sont d'une technologie très
poussée et il n'en existe actuellement que dans cinq pays (USA,
URSS, Grande-Bretagne, France, Chine). Les premières usines utilisent
le procédé de diffusion gazeuse et seules les installations
des USA et d'URSS ont une taille suffisante pour une production à
usage civil. A l'heure actuelle, tout l'uranium utilisé dans les
centrales nucléaires du monde entier est enrichi, soit aux Etats-Unis,
soit en URSS.
Cette situation de dépendance et de rupture possible d'approvisionnement à partir des années 1980 a amené la création de deux groupes industriels européens: - La Hollande, le Royaume Uni et l'Allemagne de l'Ouest participent à la société URENCO qui doit exploiter deux usines d'enrichissement de l'uranium suivant le principe de l'ultra-centrifugation, à Almelo (Pays-Bas) et Capenhurst (Grande-Bretagne) qui, après extension des installations actuelles, devrait atteindre en 19X5 une capacité d'alimentation des recharges en combustible d'une trentaine de réacteurs de 1.000 MWe par an. - La société EURODIF regroupe comme partenaire la Belgique, la France, l'Espagne, l'Italie et l'Iran[24]. Elle construit et exploitera l'usine de Tricastin (France), utilisant la méthode de diffusion gazeuse qui doit démarrer en 1980 (alimentation annuelle d'une centaine de réacteurs de 1.000 MWe). Les mêmes partenaires se retrouvent dans COREDIF[25] pour un projet de deuxième usine d'enrichissement. Si les projets d'Eurodif et d'Urenco se réalisent sans difficultés, il ne devrait pas y avoir de problème d'approvisionnement en uranium enrichi pour les pays participants. Mais au stade actuel, le bon fonctionnement de ces usines et le coût réel de l'enrichissement, qui lui est lié, sont encore des inconnues. En fait, la situation de stagnation des programmes de centrales nucléaires et les retards pris dans les constructions en cours rendent délicats toutes prévisions dans ce domaine. Il y a deux ans, on invoquait la pénurie d'uranium enrichi pour «forcer la main» sur ces projets. Cette situation est caractéristique: les programmes aberrants prévus dans les années 73-74 ont entraîné des investissements colossaux pour créer des situations irréversibles. Le retour à une vue plus juste des choses met en évidence les dangers économiques de tels à-coups. L'étape suivante est la fabrication des combustibles. La domination des «filières américaines» pour les centrales se répercute directement sur les combustibics où les grandes firmes américaines dominent le marché. A côté des fabricants de centrales comme General Electric et Westinghouse, les «firmes de l'énergie», puissances pétrolières comme Exxon[22] et Gulf Oil jouent un rôle très important: c'est, de toute l'industrie nucléaire, le secteur qui rapporte le plus sans nécessiter les investissements considérables des autres activités du cycle du combustible (enrichissement, retraitement). C'est dans le secteur du retraitement des combustibles irradiés que la situation est la plus grave. Non seulement la pénurie mondiale du retraitement se poursuit, mais ce problème déborde de loin les aspects techniques puisqu'il pose toutes les questions liées au plutonium, à l'utilisation des réacteurs surrégénérateurs et au devenir des déchets radioactifs[27]. Le retraitement des combustibles irradiés consiste en une série d'opérations mécaniques et chimiques complexes - rendues très difficiles par la très forte radioactivité des combustibles - par lesquelles on sépare les différents composants du combustible nucléaire après son séjour dans le réacteur. On sépare ainsi l'uranium et le plutonium, qui pourront être réutilisés, les produits de fission et les transuraniens qui doivent être stockés, après conditionnement (autres problèmes). La technique du retraitement a été mise au point initialement pour la récupération du plutonium permettant de faire les armes nucléaires. Pendant longtemps on a considéré que cette technique éprouvée pour les combustibles «militaires» ne devait pas poser de problème majeur pour les combustibles des centrales nucléaires. Les combustibles des réacteurs à uranium naturel, graphite, gaz, ont été retraités en Grande-Bretagne et en France dans les usines de Windscale, Marcoule et La Hague pendant de nombreuses années. Les combustibles des réacteurs à eau lourde canadiens ne sont pas retraités: ils sont stockés en piscine. Pour l'ensemble des pays occidentaux qui, à quelques exceptions près, ont choisi les filières à uranium enrichi et eau ordinaire dont le combustible est de l'oxyde d'uranium, la situation n'est pas brillante. (suite)
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Les premiers combustibles de ces réacteurs ont été retraités aux Etats-Unis dans l'usine de NFS (Nuclear Fuel Services) et en Europe dans les installations d'Eurochemic appartenant à l'OCDE, en Belgique, de Vak en Allemagne et de Windscale en Angleterre. A la fin de l'année 1974, toutes les usines susceptibles d'effectuer le retraitement étaient arrêtées et la situation a peu évolué depuis. Aux Etats-Unis, l'usine de NFS a fermé en 1972 et la décision a été prise de ne pas la rouvrir; l'usine de Morris (General Electric) d'une capacité de 300 t/an n'a jamais démarré pour des raisons techniques; l'usine de Barnwell (1.500 t/ an) n'a pas l'autorisation de démarrer, suivant les principes de la nouvelle politique du président Carter. Le Japon dispose à Torai-Mura d'une usine de capacité nominale de 200 t/an construite à l'aide de l'industrie française. Malheureusement, après les premiers essais fin 77, l'usine a été arrêtée en août 1978, après avoir traité 19 tonnes de combustible. Cet arrêt est dû à la découverte d'une fuite, la réparation demandera plusieurs mois et les essais à pleine capacité sont retardés à une date indéterminée[28]. En Europe, l'usine de Windscale a été adaptée en 1972 au retraitement des combustibles à oxyde d'uranium à la suite d'un accident qui, en septembre 1973, a causé la contarnination de 35 travailleurs, la chaîne oxyde a été fermée (après avoir traité près de 100 tonnes de combustible). La question de la construction d'une nouvelle usine à Windscale a fait l'objet d'une grande enquête publique de juin à novembre 1977. L'usine de Mol en Belgique a été arrétée en 1974 mais il est question d'une rénovation et d'un redémarrage par la Belgique seule. Sa capacité maximale est de 100 t/an. La RFA possède une installation pilote de 40 t/an et envisage la construction d'une grande usine à Gorleben (1.500 t/an): ce projet se heurte à l'opposition des populations et est très cher (estimation actuelle 25 milliards de F). En France, l'usine de La Hague, qui a retraité des combustibles «graphite-gaz» depuis 1967 a subi une transformation (adjonction de l'atelier HAO[29]) lui permettant le découpage et la dissolution des combustibles oxydes[30]. Deux campagnes d'essais ont eu lieu qui ont permis de traiter 15 tonnes en mai 1976 et 50 tonnes de novembre 77 à mars 78. Fin octobre 1978, on annonce une nouvelle campagne pour la fin de l'année. On voit que la capacité industrielle de retraitement n'est pas à la hauteur des besoins: chaque réacteur de 1.000 MWe décharge chaque année 30 tonnes de combustible irradié[31]. Il y a incohérence totale entre le nombre de réacteurs nucléaires construits, en construction et en projet et les capacités de retraitement et de stockage. Et on ne voit pas comment la situation pourrait évoluer sinon en empirant car aucune installation nouvelle n'est en construction, bien que ce point soit au coeur du débat sur l'utilisation de l'énergie de fission. Cela signifie que des milliers de tonnes de combustible irradié vont s'accumuler dans les piscines de stockage et ceci dans le monde entier. Devant cette situation, la France, par l'intermédiaire de la COGEMA, propose ses services et fait du retraitement une opération commerciale comme une autre[30].ll s'agit entre autres choses de financer la construction de 2 nouvelles unités de 800 tonnes/an. Mais il semble bien que la COGEMA vend la peau de l'ours avant de l'avoir tué... et que ce n'est pas demain la veille qu'il sera mort! Les dirigeants étrangers et français ont lancé d'importants programmes nucléaires, sans avoir la maîtrise du secteur le plus dangereux: le retraitement. 24. Voir à ce sujet le rapport Schloesing, Gazette nucléaire N°15/16. 25. Pour la nouvelle usine, on parle de plus en plus avec insistance du site d'Offerkerque dans le Nord de la France. 26. Ou Esso, si vous préférez. 27. Voir de nombreuses Gazettes (faites une recherche sur le site!), en particulier N°4 et N°12. 28. Ce qui n'empêche pas le constructeur de faire de la publicité dans des revues spécialisées. Si vous voulez des renseignements, adressez-vous à la Société Générale pour les Techniques Nouvelles. B.P. 30. 78184 St Quentin en Yvelines Cedex tél. 043.99.32. 29. Haute Activité Oxyde. Pour le retraitement des filières à eau ordinaire. 30. Voir à nouveau Gazettes N°4 et N°12. Cette dernière en particulier rappelle la position du syndicat CFDT de la Hague (majoritaire). 31. Notons que l'uranium qui sort d'une centrale est encore "enrichi" en 235: 1% contre 0,7% pour l'uranium naturel. p.9
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