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N°53, juin-juillet 1983
LE SECRET DE LA DEMOCRATIE
Editorial / Sommaire



     La lecture du Journal Officiel est un exercice particulièrement réjouissant en ce moment. Après le serment de secret (Gazette N°52), voici la liste des documents administratifs non communicables au public - nous remercions notre abonné qui nous a transmis ce texte -. Lisez-le attentivement. Grâce à ce texte, plus aucune information n'est accessible: les dossiers relatifs à la prolifération, les dossiers de la Communauté européenne, les rapports d'inspection relatifs aux transport, au stokage des produits nucléaires, chimiques, les dossiers sur les mines, la géothermie, les dossiers financiers des entreprises, etc.
     N'en jetons plus, lisez vous-même:
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17 avril 1983          JOURNAL OFFICIEL DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE          N.C. 3833

MINISTERE DE L'INDUSTRIE ET DE LA RECHERCHE
Documents administratifs non communicables au public.

     Le ministère d'Etat, ministre de la recherche et de l'industrie,
     Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'améliorations des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, notamment ses articles 8 et 13;
     Vu la lui n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives;
     Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, et notamment son article 9;
     Vu les avis en date du 29 octobre 1980 et du 4 novembre 1982 de la commission d'accès aux documents administratifs.

          Arrête:
     Art. 1er. - Les documents administratifs émanant des services, établissements et organisrnes, placés sous l'autorité et le contrôle du ministre de la lecherche et de l'industrie ne peuvent, sous réserve des dispositions de la loi du 3 janvier 1979 susvisée sur les  archives être communiqués au public lorsque, par leur nature ou par leur objet, ils entrent dans l'une des catégories fixées par la liste ci-après:
1. Documents dont la communication pourrait porter atteinte au secret des délibérations gouvernementales et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif.
     Notes ne comportant pas une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, échangées entre le ministre et ses collaborateurs directs, entre les autorités responsables relevant du pouvoir exécutif, et notamment celles qui rendent compte de leurs délibérations;
     Procès-verbaux du conseil supérieur de la propriété industrielle;
     Dossiers soumis au comité interministériel chargé de fixer les orientations des actions de développement industriel à caractère stratégique et procès-verbaux de ce comité;
     Délibérations du comité interministériel de la recherche scientifique et technique.
2.  Documents dont la communication pourrait porter atteinte au secret de la défense nationale et de la politique extérieure.
     Documents intéressant la défense nationale relatifs aux travaux soumis à la procédure d'instruction mixte instituée par la loi du 29 novembre 1952,
     Documents relatifs à la protection et à la mobilisation de l'appareil industriel français;
     Documents relatifs aux négociations et accords internationaux en matière d'approvisionement en énergie et matières premières;
     Plan de crise énergétique grave;
     Documents relatifs à la non-prolifération nucléaire;
     Documents relatifs aux négociations internationales an matière de normalisation, de certification et de reconnaissance mutuelles de contrôle ou essais


     Procès verbaux et comptes rendus des commissions mixtes intergouvernementales et des réunions tenues dans le cadre des communautés européennes;
     Instructions destinées aux conseillers et attâchés scientifiques dont la communication pourrait porter atteinte au secret de la défense nationale et de la politique extérieure en matière de recherche.

3. Documents dont la communication pourrait porter atteinte à la monnaie, au crédit public, à la sûreté de l'Etat et à la sécurité publique.
     Documents relatifs aux stocks de matières premières et de production énergétiques;
     Eléments des documents, notamment des rapports d'inspection et de sûreté, relatifs aux plans, accès, dispositifs de sécurité et de sûreté et conditions de surveillance des ouvrages de production, de transport de stockage de produits énergétiques et nucléaires, de produits chimiques et de matières premières;
     Dossiers de demandes d'aide à la recherche relatifs à des travaux subventionnés dont les résultats sont susceptibles d'être protégés au titre du régime de la propriété industrielle, ainsi que les documents présentant ces résultats;
     Expertises réalisées pour le compte du ministre de la recherche et de l'industrie dans le cadre de conventions d'étude concernant les secteurs industriels prioritaires.

4. Documents dont la communication pourrait porter atteinte
au secret industriel en matière industrielle et commerciale.
     Dossiers relatifs aux autorisations et aux opérations d'importation et d'exportation de produits énergétiques et de matières premières;
     Dossiers relatifs. aux fonds de soutien;
     Dossiers relatifs aux 'gites, litres de nilue, de carrière et de géothermie en tant qu'ils concernent le gisement, sa gitologie et l'économie de l'exploitation;
     Dossiers relatifs à la mise en oeuvre de la procédure d'encadrement du fuell domestique;
     Eléments des plans de développement des secteurs industriels permettant de prendre connaissance de la situation financière d'une entreprise;
     Documents contenant des données statistiques de nature à révéler des informations relatives à des personnes physiques ou morales identifiables, du fait du petit nombre d'unités concernées ou de la position dominante de l'une d'entre elles.

Art. 2. - Le présent arrêté sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 23 février 1983.

Pour le ministre et par délégation
Le directeur de cabinet,
L. HENNEKINNE.
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     L'étape suivante sera de publier un décret du Journal Officiel disant que le J.O. n'est plus communicable au public, et le tour sera joué. Le PS n'a pas le monopole de ces manipulations. Souvenez-vous, la loi sur l'objection de conscience dont le simple fait de dire qu'elle existait était contraire à la loi.
     Et voilà! Comment pourra-t-on appliquer les recommandations du Groupe Castaing: «Que, corrélativement, un effort soit fait pour rendre public l'essentiel des données techniques relatives à la sûreté de la gestion des combustibles irradiés...» et «que la communauté scientifique et technique soit invitée à s'intéresser aux problèmes que pose la gestion des combustibles irradiés».
     Conîment peut-on espérer que des experts indépendants puissent travailler si:
     1) ils n'ont pas accès aux données;
     2) les personnes travaillant dans ce domaine sont soumises au secret?

     Maintenant, en tant que démocrates et mauvais sujets, nous vous proposons:
     - le bilan du parc nucléaire français: fonctionnement, avancement des constructions;
     - une note EDF sur les calculs de coût du kWh. C'est un calcul fait pour 1992 en francs 1982 mais on peut tout de même en tirer quelques estimations:
     - la synthèse des premières conclusions du Groupe long terme énergie;
     - le dernier incident connu survenu à Marcoule.
     Au vu de ces dossiers, on pourrait bien sur répéter en radotant, «on vous l'avait bien dit, on l'avait écrit». Car, une fois de plus, nous constatons que lorsque les commissions, même officielles, analysent réellement des dossiers en ne se contentant pas de répéter le message d'EDF, elles arrivent aux mêmes conclusions que les personnes extérieures à la technostructure. Ce qui est inquiétant, c'est la facilité avec laquelle ces rapports sont enterrés.
p.2b


     Souvenez-vous, il y eut, en 1977, le rapport, appelé rapport Schloesing, qui était l'annexe 27 du rapport 3131 de la commission des finances de l'économie générale et du plan sur le projet de loi de finance de 1978 (voir à ce sujet la Gazette 15/16).
     · On y trouvait déjà une analyse pertinente de l'illusion de l'indépendance énergétique créée par le nucléaire:
     «... Dans la situation actuelle, la prépondérance du Groupe Empain dans la fabrication des cuves comme le recours à une licence américaine ne permettent pas d'affirmer que l'énergie nucléaire nous soustrait à toute contrainte extérieure.
     Cette constatation est vérifiée si l'on considère ce qu'il en est du cycle de l'uranium».
     · un réquisitoire contre le groupe de pression que constitue la Commission PEON (voir Gazettes 06, 15/16, 50/51, 203):
     «... La dernière rigidité qu'il paraît utile d'évoquer est d'un ordre différent. On sait que toute la politique nucléaire française est élaborée et proposée par la commission de Production d'Electricité d'Origine Nucléaire (Commission dite PEON). Or, cette commission est composée pour une large part par les représentants d'EDF et du CEA, ainsi que par les représentants des industriels intéressés à la réalisation du programme. Cette composition en elle-même fait problème. On n'imaginepas que la politique des constructions scolaires soit pour l'essentiel élaborée par les entreprises du bêtiment. On peut être assuré que les personnalités de grande capacité et de haute qualité qui composent la commission PEON savent, autant que d'autres, faire prévaloir ce qu'elles considèrent comme étant l'intérêt national. Mais leur formation comme leurs choix professionnels donnent à penser qu'ils examinent davantage les possibilités de développement nucléaire que les orientations à donner à notre politique énergétique
     Au fait, qu'est-elle devenue cette commission - existe-t-elle toujours? Continue-t-elle à sévir dans le secret des cabinets ministériels?
     · On y trouvait aussi une analyse de la confusion des pouvoirs au niveau de la technostructure et des prises de décisions politiques:
     «... Enfin, on souhaitera que la politique énergétique de la France soit élaborée par un organisme largement ouvert et indépendant. Actuellement, le ministère de l'industrie parait trop ancré dans les raisonnements qui ont été développés par les entreprises nationales pour opérer une indispensable synthèse, insensible aux arguments d'une entreprise...»
     «Il serait bon que les propositions ainsi élaborées, par un organisme indépendant, puissent être réelle-ment débattues dans des instances appropriées et dans des délais raisonnables. La politique énergétique de la France ne se bêtira pas sans un assentiment fondé et réfléchi des Français».
     Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce rapport aurait dû entraîner une enquête sérieuse. C'était sous Giscard et le rapport, bien qu'adopté par la'commission des finances, présidée par Papon, fut jeté aux oubliettes. Enfin, pas tout à fait, car EDF réussit à faire passer son rapport à elle sous la forme d'un hymne au nucléaire appelé «Rapport Pintat» ou plus exactement, «Rapport n° 90 de la Commission des Finances du Sénat».
suite:
De toute façon, ce genre d'événement fut banni, car après 78, les rapports trop en flèche sont devenus des avis indépendants du rapport final de la commission. Puis, en 1980 ce fut, dans le cadre du VIIIe Plan et du rapport de la commission énergies et Matières premières, un document sur la prospective à long terme de la politique énergétique (voir Gazette 44). Ce document, dit Rapport Crémieux, montrait que l'on pouvait faire l'économie du programme nucléaire programmé à partir de 1981.
     En 1981, en préparation du débat parlementaire (???), sous Mitterrand cette fois, ce fut le Rapport Hugon. Ce rapport montrait qu'il fallait limiter le nucléaire pour pouvoir diversifier la politique énergétique française sur toutes les énergies primaires possibles (charbon, gaz, uranium, coke). Mais en plus, ce rapport montrait les impasses technologiques: retraitement, stockage des déchets.
     Nous voici en 1983: nouveau rapport du Commissariat au plan et comme la politique énergétique a continué à suivrre la logique EDF, ce rapport est encore plus net: nous aurons une trop grande capacité de production d'électricité dès 1985. Certes, on pourra la vendre. Certes, cette surcapacité nous aidera à faire face aux pannes du type des broches de Fessenheim, des sécheurs surchauffeurs et autres égarements technologiques, mais cela ne nous permettra pas de dégager les fonds que nous aurions pu consacrer à d'autres voies modernisation de l'industrie,choix technologiques, développement régional d'industries consacrées aux énergies renouvelables, utilisation de nos ressources nationales.
     A l'évidence, toutes les études menées avec sérieux et dans des structures indépendantes conduisent à des conclusions identiques: notre politique énergétique doit être diversifiée et le nucléaire pèse trop lourdement sur cette politique.
     En dehors d'EDF et du CEA, il existe quelques groupes qui ne partagent pas nos analyses. En particulier la Fondation pour l'énergie de fusion créée par L. La Rouche (conseiller de Reagan) ou le Club de la Vie créé par H. Zepp-La Rouche. En deux encarts nous vous les présentons à l'aide de leurs propres textes:
La fondation pour l'énergie de fusion

     «La Fondation pour l'Energie de fusion, association selon la loi de 1901, a été fondée à New York en 1974 à l'initiative d'un groupe de savants, de responsables des Nations-Unies et d'autres personnalités, notamment Lyndon La Rouche, dans le but de promouvoir le développement de l'énergie nucléaire (fission et fusion thermonucléaire contrôlée), et l'application des technologies de pointe. En outre, la FEF s'est attachée à promouvoir la conquête de l'espace, de vastes projets de développement industriel du tiers monde, et les découvertes les plus récentes dans le domaine de la physique des plasmas et de ses applications militaires. C'est ainsi que dès 1977, la FEF a été le prionnier d'une campagne d'information en faveur du développement des systèmes de défense basés sur les armes à rayons

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Le Club de la Vie

     «En janvier 1982, Helga Zepp-La Rouche lança un appel à la création d'une nouvelle organisation internationale qui, par sa conception du monde et ses objectifs politiques, constituerait un contrepôle conceptuel au Club de Rome.
     Le Club de la Vie a donc été officiellement fondé au cours d'une série de conférences parallèles qui se sont tenues les 20 et 21 octobre 1982, dans plus de cinquante villes du monde et sur quatre continents.
     Le Club de la Vie s'est donné pour objectif de réunir les meilleures forces morales, religieuses, politiques, syndicales et scientifiques - toutes les forces dans le secteur industrialisé et dans les pays en voie de développement qui, alors que la société humaine est peut-être à la veille de sa perte, sont prêtes à se battre avec un optimisme culturel et une détermination politique pour un nouvel ordre économique mondial plus juste».

     Jugez aussi à l'aide d'extraits de leurs publications:
 

Avec François Rabelais, créer des génies pour développer le monde

     «... Mme Phau décrivit le contexte dans lequel Rabelais créa son oeuvre: un moment où les grandes réalisations de la Renaissance étaient menacées par l'oligarchie représentée surtout par des maisons de Lorraine et d'Anjou, et Venise. Les populations de Panurges avaient besoin d'être secouées pour sortir de leur soumission aux autorités incompétentes et d'être amenées à accorder leur volonté avec le divin.

(suite p. suivante)
     L'auditoire apprécia particulièrement d'entendre que Jeanne d'Arc mit fin à la Guerre de cent ans, et fut à l'origine d'une renaissance, en appliquant les armes à rayons du XVe siècle: l'artillerie mobile. Les Français avaient auparavant perdu toutes leurs batailles contre les forces anglaises d'occupation, à cause du «mouvement pour la paix et le désarmement» qui avait prohibé l'utilisation de l'arbalète dans l'armée française. Jeanne se débarrassa des pacifistes, instaura des manufactures qui construisirent des arbalètes, déploya des canons modernes sur les collines et fit de la chair à pâté des Anglais, établissant la France comme premier Etat moderne d'Europe
Extrait de Nouvelle Solidarité
page 2 - vendredi 20 mai1983
Qu'y a-t-il derrière le mouvement écologiste?

     «... Vogel et Bahr ont soutenu l'exigence outrancière d'Andropov que la force de frappe française soit incluse dans leurs pourparlers de Genève sur le désarmement. La France a heureusement opposé un «non» sans équivoque à cette demande. Il y a suffisamment de gens en France qui savent ce que cela veut dire d'abandonner les programmes militaires à haute technologie et la force de frappe et de retourner aux doctrines de «guerre démographique», dont les exemples indochinois et algérien ont non seulement laissé un goût amer, mais ont bien failli détruire la nation française. C'est ce genre de destruction, évité de justesse en France entre 1958 et 1962, qui menace le monde si la crise économique persiste et si les mouvements écologistes et pacifistes continuent à fleurir. Il faut se mobiliser dans l'esprit de la Résistance pour mettre fin à la dépression économique et extirper les réseaux néo-nazis qui prolifèrent dans un tel climat.»

Extrait de Fusion page 32
mars 1983
p.4
Le nucléaire à la portée de tous!
64 pages, couverture cartonnée
Prix: 10F pour une commande d'au moins 10 livres, sinon 14F (port compris)

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CRILAN, St-Lô, BP 204
50004, St-Lô cedex

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SOMMAIRE
EDITO (Journal Officiel!)
Survol du parc français (tableaux récapitulatifs)
Les coûts du nucléaire
Le rapport préliminaire du groupe Long Terme Energie (quelques extraits significatifs)
Incident à Marcoule le 22 mars 1983; notes de lecture

Année 1983
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