Dossier UkraineLes 7 piliers sur lesquels reposait la sûreté ont été par moment plus que sérieusement minés. Perte des lignes électriques externes en Ukraine. |
|
Centrale de Zaporijia
« Les 25 et 26 août 2022, la centrale nucléaire de Zaporizhzhia a été complètement coupée du réseau électrique pour la première fois de son histoire. Selon l’autorité de régulation, la connexion a été perdue à au moins deux reprises, le jeudi 25 août. Sans pouvoir évacuer l’électricité produite, il a fallu arrêter les réacteurs 5 et 6, les seuls encore en activité. Et comme de l’électricité est nécessaire au refroidissement des combustibles, les diesels de secours ont été mis en service. Sur le papier, selon les stress tests post-Fukushima, la centrale peut tenir 7 jours ainsi, mais il vaut mieux ne pas avoir à tester les limites en situation réelle…
Toujours selon l’autorité de régulation, les lignes électriques ont pu être rétablies le 26 août et les deux réacteurs nucléaires remis en service. A noter, que des canalisations d’eau ont aussi été endommagées. La situation sur place s’est approchée de celle de Fukushima où il y a eu perte de l’alimentation en eau et en électricité. Et c’est un personnel épuisé, en état de stress lié à l’occupation par l’armée russe qui a dû gérer cette situation.
Selon Energoatom sur Telegram, le feu a pris dans une centrale à charbon située près de la centrale et a endommagé la dernière ligne électrique disponible, les autres ayant été coupées par l’occupant » [ACRO].
« Le 26 août, Energoatom puis l’AIEA annonçaient que suite à la réparation d’une ligne 750 kV, le réacteur N°6 était reconnecté à nouveau au réseau et en montée en puissance progressive. Le réacteur N°5 a ensuite également été reconnecté au réseau.
Mais les combats se sont poursuivis, y compris dans la nuit précédant l’arrivée de la délégation de l’AIEA à la centrale. Energoatom indiquait en effet le 1er septembre que, du fait de tirs de mortier, une ligne de secours (330 kV) était endommagée, le réacteur N°2 basculé sur générateur diesel et la protection d’urgence du réacteur N°5 déclenchée » [CRIIRAD].
« Le 3 septembre 2022, toutes les lignes vers le réseau électrique sont à nouveau coupées, suite à des bombardements. Seule une ligne de secours vers la centrale thermique est disponible. Le réacteur n°5 a de nouveau été arrêté et l’électricité produite par le réacteur n°6 est évacuée vers la centrale thermique avant [d’être] fournie au réseau, selon AIEA.
La présence d’inspecteurs internationaux n’apporte rien à la sécurité du site » [ACRO].
« Le 5 septembre, Energoatom annonçait que, suite à un incendie lié à de nouveaux bombardements, la ligne de secours avait dû être déconnectée. Cette fois-ci, non seulement la centrale était déconnectée du réseau principal, mais de plus elle ne disposait d’aucune ligne de secours. L’exploitant décidait alors de laisser le réacteur N°6 en fonctionnement, à puissance réduite (114 à 140 MWe au lieu de la puissance maximale, de l’ordre de 1 000 MWe) et en mode « îlotage », régime durant lequel l’électricité produite par le réacteur n’est pas utilisée pour fournir de l’électricité au réseau, mais uniquement pour faire fonctionner les systèmes de sûreté de la centrale » [CRIIRAD].
« Le 11 septembre 2022 à 3h41, le réacteur n°6 a été mis à l’arrêt, selon l’exploitant (voir aussi le communiqué de l’Autorité de régulation). Cela faisait trois jours qu’il était en situation d'”îlotage” avec une puissance réduite (114 à 140_MW) pour alimenter les seuls besoins de la centrale. Mais, comme une ligne électrique (celle de secours à 330_kV) a pu être rétablie la veille, afin d’assurer les besoins électriques, il n’était plus nécessaire de maintenir le réacteur n°6 dans cet état. L’électricité et l’eau courantes ont été rétablies à Enerhodar, mais la situation reste précaire et en cas de nouvelle coupure de la ligne, il faudra activer les générateurs diesels de secours. L’exploitant dit faire son possible pour accroître ses réserves de carburant, qui permettraient de tenir 10 jours, selon l’autorité de régulation nucléaire.
Et le 13 septembre 2022, selon l’AIEA, 3 lignes électriques ont été rétablies, ce qui est rassurant. Une fournit la centrale en courant et les deux autres sont là en secours. Il n’est pas question de remettre des réacteurs en service pour le moment.
Le 17 septembre 2022, c’est au tour de la ligne haute tension de 750 kV d’être rétablie, selon l’AIEA. Les trois lignes rétablies précédemment redeviennent des lignes de secours, ce qui renforce la sécurité de l’alimentation électrique du site et le maintien à froid des combustibles nucléaires. Il y a toujours trois lignes à haute tension de 750_kV de coupées. Par ailleurs, l’exploitant a augmenté ses réserves en diesel pour les générateurs de secours.
(...)
Le 21 septembre 2022 à 1h13, heure locale, la centrale nucléaire de Zaporizhzhia a de nouveau été bombardée, selon l’exploitant. Deux transformateurs ont été endommagés, entraînant la coupure de l’alimentation électrique du réacteur n°6. Deux générateurs diesel de secours ont été immédiatement mis en service pour assurer le refroidissement des combustibles usés. Vers 2h, le réacteur n°6 a pu être raccordé aux autres tranches de la centrale et les diesels de secours ont pu être arrêtés. L’exploitant impute le bombardement à la Russie et rappelle qu’il y a deux inspecteurs de l’AIEA sur place.
Et l’AIEA d’ajouter qu’un autre bombardement, le 20 septembre 2022, de l’un des bassins de refroidissement par aspersion du site. Un tuyau a été endommagé, mettant le bassin hors service en attendant les réparations. Espérons qu’il y a des systèmes d’adduction d’eau de secours, car à Fukushima, il y a eu coupure d’électricité et d’eau. De plus, des tirs d’obus ont également été signalés sur le site industriel autour de la centrale thermique, situé à quelques kilomètres.
Les 27 et 28 septembre 2022, l’AIEA fait part d’explosions sur le site de la centrale nucléaire de Zaporizhzhia. Celles du 27 septembre auraient brisé des vitres dans un des bâtiments turbine. Et, le 28 septembre, l’AIEA fait part d’autres explosions qu’elle attribue, comme celle de la veille, à des passages d’animaux sur des mines.
Le_30 septembre, l’AIEA signale dans un tweet qu’il y aurait eu 6 explosions de mines en une semaine.
Le 1er octobre 2022 (...) les explosions de mines sur le site de la centrale continuent.
(...)
Le 5 octobre 2022, un décret signé par le président Poutine prend possession de la centrale de Zaporizhzhia et en confie l’exploitation à une filiale de Rosatom enregistrée à Moscou » [ACRO].
Le 8 octobre, la centrale de Zaporizhzhya (ZNPP) a de nouveau « perdu tout accès à l'alimentation électrique externe en raison de nouveaux bombardements dans la nuit »_qui « ont endommagé la dernière ligne électrique de 750 kilovolts (kV) de la centrale ZNPP, obligeant la plus grande centrale nucléaire d'Europe à s'appuyer sur ses générateurs diesel de secours » [AIEA, 8/10/22].
Le 9 octobre 2022, « la ligne de 750 kilovolts (kV) a été reconnectée dans la soirée » [AIEA, 9/10/22].
Le 12 octobre 2022, « L'équipe d'experts de l'AIEA présente à la centrale ZNPP a indiqué que la connexion à la dernière ligne électrique de 750 kilovolts (kV) encore en service avait été coupée vers 9_heures » : « Energoatom, a déclaré que les tirs d'obus avaient provoquée l’endommageant d’une sous-station - qui fait partie du système de transmission et de distribution électrique du réseau - située loin de la centrale elle-même » [AIEA, 12/10/22]. Dans un second communiqué le même jour, l’AIEA indique que « la connexion de la centrale à la dernière ligne électrique de 750 kilovolts (kV) encore en service a été rétablie vers 13 h 40 » [AIEA, 12/10/22].
Le 3 novembre 2022, « Le directeur général avait précédemment indiqué que la principale ligne électrique externe de 750 kilovolts (kV) de la centrale de ZNPP avait été déconnectée à la suite d'un bombardement vers 22 heures, heure locale, hier, et qu'une ligne de 330 kV fournissant de l'électricité de secours avait également été perdue peu après minuit » [AIEA, 3/11/22].
Le 5 novembre 2022, « vers 22 heures, l'alimentation électrique de 750 kV des six unités de la centrale ZNPP a été rétablie, et les huit générateurs diesel de secours en fonctionnement ont été éteints et mis en mode veille » selon « le directeur général Grossi, citant les informations qu'il avait reçues de l'équipe d'experts de l'AIEA présente dans la centrale » [AIEA, 5/11/22].
Le 23/11/2022, « la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporizhzhya a une fois de plus perdu l'accès à l'électricité externe » [AIEA, 23/11/22]. « L'alimentation externe a été rétablie » le lendemain [AIEA, 24/11/22].
Et pendant ce temps, ailleurs, en Ukraine
Centrale de Pivdennooukraïnsk (Sud de l’Ukraine)
« Le 19 septembre 2022, dans un communiqué, Energoatom accuse la Russie d’avoir bombardé une zone industrielle située à proximité de la centrale nucléaire du Sud [3 tranches VVER-1000], à 00h20 locales. Une puissante explosion se serait produite à seulement 300 mètres des 3 réacteurs en fonctionnement. Elle n’a pas fait de morts ou de blessés, mais aurait soufflé une centaine de fenêtres dans le bâtiment de la centrale et provoqué une brève coupure de trois lignes de haute tension de la centrale. Une des unités hydroélectriques du barrage voisin a été arrêtée » [ACRO].
Centrale nucléaire de Khmelnitski
(2 tranches VVER-1000 situées dans l’ouest de l’Ukraine)
Le 15 novembre 2022, « la connexion au réseau de la centrale de Khmelnitski a été complètement interrompue (...) en raison d'attaques de missiles contre l'infrastructure énergétique du pays.
(...)
La centrale a retrouvé le réseau externe grâce à deux lignes électriques de secours de 330 kilovolts (kV), et les générateurs diesel ont été arrêtés » [AIEA, 16/11/22].
Le 23/11/2022, « l'opérateur national ukrainien Energoatom a déclaré qu'en raison d'une baisse de la fréquence dans le système électrique ukrainien aux centrales nucléaires de Rivné [2 VVER-440 et 2 VVER-1000], d'Ukraine du Sud et de Khmelnitski, la protection d'urgence a fonctionné, à la suite de quoi toutes les unités de puissance ont été automatiquement déconnectées » du réseau [AIEA, 23/11/22].
« La perte complète et simultanée de l'alimentation électrique hors site des centrales nucléaires ukrainiennes montre que la situation en matière de sûreté et de sécurité nucléaires dans le pays est de plus en plus précaire, difficile et potentiellement dangereuse. C'est la première fois que toutes les centrales subissent une perte d'alimentation externe en même temps. Cela aurait été totalement inimaginable avant cette guerre tragique. C'est extrêmement préoccupant » [AIEA, 24/11/22].
Le 25/11/2022, « l'Ukraine a également confirmé aujourd'hui à l'AIEA que les trois autres centrales nucléaires - Rivné, Ukraine du Sud et Khmelnytskyy - avaient été reconnectées au réseau et fonctionnaient pour produire l'électricité nécessaire aux besoins du pays » [AIEA, 25/11/22].